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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3135/2023

ATAS/880/2023 du 09.11.2023 ( LAA ) , IRRECEVABLE

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3135/2023 ATAS/880/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 9 novembre 2023

Chambre 3

 

En la cause

Monsieur A______
représenté par Maître Georges BUISSON

 

recourant

 

contre

CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS - SUVA

 

 

intimée

 


 

 

ATTENDU EN FAIT

 

Que par courrier du 14 juillet 2023, la Caisse nationale suisse en cas d’accidents (ci‑après : SUVA) a informé Monsieur A______ (ci-après : l’assuré) qu’elle mettrait un terme au versement de l’indemnité journalière et à la prise en charge des soins médicaux avec effet au 31 juillet 2023 ; que dans ce courrier, la SUVA précisait que le droit de l’assuré à d’autres prestations était en cours d’examen ;

Que par courrier du 19 septembre 2023, l’assuré a interjeté « recours » auprès de la Cour de céans contre ce qu’il a considéré être une « décision » ;

Que la SUVA a rendu, en date du 28 septembre 2023, une décision formelle reconnaissant à l’assuré – s’agissant des atteintes physiques en lien de causalité avec l’accident dont il a été victime le 3 septembre 2013 – le droit à une rente d’invalidité de 17% et à une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 10%, mais lui niant le droit à toute prestation s’agissant des troubles psychiques, dont elle a considéré qu’ils n’étaient pas en lien de causalité adéquate avec l’accident ;

Qu’invitée à se déterminer sur le « recours » du 19 septembre 2023, l’intimée, dans sa réponse du 6 octobre 2023, a fait remarquer que son courrier du 14 juillet 2023 n’était qu’un courrier informel par lequel elle informait l’assuré qu’elle suspendait provisoirement le versement des prestations, le temps de se prononcer dans le cadre d’une décision sujette à opposition sur son droit à d’autres prestations d’assurance, décision qui avait été rendue en date du 28 septembre 2023 ;

Que l’intimée a dès lors conclu à l’irrecevabilité du recours ;

Qu’en date du 11 octobre 2023, l’assuré a fait opposition à la décision du 28 septembre 2023 ;

Que par courrier du 17 octobre 2023, l’assuré a brièvement indiqué qu’il souhaitait « maintenir le recours déposé » devant la Cour de céans ;

 

CONSIDERANT EN DROIT

 

Que conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA ‑ RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20) ;

Que sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie ;

Que se pose au préalable la question de la recevabilité du recours interjeté le 19 septembre 2023 contre le courrier de l’intimée du 14 juillet 2023 ;

Que selon l’art. 49 al. 1 à 3 LPGA, l’assureur doit rendre par écrit les décisions qui portent sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou avec lesquelles l’intéressé n’est pas d’accord (al. 1) ; que si le requérant rend vraisemblable un intérêt digne d’être protégé, l’assureur rend une décision en constatation (al. 2) ; que les décisions indiquent les voies de droit ; qu’elles doivent être motivées si elles ne font pas entièrement droit aux demandes des parties ; que la notification irrégulière d’une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l’intéressé (al. 3) ;

Qu’aux termes de l’art. 51 LPGA, les prestations, créances et injonctions qui ne sont pas visées à l’art. 49 al. 1 peuvent être traitées selon une procédure simplifiée (al. 1) ; que l’intéressé peut exiger qu’une décision soit rendue (al. 2) ;

Qu’un assureur-accidents ne peut pas nier définitivement le droit à toute prestation en relation avec un accident assuré en mettant simplement fin, en procédure simplifiée, à l’octroi de prestations temporaires (indemnité journalière et traitement médical) ; que dans la mesure où des prestations durables sont en jeu, il lui appartient de rendre une décision formelle (ATF 132 V 412 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_377/2009 du 18 février 2010 consid. 4.2) ;

Que la distinction entre la procédure prévue par l’art. 49 et celle de l’art. 51 LPGA s’effectue de la manière suivante : il y a décision uniquement dans le cas où le document est qualifié de tel ou s’il contient, au moins, une indication des voies de droit ; que si une décision présente un défaut, ses conséquences seront alors examinées conformément à l’art. 49 al. 3 LPGA ; que si le courrier, dans lequel l’assureur fait valoir sa position, ne respecte pas les conditions précitées, il ne peut être qualifié de décision, de sorte que la procédure ne doit pas tendre à la notification d’une décision sur opposition mais à celle d’une décision (arrêt du Tribunal fédéral 8C_738/2007 du 26 mars 2008) ;

Que la loi ne précise pas dans quel laps de temps l’intéressé doit déclarer son désaccord avec le mode de règlement choisi par l’administration conformément à l’art. 51 al. 2 LPGA ; que, d’après la jurisprudence, on contreviendrait aux principes de l’équité et de la sécurité du droit si l’on considérait comme sans importance, du point de vue juridique, une renonciation – expresse ou tacite – à des prestations ; que l’on peut en effet attendre de la personne qui n’admet pas une certaine solution, et qui entend voir statuer sur ses droits dans un acte administratif susceptible de recours, qu’elle fasse connaître son point de vue dans un délai d’examen et de réflexion convenable (ATF 126 V 23 consid. 4b p. 24 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_377/2009 consid. 4.1) ; qu’en règle générale, ce droit s’éteint une année après que l’assureur a fait connaître sa volonté de manière simplifiée ; qu’un délai plus long entre éventuellement en considération lorsque l’assuré pouvait croire de bonne foi que l’assureur poursuivrait l’élucidation de l’affaire et n’avait pas encore pris de décision définitive ; que cette hypothèse concerne surtout l’assuré profane en droit et dépourvu de conseil juridique ; que si l’assuré ne respecte pas ce délai, ordinaire ou prolongé, il perd son droit de demander une décision formelle afin de recourir contre celle-ci, et la volonté communiquée de façon simplifiée lui est désormais opposable (ATF 134 V 145) ;

Que conformément à l’art. 52 al. 1 LPGA, les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d’opposition auprès de l’assureur qui les a rendues, à l’exception des décisions d’ordonnancement de la procédure ; que les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n’est pas ouverte sont sujettes à recours dans un délai de trente jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA) ;

Qu’en l’espèce, dans son courrier du 14 juillet 2023, l’intimée a clairement indiqué au recourant qu’elle entendait mettre un terme au versement des indemnités journalières et à la prise en charge du traitement médical avec effet au 31 juillet 2023, mais que le droit à d’éventuelles autres prestations serait examiné ;

Que ce courrier ne constitue pas une décision formelle au sens de l’art. 49 al. 1 LPGA ; qu’il n’est pas qualifié comme tel et ne contient pas l’indication des voies de droit ; qu’il s’agit donc d’une simple communication rendue conformément à la procédure simplifiée (art. 51 al. 1 LPGA) ;

Que conformément à la jurisprudence précitée, dans la mesure où elle entendait mettre un terme au versement des indemnités journalières et au paiement des soins médicaux, l’intimée aurait dû adresser au recourant une décision en bonne et due forme ; que, quand bien même la procédure ordinaire n’a pas été suivie, le courrier du 14 juillet 2023 acquiert les mêmes effets qu’une décision à l’expiration d’un délai d’un an, délai durant lequel l’assuré peut toutefois contester l’application de la procédure simplifiée et solliciter la notification d’une décision formelle ;

Que dans son recours du 19 septembre 2023, le recourant conteste le courrier de l’intimée du 14 juillet 2023 ; que même s’il ne conclut pas à la notification d’une décision formelle, son recours doit être interprété comme une demande de décision formelle sur la suppression de la prise en charge des soins médicaux et du versement des indemnités journalières, avec effet au 31 juillet 2023 ;

Que cette demande intervient dans le délai d’un an prévu par la jurisprudence ;

Qu’en l’occurrence, l’intimée a d’ores et déjà, dans l’intervalle, rendu une décision formelle statuant sur le droit à la rente et à une indemnité pour atteinte à l’intégrité, le 28 septembre 2023 ;

Que la suspension des prestations provisoires et la liquidation du cas avec examen des conditions du droit à la rente sont des questions si étroitement liées entre elles, qu'il faut partir du principe qu'il s'agit d'un seul objet du litige ; que l'art. 19 al. 1 LAA fait coïncider la suspension des prestations provisoires avec l'examen, le cas échéant la fixation, du droit à la rente, de sorte qu’il n'y a pas de place pour une pratique divergente, selon laquelle on se trouverait en présence de deux objets litigieux différents (la suspension des indemnités journalières et du traitement médical d'une part, l'examen des conditions du droit à la rente d'autre part ; ATF 144 V 354) ;

Que le recourant a d’ores et déjà contesté la décision formelle du 28 septembre 2023 par la voie régulière de l’opposition ; que l’intimée sera donc amenée à trancher le seul et unique objet du litige dans le cadre de cette procédure régulière ;

Que, partant, il y a lieu de déclarer le recours contre le courrier du 14 juillet 2023 irrecevable ;

Que pour le surplus, la procédure est gratuite.


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.        Déclare le recours irrecevable.

2.        Dit que la procédure est gratuite.

3.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le