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Décisions | Chambre de surveillance

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C/26435/2015

DAS/13/2024 du 19.01.2024 sur DTAE/10078/2023 ( PAE ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26435/2015-CS DAS/13/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU VENDREDI 19 JANVIER 2024

 

Recours (C/26435/2015-CS) formé le 28 décembre 2023 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), représentée par Me Jacqueline MOTTARD, avocate.

* * * * *

Décision communiquée anticipée par courriel et par plis recommandés du greffier du 19 janvier 2024 à :

- Madame A______,
c/o Me Jacqueline MOTTARD
Rue Pedro-Meylan 1, CP 6203, 1211 Genève 6.

- Madame B______
c/o Me C______, curatrice de représentation
______, ______.

- Monsieur D______
c/o Me Francesco LA SPADA, avocat.
Rue De-Beaumont 3, CP 24, 1211 Genève 12.

- Monsieur E______
Monsieur F
______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Route des Jeunes 1C, case postale 107, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A. a) B______, née le ______ 1998, souffre de troubles du développement intellectuel et de déficience mentale, liés à un syndrome génétique, se traduisant notamment par un retard sévère des apprentissages, un manque d'autonomie dans la vie quotidienne et une immaturité affective. Elle n'a pas la capacité de discernement pour assurer sa propre prise en charge de façon autonome ni pour se déterminer sur son lieu de vie.

Une curatelle de portée générale a été instituée en sa faveur le 22 avril 2016. Ses parents D______ et A______ ont été désignés aux fonctions de curateurs.

b) Sa sœur G______, née le ______ 1996 est atteinte du même trouble et également sous curatelle de portée générale.

c) B______ et sa sœur ont vécu au domicile de leurs parents jusqu'en février 2023.

d) A la suite de signalements transmis au Tribunal de protection par la police judiciaire et la Fondation H______ le 8 février 2023 portant sur l'arrestation du père en raison de violences domestiques qu'il aurait commises sur son épouse et ses filles, B______ et sa sœur ont été accueillies dans une résidence de la Fondation H______.

e) Statuant le 8 février 2023 sur mesures superprovisionnelles, puis le 17 mai 2023 sur mesures provisionnelles, le Tribunal de protection a libéré D______ et A______ de leurs fonctions de curateurs de leurs filles et désigné deux intervenants du Service de protection de l'adulte à cette fonction. Il a en outre exhorté les curateurs et les parents à mettre en place une thérapie familiale, exhorté les parents à continuer leur suivi thérapeutique par l'Unité I______ et un accompagnement socio-éducatif par l'équipe mobile de l'Unité I______, réservé le sort du lieu de vie de B______ et réglé les relations personnelles entre cette dernière et chacun de ses parents.

Les parents ont tous deux recouru contre cette dernière décision; les procédures de recours sont en cours.

Une curatrice a été nommée d'office pour la représentation de B______ dans la présente procédure de protection.

Il ressort de l'audition des parents, des curateurs, des médecins de B______ ainsi que des représentants de la Fondation H______ menée par le Tribunal de protection lors de ses audiences des 5 avril et 17 mai 2023, que B______ ne supportait aucune frustration, pouvait se montrer grossière et violente, que les parents étaient preneurs d'une stratégie éducative proposée par les éducateurs de la Fondation et avaient toujours bien collaboré et adhéré à leurs propositions. La situation de B______ s'était dégradée en mai 2023; elle se mettait dans des états de colère en lien avec sa frustration de ne pas pouvoir rentrer à la maison, et les autres résidents réagissaient parfois fortement à ses crises et il arrivait qu'elle se fasse frapper par d'autres. Son médecin psychiatre a indiqué qu'elle avait besoin d'être prise en charge dans un milieu structuré et contenant avec un renfort dans l'accompagnement socio-éducatif, afin de lui enseigner ses limites et de la rassurer; les parents, qui satisfaisaient toutes ses demandes pour gérer ses crises et favorisaient ainsi le schéma dysfonctionnel de l'intéressée dans ses rapports à autrui, devaient être soutenus en cas de retour de l'intéressée à domicile.

f) Une procédure pénale est en cours contre D______, prévenu de lésions corporelles simples aggravées, lésions corporelles simples, voies de faits, voire voies de faits commises à réitérées reprises, injure et menaces.

Des mesures de substitution ont été ordonnées le 9 février 2023, dont notamment l'interdiction faite à D______ de prendre contact avec son épouse et ses deux filles et l'instruction d'entreprendre un traitement psychothérapeutique.

Le 19 décembre 2023, le Ministère public a levé les mesures de substitution et suspendu l'instruction dans l'attente de la fin de la médiation pénale.

B. a) Le placement à des fins d'assistance de B______ en la Clinique de J______ a été ordonné le 20 mai 2023 par la Dre K______, médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie auprès du Service de psychiatrie gériatrique des HUG. B______ s'en était prise physiquement à sa sœur G______. Depuis un mois, elle présentait une baisse de l'humeur et des troubles du comportement se péjorant, sous forme d'auto- et d'hétéro-agressivité, multipliant les conflits avec les autres résidents du foyer.

b) Statuant le 27 juin 2023 à titre superprovisionnel puis le 4 juillet 2023 sur le fond, le Tribunal de protection a prolongé pour une durée indéterminée le placement à des fins d'assistance institué le 20 mai 2023 en faveur de B______ au sein de la Clinique de J______.

c) Le Tribunal de protection a ordonné une expertise psychiatrique. Dans leur rapport d'expertise établi le 27 septembre 2023, les Dres L______, psychiatre psychothérapeute FMH médecin cheffe de clinique à l'unité de psychiatrie légale, et M______, médecin interne au sein de cette unité, ont relevé que B______ souffrait de troubles du développement intellectuel et qu'il en résultait un besoin d'assistance et de traitement. Elle ne disposait pas de la capacité de discernement pour se déterminer sur son lieu de vie. L'équipe médicale envisageait, à terme, la poursuite de soins en ambulatoire, qui était toutefois prématurée en l'état, un retour à domicile prématuré risquant de conduire à des actes de violence de B______ envers sa mère, voire des parents sur la personne concernée. Considérant que les visites au Foyer N______ s'étaient bien déroulées depuis son admission à J______, les expertes ont estimé qu'un retour dans cette structure serait approprié, voire dans un Etablissement public pour l'intégration.

Les expertes ont relevé que l'intéressée pouvait se montrer agressive, notamment dans le contexte d'une frustration lorsqu'une demande lui était refusée. Sa mère semblait avoir du mal à maintenir seule un cadre éducatif suffisamment contenant, pourtant essentiel pour la suite de la prise en charge de l'intéressée. Cette dernière avait besoin d'un suivi psychiatrique régulier, qui était envisageable en milieu ambulatoire, mais également d'assistance au quotidien dans un cadre contenant et stable, que son entourage familial, encore trop fragile, n'était pas en mesure de lui procurer. Un retour à domicile auprès de sa mère seule apparaissait prématuré, il convenait d'examiner l'évolution de la situation d'ici six mois à un an, compte tenu de la thérapie familiale, de la situation du couple parental, des séjours à l'essai. Un suivi psycho-éducatif était recommandé, par le biais d'une équipe éducative au sein d'un foyer de vie ou en cas de retour à domicile. A la sortie d'hospitalisation, un suivi ambulatoire spécialisé était indiqué.

d) Le 13 novembre 2023, la Dre O______, médecin interne à J______, a sollicité le transfert de B______ au foyer N______.

Le 4 décembre 2023, le Tribunal de protection a prescrit que le placement à des fins d'assistance ordonné le 20 mai 2023 devait être exécuté au sein du foyer N______ de la Fondation H______, en autorisant des sorties de l'institution pour que l'intéressée puisse accomplir ses activités journalières et récréatives, ainsi que pour des visites durant le week-end avec sa mère et sa sœur ou avec son père.

Il a considéré que les soins psychiatriques pouvaient être prodigués à l'intéressée de manière ambulatoire, mais que son manque d'autonomie et son besoin d'encadrement psycho-social commandaient qu'elle soit hébergée dans une structure spécialisée telle que le foyer N______, qui disposait de l'infrastructure et des compétences professionnelles nécessaires. Le retour au domicile familial n'était pas envisageable au regard du contexte familial, qui nécessitait une évaluation des compétences parentales ainsi qu'une reprise progressive des liens parentaux. Il était nécessaire de protéger l'intéressée, qui n'était potentiellement pas en mesure de dénoncer des faits répréhensibles commis par son père s'ils étaient amenés à se produire à nouveau.

e) B______ a été réintégrée au foyer N______ le 6 décembre 2023.

Les 8 et 10 décembre 2023, l'institution a dû faire appel à l'ambulance et faire conduire B______ aux urgences psychiatriques suite à des actes de violence de cette dernière à l'encontre d'autres résidents et d'éducateurs du foyer.

B______ a à nouveau été hospitalisée à la Clinique de J______ à compter du 11 décembre 2023.

C. Par ordonnance DTAE/9924/2023 prononcée le 14 décembre 2023, communiquée à A______ le 18 décembre 2023, le Tribunal de protection a prescrit l’exécution du placement à des fins d’assistance institué le 20 mai 2023 en faveur de B______ à la Clinique de J______ (ch. 1 du dispositif), rendu attentive l’institution de placement au fait que la compétence de libérer la personne concernée, de lui accorder des sorties temporaires ou de transférer le lieu d’exécution du placement, appartenait au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ch. 2), autorisé les sorties de l'institution pour que B______ puisse accomplir ses activités journalières et récréatives (ch. 3), autorisé les sorties de l'institution les samedis et dimanches durant la journée pendant cinq heures avec sa mère et sa sœur (ch. 4), autorisé les sorties de l'institution durant deux heures le samedi ou le dimanche avec son père, sans la présence de sa mère et de sa sœur (ch. 5) et rappelé que la procédure était gratuite (ch. 6).

Le Tribunal de protection a retenu qu'au regard des incidents survenus au foyer depuis la réintégration de B______, le foyer N______ n'apparaissait pas en mesure d'apporter un cadre suffisamment contenant à l'intéressée pour stabiliser ses troubles du comportement. Il convenait dès lors de trouver une institution spécialisée apte à encadrer l'intéressée, un retour au domicile familial n'étant pas envisageable au regard du contexte familial, qui commandait une évaluation des compétences parentales et une reprise progressive des liens parentaux. Il s'avérait enfin nécessaire de protéger l'intéressée, qui ne serait pas en mesure de dénoncer à nouveau des faits répréhensibles commis par le père s'ils étaient amenés à se produire à nouveau. Le Tribunal de protection a dès lors invité les curateurs à faire les démarches nécessaires en vue de trouver un nouveau lieu de vie disposant de l'infrastructure et des compétences professionnelles nécessaires à la prise en charge de l'intéressée. Dans l'intervalle, la Clinique de J______ constituait la seule institution en mesure d'apporter à l'intéressée l'assistance et les soins requis par son état.

D. Par ordonnance DTAE/10078/2023 rendue le 19 décembre 2023, communiquée à A______ le 20 décembre 2023, le Tribunal de protection a maintenu l'exécution du placement à des fins d’assistance institué le 20 mai 2023 en faveur de B______ à la Clinique de J______ (ch. 1 du dispositif), enjoint les curateurs à trouver sans délai une place à la personne concernée dans une institution adaptée à ses besoins (ch. 2), autorisé la sortie de B______ du 23 décembre 2023 au 7 janvier 2024 inclus au domicile de sa mère avec sa sœur (ch. 3), soumis l'autorisation de sortie visée sous chiffre 2 à la condition d'évaluations de la personne concernée par l'équipe mobile de l'Unité I______ au domicile de la mère (ch. 4), autorisé le père à partager en dehors du domicile familial les repas et fêtes des 24 et 25 décembre 2023 ainsi que la soirée du 31 décembre 2023 avec ses filles et son épouse (ch. 5), rappelé que les sorties suivantes étaient autorisées : en journée pour que B______ puisse accomplir ses activités journalières et récréatives, les samedis et dimanches durant la journée pendant cinq heures avec sa mère et sa sœur, ainsi que deux heures le samedi ou le dimanche avec son père sans la présence de sa mère et de sa sœur (ch. 6), et rendu attentive l’institution de placement au fait que la compétence de libérer la personne concernée, de lui accorder d'autres sorties temporaires ou de transférer le lieu d’exécution du placement, appartenait au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ch. 7) et rappelé que la procédure était gratuite (ch. 8).

E. a) Par acte expédié le 28 décembre 2023, A______ a recouru contre ces deux ordonnances, concluant à l'annulation de l'ordonnance DTAE/9924/2023 du 14 décembre 2023 et des chiffres 1 et 2 de l'ordonnance DTAE/10078/2023 du 19 décembre 2023. Cela fait, elle demande à la Chambre de surveillance de dire que la mesure de placement de B______ à des fins d'assistance est levée et d'autoriser le retour immédiat de cette dernière à domicile, subsidiairement d'ordonner le placement de B______ auprès de sa mère A______ en assortissant l'exécution de ce placement d'une mesure de surveillance et d'accompagnement socio-éducatif par l'équipe mobile de l'Unité I______.

b) Lors de l'audience tenue le 12 janvier 2024, le juge délégué de la Chambre de surveillance a entendu B______, sa curatrice de représentation, A______, D______, les intervenants du Service de protection de l'adulte chargé de la curatelle de portée générale en faveur de B______ et le Dr P______, médecin responsable de l'Unité I______ de la Clinique de J______.

A______ a déclaré persister dans son recours.

D______ a appuyé les conclusions prises par son épouse dans son recours.

B______ a indiqué vouloir rentrer à la maison auprès de sa mère.

Le Dr P______ a déclaré que B______ souffrait d'un trouble du développement mental moyennement sévère, d'origine génétique. Il s'agissait d'un état chronique qui ne pouvait être guéri. Dans le cadre de son séjour à la Clinique, l'objectif visé est de permettre à B______ de gagner en autonomie et d'améliorer ses capacités pour faire face à sa vie de tous les jours. Le traitement médical pourrait être dispensé de manière ambulatoire. L'approche comportementale et éducative nécessitait en revanche un cadre de vie adapté, une présence régulière durant la journée et une bonne collaboration avec les proches ou le personnel d'une institution. L'équipe mobile de l'Unité I______ était en mesure d'intervenir ponctuellement, mais ne pouvait pas assurer une présence durable sur la journée. B______ avait pu rentrer à domicile durant les fêtes de fin d'année, pendant environ deux semaines. Son séjour s'était bien déroulé, selon le retour donné par l'équipe médicale passée à domicile à deux reprises. La Clinique de J______ était un établissement hospitalier accueillant des patients présentant des troubles du comportement. Elle ne constituait pas une institution optimale pour le placement de B______, dans la mesure où elle ne proposait pas d'activités ni d'accompagnement en modalité "un pour un" et qu'il ne s'agissait pas d'un lieu de vie. Un retour à domicile supposerait la présence d'une équipe collaborante et compétente. Dans l'optique de lui permettre de gagner en autonomie, un lieu de vie dans une institution avec une équipe encadrante serait adéquat. Son séjour à domicile durant les fêtes de fin d'année s'était mieux passé que son séjour au foyer de N______. Avant son placement, B______ vivait à domicile et avait des activités la journée au sein de la Fondation H______. Cette situation était adéquate, ne présentait apparemment pas de problèmes et était à l'époque meilleure que la situation actuelle, le médecin relevant qu'il ignorait toutefois les circonstances ayant conduit à son placement en foyer. Il estimait que, de manière générale, il serait opportun de prévoir dans un premier temps un retour à domicile, afin que l'intéressée retrouve une stabilité émotionnelle, avant d'envisager un placement en institution visant l'acquisition d'une plus grande autonomie, en répétant toutefois à nouveau qu'il n'était pas au courant des circonstances ayant conduit à l'éclatement de la famille. Le retour de B______ à la Clinique de J______ après son séjour à domicile durant les fêtes de fin d'année avait été traumatisant pour cette dernière, nécessitant l'intervention d'une ambulance et de la police. B______ exprimait régulièrement et vigoureusement son affection pour sa famille. Le médecin a enfin souligné que les parents de l'intéressée respectaient scrupuleusement les règles posées par le Tribunal de protection en ramenant leur fille à la fin du congé octroyé.

L'intervenant en protection chargé de la curatelle de portée générale a relevé que sa protégée n'avait pas la capacité de discernement pour déterminer son lieu de vie. La Commission cantonale d'indication avait été saisie, qui avait proposé trois établissements, la Fondation H______, les Etablissements publics pour l'intégration (ci-après : EPI) et [la fondation] Q______. Compte tenu des événements survenus lors du dernier retour de B______ au foyer N______ de la Fondation H______, un retour de cette dernière dans cet établissement n'était plus envisageable. Les deux autres institutions proposées ne disposaient d'aucune disponibilité en l'état. Il était difficile de concrétiser le placement en institution envisagé dans la mesure où B______ et ses parents n'adhéraient pas à ce projet. Selon les éducateurs de l'intéressée, celle-ci avait besoin d'un suivi psychopédagogique que ses parents n'étaient pas en mesure de lui fournir à domicile. Sa mère n'était pas en mesure de gérer seule les débordements de sa fille. L'expertise psychiatrique réalisée l'année passée envisageait un retour à domicile à condition qu'un suivi particulier permette une bonne évolution de la dynamique familiale. Une thérapie familiale a été mise en œuvre et il y a eu un changement de thérapeute en cours de route.

La curatrice de représentation d'office a indiqué qu'elle estimait, à l'instar du médecin, que la Clinique de J______ n'était pas un lieu de vie approprié pour sa protégée et qu'un placement à long terme dans cet établissement lui serait préjudiciable. Des craintes persistaient toutefois à l'idée que B______ et sa sœur réintègrent le domicile familial au regard des circonstances ayant conduit à leur accueil en foyer en février 2023. La curatrice de représentation considérait que la solution idéale serait de prévoir, à terme, un système dual avec une présence en partie en institution, en partie à domicile. Selon la curatrice, un retour à domicile dans le cadre d'un tel système dual pourrait être mis en place plus rapidement si les parents collaboraient à ce projet et soutenaient leur fille dans cette optique.

Le curateur de portée générale a appuyé la proposition de la curatrice de représentation, en insistant qu'elle impliquait l'adhésion de la famille.

A______ a déclaré qu'il convenait, dans un premier temps, de permettre à leur fille de rentrer à domicile afin que son état émotionnel se stabilise.

D______ a indiqué que le système proposé par la curatrice de représentation devait être mis en place progressivement, en permettant à sa fille de rentrer au domicile familial et de faire des stages et des activités au sein d'une ou plusieurs institutions, puis d'envisager une intégration dans une institution si sa fille y adhérait. Il était important qu'elle soit dans un état psychologique et émotif lui permettant d'aller de l'avant dans un tel projet, et d'éviter qu'elle doive à nouveau être hospitalisée. Avant son placement en foyer, sa fille avait une certaine autonomie et participait à des activités. Durant toutes les années où son épouse et lui avaient pris en charge leurs filles, leurs compétences parentales n'avaient jamais été remises en question par les éducateurs et professionnels de la Fondation H______. Il ne ferait plus de mal à sa famille. Le contexte familial s'améliorait et évoluait positivement. En juillet, il était rentré au domicile familial avec l'autorisation du Ministère public. Il avait respecté toutes les mesures de substitution ordonnées, et la procédure pénale avait été suspendue en raison de la médiation familiale. Il avait entamé une thérapie auprès de l'association R______, active dans la prévention contre la violence, dont les rapports avaient tous été positifs.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

EN DROIT

1. Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet d'un recours devant le juge compétent (art. 450 al. 1 CC). Dans le domaine du placement à des fins d'assistance, le délai de recours est de dix jours à compter de la notification de la décision entreprise (art. 450b al. 2 CC). Le recours formé contre une décision prise dans le domaine du placement à des fins d'assistance ne doit pas être motivé (art. 450e al. 1 CC).

Formé dans le délai utile de dix jours par la mère de la personne concernée par la mesure de placement à des fins d'assistance, le recours est recevable.

2. 2.1 Une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsque, en raison de troubles psychiques, d'une déficience mentale ou d'un grave état d'abandon, l'assistance ou le traitement nécessaire ne peuvent lui être fournis d'une autre manière (art. 426 al. 1 CC). Elle est libérée dès que les conditions du placement ne sont plus remplies (art. 426 al. 3 CC).

La loi exige la réalisation de trois conditions cumulatives, à savoir une cause de placement (troubles psychiques, déficience mentale ou grave état d'abandon), un besoin d'assistance ou de traitement ne pouvant lui être fourni autrement et l'existence d'une institution appropriée permettant de satisfaire les besoins d'assistance de la personne placée ou de lui apporter le traitement nécessaire (MEIER/LUKIC, Introduction au nouveau droit de la protection de l'adulte, p. 302, n. 666).

L'une des conditions légales au placement est l'existence d'une institution appropriée permettant de satisfaire les besoins d'assistance de la personne placée ou de lui apporter le traitement nécessaire (MEIER/LUKIC, Introduction au nouveau droit de la protection de l'adulte, 2011, p. 302, n° 666).

2.2 En l'espèce, B______ souffre d'un trouble du développement intellectuel et de déficience mentale, d'ordre génétique et se manifestant notamment par un retard sévère des apprentissages, un manque d'autonomie dans la vie quotidienne et une immaturité affective. Il ressort tant de l'expertise psychiatrique effectuée que des déclarations des médecins entendus dans la présente procédure que B______ a besoin d'un suivi psychiatrique régulier, qui pouvait lui être prodigué en ambulatoire, ainsi que d'une assistance au quotidien s'inscrivant dans une approche comportementale et éducative dans un cadre de vie contenant et stable.

Depuis sa naissance, B______ a vécu auprès de ses parents avec sa sœur, qui souffre du même trouble. Les parents ont assuré la prise en charge de leurs deux filles depuis 25 ans, et ont été désignés curateurs de portée générale lorsqu'elles ont atteint leur majorité. B______ a ainsi toujours vécu à domicile et participait la journée aux activités proposées par la Fondation H______, lorsqu'en février 2023, à la suite de l'arrestation de son père et de la procédure pénale dirigée à l'encontre de ce dernier pour violences domestiques, elle a été accueille au foyer N______ de la Fondation H______. Son état s'est dégradé en mai 2023, ses crises en lien avec sa frustration de ne pas pouvoir rentrer à domicile conduisant à des altercations avec les autres résidents, qui pouvaient fortement réagir à ses accès de colère, ainsi qu'à l'intervention des ambulanciers ou de la police. B______ a alors été placée à des fins d'assistance au sein de la Clinique de J______, où elle réside depuis lors, en bénéficiant de sorties pour ses activités récréatives, pour voir chacun de ses parents ou pour passer les vacances de fin d'année. Son retour dans le foyer N______ a été ordonné en décembre 2023, mais elle a, après quelques jours, été à nouveau hospitalisée à la Clinique de J______ en raison d'actes de violence à l'encontre d'autres résidents et d'éducateurs du foyer.

Il s'avère toutefois que la Clinique de J______ n'est, selon le Dr P______ entendu le 12 janvier 2024, pas un établissement optimal pour l'intéressée, dès lors qu'il s'agit d'un établissement hospitalier accueillant des personnes présentant des troubles du comportement, alors que B______ souffre d'une déficience mentale génétique, qui est un état chronique et ne peut pas être guéri. La Clinique n'est par ailleurs pas un lieu de vie pour l'intéressée, puisqu'elle ne propose pas d'activités, ni d'accompagnement individuel.

La situation actuelle est insatisfaisante et n'évolue pas favorablement depuis que B______ est accueillie en institution. S'il convient certes de retenir qu'elle a besoin d'une assistance quotidienne dans l'optique d'une approche comportementale et éducative en vue de gagner en autonomie, son placement dans une institution appropriée, offrant un lieu de vie adéquat avec un cadre contenant et stable, apparaît en l'état difficile à mettre en œuvre, puisque la Clinique de J______ n'est pas appropriée et que les institutions proposées par la Commission cantonale d'indication ne sont pas en mesure d'accueillir B______, le foyer de N______ n'étant plus envisageable en raison des derniers événements survenus en décembre 2023 et les deux autres établissements ne disposant pas de places disponibles à l'heure actuelle.

Selon le Dr P______ entendu le 12 janvier 2024, le séjour de B______ à domicile durant les fêtes de fin d'année semble s'être bien déroulé, selon les retours effectués par l'équipe mobile de l'Unité I______. Le médecin a également relevé que la situation de l'intéressée avant son placement, lorsqu'elle vivait à domicile et participait aux activités proposées par la Fondation H______, était meilleure que sa situation actuelle en milieu hospitalier, en relevant qu'il ignorait les circonstances ayant conduit à l'éclatement de la famille en février 2023. A cet égard, il sera relevé que les craintes relatives à la commission de nouvelles violences domestiques ne justifient pas le maintien d'un placement de l'intéressée à des fins d'assistance en la Clinique de J______ : la procédure pénale a suivi son cours, des mesures de substitution ont été prononcées à l'encontre du recourant et levées depuis lors; le recourant s'est investi dans les différents suivis qu'il a été enjoint d'entreprendre, notamment auprès de l'association R______, active dans la prévention de la violence, et la procédure pénale a été suspendue en raison de la médiation pénale engagée.

S'il apparaît certes souhaitable que B______ puisse être accueillie dans une institution telle que le foyer N______ de la Fondation H______, les EPI ou [la fondation] Q______, éventuellement selon un système dual lui permettant de résider en partie en institution et en partie à domicile comme le préconisent ses curateurs de représentation d'office et de portée générale, une telle intégration n'est pas envisageable à l'heure actuelle et le maintien du placement de B______ au sein d'un établissement hospitalier dans l'attente qu'un tel projet puisse se réaliser ne se justifie pas.

Il convient, dans ces circonstances, d'envisager un retour de B______ à domicile, comme le souhaitent et le réclament ses parents, afin de stabiliser dans un premier temps son état émotionnel et retrouver ainsi un certain apaisement, avant de mettre sur pied l'approche comportementale et éducative dont elle a besoin, éventuellement par le biais de son intégration, potentiellement partielle, dans une institution adaptée. S'il devait, à terme, s'avérer que cette approche ne peut être mise en œuvre qu'à la condition d'un placement de l'intéressée dans une institution spécialisée du type de celles proposées par la Commission cantonale d'intégration, il conviendra alors d'envisager un placement de l'intéressée dans un établissement de ce type.

Le recours sera en conséquence admis. Le placement à des fins d'assistance en faveur de B______ sera levé et les curateurs de portée générale seront enjoints à mettre sur pied le suivi à domicile par l'équipe mobile de l'Unité I______.

3. La procédure est gratuite (art. 22 al. 4 LaCC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 28 décembre 2023 par A______ contre les ordonnances DTAE/9924/2023 et DTAE/1008/2023 rendues par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant les 14 et 19 décembre 2023 dans la cause C/26435/2015.

Au fond :

Annule ces ordonnances et statuant à nouveau :

Lève le placement à des fins d'assistance ordonné en faveur de B______ le 20 mai 2023 et prolongé par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant le 4 juillet 2023.

Enjoint les curateurs de portée générale de B______ à mettre en œuvre un suivi à domicile par l'équipe mobile de l'Unité I______.

Dit que la procédure est gratuite.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.