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Décisions | Chambre de surveillance

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C/2070/2010

DAS/70/2023 du 22.03.2023 sur DTAE/7709/2022 ( PAE ) , IRRECEVABLE

Normes : CC.450.al3; CC.450.letf
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2070/2010-CS DAS/70/2023

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MERCREDI 22 MARS 2023

 

Recours (C/2070/2010-CS) formé en date du 23 novembre 2022 par Madame A______, domiciliée ______ (Genève), comparant par Me Martine GARDIOL, avocate, en l'Etude laquelle elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 30 mars 2023 à :

- Madame A______
c/o Me Martine GARDIOL, avocate
Place Terribilini 1, 1260 Nyon.

- Madame B______
Présidente de la ______ème Chambre du
TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A.    a) Le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ci-après: le Tribunal de protection) est en charge depuis l’année 2010 d’une procédure relative aux enfants D______, née le ______ 2005, récemment devenue majeure, et E______, né le ______ 2010.

b) Par ordonnance DTAE/7431/2019 du 27 novembre 2019, le Tribunal de protection a notamment, statuant sur mesures provisionnelles, retiré le droit de garde et de déterminer le lieu de résidence des enfants D______ et E______ à leur mère, maintenu le placement de ces derniers en foyer, accordé aux parents un droit de visite sur les mineurs et instauré diverses mesures de curatelle et, statuant préparatoirement, a ordonné une expertise psychiatrique familiale.

c) La Chambre de surveillance de la Cour de justice a, le 23 décembre 2019, octroyé l’effet suspensif au recours et prononcé des mesures provisionnelles, aux termes desquelles elle a ordonné la restitution provisoire de la garde des mineurs à leur mère, aucun danger imminent ne justifiant le placement des enfants, sans instruction au fond.

d) Par décision DAS/114/2020 du 26 juin 2020, la Chambre de surveillance a annulé l'ordonnance du 27 novembre 2019 en tant qu'elle ordonnait à titre provisionnel le retrait de la garde des enfants et du droit de déterminer leur lieu de résidence à leur mère, qu'elle ordonnait leur placement en foyer et qu'elle fixait les modalités des relations personnelles au sein de celui-ci et a confirmé l'ordonnance pour le surplus.

e) Par ordonnance DTAE/272/2020 du 17 janvier 2020, le Tribunal de protection, statuant préparatoirement, a ordonné une expertise psychiatrique familiale, dont il a confié la réalisation à la Prof. F______, Centre universitaire de médecine légale (CURML), et a déterminé sa mission.

f) Par décision DAS/181/2020 du 29 octobre 2020, la Chambre de surveillance a déclaré irrecevable le recours formé le 3 février 2020 par A______ contre l'ordonnance du Tribunal de protection du 17 janvier 2020, celle-ci ne pouvant plus remettre en question le principe de l’expertise, ordonnée par décision du 27 novembre 2019.

g) Par arrêt 5A_1019/2020, le Tribunal fédéral a partiellement admis le recours, et renvoyé la cause à la Chambre de surveillance, afin qu'elle se prononce sur le grief soulevé par la mère des mineurs s'agissant de la personne de l'expert, le recours étant rejeté pour le surplus.

h) Par décision DAS/77/2022 du 24 mars 2022, la Chambre de surveillance a rejeté le recours formé par A______ contre l’ordonnance d’expertise familiale rendue par le Tribunal de protection le 17 janvier 2020 désignant F______ en qualité d'experte.

i) Par courrier du 20 mai 2022, le Tribunal fédéral a attesté qu'aucune requête d'effet suspensif ou de mesures provisoires n'avait été déposée, suite au recours formé par A______ le 23 avril 2022 contre la décision de la Chambre de surveillance du 24 mars 2022.

j) Par courrier du 31 mai 2022, le Tribunal de protection a transmis une copie du courrier du Tribunal fédéral au CURML et l'a invité à débuter le processus d'expertise. Une copie de cette correspondance a été adressée aux participants à la procédure.

k) Par courrier du 24 juin 2022, A______ a écrit au Tribunal de protection afin de lui faire part de son opposition à la réalisation immédiate de l'expertise, au motif qu'un recours était actuellement pendant devant le Tribunal fédéral, concernant la personne de l'expert. Elle n'avait pas sollicité l'octroi de l'effet suspensif au recours déposé au Tribunal fédéral, en raison d'un refus antérieur d'une telle requête dans la même affaire, estimant que sa démarche aurait été vaine. Cependant, elle sollicitait du Tribunal de protection de ne pas "précipiter" la réalisation de l'expertise, en raison notamment de la souffrance éprouvée par les mineurs suite au placement injustifié dont ils avaient été victimes trois ans auparavant.

l) Par courrier du 25 juillet 2022, le Tribunal de protection, sous la plume de la juge B______, a rappelé à A______ que la question de l'expertise avait été tranchée, tant par la Chambre de surveillance, que par le Tribunal fédéral. Aucun fait nouveau ne justifiait de reconsidérer la problématique, A______ indiquant elle-même que l'enfant E______ était en souffrance. Le but de l'expertise était d'éclairer le Tribunal de protection sur les mesures de protection à envisager. Il incombait donc à la mère des mineurs de se conformer à son obligation de collaborer (art. 314e al. 1 CC; art. 39 al. 2 LaCC), en donnant suite aux rendez-vous qui seraient fixés par les experts dans les semaines à venir.

m) Par arrêt du 15 août 2022 (5A_313/2022), le Tribunal fédéral a rejeté, dans la mesure de sa recevabilité, le recours formé le 27 avril 2022 par A______ contre la décision du 24 mars 2022 de la Chambre de surveillance.

n) Par acte du 22 août 2022, A______ a sollicité la récusation de la juge B______ au motif, d’une part, que la lettre du 25 juillet 2022 adressée par celle-ci à son intention relevait d’une inimitié, voire d’un parti pris à son encontre, dans la mesure où elle sollicitait une expertise immédiate malgré la litispendance d’un recours devant le Tribunal fédéral contestant le choix de l’expert et que, d’autre part, la même juge avait manifesté une hostilité à son encontre, notamment en audience en automne 2019, de même qu’en 2020, lors d'une décision de refus de lever les curatelles en place.

o) Invitée à se déterminer, la juge B______ a conclu, par déterminations du 26 septembre 2022, à ce que la requête en récusation soit déclarée irrecevable, subsidiairement infondée.

p) Par déterminations du 19 octobre 2022, A______ a persisté dans sa requête, sur quoi la cause a été gardée à juger.

B.     Par ordonnance DTAE/7709/2022 du 9 novembre 2022, le collège des juges du Tribunal de protection a déclaré irrecevable la requête en récusation formée le 22 août 2022 par A______ à l’encontre de la juge B______, Présidente de la ______ème Chambre du Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant (ch. 1 du dispositif), subsidiairement l'a déclarée infondée (ch. 2), et a arrêté les frais judiciaires à 400 fr., qu’il a mis à la charge de A______ (ch. 3).

En substance, le Tribunal de protection a retenu que la demande en récusation était tardive puisqu’elle était motivée par le contenu de la lettre du 25 juillet 2022, ainsi que par des événements survenus en 2019 et 2020, dont A______ avait eu connaissance plus de dix jours avant le dépôt de la requête. Elle n’avait donc pas agi immédiatement après la connaissance d’une éventuelle cause de récusation. Le principe d’immédiateté n’ayant pas été respecté, sa requête devait être déclarée irrecevable. Subsidiairement, cette requête n’était pas fondée. Le recours au Tribunal fédéral contre la décision de la Cour de justice du 24 mars 2022 n’avait pas d’effet suspensif, de sorte que l’ordonnance d’expertise était exécutoire et qu’il incombait à la juge de la mettre en œuvre. Par ailleurs, la requête de récusation n’expliquait pas comment la juge concernée aurait pu manifester de l’hostilité à l’encontre de A______, que ce soit lors d’une audience en 2019 ou dans une décision de 2020.

C.    a) Par acte du 23 novembre 2022, A______ a formé recours contre cette ordonnance, qu’elle a reçue le 14 novembre 2022, concluant à l’annulation des chiffres 1 à 3 de son dispositif et, cela fait, à ce que sa demande de récusation à l'encontre de la juge B______ soit admise sur la base de l’art. 47f al. 1 lit. f CPC, soit une prévention sous forme d’inimitié à son égard.

En substance, dans un exposé difficilement intelligible et impossible à résumer, la recourante considère, pour l'essentiel, que la juge B______ "a fait preuve en 2019 et continue de faire preuve en automne 2022 de prévention dans le cadre de la procédure pendante parce qu'elle se méprend sur la personnalité des parties en diabolisant la recourante à la personnalité bien affirmée sans doute liée à ses origines sud-américaines et en idéalisant la personnalité de G______, en apparence posé et calme mais pourtant mu de son côté par un profond désir de vengeance envers la recourante au mépris de l'intérêt de ses enfants". Elle reproche à la juge de ne pas avoir tenu compte du courrier de l'une de ses voisines, relatant un appel téléphonique du père, ni de deux plaintes pénales déposées par les enfants et de vouloir absolument soumettre le mineur E______ à une expertise qu'il refuse, sans s'interroger sur l'intérêt supérieur de l'enfant.

La juge avait démontré "sans ambigüité" dans son courrier du 26 septembre 2022 (soit les déterminations de la juge B______ au Tribunal de protection dans le cadre de la procédure visant sa récusation) "qu’elle ne dispose plus dans tous les cas de la neutralité indispensable à la réalisation de sa mission", ce courrier permettant de considérer "qu’à compter de cette date au moins", elle n’était plus en mesure d’évaluer la situation du mineur avec suffisamment d’impartialité, raison pour laquelle le motif de récusation de l’art. 47 al. 1 lit. f CPC était réalisé. Cette correspondance établissait "une prévention" envers A______ et "un parti pris en faveur de G______" et ce, "malgré le courrier de Madame H______ faisant état de sa volonté de faire souffrir la mère de ses enfants, malgré encore la souffrance des enfants en foyer niée en première instance, malgré la situation marginale de Monsieur G______, malgré l’absence d’enquête sociale sur ce dernier encore au bénéfice de l’assistance de l’hospice général, alors qu’il est titulaire de deux masters et parle plusieurs langues, etc.".

La demande de récusation n'était "ni infondée ni tardive dans la mesure où il s'agira après l'expertise de statuer sur le sort de E______ dans le cadre de cette même procédure".

Enfin, la juge B______ avait "également passé sous silence que depuis 3 ans, Monsieur G______ ne s’est manifesté qu’une fois auprès de ses enfants en leur écrivant une brève missive alors qu’il lui était recommandé de le faire en 2020 déjà". Il était donc "indispensable qu’un nouveau regard soit porté sur cette procédure à compter du 26 septembre 2022 au moins dans l’intérêt supérieur de E______".

b) Le Tribunal de protection n’a pas souhaité faire d’observations et a persisté dans sa décision.

c) La Présidente de la Chambre C______ n’a pas pris position sur le recours.

EN DROIT

1.      1.1 La décision prise par le collège des juges du Tribunal de protection sur les demandes de récusation visant l’un de ses juges ou fonctionnaires est sujette à recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 50 al. 2 CPC; art. 13 al. 1 LaCC).

La récusation des membres des autorités de protection n’étant pas réglée par les dispositions du droit fédéral sur la procédure devant ces autorités, les dispositions du CPC sont applicables par analogie, pour autant que les cantons n’en disposent pas autrement (art. 450f CC; arrêts du Tribunal fédéral 5A_462/2016 du 1er septembre 2016, consid. 2.1; 5A_254/2014 du 2 septembre 2014 consid. 2.1).

Le recours doit être introduit devant l’instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision (art. 450f CC; art. 50 al.2 et 321 al. 1 et 2 CPC; art. 31 al. 1 let.d LaCC).

1.2 En l’espèce, le recours formé par la recourante contre le rejet de la requête en récusation qu’elle a adressée au Tribunal de protection a été déposé dans le délai prévu par la loi, de sorte qu’il est, de ce point de vue, recevable, sous réserve de ce qui suit.

2.      La recourante conclut à l’annulation du chiffre 1 du dispositif de l’ordonnance ayant déclaré irrecevable sa requête en récusation.

2.1 Le recours doit être motivé (art. 450 al. 3 CC). Il peut être formé pour violation du droit, constatation fausse ou incomplète des faits pertinents ou inopportunité de la décision (art. 450a al. 1 CC).

L'exigence de motivation implique que le recourant doit s'efforcer d'établir que la décision est entachée d'erreurs en mettant le doigt sur les failles du raisonnement. Les critiques toutes générales ne satisfont pas à ces exigences (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1; arrêt 4A_218/2017 consid. 3.1.2).

2.2 En l’espèce, la recourante, pourtant dûment assistée d’un conseil, conclut à l’annulation du chiffre 1 de l’ordonnance déclarant irrecevable sa requête en récusation pour tardiveté, mais ne consacre aucune ligne dans son recours à l’examen de cette question. Elle n’expose pas en quoi la décision attaquée serait entachée d'erreur, ni en quoi le raisonnement tenu par le Tribunal de protection serait incorrect, alors que celui-ci a exposé clairement les motifs l’ayant conduit à retenir que la requête en récusation était tardive. La recourante se contente d'affirmer que la requête n'est pas tardive puisque le Tribunal de protection devra statuer sur le sort du mineur E______ après expertise, ce qui ne constitue pas un grief envers le raisonnement tenu par le Tribunal de protection sur la question de la tardiveté de la requête de récusation, ni ne met en évidence une faille de ce raisonnement.

L’exigence de motivation du recours n’est donc pas respectée concernant cette conclusion, de sorte qu’elle est irrecevable.

Ce constat suffit à sceller le sort du recours, lequel doit être déclaré irrecevable dans son ensemble, l’irrecevabilité de la requête en récusation étant acquise.

Quoi qu’il en soit, les reproches formulés par la recourante dans son acte de recours, d'ordre général et de nature subjective, sont axés pour l'essentiel sur le contenu des déterminations sur récusation de la juge concernée du 26 septembre 2022, et sans rapport avec le contenu du courrier du 25 juillet 2022 - qui a pourtant motivé la requête de récusation - courrier qui rappelle notamment à la recourante son obligation de collaborer dans le cadre de l'expertise diligentée. Aucune trace d’inimitié ni de prévention à l’encontre de la recourante de la juge B______ ne peut être retenue, de sorte que si la requête n’avait pas été déclarée irrecevable, elle aurait été infondée.

2.3 La recourante, qui conclut à l’annulation du chiffre 3 du dispositif de l’ordonnance concernant les frais judiciaires, ne motive pas sa conclusion, laquelle est derechef irrecevable pour défaut de motivation.

2.4 Le recours est ainsi irrecevable dans son ensemble, subsidiairement infondé.

3.      En l’espèce, le recours, au vu de l’absence de motivation contre l’irrecevabilité de la requête de récusation, des motifs invoqués en vrac et de son absence totale de structure et de consistance, alors que la recourante est assistée d’un avocat, relève de l’utilisation abusive des procédures et de témérité. La Chambre de surveillance renoncera à sanctionner tant la recourante que son conseil, mais attire leur attention sur le fait qu’en cas de récidive, une amende pour téméraire plaideur pourra être prononcée.

4.      Les frais du recours, arrêtés à 800 fr., seront mis à la charge de la recourante, qui succombe (art 106 al. 1 CPC). L’avance de frais de 400 fr., d’ores et déjà versée, demeure acquise à l’Etat de Genève. La recourante sera condamnée à verser le solde des frais judiciaires, soit 400 fr., à l’Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire.

Il n’est pas alloué de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


Déclare irrecevable, subsidiairement rejette, le recours formé le 23 novembre 2022 par A______ contre l’ordonnance
DTAE/7709/2022 rendue le 9 novembre 2022 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/2070/2010.

Arrête les frais judiciaires de recours à 800 fr., les met à la charge de A______ et les compense partiellement avec l’avance de frais de 400 fr., laquelle reste acquise à l’Etat de Genève.

Condamne A______ à verser la somme de 400 fr. à l’Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à titre de solde de frais.

Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 


Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.