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Décisions | Chambre de surveillance

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C/2637/2022

DAS/245/2023 du 12.10.2023 sur DTAE/3811/2023 ( PAE ) , REJETE

Recours TF déposé le 17.11.2023, 5A_881/2023
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2637/2022-CS DAS/245/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU JEUDI 12 OCTOBRE 2023

 

Recours (C/2637/2022-CS) formé en date du 30 juin 2023 par Maître A______, avocate, p.a. ______, ______ [GE].

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 17 octobre 2023 à :

- Maître A______
______, ______.

- Madame B______
c/o M. C______
______, ______.

- Madame D______
Madame E______

SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Route des Jeunes 1C, case postale 107, 1211 Genève 8.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A. a) Par ordonnance DTAE/3811/2023 du 4 mai 2023, communiquée pour notification le 25 mai 2023, le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (cu-après : le Tribunal de protection) a libéré Maître A______ de ses fonctions de curatrice de représentation et de gestion du patrimoine de B______, née le ______ 2002, de nationalité serbe (ch. 1 du dispositif), réservé l’approbation de ses rapport et comptes finaux (ch.2), désigné deux intervenantes en protection de l’adulte auprès du Service de protection de l'adulte (SPAd), aux fonctions de curatrices *de portée générale de représentation et de gestion du patrimoine (ch. 3, après correction d'erreur matérielle) et dit que les curatrices peuvent se substituer l’une à l’autre dans l’exercice de leur mandat, chacune avec les pleins pouvoirs de représentation (ch. 3), rappelé que les curatrices exercent les tâches de représenter la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d’affaires administratives et juridiques et de gérer ses revenus et biens et d'administrer ses affaires courantes (ch.4), rappelé que la personne concernée est privée de sa faculté d’accéder et de disposer de son compte épargne auprès de F______ CH1______ (ch. 5) et autorisé les curatrices à prendre connaissance de la correspondance de la personne concernée, dans les limites du mandat, et, si nécessaire, à pénétrer dans son logement (ch. 6).

Ladite ordonnance a été notifiée à la personne concernée le 26 mai 2023 et à la curatrice le 31 mai 2023.

En substance, le Tribunal de protection a d'une part, reproché à la curatrice de ne pas avoir répondu à une demande de sa part, ni adressé dans les temps son rapport, ce manque de collaboration étant incompatible avec la diligence requise, et d'autre part, considéré que les moyens de la personne protégée ne lui permettant pas d'assumer les frais d'un curateur privé, celui-ci devait être relevé et le SPAd mis en œuvre.

B. Par acte expédié à l'adresse de la Cour le 30 juin 2023, A______ a recouru contre ladite ordonnance concluant à son annulation, se plaignant essentiellement du reproche qui lui était fait de ne pas avoir répondu à un courrier du Tribunal de protection et, entre les lignes, du fait que la décision serait inopportune, la protégée étant opposée à un changement de curateur.

Par courrier du 26 juillet 2023, le Tribunal de protection a fait savoir à la Cour qu'il persistait dans sa décision, qu'il ne souhaitait pas revoir.

Le 22 août 2023, le greffe de la Cour a reçu un courrier manuscrit signé de la personne protégée exposant ne pas souhaiter de mesure de curatelle et souhaiter conserver son autonomie.

Par avis du 6 septembre 2023 la Cour a informé les parties que la cause était gardée à juger à 10 jours.

Par courrier du 19 septembre 2023, la recourante a sollicité la tenue d'une audience, souhaitée par la personne protégée.

C. Ressortent pour le surplus de la procédure les faits pertinents suivants :

a) B______, née le ______ 2002, de nationalité serbe, a été mise au bénéfice d'une curatelle de représentation et de gestion du patrimoine par ordonnance du 6 avril 2022, à sa demande, comme cela ressort de sa requête au Tribunal de protection du 11 février 2022 et de son audition du 6 avril 2022.

Pour une raison ignorée de la Cour, le Tribunal de protection a fait le choix, alors que la situation financière de la protégée ne lui permettait pas de rémunérer un curateur privé, de désigner A______, avocate et mandataire privée professionnelle, aux fonctions de curatrice, en laissant provisoirement sa rémunération à la charge de l'Etat.

b) Le 14 décembre 2022, la curatrice a remis au Tribunal de protection son rapport intermédiaire daté du 8 décembre 2022, dans lequel elle considérait que la mesure de protection devait être maintenue et qu'il était prématuré de transmettre le mandat au SPAd dans la mesure où la protégée avait besoin de temps pour être mise en confiance et peinait à accepter le changement. Diverses démarches devaient en outre être effectuées à son profit (recherche de logement, demande de prestations complémentaires, …).

c) Le 20 décembre 2022, le Tribunal de protection a informé la curatrice de ce qu'au vu des explications données, il n'envisageait pas de transférer le mandat au SPAd.

d) Par ordonnance superprovisionnelle du 12 janvier 2023 rendue à la demande de la curatrice, confirmée au fond le 8 mars 2023, l'accès de la personne concernée à la disposition de son compte épargne auprès de F______ CH1______, sur lequel devait parvenir un rétroactif de rente AI, a été limité.

e) A peine deux mois après son courrier du 20 décembre 2022, le Tribunal de protection a, le 7 mars 2023, invité la curatrice à lui remettre un (nouveau ?) rapport d'activité, comprenant un préavis sur la possibilité de transférer le mandat au Service de protection de l'adulte (SPAd). Le dossier ne contient pas de réaction à cette demande.

Un rappel lui a été adressé le 17 avril 2023, suite à quoi la décision querellée a été rendue dans la foulée.


 

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet, dans les trente jours, d'un recours écrit et motivé, devant le juge compétent, à savoir la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 et al. 3 et 450b CC; art. 126 al. 3 LOJ; art. 53 al. 1 et 2 LaCC).

Ont qualité pour recourir les personnes parties à la procédure, les proches et les personnes ayant un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 450 al. 2 ch. 1 à 3 CC). Le recours doit être dûment motivé et interjeté par écrit auprès du juge (art. 450 al. 3 CC).

1.2 En l'espèce, le recours déposé par la curatrice a été formé dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi, devant l'autorité compétente, par une personne ayant un intérêt à le faire. Il est recevable.

Tel n'est pas le cas du recours déposé par la protégée, tardif.

1.3 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC).

Les maximes inquisitoire et d'office sont applicables, en première et en seconde instance (art. 446 CC).

2. La recourante reproche essentiellement au Tribunal de protection, tout d'abord de lui avoir adressé des reproches en matière de collaboration et en outre, de ne pas l'avoir maintenue comme curatrice de la protégée, et d'avoir rendu en cela une décision inopportune.

2.1 Conformément à l'art. 413 al. 1 CC, le curateur accomplit ses tâches avec le même devoir de diligence qu'un mandataire au sens du Code des obligations.

Selon l'art. 410 al.1 CC, le curateur tient les comptes et les soumet à l'approbation de l'autorité de protection de l'adulte aux périodes fixées par celle-ci, mais au moins tous les deux ans.

A teneur de l'art. 411 al. 1 CC, aussi souvent que nécessaire mais au moins tous les deux ans, le curateur remet à l'autorité de protection de l'adulte un rapport sur son activité et sur l'évolution de la situation.

A teneur de l'art. 423 CC, l'autorité de protection de l'adulte libère le curateur de ses fonctions s'il n'est plus apte à remplir les tâches qui lui sont confiées (al. 1 ch. 1) ou s'il existe un autre motif de libération (al. 1 ch. 2).

L'art. 423 CC permet la libération du mandataire indépendamment de sa volonté. Comme pour l'art. 445 al. 2 aCC, c'est la mise en danger des intérêts de la personne à protéger qui est déterminante et non le fait qu'il y ait eu un dommage ou non.

L'autorité de protection dispose d'un pouvoir d'appréciation étendu aussi bien lorsqu'elle examine l'aptitude du mandataire (art. 400 CC) que lorsqu'elle le libère pour inaptitude. La notion d'aptitude est relative et doit être appréciée par rapport aux tâches du mandataire. Le mandataire peut aussi être libéré de ses fonctions sur la base d'un autre juste motif. Dans ce cas également, l'accent sera mis sur les intérêts de la personne à protéger. Il sera aussi tenu compte de motifs axés plus nettement sur la confiance (ROSCH, CommFam, 2013, Protection de l'adulte, no 7-8 ad art. 423 CC).

L'application de l'art. 423 CC est gouvernée par le principe de proportionnalité. Les autorités de protection doivent exiger une sérieuse mise en danger des intérêts ou du bien-être de la personne protégée pour prononcer la libération du curateur. Dans le cadre de l'application de l'art. 423 al. 1 ch. 2 CC, on pense notamment à la grave négligence dans l'exercice du mandat, à l'abus dans l'exercice de sa fonction, à l'indignité du mandataire et de son comportement, à son défaut de paiement en particulier. Tous ces motifs doivent avoir pour résultante la destruction insurmontable des rapports de confiance ("unüberwindbare Zerrüttung des Vertrauensverhältnisses") (Fassbind, Erwachsenenschutz, 2012, p. 273; DAS/89/2015).

2.2 En cas de fortune globale nette de la personne à protéger inférieure ou égale à 50'000 fr. et si aucun proche n'est susceptible de fonctionner comme curateur, le Tribunal de protection désigne des collaborateurs du Service de protection de l'adulte (art. 2 al. 2 du Règlement fixant la rémunération des curateurs (RRC)).

2.3 Le juge du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant est compétent seul pour prononcer la libération du curateur de ses fonctions (art. 421 à 423 CC) (art. 5 al. 1 let. g LaCC).

2.4 En l'espèce, il doit tout d'abord être relevé que les reproches faits à la curatrice par le Tribunal de protection n'apparaissent pas fondés. En effet, il ressort du dossier que, contrairement à ce que retient l'autorité précédente, non seulement la curatrice lui a remis un rapport d'activité daté du 8 décembre 2022, en date du 14 décembre 2022, mais que celui-ci contenait la réponse à la demande de préavis quant au transfert de la curatelle au SPAd. Il ressort en outre du dossier que, le 20 décembre 2022, le Tribunal de protection a répondu à la curatrice en lui confirmant qu'après lecture de son rapport et des motifs relatifs au préavis sur le transfert du mandat, il n'envisageait pas de prononcer ledit transfert. Or, alors que la loi impose au curateur de déposer ses comptes et rapport tous les deux ans, dans le cas d'espèce et sans que l'on ne trouve de justification particulière au dossier, le Tribunal de protection a sollicité, tout juste deux mois après le dépôt par le curateur de son rapport, un nouveau rapport avec un nouveau préavis. Dans la mesure où la nécessité d'un suivi si rapproché ne ressort pas du dossier ni n'est motivé, l'on ne peut faire reproche à la curatrice de ne pas y avoir déféré. La curatrice a exposé avoir répondu en ce sens au Tribunal de protection. Elle n'a cependant pas produit de pièce à ce propos. Cela reste toutefois sans conséquence vu ce qui précède. Le quiproquo induit par le Tribunal de protection ne justifiait pas les reproches formulés, qui apparaissent infondés.

Cela étant, le recours doit être néanmoins rejeté.

En effet, pour une raison ignorée de la Cour, le Tribunal de protection a fait le choix, au moment du prononcé de la mesure, de désigner en faveur d’une personne non éligible, un curateur privé. A un moment ou à un autre, il était nécessaire de corriger cette décision et de désigner, conformément aux dispositions applicables, en l'absence d'éléments exceptionnels, le service officiel de gestion des curatelles d'adultes pour les personnes sans ressources suffisantes. Il apparaît dès lors que la décision prise est conforme à la loi pour le second motif exclusivement sur lequel elle se fonde. Elle n'est par ailleurs pas inopportune, en l'absence de circonstance particulière, la question de l'adaptation de la protégée à un nouveau curateur n'en étant pas une, et doit être confirmée.

3. Dans la mesure où elle succombe partiellement sur les motifs et complètement sur l'issue du recours, des frais réduits de 200 fr. seront mis à charge de la recourante.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare irrecevable le recours déposé le 22 août 2023 par B______ contre la décision DTAE/3811/2023 rendue le 4 mai 2023 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/2637/2022.

Déclare recevable le recours déposé le 30 juin 2023 par A______ contre la même décision.

Au fond :

Le rejette.

Sur les frais :

Arrête les frais de recours à 200 fr.

Les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont compensés à due concurrence avec l'avance de frais versée.

Ordonne aux Services financiers du Pouvoir judiciaire de restituer à A______, le solde de l'avance de frais.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.