Skip to main content

Décisions | Chambre de surveillance

1 resultats
C/3555/2013

DAS/52/2021 du 10.03.2021 sur DTAE/829/2021 ( PAE ) , REJETE

Normes : CC.426
En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3555/2013-CS DAS/52/2021

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU MERCREDI 10 MARS 2021

 

Recours (C/3555/2013-CS) formé en date du 1er mars 2021 par Madame A______, actuellement hospitalisée à B______, Unité C______, ______, ______ (Genève), comparant en personne.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 11 mars 2021 à :

- Madame A______
p.a. B______, Unité C______
______, ______ [GE].

- Maître D______
______, _______ Genève.

- Monsieur E______
Monsieur F______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Case postale 5011, 1211 Genève 11.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

Pour information, dispositif uniquement, à :

- Direction de B______
______, ______ [GE].


EN FAIT

A.           a) A______, née le ______ 1962, de nationalité somalienne, a été hospitalisée en 2011 à B______ suite à un signalement des assistants sociaux de l'Hospice général dont elle dépendait financièrement; elle se sentait menacée par ses voisins, proférait des insultes à leur égard et sortait de son logement armée d'un couteau. Elle avait été retrouvée désorientée et sous l'emprise d'un délire de persécution.

b) En raison des difficultés de comportement et des nombreuses dettes accumulées (41'000 fr.) par la personne concernée, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) a instauré, sur mesures provisionnelles, le 9 avril 2013 une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______, puis, au fond, le 9 avril 2014, une curatelle de portée générale.

Dans le cadre de cette procédure, l'expertise psychiatrique ordonnée par le Tribunal de protection, s'est révélée difficile à réaliser, en raison du manque total de collaboration de la personne concernée, de sorte que le concours de la police a été rendu nécessaire. Le rapport déposé le 4 février 2014 par la Dre G______, médecin au Centre universitaire romand de médecine légale (ci-après: CURML), indique que A______, anosognosique de son état, souffre de troubles schizotypiques durables, soit des troubles se rapprochant de la schizophrénie, mais sans phénomènes hallucinatoires. Ces troubles touchent des personnes vivant de manière isolée, parfois dans l'errance, ayant des visions persécutoires et qui, en période de crises, peuvent se montrer agressives envers les tiers.

c) A______ a été évacuée de son logement en juin 2017 et vit depuis lors chez l'une de ses filles, H______.

d) Par courriers des 20 mai et 19 juin 2020, le Service de protection de l'adulte (ci-après: SPAd) a signalé au Tribunal de protection qu'il ne parvenait pas à entrer en contact avec A______, autrement que par l'intermédiaire de ses deux filles, lesquelles s'inquiétaient d'une péjoration de l'état de santé de leur mère.

e) Lors de l'audience fixée par le Tribunal de protection le 26 août 2020, H______ a indiqué que sa mère se sentait persécutée et refusait tout contact en dehors de sa famille proche. Elle se montrait par moment agitée et se mettait en danger. Elle était en proie à des périodes de crises durant lesquelles elle ne se nourrissait pas, restait allongée dans le noir et ceci, parfois pendant plusieurs mois. Il lui arrivait de fuguer en pyjama durant plusieurs jours; elle avait notamment été retrouvée, désorientée, à la Mosquée I______ [GE]. Elle refusait d'être photographiée, disant avoir peur "de se faire enregistrer et voler le cerveau". Elle ne bénéficiait d'aucun suivi médical.

f) Par ordonnances DTAE/5639/2020 et DTAE/5641/2020 du 31 août 2020, le Tribunal de protection a ordonné, respectivement, l'expertise psychiatrique de A______ et son placement à B______, à des fins d'expertise.

g) A______ a été hospitalisée dès le 5 novembre 2020, tout d'abord en isolement à l'Unité J______ de B______ pendant une dizaine de jours en raison de son infection au SARS-CoV-2, puis à l'Unité P______.

h) Il ressort du rapport d'expertise du 7 décembre 2020 rendu par le Dr K______, psychiatre psychothérapeute FMH, médecin agrégé responsable au CURML, que A______ souffre d'un trouble délirant persistant, nécessitant assistance et soins en milieu hospitalier, faute de quoi elle risquerait de se mettre en danger par son refus de recevoir des soins adaptés à ses troubles mentaux et à son diabète, ainsi que de mettre en danger les tiers, en raison d'une hétéro-agressivité réactionnelle à ses troubles mentaux.

i) Par ordonnance DTAE/7262/2020 du 11 décembre 2020, le Tribunal de protection a prononcé la levée de la mesure de placement à des fins d'expertise de A______ et, sur mesures provisionnelles urgentes, a prononcé son placement à des fins d'assistance et ordonné son maintien en B______. Il a invité les parties à lui faire parvenir leurs observations sur le rapport d'expertise d'ici au 20 janvier 2021 et à lui indiquer dans le même délai si elle souhaitait entendre l'expert.

j) E______ et F______, co-curateurs auprès du Service de protection de l'adulte de la personne concernée, ont informé le Tribunal de protection par courrier du 4 janvier 2021, n'avoir aucune observation à faire concernant le rapport d'expertise établi.

k) D______, curateur de représentation d'office de A______, nommé par décision du Tribunal de protection du 7 août 2020, a indiqué que le contenu de l'expertise était clair et correspondait à ses propres constations ressortant des éléments du dossier et des renseignements obtenus auprès des filles de sa protégée, compte tenu de ses tentatives infructueuses de s'entretenir avec cette dernière.

l) Durant l'hospitalisation de A______, trois décisions de traitement sans consentement ont été prises par les médecins, en date respectivement des 10 novembre 2020, 18 décembre 2020 et 18 janvier 2021. A______ n'a pas recouru contre ces décisions. Son curateur d'office a indiqué, après divers échanges avec le Tribunal de protection à ce propos, in fine par courrier du 19 février 2021 à l'attention de celui-ci qu'il ferait le point avec sa protégée, afin de savoir si cette dernière souhaitait toujours solliciter une requête de mainlevée de la mesure et, dans l'affirmative, déposerait une requête dans ce sens auprès du Tribunal de protection.

B.            Par ordonnance DTAE/829/2021 du 10 février 2021, adressée le 24 février 2021 pour notification, le Tribunal de protection a confirmé, au fond, la mesure de placement à des fins d'assistance de A______ (ch. 1 du dispositif), ordonné son maintien en B______ (ch. 2), rendu attentive l'institution de placement au fait que la compétence de libérer la personne concernée, de lui accorder des sorties temporaires ou de transférer le lieu d'exécution du placement appartenait au Tribunal de protection (ch. 3), mis à la charge de l'Etat de Genève les frais d'expertise s'élevant à 2'352 fr. 40 (ch. 4) et rappelé que la procédure était gratuite (ch. 5).

C.           a) Par acte expédié le 1er mars 2021, et reçu par la Chambre de surveillance le 4 mars 2021, A______ a recouru contre cette ordonnance qu'elle a reçue le 26 février 2021. Elle a sollicité la levée de son placement, indiquant être victime des agissements de son curateur, et l'arrêt du traitement qu'on lui donnait de force.

b) Le juge délégué de la Chambre de surveillance a tenu une audience le 9 mars 2021.

A______ a contesté être malade. Elle n'avait pas besoin d'être hospitalisée. Elle avait déjà été hospitalisée plusieurs fois contre son gré et s'était enfuie à deux reprises de l'hôpital. Elle n'avait jamais été avisée du fait qu'elle pouvait recourir contre les traitements sans consentement qui avaient été décidés par les médecins durant son hospitalisation et un médecin présent à l'audience mentait en affirmant le contraire. Elle se sentait bien avant son hospitalisation et n'avait aucunement besoin de médicaments. Ceux-ci lui procuraient de l'insomnie et de la fatigue. Elle avait demandé plusieurs fois l'arrêt des médicaments mais les médecins n'avaient pas voulu. Ils lui disaient que si elle ne les prenait pas, elle recevrait une injection de force, ce qui était arrivé à trois ou quatre reprises. Elle n'était pas au courant de ce qui s'était passé pour son appartement, tout avait été fait derrière son dos. Ses filles et elle-même avaient été utilisées.

La Dre L______, médecin à B______, a confirmé les termes de l'expertise, considérant que A______ souffrait d'une psychose paranoïde plutôt que d'un trouble délirant persistant, ces deux maladies étant toutefois dans le spectre psychotique. L'hospitalisation de la concernée était nécessaire lors de son entrée à B______ le 5 novembre 2020, tout d'abord en vue d'être expertisée, l'est demeurée tout au long de son hospitalisation, et l'est encore actuellement. Au début du traitement, A______ recevait du M______ mais le taux plasmatique n'étant pas bon, cette prescription avait été modifiée il y a une semaine par du Q______. Des tests sanguins étaient prévus dans le courant de la semaine pour évaluer si le traitement était bénéfique et dans la négative, il serait encore modifié. La concernée était toujours dans le déni, elle ne bougeait pas de sa chambre, restait assise face à un mur sans rien faire, se cachait, allait aux toilettes lumière éteinte et avait très peu de contacts avec le personnel soignant, mangeant également seule dans sa chambre. Elle semblait avoir encore beaucoup d'hallucinations. Un traitement ambulatoire n'était pas possible pour l'instant. Elle se sentait persécutée, pensait que des caméras l'observaient et n'adhérait à aucun traitement depuis dix ans, début de sa maladie. Elle avait déjà subi six hospitalisations qui s'étaient toutes terminées par des fugues. L'hospitalisation visait actuellement à améliorer le traitement mis en place, obtenir l'adhésion de la personne concernée à celui-ci ainsi que la stabilisation de son état de santé, avant de pouvoir envisager un traitement ambulatoire. Elle ne prenait pas toujours volontairement son traitement. Trois décisions de traitement sans consentement avaient dû être prises, la dernière datant du 18 janvier 2021. La possibilité de faire recours lui avait été indiquée mais elle n'avait pas souhaité en faire usage. Elle avait compris qu'elle pouvait faire recours. Les documents pour ce faire lui avaient été présentés à chaque décision prise mais elle avait refusé de les signer, souhaitant qu'on la laisse tranquille et disant qu'elle ne voulait pas voir le juge. Trois à quatre injections avaient été nécessaires depuis le début de son hospitalisation, dont une de N______, il y avait une semaine. En l'absence de traitement, A______ risquait une nouvelle décompensation, avec risques auto et hétéro-agressifs. Elle ne se nourrissait alors plus, quittait le domicile de sa fille sans savoir où elle allait, ni où elle se trouvait ensuite. Elle s'était ainsi rendue à O______ [UK] durant l'un de ses voyages pathologiques et avait été hospitalisée sur place contre son gré. Elle se montrait très agitée lorsqu'elle était en décompensation et il existait un risque pour les personnes qui l'entouraient, dès lors qu'elle se sentait persécutée et pouvait agir en conséquence.

Le représentant du Service de protection de l'adulte a indiqué que A______ avait toujours refusé de les rencontrer, de sorte que le contact passait par les filles de la concernée, avec lesquelles un lien de confiance avait été établi. Elle recevait l'argent pour leur mère, celle-ci ne voulant pas se déplacer auprès de leur service. A______ avait perdu son appartement en 2017 suite à des dettes. Il n'avait rien à ajouter concernant le recours formé.

Le curateur de représentation de A______ s'en est rapporté à justice concernant le recours. Il a exposé qu'il n'avait pas pu créer de liens de confiance avec sa protégée, laquelle avait refusé dans un premier temps de le voir. Il avait pu ensuite organiser deux rencontres avec elle durant lesquelles son discours était circulaire. Elle s'exprimait bien en français. Elle lui avait dit qu'elle ne voulait plus être hospitalisée, ni médicamentée. Il avait constaté qu'elle allait un peu mieux, ce qui devait être la résultante du nouveau traitement qu'elle recevait. Elle était très méfiante et traitait ses filles de traîtresses, alors qu'elles étaient bienveillantes. Elle n'avait jamais contesté avoir été informée de son droit de recours contre les décisions de traitement sans consentement. Elle n'avait pas été en mesure de lui fournir une copie de ces documents et prétendait qu'on les lui avait volés.

Sur quoi la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet d'un recours devant le juge compétent (art. 450 al. 1 CC). Dans le domaine du placement à des fins d'assistance, le délai de recours est de dix jours à compter de la notification de la décision entreprise (art. 450b al. 2 CC). Le recours formé contre une décision prise dans le domaine du placement à des fins d'assistance ne doit pas être motivé (art. 450e al. 1 CC).

En l'espèce, le recours a été formé par la personne concernée, dans le délai utile de dix jours (art. 72 al. 1 LaCC). Il est donc recevable à la forme.

2.             2.1 En vertu de l'art. 426 al. 1 CC, une personne peut être placée dans une institution appropriée lorsqu'en raison de troubles psychiques, d'une déficience mentale ou d'un grave état d'abandon, l'assistance ou le traitement nécessaires ne peuvent lui être fournis d'une autre manière.

La loi exige la réalisation de trois conditions cumulatives, soit une cause de placement, un besoin d'assistance ou de traitement ne pouvant être fourni autrement et l'existence d'une institution appropriée (cf. notamment DAS/67/2014 c. 2.1).

La personne concernée est libérée dès que les conditions du placement ne sont plus remplies (art. 426 al. 3 CC).

2.2 En l'espèce, le recourante a été hospitalisée le 5 novembre 2020, tout d'abord en vue d'expertise, puis ensuite, dès le 11 décembre 2020 à des fins d'assistance, compte tenu du résultat de l'expertise psychiatrique rendue.

Il est établi par la procédure et notamment par l'expertise ordonnée par le Tribunal de protection et l'audition de la Dre L______ par le juge délégué de la Chambre de surveillance, que le placement était justifié au moment où il a été prononcé, au vu du diagnostic de trouble délirant persistant posé par les experts, respectivement de psychose paranoïde retenu par le médecin entendu, et du comportement de la recourante marqué par des idées de persécution et un repli sur elle-même, assorti d'un refus de soins et d'une anosognosie totale de son état.

Tel est encore le cas actuellement. En effet, le médecin auditionné par le juge délégué a indiqué que la recourante avait besoin de recevoir une médication appropriée - laquelle venait d'être modifiée suite à l'absence de résultat du médicament initialement proposé - qui ne pouvait lui être administrée qu'en milieu hospitalier, compte tenu de son manque de compliance au traitement. Sans traitement approprié, la recourante pourrait à nouveau être victime de décompensations, durant lesquelles elle se mettait en danger, refusait de se nourrir, restait allongée dans le noir ou, au contraire, fuguait sans savoir où elle allait, désorientée et en proie à un délire de persécution, lequel était encore très présent, même en milieu hospitalier. Elle pouvait également mettre en danger les tiers durant ces fugues, agissant en fonction de ses délires de persécution. Aucun traitement ambulatoire n'était envisageable pour l'instant compte tenu de l'opposition et de l'anosognosie de la recourante.

En conséquence, au vu des troubles dont souffrent la recourante, une poursuite de son hospitalisation est donc toujours justifiée et proportionnée, afin de lui permettre de recevoir les soins dont elle a besoin, en vue de permettre une amélioration puis une stabilisation de son état, et d'obtenir une adhésion à un suivi psychiatrique et à un traitement, lui permettant ultérieurement de pouvoir recevoir des soins en ambulatoire.

S'agissant du traitement sans consentement qui a été ordonné et auquel les médecins ont eu quelquefois recours, il ressort du dossier que la recourante n'a pas contesté les différentes mesures prises dans le délai requis auprès du Tribunal de protection, lequel n'a pas rendu de décision à ce sujet, de sorte que la Chambre de céans, saisie uniquement sur recours, n'a pas compétence pour statuer sur cet aspect du dossier.

Le recours sera donc rejeté.

3.             La procédure est gratuite (art. 22 al. 4 LaCC), de sorte que les frais d'interprète en 120 fr. seront laissés à la charge de l'Etat de Genève.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 1er mars 2021 par A______ contre l'ordonnance DTAE/829/2021 rendue le 10 février 2021 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/3555/2013.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite et laisse, en conséquence, les frais d'interprète en 120 fr. à la charge de l'Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.