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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/2068/2022

ACPR/456/2022 du 27.06.2022 sur OTDP/469/2022 ( TDP ) , REJETE

Descripteurs : OPPOSITION TARDIVE;DÉLAI;ENVOI POSTAL;ENVOI SOUS PLI SIMPLE;RÉCEPTION(SENS GÉNÉRAL);PREUVE
Normes : CPP.354; CPP.91

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/2068/2022 ACPR/456/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 27 juin 2022

 

Entre

 

A______, c/o B______ SA, ______ [GE], comparant en personne,

recourant,

 

contre l'ordonnance rendue le 8 mars 2022 par le Tribunal de police,

 

et

 

LE TRIBUNAL DE POLICE, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715, 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A. Par acte expédié le 16 mars 2022, A______ recourt contre l'ordonnance du 8 mars 2022, notifiée le lendemain, par laquelle le Tribunal de police a constaté l'irrecevabilité, pour cause de tardiveté, de l'opposition qu'il avait formée à l'ordonnance pénale n. 1______ du 11 octobre 2021, laquelle était assimilée à un jugement entré en force.

Le recourant demande que sa bonne foi soit prise en compte, afin qu'il soit retenu qu'il avait fait opposition dans le délai et avait acquitté "l'amende initiale" de CHF 250.-.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 17 mars 2021, une amende d'ordre de CHF 250.- a été adressée à la société B______ SA – dont l'administrateur est A______ –, à la suite de l'inobservation d'un signal lumineux, le 20 février précédent, par un véhicule immatriculé à son nom.

b. L'amende n'ayant pas été payée, un avis d'infraction a été adressé le 21 juin 2021 à la société, lequel mentionnait tant la possibilité de régler l'amende d'ordre que de dénoncer l'auteur des faits, dans un délai de 30 jours. Sans paiement ni réponse, l'administrateur de la société pourrait être poursuivi.

A______ a été avisé personnellement, par mise en demeure du 24 juin 2021.

c. Aucune suite n'ayant été donnée aux plis susmentionnés, A______ a été condamné par ordonnance pénale n. 1______ du 11 octobre 2021, rendue par le Service des contraventions (ci-après, SdC), à une amende de CHF 600.- augmentée d'un émolument de CHF 150.-, soit au total CHF 750.-.

Selon le suivi des envois recommandés de la Poste, le pli contenant l'ordonnance pénale a été distribué à son destinataire le 12 octobre 2021.

d. Un rappel a été adressé au contrevenant le 3 décembre 2021, avec une majoration de CHF 20.-.

e. Par pli recommandé du 10 janvier 2022 adressé au SdC, avec pour référence l'ordonnance pénale n. 2______ (sic), A______ a déclaré y avoir formé opposition le 20 octobre 2021 par pli simple.

Il a joint à son envoi copie d'une lettre datée du 20 octobre 2021 où il expliquait avoir soldé le 23 juillet 2021 toutes les contraventions en sa possession, preuve de paiement à l'appui ; ne pas avoir connaissance de l'infraction à l'origine de l'ordonnance pénale du 11 octobre 2021 ; avoir procédé aux recherches internes et identifié le conducteur – dont il a fourni le nom et l'adresse –, lequel avait prélevé dans le courrier l'amende d'ordre dans l'intention de la payer ce qu'il n'avait apparemment pas fait ; vouloir former opposition à l'ordonnance pénale car il n'était en rien responsable de la situation.

Étaient également joints : un relevé bancaire établi le 20 octobre 2021 – portant la mention "affiché dans C______ e-banking le 20.10.2021, 11:39:37 ______" faisant état de quatre versements au SdC, le 23 juillet 2021 ; et une confirmation de quittance de la Poste, datée du 20 octobre 2021 à 15 heures 49, pour une lettre standard A pesant "kg 0.017" sans mention du destinataire.

f. Par ordonnance sur opposition tardive, le SdC a transmis la cause au Tribunal de police pour qu'il statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition, précisant n'avoir aucune trace du courrier que A______ disait avoir envoyé par courrier A le 20 octobre 2021.

g. Invité par le Tribunal de police à se déterminer sur l'apparente irrecevabilité de son opposition, A______ n'a pas répondu, mais un paiement de CHF 270.- est parvenu au SdC le 4 février 2022.

C. Dans l'ordonnance querellée, le Tribunal de police a retenu que l'ordonnance pénale avait été valablement notifiée le 12 octobre 2021, de sorte que le délai pour former opposition était venu à échéance le 22 suivant. Expédiée le 10 janvier 2022, l'opposition était tardive, étant relevé que le SdC n'avait trouvé aucune trace de la lettre que A______ disait avoir envoyée le 20 octobre 2021.

D. a. Dans son recours, A______ relève que l'opposition à l'ordonnance pénale n'avait pas été formée le 10 janvier 2022, mais le 20 octobre 2021. Elle avait donc été valablement formée, dans les temps, par courrier A, ce qu'il avait attesté par la quittance postale. Une collaboratrice du SdC lui avait dit par téléphone, le 10 janvier 2022, que son opposition n'avait pas été traitée car il ne l'avait pas envoyée par pli recommandé, mais l'ordonnance pénale ne mentionnait pas qu'elle aurait dû être formée au moyen d'un pli spécifique, en l'occurrence recommandé. Sa bonne foi ne pouvait être mise en doute, car à sa lettre du 20 octobre 2021 était annexé un extrait bancaire du même jour, ce qui aurait été impossible d'obtenir ultérieurement. De plus, la "consistance de 16gr" figurant sur la quittance postale du 20 octobre 2021 correspondait exactement au poids du courrier qu'il avait adressé. Il ne s'agissait donc pas d'une opposition tardive, mais d'un probable aiguillage malheureux de son opposition au sein du SdC, dont il ne pouvait être tenu pour responsable. Il avait, de plus, payé l'amende initiale, augmentée des frais de rappel, au cas où le conducteur ne tiendrait pas son engagement.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger, sans échange d'écritures ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. b CPP) et émaner du contrevenant qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             3.1. Selon l'art. 356 al. 2 CPP, le tribunal de première instance statue sur la validité de l'opposition formée à une ordonnance pénale. L'examen de la validité de l'opposition a lieu d'office (arrêts du Tribunal fédéral 6B_910/2017 du 29 décembre 2017 consid. 2.4; 6B_848/2013 du 3 avril 2014 consid. 1.3.2). Lorsque l'opposition n'est pas valable, notamment car elle est tardive (cf. ATF 142 IV 201 consid. 2.2 p. 204), le tribunal de première instance n'entre pas en matière (cf. Message du 21 décembre 2005 relatif à l'unification de la procédure pénale, FF 2006 1275 ad art. 360).

3.2. Le délai pour former opposition à l'ordonnance pénale est de dix jours (art. 354 al. 1 CPP).

3.3. Les délais fixés en jours commencent à courir le jour qui suit leur notification ou l'évènement qui les déclenche (art. 90 al. 1 CPP).

3.4. Le délai est réputé observé si l'acte de procédure est accompli auprès de l'autorité compétente au plus tard le dernier jour du délai (art. 91 al. 1 CPP). Les écrits doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai à l'autorité pénale, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

La partie qui doit accomplir un acte de procédure doit démontrer qu'elle l'a entrepris à temps. L'expéditeur doit ainsi prouver que son envoi a été expédié le dernier jour du délai à minuit au plus tard (ATF 142 V 89 consid. 2.2 p. 391 et les références citées).

La preuve de l'expédition d'un acte de procédure en temps utile incombe à la partie, respectivement à son avocat. Une preuve stricte est exigée, la vraisemblance prépondérante ne suffisant pas. Il convient en effet, en matière de délais, de s'en tenir à des principes simples et à des solutions claires, sous peine d'ouvrir la porte à de longues et oiseuses discussions, voire à des abus. Le pli recommandé est à cet égard une preuve aisée à établir, alors que, dans le cas d'un envoi par pli simple, la preuve peut être rapportée par différents moyens, en particulier par témoins (arrêts du Tribunal fédéral 6B_558/2019 du 27 juin 2019 consid. 2.2. ; 6B_1317/2016 du 20 septembre 2017 consid. 3).

L'irrecevabilité qui sanctionne le non-respect d'un délai n'est pas constitutive d'un formalisme excessif prohibé par l'art. 29 al. 1 Cst., une stricte application des règles relatives aux délais étant justifiée par des motifs d'égalité de traitement et par un intérêt public lié à une bonne administration de la justice et à la sécurité du droit (ATF 125 V 65 consid. 1 p. 66; arrêt du Tribunal fédéral 6B_659/2021 du 24 février 2022 consid. 2.1 et les références citées).

3.5. En l'espèce, il est établi – et non contesté – que le recourant a reçu notification de l'ordonnance pénale le 12 octobre 2021. Le délai pour y former opposition venait donc à échéance dix jours plus tard, le 22 octobre 2021.

Le recourant allègue avoir formé opposition par lettre du 20 octobre 2021, dont il a fourni une copie le 10 janvier 2022. Cette lettre ne figure toutefois pas au dossier du SdC et le recourant n'est pas en mesure de prouver la date de son envoi, l'ayant expédiée par pli simple.

Contrairement à ce que semble penser le recourant, l'envoi par pli recommandé n'est pas une condition de validité de l'opposition, mais un moyen d'établir son expédition.

Le recourant tente de démontrer, au moyen d'un extrait bancaire daté du 20 octobre 2021 et d'une confirmation de quittance de la Poste, du même jour, l'envoi de l'opposition à cette date, mais ces documents ne sont pas des preuves strictes de l'envoi. Ni l'impression de l'extrait bancaire ni le récépissé postal – sans mention du destinataire – ne prouvent en effet qu'une opposition à l'ordonnance pénale – en l'occurrence la lettre du 20 octobre 2021 produite ultérieurement – a été envoyée ce jour-là.

Le recourant allègue un probable "aiguillage malheureux" du pli au sein du SdC, mais n'apporte aucun élément tangible. L'erreur dans la référence de l'ordonnance pénale – 2______ au lieu de 1______ – n'est pas probante, puisque la lettre du 10 janvier 2022, qui contient la même erreur, figure au dossier, étant relevé que le contrevenant était de toute façon identifiable par son nom.

Le paiement ultérieur du montant de l'amende, augmenté des frais de rappel, n'est pas probant non plus.

Il s'ensuit que le recourant, qui supporte le fardeau de la preuve stricte, au sens de la jurisprudence rappelée ci-dessus, échoue à prouver avoir formé à temps opposition à l'ordonnance pénale.

4.             Le recours sera dès lors rejeté, étant relevé que la personne qui prétend ne pas être l'auteur d'une contravention dont elle a été reconnue coupable par ordonnance pénale peut, subsidiairement, contester cette décision selon le mécanisme de la révision (art. 410 et ss CPP; cf. à cet égard les arrêts AARP/264/2018 du 10 septembre 2018 et AARP/144/2018 du 17 mai 2018, dans lesquels la Chambre pénale d'appel et de révision se prononce sur les demandes de personnes alléguant avoir été désignées à tort comme auteurs de contraventions).

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 300.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, arrêtés à CHF 300.-.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant, au Tribunal de police et au Service des contraventions.

Le communique, pour information, au Ministère public.

Siégeant :

Monsieur Christian COQUOZ, président; Mesdames Daniela CHIABUDINI et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

Le président :

Christian COQUOZ

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/2068/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

-

CHF

Total

CHF

300.00