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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2018/2022

ATAS/849/2023 du 07.11.2023 ( LAA ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2018/2022 ATAS/849/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 7 novembre 2023

Chambre 2

 

En la cause

A______

représenté par Me Michael ANDERS, avocat

 

recourant

 

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS

représentée par Me Jeanne-Marie MONNEY, avocate

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1967, de nationalité suisse, travaillait en tant que maçon pour la société B______ et était à ce titre assuré contre le risque accident auprès de la CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS (ci-après : la SUVA) lorsqu'il a chuté d'un escabeau, le 6 décembre 2017, sur son lieu de travail. Selon la description de l'accident faite par l'assuré, alors qu'il voulait descendre d'un pont roulant pour aller chercher du mortier, l'escabeau s'est dérobé et il est parti en arrière. Par réflexe, il a effectué un demi-tour et est tombé en avant.

b. L'assuré a été emmené par ambulance au service des urgences des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), où une lésion traumatique de la hanche et de la cuisse gauche, une fracture du nez et des contusions des poignets ont été diagnostiquées.

c. La SUVA a pris en charge le cas (sinistre n°27.______) et servi des indemnités journalières dès le 9 décembre 2017.

d. Traitée d'abord conservativement, la blessure à la cuisse gauche a finalement fait l'objet d'une intervention chirurgicale de réinsertion des ischio-jambiers, réalisée le 29 mars 2018 par le docteur C______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, du service de chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil moteur des HUG, une avulsion ostéo-tendineuse du tendon conjoint et du tendon semi-membraneux du membre inférieur gauche en proximal ayant été diagnostiquée à la suite d'une nouvelle chute de l'assuré ayant conduit à la désinsertion des ischio-jambiers des trois tendons, alors que seuls deux d'entre eux étaient au préalable touchés.

e. En arrêt total de travail à la suite de l'intervention chirurgicale, l'assuré a, à sa demande, repris son emploi à 50% « avec un rendement de 25% » dès le 3 septembre 2018, dans des activités de petite visserie, sur terrain non instable et sans port de charges moyennes ou lourdes. Dès le 1er janvier 2019, il a travaillé à 50% (sans diminution de rendement), puis, dès le 6 février 2019 à 60%, correspondant à une incapacité de travail attestée médicalement de 40%.

B. a. Le 25 février 2019, l'assuré a été victime d'un accident de la voie publique alors qu'il circulait en scooter, lui ayant causé des lésions à l'épaule droite.

b. La SUVA a pris en charge le cas (sinistre n° 23.97565.19.2).

c. Une imagerie par résonnance magnétique (ci-après : IRM) du 13 mars 2019 a conclu à l'absence de rupture transfixiante des tendons de la coiffe des rotateurs, à une tendinopathie insertionnelle du sous-scapulaire et à une bursite sous-acromio-detloïdienne. Une IRM ultérieure du 27 mai 2019 a pour sa part mis en évidence une rupture transfixiante de la face profonde du tendon du sous-scapulaire, associée à une subluxation médiale du tendon du long chef du biceps, à la suite de laquelle la décision a été prise d'opérer l'assuré.

d. Le 25 juin 2019, l'assuré a ainsi fait l'objet d'une arthroscopie de l'épaule droite, avec réinsertion du subscapulaire, ténodèse du long chef du biceps, débridement du sus épineux et acromioplastie, réalisée par le docteur D______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur.

C. a. Dans un rapport de consultation du 29 avril 2019, le Dr C______ a indiqué qu'il retrouvait à l'examen clinique un muscle en partie arraché à nouveau, l'assuré s'étant fait piqué par des abeilles et ayant ressenti une douleur au niveau de sa cuisse en postérieur. L'évènement montrait que la situation et la cicatrisation de la tubérosité sciatique était fragile et ne permettait pas à l'assuré de retrouver une activité professionnelle à 100% sur les chantiers. L'assuré allait reprendre la physiothérapie et un travail à 60%, selon les possibilités de son épaule.

b. Le 21 juin 2019, le docteur E______, spécialiste FMH en médecine interne générale, a délivré un nouvel arrêt de travail de 40% en faveur de l'assuré jusqu'au 31 juillet 2019 pour les suites de l'accident du membre inférieur gauche, et de 0% dès le 1er août 2019.

c. Par courrier du 28 juin 2019, la SUVA a communiqué à l'assuré qu'elle allait mettre fin, le 30 juin 2019, au paiement de l'indemnité journalière pour les suites de l'accident du 6 décembre 2017, sur la base du certificat médical du Dr E______.

d. Par courrier du 16 août 2019 à l'attention de la SUVA, le Dr C______ a indiqué que, cliniquement, une douleur se retrouvait à la palpation au niveau de la cicatrice postérieure, des difficultés lors de l'assise prolongée, ainsi qu'un manque de force évident avec la persistance d'une tuméfaction en regard de la cicatrice. Il conseillait la réalisation de tests fonctionnels isocinétiques et isométriques des ischio-jambiers afin d'évaluer quantitativement la perte de force effective au niveau du membre inférieur gauche.

e. Le 14 octobre 2019, l'assuré a été examiné par le docteur F______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur et médecin d'arrondissement de la SUVA. Dans son appréciation, le médecin a relevé que les constatations de l'épaule droite étaient cohérentes avec une chirurgie de coiffe récente. Concernant le membre inférieur, la situation lui semblait stabilisée avec une récupération globalement satisfaisante, les séquelles d'instabilité résiduelle devant pouvoir s'améliorer par un traitement physiothérapeutique. Il préconisait une évaluation par la clinique romande de réadaptation (ci-après : CRR), la reprise de l'ancien travail de maçon semblant compromise.

f. Dans leur rapport du 14 février 2020 faisant suite au séjour de l'assuré du 8 janvier au 5 février 2020, les médecins de la CRR ont relevé des douleurs à la palpation des ischio-jambiers à gauche et, s'agissant de l'épaule, des douleurs à la palpation en regard de la gouttière bicipitale et aux alentours, ainsi que des limitations des amplitudes. La participation de l'assuré aux ateliers professionnels avait démontré, qu'en fin de séjour, il était capable de travailler sur des demi-journées avec un rythme de travail légèrement diminué. Il persistait des gênes lors des gestes sollicitant le membre supérieur droit en rotation interne, en force et de façon répétée, ou lors du maintien prolongé de positions de travail au sol. La reprise progressive de son poste de travail avait été convenue et, dans le cas où elle devait échouer, une réorientation serait nécessaire. Les limitations fonctionnelles provisoires pour l'épaule droite étaient les suivantes : ports de charges répétitifs de plus de 20-25 kg, activités sollicitant le membre supérieur droit en rotation interne, en force et de façon répétée. L'incapacité de travail dans la profession de maçon-carreleur était donc entière jusqu'au 9 février 2020, puis de 50% du 10 février au 8 mars 2020, en vue d'une reprise thérapeutique.

g. À la demande du gestionnaire de la SUVA relevant que les limitations fonctionnelles énoncées ne concernaient que l'épaule, alors que le Dr C______ attestait toujours d'une incapacité de travail de 40% pour la cuisse, la CRR a établi un nouveau rapport correctif mentionnant, à titre de limitations fonctionnelles provisoires pour les ischio-jambiers gauches, la course rapide ainsi que la montée répétitive d'échafaudages et d'échelles avec des charges lourdes.

h. Dès le 1er mars 2020, l'assuré a présenté des certificats d'arrêt de travail à 50% pour son épaule.

i. Dans un rapport de consultation du 4 juin 2020, le Dr C______ a constaté une probable re-rupture du semi-tendineux, sans perte de fonction, responsable de crampes ressenties par l'assuré la nuit. Une éventuelle infiltration de botox pouvait être discutée en cas d'évènements à répétition.

j. Le 5 octobre 2020, le Dr F______ a procédé à un nouvel examen de l'assuré. Subjectivement, ce dernier était plus gêné par sa cuisse gauche, qui était en voie de dégradation, alors que du côté de l'épaule droite l'évolution était plutôt favorable, avec une récupération progressive des capacités. La situation lui semblait stable au niveau de la cuisse, seule une infiltration par botox pouvant encore être discutée. Il retenait les diagnostics de status après rupture de la coiffe des rotateurs opérée à l'été 2019 et de status après rupture partielle du tendon conjoint du biceps fémoral de la cuisse gauche, opérée le 29 mars 2018.

k. Par lettre du 22 novembre 2022, le docteur Maximilian H______, spécialiste FMH en médecine physique et réadaptation et médecin adjoint à l'unité de médecine physique et réadaptation orthopédique des HUG, a expliqué que l'injection de botox était un traitement de dernier recours sans littérature démontrant une efficacité significative, en sorte qu'il retenait plutôt en première intention la réalisation d'une nouvelle IRM, un traitement par myorelaxant ou pour des douleurs neurogènes, voire une approche de type acupuncture ou dry needling.

l. Une IRM de l'épaule du 8 décembre 2020 et une autre de la cuisse du 22 décembre 2020 n'ont pas mis en avant de signes de récidive de rupture ou de déchirure, de sorte que la poursuite des traitements conservateurs était préconisée.

m. Le 7 mai 2021, faisant suite à la demande du gestionnaire de la SUVA de réaliser un bilan final pour les cas de l'épaule droite et de la cuisse gauche, le Dr F______ a indiqué que la gêne fonctionnelle résultant de la rupture de la coiffe des rotateurs ne permettait pas à l'assuré de reprendre une activité professionnelle à 100%, de sorte que la reprise de l'activité de maçon devait être modifiée définitivement. Aucun traitement n'était plus susceptible de modifier la capacité de travail de l'assuré, de sorte que le cas était stabilisé. L'activité de maçon n'était plus exigible et les activités suivantes devaient être déconseillées : port de charges supérieures à 15 kg au-dessus de la taille avec les bras en avant, travaux répétitifs au-dessus de la tête, utilisation d'outils lourds et vibratoires nécessitant l'usage des deux mains, et travaux nécessitant une force importante de serrage avec le membre supérieur droit. Un rendement total et une pleine capacité de travail pouvaient être attendus en respectant ces limitations fonctionnelles. Quant à l'atteinte à l'intégrité, elle était évaluée à 10%, sur la base de la table n°1 de la SUVA, en application analogique d'une périarthrite scapulo-humérale, de type moyenne.

n. Par lettre du 10 mai 2021 portant la référence des deux sinistres, la SUVA, joignant les appréciations de son médecin d'arrondissement du 7 mai 2021, a informé l'assuré qu'elle mettait fin au paiement des soins médicaux et de l'indemnité journalière pour le 30 septembre 2021, au vu de la stabilisation du cas, tout en indiquant qu'elle se prononcerait ultérieurement sur le droit à d'autres prestations d'assurance.

o. Dans un avis du 2 septembre 2021, le Dr F______, s'exprimant sur les questions formulées par le gestionnaire après que l'assuré se fut enquis de l'évaluation concernant sa cuisse gauche, a précisé que l'examen clinique d'octobre 2020 confirmait l'absence de conséquences cliniques à caractère durable de ce membre, de sorte qu'il ne modifiait pas l'exigibilité retenue et l'estimation de l'atteinte à l'intégrité.

p. Dans un rapport de consultation ambulatoire de suivi du 7 octobre 2021 adressé à la SUVA, le Dr C______ a relevé que la situation, à trois ans et demi post-réinsertion des ischio-jambiers, était inchangée par rapport à son dernier courrier, avec une incapacité de travail de 0% de l'assuré à cause de sa cuisse. Ce dernier ressentait fréquemment une crampe douloureuse qui l'empêchait de continuer son travail avec un manque de force, surtout en montée. Il présentait un gap de 2-3 cm au niveau des trois tendons, provoquant une crampe à la contraction isométrique. Comme constaté précédemment, une capacité à 100% pour son travail n'était pas imaginable.

q. En réponse à ce courrier, le Dr F______ a écrit au Dr C______, le 26 octobre 2021, qu'une modification définitive de la profession de l'assuré avait été actée pour les suites de ses blessures à l'épaule et à la cuisse. Ce dernier continuait néanmoins sa profession de maçon, ce qui allait à l'encontre de la demande de modification définitive de son métier. Il ne pouvait retenir une incapacité de travail à 60% à cause de sa cuisse si l'assuré n'avait pas « modifié son activité professionnelle pour l'épaule ». Toutefois, une nouvelle évaluation serait faite si l'assuré venait à exercer une nouvelle activité. Il serait alors très difficile de faire la différence des capacités de travail pour un travail qui nécessitait l'usage des deux zones corporelles atteintes. Dans l'éventualité d'une difficulté d'assurer une activité professionnelle adaptée, il restait à disposition pour revoir la situation après déclaration de rechute du sinistre de la cuisse.

r. Le 22 novembre 2021, l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) a octroyé à l'assuré une mesure d'orientation professionnelle auprès des Établissements publics pour l'intégration, devant se dérouler du 6 décembre 2021 au 13 mars 2022. Celle-ci a été annulée, l'assuré ayant demandé son report.

s. Une nouvelle fois questionné par l'administration de la SUVA au sujet des conclusions du rapport du C______ du 7 octobre 2021, des limitations fonctionnelles induites par les deux accidents et de la capacité de travail de l'assuré exigible dans une activité adaptée, le Dr F______ a répondu, le 16 décembre 2021, qu'il ne modifiait pas ses précédentes conclusions et que l'exigibilité proposée lors de l'appréciation du 7 mai 2021 restait inchangée.

t. Par décision du 29 décembre 2021 ne contenant que le numéro de référence du sinistre de l'épaule, la SUVA a accordé à l'assuré, dès le 1er octobre 2021, une rente d'invalidité transitoire (dans l'attente des mesures de réadaptation entreprises par l'assurance-invalidité) de 12%, sa capacité de gain étant réduite à cette hauteur après comparaison des revenus de valide et d'invalide, relevant qu'il était en mesure d'exercer une activité dans différents secteurs de l'économie, en respectant les limitations fonctionnelles listées par le Dr F______ dans son appréciation 7 mai 2021. Elle lui a par ailleurs alloué une indemnité pour atteinte à l'intégrité (ci-après : IPAI) de 10%.

u. Le 1er février 2022, l'assuré, représenté par son conseil, a formé opposition à l'encontre de la décision précitée, sollicitant son annulation et à ce que lui soient octroyées une rente et une IPAI fondées sur les conséquences des accidents de 2017 et 2019. Il a relevé que la référence de la décision ne portait que sur la lésion de l'épaule droite, qu'il n'existait pas d'appréciation médicale au sujet de l'accident du 6 décembre 2017 et de ses suites, a contesté disposer d'une pleine capacité de travail sans limitations dans différents secteurs de l'économie, le bienfondé d'un refus d'abattement, ainsi que le taux d'IPAI de 10%.

v. Par décision du 19 mai 2022 mentionnant les références des deux sinistres, la SUVA a rejeté l'opposition, réfutant le fait qu'elle n'aurait pas apprécié l'atteinte à la cuisse gauche de l'assuré, au regard des évaluations redues par son médecin d'arrondissement. L'appréciation de son médecin concernant la capacité de travail de l'assuré, qui était fondée sur deux examens cliniques ainsi que sur l'analyse des pièces au dossier, était par ailleurs claire et convaincante, et non remise en doute par d'autres éléments médicaux. Quant au revenu d'invalide, il n'y avait pas lieu d'appliquer un abattement, l'assuré ayant accès à suffisamment de postes dans lesquels il pourrait pleinement utiliser sa capacité de travail existante compte tenu de ses limitations fonctionnelles. Enfin, aucun élément médical ne permettait de revenir sur l'appréciation du Dr F______ concernant l'IPAI, question qui était en premier lieu du ressort des médecins.

D. a. Par acte du 20 juin 2022, sous la plume de son conseil, l'assuré a interjeté recours à l'encontre de la décision du 19 mai 2022 devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), sollicitant son annulation et reprenant, sur le fond, les mêmes conclusions que celles formulées dans son opposition, le tout sous suite de frais et dépens. Le refus de rente signifié par la décision du 29 décembre 2021 reposait sur un dossier tronqué, car insuffisamment instruit, au vu d'absence d'évaluation de la cuisse gauche. Par ailleurs, l'appréciation médicale complémentaire du Dr F______ du 7 mai 2021 ne pouvait constituer une base claire, solide et valable pour fonder un refus de rente, le médecin d'arrondissement ayant alors répondu à la question de l'administration concernant la possibilité d'augmenter son taux d'activité en tant que maçon.

b. Par mémoire de réponse du 5 septembre 2022, l'intimée, par l'entremise d'une avocate, a conclu, sous suite de frais et dépens, au rejet du recours et à la confirmation de la décision sur opposition.

c. Dans sa réplique du 4 novembre 2022, le recourant a persisté dans ses conclusions et produit un rapport médical du 4 novembre 2022 du docteur G______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et traumatologie de l'appareil locomoteur, spécifiant que celui-là rapportait, à l'anamnèse, une faiblesse du membre inférieur gauche le limitant dans son périmètre de marche et dans les charges transportables, et qu'il conservait des douleurs à la station assise prolongée, ainsi que parfois des douleurs nocturnes et insomniantes, centrées sur la face postérieure de la cuisse gauche, proximale, dans la région de la tubérosité ischiatique. Concernant l'épaule droite, selon l'anamnèse, le recourant conservait une limitation fonctionnelle dans les amplitudes articulaires, pluridirectionnelle, et un manque de force le limitant pour le port de charges, avec, en sus, des douleurs nocturnes parfois insomniantes. Au status, les limitations de l'épaule étaient plus importantes que celles de la cuisse gauche (défaut d'amplitudes articulaires concernant l'épaule droite contre flexion diminuée et palpation douloureuse de la cuisse gauche). S'agissant de la capacité de travail du recourant, il était illusoire de penser pouvoir l'augmenter dans son métier de maçon exercé à 50%, dans un poste adapté. Si le poste actuel n'était pas adapté, les limitations fonctionnelles du recourant empêcheraient même un taux de 50%. Dans un métier sédentaire, sans charge, si le poste était adapté, le recourant pourrait probablement travailler à 60%. Concernant la diminution de rendement, le recourant ne pouvait rester assis plus de deux heures et devait alterner les positions assis/debout/marche. Il ne pouvait avoir à faire plus de 1 km à la fois et devait se restreindre à moins de 5 km par jour (professionnels et privés cumulés). Il ne pouvait avoir à travailler au-dessus des épaules et les charges devaient être limitées à 10 kg. Tous ces facteurs entraînaient une diminution de rendement et donc une adaptation du poste. Enfin, la situation d'un maintien au poste actuel était au-delà de ce que l'on pouvait espérer de mieux pour la réinsertion professionnelle du recourant, la capacité de travail et le rendement étant à ce poste les meilleurs que l'on puisse attendre dans sa situation post-traumatique. Obtenir à chercher plus serait contreproductif et entraînerait a contrario une perte de rendement et/ou une diminution du taux d'activité.

d. Le 8 novembre 2022, le recourant a versé à la procédure une attestation de son employeuse du 4 novembre 2022 expliquant le travail à 50% qu'il réalisait au sein de l'entreprise. En substance, il effectuait des tâches légères, de la petite maçonnerie, des bricolages et, en remplacement, des rendez-vous de chantier. Il effectuait des travaux ne nécessitant pas de matériaux lourds, ne portait plus de sacs de mortier, sable ou ciment. Quand le travail était compliqué, il en informait son patron et ils essayaient de trouver une solution ensemble. Malgré son handicap, le recourant restait un très bon élément, étant employé depuis environ 20 ans.

e. Le 10 janvier 2023, l'intimée a persisté dans les conclusions de son mémoire de réponse, produisant un nouveau rapport du Dr F______ du 12 décembre 2022 faisant état de ce que l'évaluation du dommage pour une rupture des ischio-jambiers ne donnait pas lieu, selon les tables de la SUVA, à une indemnité. En effet, lors de chirurgies de reconstruction de ligaments du genou, les mêmes muscles que ceux blessés dans le cas du recourant étaient utilisés pour la greffe du ligament et, de ce fait, la fonction de ces muscles disparaissait. Certains sportifs, notamment les footballeurs et les skieurs, revenaient à un très haut niveau sans leurs tendons ischio-jambiers et la fonction musculaire de ceux-ci disparaissait, sans donner lieu à une pathologie ou à un trouble fonctionnel. Dans son avis du 7 mai 2021, il avait jugé que le cas était stabilisé pour l'épaule mais également pour la cuisse, car aucun traitement n'était alors susceptible de modifier la capacité de travail, et avait fixé l'exigibilité en fonction de ces deux pathologies. Les limitations fonctionnelles pertinentes étaient celles signalées dans le rapport précité et permettaient au recourant d'exercer à plein temps et à plein rendement dans une activité les respectant. Concernant le rapport du Dr G______, ce dernier n'expliquait pas les motivations fonctionnelles qui pouvaient justifier de limiter l'activité en poste adapté à 60%.

f. Par observations du 3 mars 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2017 est entrée en vigueur la modification du 25 septembre 2015 de la LAA. Dans la mesure où les accidents concernés par la présente procédure sont survenus après cette date, le droit du recourant aux prestations d'assurance est soumis au nouveau droit (cf. al. 1 des dispositions transitoires relatives à la modification du 25 septembre 2015 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_662/2016 du 23 mai 2017 consid. 2.2). Les dispositions légales seront ainsi citées ci-après dans leur teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2017.

4.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu du fait que le 19 juin 2022 était un dimanche et que le délai s'en trouve reporté au premier jour ouvrable qui suit (cf. art. 38 al. 3 LPGA), le recours est recevable.

5.             Le litige porte sur le taux de la rente d'invalidité en faveur du recourant, étant précisé qu'il s'agit d'une rente transitoire, et celui de l'IPAI.

6.              

6.1 Selon l'art. 6 al. 1 LAA, les prestations d'assurance sont allouées en cas d'accident professionnel, d'accident non professionnel et de maladie professionnelle. Par accident, on entend toute atteinte dommageable, soudaine et involontaire, portée au corps humain par une cause extérieure extraordinaire qui compromet la santé physique, mentale ou psychique ou qui entraîne la mort (art. 4 LPGA ; ATF 142 V 219 consid. 4.3.1 et les références).

6.2 . La responsabilité de l’assureur-accidents s’étend, en principe, à toutes les conséquences dommageables qui se trouvent dans un rapport de causalité naturelle (ATF 129 V 177 consid. 3.1 et les références ; 129 V 402 consid. 4.3.1 et les références) et adéquate avec l’événement assuré (ATF 129 V 177 consid. 3.2 et la référence ; 129 V 402 consid. 2.2 et les références).

7.             L'assuré a droit au traitement médical approprié des lésions résultant de l'accident (art. 10 al. 1 LAA). S'il est totalement ou partiellement incapable de travailler (art. 6 LPGA) à la suite d’un accident, il a droit à une indemnité journalière (art. 16 al. 1 LAA). Le droit à l'indemnité journalière naît le troisième jour qui suit celui de l'accident. Il s’éteint dès que l’assuré a recouvré sa pleine capacité de travail, dès qu’une rente est versée ou dès que l’assuré décède (art. 16 al. 2 LAA).

8.              

8.1 Si l'assuré est invalide (art. 8 LPGA) à 10% au moins par suite d’un accident, il a droit à une rente d'invalidité, pour autant que l’accident soit survenu avant l’âge ordinaire de la retraite (art. 18 al. 1 LAA). Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA ; méthode ordinaire de la comparaison des revenus).

Selon l'art. 7 LPGA (dans sa teneur en vigueur dès le 1er janvier 2021), est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1) ; seules les conséquences de l'atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d'une incapacité de gain ; de plus, il n'y a incapacité de gain que si celle-ci n'est pas objectivement surmontable (al. 2).

8.2 Selon l'art. 19 al. 1 LAA, le droit à la rente prend naissance dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l'état de l'assuré et que les éventuelles mesures de réadaptation de l'assurance-invalidité ont été menées à terme. Le droit au traitement médical et aux indemnités journalières cesse dès la naissance du droit à la rente.

Dès qu'il n'y a plus lieu d'attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de santé de l'assuré et qu'aucune mesure de réadaptation de l'assurance-invalidité n'entre en considération, il appartient à l'assureur-accidents de clore le cas en mettant fin aux frais de traitement ainsi qu'aux indemnités journalières et en examinant le droit à une rente d'invalidité et à une indemnité pour atteinte à l'intégrité (ATF 134 V 109 consid. 4.1 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_39/2020 du 19 juin 2020 consid. 3.2 et les références).

8.3 Aux termes de l’art. 19 al. 3 LAA, le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur la naissance du droit aux rentes lorsque l’on ne peut plus attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de l’assuré, mais que la décision de l’assurance-invalidité quant à la réadaptation professionnelle intervient plus tard.

En application de cette disposition, le Conseil fédéral a adopté l’art. 30 de l’ordonnance sur l’assurance-accidents du 20 décembre 1982 (OLAA - RS 832.202), lequel prévoit que lorsqu’on ne peut plus attendre de la continuation du traitement médical une sensible amélioration de l’état de santé de l’assuré, mais que la décision de l’assurance-invalidité concernant la réadaptation professionnelle n’interviendra que plus tard, une rente sera provisoirement allouée dès la fin du traitement médical ; cette rente est calculée sur la base de l’incapacité de gain existant à ce moment-là. Le droit s’éteint dès la naissance du droit à une indemnité journalière de l’assurance-invalidité, ou avec la décision négative de l’AI concernant la réadaptation professionnelle ou encore avec la fixation de la rente définitive (al. 1). Il s’agit d’une rente transitoire destinée à permettre à l’assureur-accidents qui ne peut encore fixer définitivement le degré d’invalidité de l’assuré, faute de connaître le résultat des mesures de réadaptation entreprises par l’assurance-invalidité, de verser néanmoins une rente d’invalidité à l’assuré sans attendre ce résultat (ATF 116 V 246 consid. 2b et la référence). C’est donc une prestation temporaire, fixée provisoirement, et qui doit être allouée aussi bien pendant le déroulement des mesures de réadaptation de l’assurance-invalidité que pendant la période qui va de la fin du traitement médical jusqu’au moment où décision est prise quant à d’éventuelles mesures de réadaptation, cas échéant à la mise en œuvre de celles-ci (ATF 129 V 283). La décision portant sur l’allocation d’une rente transitoire doit mentionner qu’elle sera remplacée dès l’achèvement de la réadaptation ou s’il est renoncé à sa mise en œuvre. Il s’agit, en effet, d’éviter de faire naître de faux espoirs quant au montant de la rente ordinaire ou « définitive », pour reprendre la terminologie de l’art. 30 OLAA (ATF 139 V 514 consid. 2.3 et les références).

Dans l'ATF 116 V 246, le Tribunal fédéral a estimé que la rente transitoire fondée sur l'art. 30 OLAA doit être fixée d'après la méthode générale de comparaison des revenus. Toutefois, l'évaluation de l'invalidité intervient dans ce cas avant l'exécution éventuelle de mesures de réadaptation. Seule entre en considération, à cette date, l'activité qui peut raisonnablement être exigée de la part d'un assuré non encore réadapté, compte tenu de la situation équilibrée du marché du travail. Dans un arrêt du 15 octobre 2014 (8C_347/2014 consid. 4.2.3), la Haute Cour, commentant l'arrêt publié précité, a indiqué qu'elle avait admis une dérogation à la comparaison ordinaire des revenus, dans le cas d'un assuré dont on pouvait supposer, au vu des circonstances, qu'il pourrait conserver une emploi auprès de son ancien employeur grâce aux mesures de réadaptation prévues par l'assurance-invalidité, car il ne pouvait être exigé de lui qu'il change d'emploi avant la fin de ces mesures ; il fallait alors fixer provisoirement le degré d'invalidité de l'assuré en fonction de la capacité de travail auprès de l'ancien employeur ; tel n'était pas le cas dans l'affaire qui était alors soumise au Tribunal fédéral, l'assuré ayant perdu le poste qu'il occupait peu après l'accident, de sorte qu'il n'existait aucun indice d'une réintégration même approximativement aussi stable et prometteuse que celle qui était à la base de l'ATF 116 V 246. Récemment, le Tribunal fédéral a jugé que l'activité raisonnablement exigible ne correspond pas (forcément) à l'activité habituelle, à tout le moins pas dans les cas où l'ancienne activité n'est plus exigible, indépendamment de la mise en œuvre de mesures de réadaptation (arrêts du Tribunal fédéral 8C_99/2023 du 7 août 2023 consid. 4.2).

9.              

9.1 Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être évalué sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 8 al. 1 et art. 16 LPGA). En règle ordinaire, il s'agit de chiffrer aussi exactement que possible ces deux revenus et de les confronter l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité. Dans la mesure où ils ne peuvent être chiffrés exactement, ils doivent être estimés d'après les éléments connus dans le cas particulier, après quoi l'on compare entre elles les valeurs approximatives ainsi obtenues (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 137 V 334 consid. 3.3.1).

9.2 Pour procéder à la comparaison des revenus, il convient de se placer au moment de la naissance du droit à la rente ; les revenus avec et sans invalidité doivent être déterminés par rapport à un même moment et les modifications de ces revenus susceptibles d'influencer le droit à la rente survenues jusqu'au moment où la décision est rendue doivent être prises en compte (ATF 129 V 222 consid. 4.1 et les références ; 128 V 174).

9.3 Pour déterminer le revenu sans invalidité, il convient d'établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas devenu invalide. Le revenu sans invalidité doit être évalué de la manière la plus concrète possible. Partant de la présomption que l'assuré aurait continué d'exercer son activité sans la survenance de son invalidité, ce revenu se déduit en principe du salaire réalisé en dernier lieu par l'assuré avant l'atteinte à la santé, en prenant en compte également l'évolution des salaires jusqu'au moment de la naissance du droit à la rente (ATF 144 I 103 consid. 5.3 ; 139 V 28 consid. 3.3.2 et les références ; 135 V 297 consid. 5.1 et les références ; 134 V 322 consid. 4.1 et les références).

9.4 On évaluera le revenu que l'assuré pourrait encore réaliser dans une activité adaptée avant tout en fonction de la situation concrète dans laquelle il se trouve. Lorsqu'il a repris l'exercice d'une activité lucrative après la survenance de l'atteinte à la santé, il faut d'abord examiner si cette activité est stable, met pleinement en valeur sa capacité de travail résiduelle et lui procure un gain correspondant au travail effectivement fourni, sans contenir d'élément de salaire social. Si ces conditions sont réunies, on prendra en compte le revenu effectivement réalisé pour fixer le revenu d'invalide (ATF 139 V 592 consid. 2.3 et les références ; 135 V 297 consid. 5.2 et les références).

9.5 En l'absence d'un revenu effectivement réalisé – soit lorsque la personne assurée, après la survenance de l'atteinte à la santé, n'a pas repris d'activité lucrative ou alors aucune activité normalement exigible –, le revenu d'invalide peut être évalué sur la base de salaires fondés sur les données statistiques résultant de l'ESS (ATF 148 V 174 consid. 6.2 et les références ; 143 V 295 consid. 2.2 et les références).

Il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1_tirage_skill_level, à la ligne « total secteur privé » (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa). On se réfère alors à la statistique des salaires bruts standardisés, en se fondant toujours sur la médiane ou valeur centrale (ATF 126 V 75 consid. 3b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_58/2021 du 30 juin 2021 consid. 4.1.1), étant précisé que, depuis l'ESS 2012, il y a lieu d'appliquer le tableau TA1_skill_level et non pas le tableau TA1_b (ATF 142 V 178). Lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l'assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières ; tel est notamment le cas lorsqu'avant l'atteinte à la santé, l'assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pas en ligne de compte (arrêt du Tribunal fédéral 8C_205/2021 du 4 août 2021 consid. 3.2.1 et la référence). Il y a en revanche lieu de se référer à la ligne « total secteur privé » lorsque l'assuré ne peut plus raisonnablement exercer son activité habituelle et qu'il est tributaire d'un nouveau domaine d'activité pour lequel l'ensemble du marché du travail est en principe disponible (arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2021 du 9 novembre 2021 consid. 5.2.1 et les références). La valeur statistique – médiane – s'applique, en principe, à tous les assurés qui ne peuvent plus accomplir leur ancienne activité parce qu'elle est physiquement trop astreignante pour leur état de santé, mais qui conservent néanmoins une capacité de travail importante dans des travaux légers. Pour ces assurés, ce salaire statistique est suffisamment représentatif de ce qu'ils seraient en mesure de réaliser en tant qu'invalides dès lors qu'il recouvre un large éventail d'activités variées et non qualifiées (branche d'activités), n'impliquant pas de formation particulière, et compatibles avec des limitations fonctionnelles peu contraignantes (cf. arrêts du Tribunal fédéral 9C_603/2015 du 25 avril 2016 consid. 8.1 et 9C_242/2012 du 13 août 2012 consid. 3). Il convient de se référer à la version de l'ESS publiée au moment déterminant de la décision querellée (ATF 143 V 295 consid. 4 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_801/2021 du 28 juin 2022 consid. 3.6).

Dans un arrêt de principe, le Tribunal fédéral a récemment estimé qu’il n'y a pas de motif sérieux et objectif de modifier la jurisprudence selon laquelle la détermination du revenu d'invalide sur la base des valeurs statistiques se fonde en principe sur la valeur centrale, respectivement médiane, de l'ESS (ATF 148 V 174 consid. 9.2.3 et 9.2.4).

Depuis la 10e édition des ESS (ESS 2012), les emplois sont classés par l'Office fédéral de la statistique (OFS) par profession en fonction du type de travail qui est généralement effectué. L'accent est ainsi mis sur le type de tâches que la personne concernée est susceptible d'assumer en fonction de ses qualifications (niveau de ses compétences) et non plus sur les qualifications en elles-mêmes. Quatre niveaux de compétence ont été définis en fonction de neuf groupes de profession (voir tableau T17 de l'ESS 2012 p. 44) et du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l'expérience professionnelle (voir tableau TA1_skill_level de l'ESS 2012 ; ATF 142 V 178 consid. 2.5.3). Le niveau 1 est le plus bas et correspond aux tâches physiques et manuelles simples, tandis que le niveau 4 est le plus élevé et regroupe les professions qui exigent une capacité à résoudre des problèmes complexes et à prendre des décisions fondées sur un vaste ensemble de connaissances théoriques et factuelles dans un domaine spécialisé (on y trouve par exemple les directeurs/trices, les cadres de direction et les gérant[e]s, ainsi que les professions intellectuelles et scientifiques). Entre ces deux extrêmes figurent les professions dites intermédiaires (niveaux 3 et 2). Le niveau 3 implique des tâches pratiques complexes qui nécessitent un vaste ensemble de connaissances dans un domaine spécialisé (notamment les techniciens, les superviseurs, les courtiers ou encore le personnel infirmier). Le niveau 2 se réfère aux tâches pratiques telles que la vente, les soins, le traitement des données, les tâches administratives, l'utilisation de machines et d'appareils électroniques, les services de sécurité et la conduite de véhicules (arrêt du Tribunal fédéral 9C_370/2019 du 10 juillet 2019 consid. 4.1 et les références).

9.6 La mesure dans laquelle les salaires ressortant des statistiques doivent être réduits, dépend de l'ensemble des circonstances personnelles et professionnelles du cas particulier (limitations liées au handicap, âge, années de service, nationalité/catégorie d'autorisation de séjour et taux d'occupation) et résulte d'une évaluation dans les limites du pouvoir d'appréciation. Une déduction globale maximum de 25% sur le salaire statistique permet de tenir compte des différents éléments qui peuvent influencer le revenu d'une activité lucrative (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 135 V 297 consid. 5.2 ; 134 V 322 consid. 5.2 et les références). Une telle déduction ne doit pas être opérée automatiquement, mais seulement lorsqu'il existe des indices qu'en raison d'un ou de plusieurs facteurs, l'intéressé ne peut mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail sur le marché du travail qu'avec un résultat économique inférieur à la moyenne (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 146 V 16 consid. 4.1 et les références ; 126 V 75 consid. 5b/aa). Il n'y a pas lieu de procéder à des déductions distinctes pour chacun des facteurs entrant en considération ; il faut bien plutôt procéder à une évaluation globale, dans les limites du pouvoir d'appréciation, des effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret (ATF 148 V 174 consid. 6.3 et les références ; 126 V 75 consid. 5b/bb et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_608/2021 du 26 avril 2022 consid. 3.3 et les références).

À cet égard, le pouvoir d'examen de l’autorité judiciaire cantonale n'est pas limité à la violation du droit (y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation), mais s'étend également à l'opportunité de la décision administrative (« Angemessenheitskontrolle »). En ce qui concerne l'opportunité de la décision en cause, l'examen porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans un cas concret, a adoptée dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. À cet égard, le tribunal des assurances sociales ne peut pas, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l'administration ; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 et la référence).

Concernant l'abattement pour les limitations fonctionnelles, on rappellera qu'une réduction au titre du handicap dépend de la nature des limitations fonctionnelles présentées et n'entre en considération que si, sur un marché du travail équilibré, il n'y a plus un éventail suffisamment large d'activités accessibles à l'assuré (ATF 148 V 419 consid. 6 et les références).

9.7 Le salaire fondé sur les ESS doit encore être adapté à l’horaire de travail usuel de la branche, et indexé à l’année déterminante en tenant compte des valeurs spécifiques au sexe (ATF 129 V 408).

Le cas échéant, il y a lieu d'adapter le salaire statistique à l'évolution des salaires nominaux en appliquant soit le chiffre définitif de l'indice suisse des salaires nominaux publié au moment déterminant de la décision litigieuse, soit la plus récente estimation trimestrielle (cf. ATF 143 V 295 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_659/2022 du 2 mai 2023 consid. 7.2).

10.         Lorsque l'activité exercée ne met pas pleinement en valeur la capacité de travail résiduelle de l'assuré, ce dernier peut être tenu de quitter son poste de travail, voire de mettre fin à son activité indépendante au profit d'une activité plus lucrative, ou encore d'accepter un emploi le contraignant à changer de domicile, en vertu de son obligation de réduire le dommage résultant de l'invalidité (ATF 113 V 22 consid. 4 et les références ;  109 V 25 consid. 3c et les références). Un assuré doit, avant de requérir des prestations, entreprendre de son propre chef tout ce qu'on peut raisonnablement attendre de lui, pour atténuer le mieux possible les conséquences de son invalidité ; c'est pourquoi un assuré n'a pas droit à une rente lorsqu'il serait en mesure, au besoin en changeant de profession, d'obtenir un revenu excluant une invalidité ouvrant droit à une rente. La réadaptation par soi-même est un aspect de l'obligation de diminuer le dommage et prime aussi bien le droit à une rente que celui à des mesures de réadaptation. Le point de savoir si une mesure peut être exigée d'un assuré doit être examiné au regard de l'ensemble des circonstances objectives et subjectives du cas concret. Par circonstances subjectives, il faut entendre en premier lieu l'importance de la capacité résiduelle de travail ainsi que les facteurs personnels tels que l'âge, la situation professionnelle concrète ou encore l'attachement au lieu de domicile. Parmi les circonstances objectives doivent notamment être prises en compte l'existence d'un marché du travail équilibré et la durée prévisible des rapports de travail (ATF 138 I 205 consid. 3.2 et les références ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 9C_644/2015 du 3 mai 2016 consid. 4.3.1). L'effort à consentir par l'assuré est d'autant plus important que la diminution du dommage escomptée est substantielle, l'ensemble des circonstances devant être prises en considération, conformément au principe de proportionnalité, applicable de manière générale en droit des assurances sociales (ATF 122 V 377 consid. 2b/cc et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_878/2010 du 19 septembre 2011 consid. 4.2 et les références). 

11.          

11.1 Aux termes de l'art. 24 LAA, si par suite d'un accident, l'assuré souffre d'une atteinte importante et durable à son intégrité physique, mentale ou psychique, il a droit à une indemnité équitable pour atteinte à l'intégrité (al. 1). L'indemnité est fixée en même temps que la rente d'invalidité ou, si l'assuré ne peut prétendre une rente, lorsque le traitement médical est terminé (al. 2). D'après l'art. 25 LAA, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est allouée sous forme de prestation en capital (al. 1, 1ère phrase) ; elle ne doit pas excéder le montant maximum du gain annuel assuré à l'époque de l'accident et elle est échelonnée selon la gravité de l'atteinte à l'intégrité (al. 1, 2ème phrase). Elle est également versée en cas de maladie professionnelle (cf. art. 9 al. 3 LAA). Le Conseil fédéral édicte des prescriptions détaillées sur le calcul de l'indemnité (al. 2).

L'indemnité pour atteinte à l'intégrité est une forme de réparation morale pour le préjudice immatériel (douleurs, souffrances, diminution de la joie de vivre, limitation des jouissances offertes par l'existence etc.) subi par la personne atteinte, qui perdure au-delà de la phase du traitement médical et dont il y a lieu d'admettre qu'il subsistera la vie durant. Elle n'a pas pour but d'indemniser les souffrances physiques ou psychiques de l'assuré pendant le traitement, ni le tort moral subi par les proches en cas de décès. L'indemnité pour atteinte à l'intégrité se caractérise par le fait qu'elle est exclusivement fixée en fonction de facteurs médicaux objectifs, valables pour tous les assurés, et sans égard à des considérations d'ordre subjectif ou personnel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_703/2008 du 25 septembre 2009 consid. 5.1 et les références). En cela, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité se distingue de la réparation morale selon le droit civil, qui n'implique pas une atteinte durable et qui vise toutes les souffrances graves liées à une lésion corporelle (ATF 133 V 224 consid. 5.1 et les références). Contrairement à l’évaluation du tort moral, la fixation de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité peut se fonder sur des critères médicaux d’ordre général, résultant de la comparaison de séquelles similaires d’origine accidentelle, sans qu’il soit nécessaire de tenir compte des inconvénients spécifiques qu’une atteinte entraîne pour l’assuré concerné. En d’autres termes, le montant de l’indemnité pour atteinte à l’intégrité ne dépend pas des circonstances particulières du cas concret, mais d’une évaluation médico-théorique de l’atteinte physique ou mentale, abstraction faite des facteurs subjectifs (ATF 115 V 147 consid. 1 ; 113 V 218 consid. 4b et les références ; voir aussi ATF 125 II 169 consid. 2d).

11.2 Selon l’art. 36 OLAA, édicté conformément à la délégation de compétence de l’art. 25 al. 2 LAA, une atteinte à l'intégrité est réputée durable lorsqu'il est prévisible qu'elle subsistera avec au moins la même gravité pendant toute la vie (al. 1, 1ère phrase) ; elle est réputée importante lorsque l'intégrité physique ou mentale subit, indépendamment de la diminution de la capacité de gain, une altération évidente ou grave (al. 1, 2ème phrase). L’indemnité pour atteinte à l'intégrité est calculée selon les directives figurant à l'annexe 3 à l'OLAA (al. 2). En cas de concours de plusieurs atteintes à l'intégrité physique ou mentale, dues à un ou plusieurs accidents, l'indemnité pour atteinte à l'intégrité est fixée d'après l'ensemble du dommage (al. 3, 1ère phrase).

Cette disposition a été jugée conforme à la loi en tant qu'elle définit le caractère durable de l'atteinte (ATF 133 V 224 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral U 401/06 du 12 janvier 2007 consid. 2.2). Le caractère durable de l'atteinte doit être à tout le moins établi au degré de la vraisemblance prépondérante (ATF 124 V 29 consid. 4b/cc). Quant au caractère important de l'atteinte, le ch. 1 de l'annexe 3 à l'OLAA précise que les atteintes à l'intégrité qui sont inférieures à 5% selon le barème ne donnent droit à aucune indemnité. Il faut en conclure qu'une atteinte est réputée importante si elle atteint au moins ce pourcentage (Thomas FREI et Juerg P. BLEUER, Évaluation d'atteintes à l'intégrité multiples, in SUVA Medical 2012, p. 202).

Le taux d'une atteinte à l'intégrité doit être évalué exclusivement sur la base de constatations médicales (ATF 115 V 147 consid. 1 ; 113 V 218 consid. 4b ; RAMA 2004 p. 415 ; arrêt du Tribunal fédéral U 134/03 du 12 janvier 2004 consid. 5.2).

12.         Depuis le 1er janvier 2016, le montant maximum du gain assuré s’élève à CHF 148'200.- par an et CHF 406.- par jour (art. 22 al. 1 OLAA).

13.          

13.1 L’annexe 3 à l'OLAA comporte un barème – reconnu conforme à la loi et non exhaustif (ATF 124 V 29 consid. 1b et les références ; 124 V 209 consid. 4a/bb et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_745/2022 du 29 juin 2023 consid. 3.2 et la référence) – des lésions fréquentes et caractéristiques, évaluées en pour cent (ATF 124 V 209 consid. 4bb).

L'indemnité allouée pour les atteintes à l'intégrité énumérées à cette annexe est fixée, en règle générale, en pour cent du montant maximum du gain assuré (ch. 1 al. 1 de l'annexe 3). Pour les atteintes à l'intégrité spéciales ou qui ne figurent pas dans la liste, le barème est appliqué par analogie, en fonction de la gravité de l'atteinte. On procédera de même lorsque l’assuré présente simultanément plusieurs atteintes à l’intégrité physique, mentale ou psychique. Les atteintes à l’intégrité pour lesquelles un taux inférieur à 5% serait appliqué selon le barème ne donnent droit à aucune indemnité. Les atteintes à l’intégrité sont évaluées sans les moyens auxiliaires – à l’exception des moyens servant à la vision (ch. 1 al. 2 de l'annexe 3). La perte totale de l’usage d’un organe est assimilée à la perte de celui-ci. En cas de perte partielle d’un organe ou de son usage, l’indemnité pour atteinte à l’intégrité est réduite en conséquence ; toutefois aucune indemnité ne sera versée dans les cas où un taux inférieur à 5% du montant maximum du gain assuré serait appliqué (ch. 2 de l'annexe 3).

La Division médicale de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) a établi plusieurs tables d'indemnisation des atteintes à l'intégrité selon la LAA (disponibles sur www.suva.ch). Ces tables n'ont pas valeur de règles de droit et ne sauraient lier le juge. Toutefois, dans la mesure où il s'agit de valeurs indicatives, destinées à assurer autant que faire se peut l'égalité de traitement entre les assurés, elles sont compatibles avec l'annexe 3 à l'OLAA (ATF 132 II 117 consid. 2.2.3 ; 124 V 209 consid. 4a/cc ; 116 V 156 consid. 3a).

14.          

14.1 La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie, l'accident, l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité physique ou mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour pouvoir établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou le juge a besoin de documents que le médecin doit lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 132 V 93 consid. 4 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid 5.1).

14.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre (ATF 143 V 124 consid. 2.2.2). L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux (ATF 125 V 351 consid. 3b).

14.3 Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bienfondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

Lorsqu'un cas d'assurance est réglé sans avoir recours à une expertise dans une procédure au sens de l'art. 44 LPGA, l'appréciation des preuves est soumise à des exigences sévères : s'il existe un doute même minime sur la fiabilité et la validité des constatations d'un médecin de l'assurance, il y a lieu de procéder à des investigations complémentaires (ATF 145 V 97 consid. 8.5 et les références ; 142 V 58 consid. 5.1 et les références ; 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.4 et les références). En effet, si la jurisprudence a reconnu la valeur probante des rapports médicaux des médecins-conseils, elle a souligné qu'ils n'avaient pas la même force probante qu'une expertise judiciaire ou une expertise mise en œuvre par un assureur social dans une procédure selon l'art. 44 LPGA (ATF 135 V 465 consid. 4.4 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_691/2021 du 24 février 2022 consid. 3.4).

Dans une procédure portant sur l’octroi ou le refus de prestations d’assurances sociales, lorsqu’une décision administrative s’appuie exclusivement sur l’appréciation d’un médecin interne à l’assureur social et que l’avis d’un médecin traitant ou d’un expert privé auquel on peut également attribuer un caractère probant laisse subsister des doutes mêmes faibles quant à la fiabilité et la pertinence de cette appréciation, la cause ne saurait être tranchée en se fondant sur l’un ou sur l’autre de ces avis et il y a lieu de mettre en œuvre une expertise par un médecin indépendant selon la procédure de l’art. 44 LPGA ou une expertise judiciaire (ATF 139 V 225 consid. 5.2 et les références ; 135 V 465 consid. 4.6).

14.4 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 135 V 465 consid. 4.5 et les références ; 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52 ; 122 V 157 consid.  1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

15.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6. 1 et la référence).

16.         En l'espèce, le recourant sollicite, en premier lieu, l'annulation de la décision du 19 mai 2022, au motif qu'elle ne porterait que sur les suites de l'accident du 25 février 2019 (lésions de l'épaule droite) et ne contiendrait pas d'évaluation de sa cuisse gauche, atteinte lors de l'accident du 6 décembre 2017.

Une telle opinion ne saurait être suivie.

Certes, certains éléments du dossier créent une confusion quant aux lésions analysées, faisant l'objet de la décision de rente et d'IPAI. En premier lieu, la décision du 29 décembre 2021 ne portait que le numéro de référence du sinistre concernant l'épaule du recourant. De plus, lors du séjour du recourant au sein de la CRR, l'attention des évaluateurs a plus porté sur l'état de l'épaule que de la cuisse, (cf. notamment la consultation orthopédique du 31 janvier 2021 ne mentionnant que l'atteinte à l'épaule droite), et la première lettre de sortie ne contenait pas de limitations fonctionnelles afférentes à la cuisse.

Cependant, le fait que l'intimée ait mentionné un seul numéro de sinistre sur sa décision initiale (tandis que les deux références sont indiquées dans la décision sur opposition) et que la décision en question ainsi que l'opposition formulée par le recourant ne se retrouvent que dans le dossier afférent à ce membre résulte, selon toute vraisemblance, d'une erreur administrative, liée au fait que l'intimée avait cessé de verser des indemnités journalières pour la cuisse gauche et continuait d'en verser pour l'épaule droite après le 30 juin 2019.

En tout état, seul un examen au fond des mesures d'instruction menées par l'intimée permet de déterminer si le membre inférieur gauche du recourant a bien été pris en considération. À cet égard, il sied de constater qu'à la demande du gestionnaire des dossiers, la CRR a répondu qu'elle avait bien examiné les troubles des ischio-jambiers (cf. notice téléphonique du 19 février 2020) et a corrigé en ce sens sa lettre de sortie, mentionnant directement des limitations fonctionnelles pour ce membre (course rapide et montée de manière répétitive des échafaudages et/ou d'échelles avec des charges lourdes). Quant au Dr F______, il a examiné personnellement le recourant à deux occasions. La première évaluation du 14 octobre 2019 porte la référence des deux sinistres litigieux, contient un résumé des pièces afférentes aux deux accidents, et les constatations cliniques et diagnostics posés concernent les deux membres. Il en va de même de l'évaluation ultérieure du 5 octobre 2020. Les deux évaluations précisent en outre que la situation semble stabilisée pour la cuisse gauche, et celle du 5 octobre 2020 propose de réaliser une injection de botox si les médecins traitants du recourant l'estiment pertinent (ce qu'envisageait déjà le Dr C______ [cf. rapport de consultation du 4 juin 2020] et qui a été jugé comme un traitement de dernier recours par le Dr H______ dans sa lettre du 22 novembre 2020, sans littérature démontrant une efficacité significative).

Quant à l'appréciation médicale du 7 mai 2021 du Dr F______, elle contient à nouveau les références des deux sinistres et fait suite à la demande du gestionnaire de réaliser un bilan final pour les deux cas, étant précisé que ce dernier mentionnait que la situation apparaissait stabilisée en ce qui concernait la cuisse gauche, conformément à une discussion téléphonique échangée le 25 février 2021 avec le recourant, au cours de laquelle celui-ci avait expliqué que sa jambe ne connaissait plus d'évolution et qu'il n'existait aucune proposition thérapeutique, malgré qu'il conservait des douleurs, notamment à la marche rapide et lors de la montée d'escaliers. Certes, le rapport du 7 mai 2021 ne liste pas les pièces médicales concernant la cuisse, postérieures à l'examen du 5 octobre 2020, et l'appréciation du Dr F______ ne mentionne que l'épaule droite. Cependant, compte tenu de la réponse de ce médecin du 2 septembre 2021, aux termes de laquelle l'examen clinique du 5 octobre 2020 confirmait l'absence de conséquences cliniques à caractère durable de la cuisse gauche, de sorte qu'aucune modification de l'exigibilité ou de l'IPAI n'était à retenir, et compte tenu du fait que cet examen du 5 octobre 2020 ne démontrait globalement pas de douleurs à la mobilité du membre inférieur gauche, l'on peut considérer que le médecin d'arrondissement n'a pas fait état, le 7 mai 2021, des dernières pièces et de ses réflexions concernant ce membre car il n'estimait pas celles-ci de nature à modifier ses conclusions. Par ailleurs, il n'apparaît pas que les deux pièces médicales postérieures à l'évaluation du 5 octobre 2020 soient en l'occurrence décisives, puisque l'IRM du 22 décembre 2020 conclut à l'absence de signe de récidive de déchirure et le rapport du Dr C______ du 19 février 2021 confirme une bonne cicatrisation de la réinsertion des ischio-jambiers et préconise la poursuite du traitement conservateur, compte tenu de la persistance des douleurs ressenties par le recourant.

De plus, il sied de constater que dans l'évaluation de l'atteinte à l'intégrité du 7 mai 2021, le Dr F______ mentionne expressément le status après rupture des ischio-jambiers de la cuisse gauche, opérés en 2018. Il en découle qu'il avait cette atteinte en tête lorsqu'il s'est, le même jour, prononcé sur la capacité de travail. Le fait qu'il n'ait pas conclu à l'octroi d'une IPAI pour l'atteinte de ce membre signifie uniquement qu'il n'en jugeait pas les conditions remplies, et non, comme le soutient le recourant, que l'atteinte n'a pas été investiguée.

Le recourant voit également dans la lettre du Dr F______ du 26 octobre 2021 à l'intention du Dr C______ la confirmation de ce que l'intimée n'aurait pas investigué l'état de sa cuisse, en ce que celui-là a affirmé qu'il ne pouvait pas retenir une incapacité de travail à cause de ce membre si le recourant n'avait pas modifié son activité professionnelle pour respecter les épargnes de l'épaule, mais qu'une nouvelle évaluation serait faite en cas de changement de profession. Une telle déduction ne peut néanmoins être tirée du courrier précité. En effet, dans le paragraphe qui précède celui en cause, le médecin d'arrondissement a relevé qu'en raison des suites des accidents concernant l'épaule et la cuisse, il avait acté de la nécessité d'un changement définitif de profession, alors que le recourant continuait son activité de maçon. Le paragraphe litigieux, dans lequel le Dr F______ souligne par ailleurs qu'il sera très difficile de faire la différence des capacités de travail pour un travail autre que celui de maçon nécessitant l'usage des deux zones corporelles atteintes, vise ainsi à expliquer que toute activité physique qui ne respecterait pas les limitations fonctionnelles induites tant par l'épaule que par la cuisse était proscrite.

Une nouvelle fois interrogé par l'administration en relation avec le rapport du Dr C______ du 7 octobre 2021, le Dr F______ a par ailleurs confirmé ses précédentes conclusions (cf. réponse du 16 décembre 2021).

Par conséquent, si l'on peut reprocher à l'intimée d'avoir créé une confusion dans la manière avec laquelle elle a traité les deux dossiers, un examen sur le fond de ceux-ci et du contenu des évaluations du médecin d'arrondissement ne permet pas de retenir que l'état de la cuisse gauche du recourant n'a pas été analysé.

Autres sont les questions de savoir si l'appréciation de l'intimée à cet égard est convaincante, et d'en tirer les conclusions en terme de capacité de travail dans une activité adaptée et du taux d'IPAI, ce qui sera examiné ci-après.

17.         Dans un second moyen, le recourant conteste qu'il dispose d'une pleine capacité de travail dans une activité adaptée et relève que l'appréciation du 7 mai 2021 du Dr F______ a listé ses limitations fonctionnelles en réponse à la question du gestionnaire de savoir si le taux d'activité dans le métier de maçon pouvait être augmenté et en mentionnant uniquement des « activités à déconseiller », ce qui était insuffisant pour constituer une base valable de refus de rente.

Le grief est infondé. Si le Dr F______ a certes listé les limitations fonctionnelles du recourant sous le point deux de son appréciation, et que la deuxième question de l'administration portait sur la possibilité d'augmenter le taux d'activité dans la profession habituelle, et qu'il a parlé d'« activités à déconseiller », il n'en demeure pas moins qu'il s'est prononcé sur les limitations fonctionnelles. Peu importe si l'ordre des réponses du médecin d'arrondissement ne respecte pas strictement le canevas posé par l'administration, l'essentiel étant que les point litigieux et déterminants aient été abordés. Or, tel est le cas en l'espèce, ce d'autant plus que la réponse à la troisième question de l'administration (concernant les activités et tâches que le recourant peut encore exercer compte tenu de sa capacité fonctionnelle résiduelle en termes de temps et de rendement) se réfère aux restrictions précédemment notées et ajoute au surplus que l'on peut s'attendre à un rendement total et à une pleine capacité de travail si ces limitations sont respectées.

18.         Il convient à présent de déterminer si l'intimée s'est valablement fondée sur les évaluations du Dr F______ pour fixer le droit à la rente et à l'IPAI du recourant.

18.1 Sur la forme, les conclusions du Dr F______ sont conformes aux exigences dégagées par la jurisprudence. Ce médecin a en effet rédigé ses conclusions, le 7 mai 2021, après avoir pris connaissance du dossier médical du recourant, incluant les examens d’imagerie, étant relevé que l'absence de mention du rapport du Dr C______ du 19 février 2021 et de l'IRM du 22 décembre 2020 ne signifie pas encore que ces pièces – qui figurent au dossier du recourant – n'ont pas été consultées par le médecin d'arrondissement ; comme vu supra (cf. consid. 16), elles ne contiennent en tout état aucun élément permettant de modifier les conclusions du médecin d'arrondissement. Le Dr F______ a au surplus, le 14 octobre 2019 et le 5 octobre 2020, interrogé le recourant sur son anamnèse, a rapporté ses plaintes et a procédé à deux examens cliniques complets avant de poser ses diagnostics, d’établir les limitations fonctionnelles du recourant, de se prononcer sur sa capacité de travail et sur l'atteinte à l'intégrité.

18.2 Concernant l'épaule droite, les conclusions du Dr F______ rejoignent par ailleurs pour l'essentiel celles provisoirement dressées par la CRR et, au jour du prononcé de la décision de rente et d'IPAI, n'étaient contredites par aucun élément médical.

Concernant la cuisse du recourant, le fait que le Dr C______ relève, dans son rapport du 7 octobre 2021, qu'une activité à 100% n'est pas imaginable, ne s'oppose pas aux conclusions du médecin d'arrondissement. En effet, il apparaît que ce médecin traitant se réfère à l'activité habituelle du recourant, mentionnant expressément que la présence de crampes douloureuses empêche le recourant de continuer son travail, avec un manque de force et des difficultés en montée. Au demeurant, le Dr C______ ne fournit aucune explication des raisons pour lesquelles l'incapacité de travail du recourant serait de 60% à cause de sa cuisse, alors qu'il délivrait jusqu'alors des arrêts de travail de 40% pour ce membre.

Qui plus est, même si l'on peut regretter que le Dr F______ n'ait pas expressément dit qu'il excluait des limitations fonctionnelles pour la cuisse gauche ou précisé celles qu'il aurait jugées pertinentes – doute qu'il n'a pas dissipé dans la suite de ses écritures –, il ressort de l'évaluation de la CRR (qui retient des limitations dans la course rapide et la montée de manière répétitive d'échafaudages et/ou d'échelles avec des charges lourdes), mais également des constatations cliniques du Dr F______ que le recourant n'a pas de limitations fonctionnelles du membre inférieur gauche dans une activité physiquement peu astreignante (il est relevé dans l'appréciation du 5 octobre 2020 dudit médecin d'arrondissement que le recourant peut marcher correctement et que la mobilité ne déclenche globalement pas de douleurs, alors que dans l'évaluation du 14 octobre 2019 la récupération est jugée globalement satisfaisante, avec quelques séquelles d'instabilité qui devraient pouvoir s'améliorer avec de la physiothérapie). Les déclarations du recourant au gestionnaire de dossier semblent en outre confirmer l'absence de limitations autres que dans une activité physique, ce dernier ne rapportant que des difficultés à la marche rapide et lors de montées d'escaliers (cf. notice de l'entretien téléphonique du 25 février 2021). Même s'il est vrai que les notes de suite antérieures du Dr C______ de janvier 2021 et le rapport du 16 août 2019 de ce médecin mentionnent des douleurs à la position assise, de telles douleurs ne sont par la suite plus rapportées, que ce soit par le recourant lui-même ou ses médecins, notamment pas dans le rapport du Dr C______ du 7 octobre 2021 qui décrit des limitations uniquement dans l'activité habituelle.

Par conséquent, l'intimée était fondée à rendre une décision de rente et d'IPAI sur la base des conclusions de son médecin d'arrondissement.

18.3 Reste à examiner si le rapport du Dr G______ du 4 novembre 2022 permet de jeter un doute sur la valeur probante des constatations du Dr F______.

À titre liminaire, il sied de rappeler que, de jurisprudence constante, le juge apprécie en règle générale la légalité des décisions entreprises d'après l'état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 132 V 215 consid. 3.1.1). Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent en principe faire l'objet d'une nouvelle décision administrative (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 ; 130 V 130 consid. 2.1). Même s'il a été rendu postérieurement à la date déterminante, un rapport médical doit cependant être pris en considération, dans la mesure où il a trait à la situation antérieure à cette date (cf. ATF 99 V 98 consid. 4 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_259/2018 du 25 juillet 2018 consid. 4.2).

En application des principes qui précèdent, il n'y a pas de raison d'écarter le rapport du Dr G______, celui-ci décrivant la situation du recourant sans qu'un élément de modification de son état de santé postérieurement à la décision entreprise ne soit relevé.

Concernant la cuisse gauche, le Dr G______ relate, à l'anamnèse, une limitation du périmètre de marche et dans les charges transportables, ainsi que des douleurs à la station assise prolongée et parfois des douleurs nocturnes insomniantes. Au status, il retrouve des amplitudes normales, si ce n'est en flexion, des douleurs à la palpation, ainsi qu'une trophicité du tendon conjoint des ischio-jambiers moindre.

Concernant l'épaule droite, l'anamnèse dressée par le Dr G______ fait état de limitations dans les amplitudes articulaires, d'un manque de force limitant le port de charges et de douleurs nocturnes. Au status, les limitations de l'épaule sont décrites comme plus importantes que celles de de la cuisse.

L'on constate par ailleurs que les diagnostics posés par les Drs F______ et G______ se rejoignent, mais que leur analyse de la capacité de travail du recourant diverge, le second rapportant que dans un métier sédentaire, sans charges, le recourant pourrait probablement travailler à 60% si le poste était adapté. À ce propos, la chambre de céans observe que les restrictions mentionnées par le Dr G______ sous la rubrique « diminution de rendement du patient » sont en réalité des limitations fonctionnelles (impossibilité de rester assis plus de deux heures, alternance des positions assis/debout/marche, pas de marche de plus de 1 km à la fois et supérieure à 5 km dans la journée, pas de travail au-dessus des épaules et charges limitées à 10 kg). Contrairement à l'avis de ce médecin, dans un poste adapté respectant ces limitations, on ne discerne pas quels motifs permettraient de retenir que le recourant aurait une diminution de rendement. Il n'est par exemple pas indiqué que le recourant devrait si fréquemment réaliser des pauses pour changer de positions que son rendement en serait affecté.

Pour ces motifs, la chambre de céans n'est pas convaincue par l'évaluation de la capacité de travail du recourant dans une activité adaptée faite par le Dr G______, ce d'autant plus que ce dernier n'est pas catégorique quant au taux retenu et que sa conclusion, peu motivée, semble plus guidée par des considérations afférentes à l'opportunité, pour le recourant, de conserver son emploi auprès de son employeuse que fondée sur une analyse médico-théorique (cf. affirmation selon laquelle la situation actuelle du recourant est au-delà de ce que l'on pouvait attendre de mieux pour sa réinsertion professionnelle et que, s'il pouvait être maintenu à ce poste, la capacité de travail et le rendement seraient les meilleurs que l'on puisse attendre dans la situation post-traumatique, de sorte que chercher à obtenir plus serait contreproductif). Il n'est en particulier pas convaincant que le Dr G______ retienne qu'à son poste actuel le recourant a les meilleurs taux de capacité de travail et de rendement, alors qu'il y est actif à 50% et qu'il pourrait, selon l'opinion du même médecin, travailler à 60% dans une activité adaptée.

18.4 Du reste, il sied de rappeler qu'en cas d'incapacité de travail de longue durée, l'activité qui peut être exigée d'un assuré peut aussi relever d'une autre profession ou d'un autre domaine d'activité (art. 6 LPGA) et que l'évaluation de l'incapacité de gain se fait en fonction de la diminution des possibilités de gain sur le marché équilibré du travail, ce qui implique, en vertu du principe de l'obligation diminuer le dommage, que la personne assurée accepte un changement de profession (cf. consid. 10 supra ; Margrit MOSER-SZELESS in Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n. 18 ad art. 7 LPGA).

En définitive, il ressort des rapports médicaux de la CRR et du Dr G______ que les limitations induites par l'état des ischio-jambiers empêchent des activités physiques, voire nécessitent une alternance des positions (cf. impossibilité de rester assis plus de deux heures, alternance des positions assis/debout/marche, pas de marche de plus de 1 km à la fois et supérieure à 5 km dans la journée selon le Dr G______ et pas de course rapide et de montée répétitive d'échafaudages et d'échelles avec des charges lourdes selon la CRR). Or, le marché équilibré du travail offre la possibilité d'exercer des activités légères ou alternées (arrêts du Tribunal fédéral 8C_391/2014 du 9 juillet 2014 consid. 4 ; 8C_606/2012 du 3 décembre 2012 consid. 3.5 ; 8C_299/2010 du 23 juillet 2010 consid. 4.3 [volet AI] et 8C_300/2010 du 23 juillet 2010 consid. 4.2 [volet AA] ; I 761/01 du 18 octobre 2002 consid. 2.5), de sorte que, même à tenir compte de limitations fonctionnelles pour les atteintes à la cuisse gauche du recourant telles que décrites par le Dr G______, celles-ci ne sont pas de nature à modifier la conclusion du Dr F______ quant à sa capacité de travail.

Il convient par ailleurs de souligner que le Dr E______, médecin-traitant du recourant, avait levé les arrêts de travail délivrés pour le membre inférieur gauche dès le 1er août 2019.

18.5 Ainsi, le taux de capacité de travail du recourant dans une activité adaptée déterminé par l'intimée (100% sans diminution de rendement) apparaît conforme au droit.

19.         Il convient à présent de déterminer si le calcul de l'invalidité opéré par l'intimée est correct.

19.1 À cet égard, il sied de rappeler que la rente allouée par l'intimée est une rente transitoire de l'assurance-accident, au sens de l'art. 30 OLAA. Par conséquent, il est nécessaire de déterminer de quelle manière doit être appliquée la méthode générale de comparaison des revenus, en particulier de dire si l'invalidité doit être fixée sur la base de l'incapacité de travail dans l'ancienne profession. La question paraît pertinente en l'occurrence puisque le recourant a maintenu une activité auprès de son ancienne employeuse, avec un cahier des charges modifié (cf. attestation de l'employeuse du 4 novembre 2022).

Malgré la continuation d'une activité auprès de l'ancienne employeuse, il n'apparaît pas justifié de s'éloigner de la méthode générale de comparaison des revenus, dans la mesure où il ne résulte pas du dossier – et le recourant ne l'allègue pas – que les mesures de réadaptation devant être mises en place par l'OAI lui permettront de conserver son emploi auprès de son employeuse. L'OAI a en effet accordé une mesure d'orientation professionnelle en faveur du recourant, qui a été reportée à sa demande, et dont on ignore si elle a aujourd'hui été réalisée.

Quoi qu'il en soit, l'orientation professionnelle, au sens de l'art. 15 al. 2 de la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20) est une mesure de réadaptation d'ordre professionnel qui doit permettre aux personnes assurées qui ont déjà achevé une formation ou qui possèdent une longue expérience professionnelle de bénéficier d'un examen approfondi de professions possibles (Circulaire sur les mesures de réadaptation professionnelle de l’AI (CMRPr) de l'office fédéral des assurances sociales, état au 1er janvier 2023, n° 1002). L'objectif de la mesure est que les personnes assurées identifient des activités professionnelles qui correspondent à leur âge, leur niveau de développement, leurs aptitudes et leurs intérêts, et qu’elles sont en mesure de suivre (CMRPr, p. 95 ab initio). Cette mesure vise donc à ce que l'assuré soit en mesure de se déterminer au mieux dans le choix d'une nouvelle profession, et ne vise pas à sa réintégration auprès de l'ancien employeur. Il ne résulte pas non plus de l'attestation de l'employeuse du 4 novembre 2022 que le maintien du poste du recourant soit conditionné au succès des mesures de réadaptation et on peut au contraire conclure de cette attestation que celle-ci souhaite continuer d'offrir du travail à son employé en raison des longs rapports de service l'unissant à ce dernier et de ses compétences, malgré son handicap.

19.2 Dans son recours, le recourant ne soutient plus expressément que le revenu avec invalidité devrait faire l'objet d'un abattement, grief qu'il avait soulevé dans son opposition. Cependant, le juge applique le droit d’office (Jean METRAL in Commentaire romand, Loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, n. 74 ad. art. 61 LPGA), et il n’est pas lié par les conclusions des parties (art. 61 let. d LPGA). Le point de savoir s'il y a lieu de procéder à un abattement sur le salaire statistique en raison de circonstances particulières (liées au handicap de la personne ou à d'autres facteurs) est par ailleurs une question de droit (ATF 142 V 178 consid. 2.5.9 ; 137 V 71 consid. 5.1). Il y donc lieu de vérifier si c'est à juste titre qu'aucun abattement n'a été accordé par l'intimée.

19.2.1 De jurisprudence constante, un abattement n'entre en considération que si, dans un marché du travail équilibré, il n'y a plus un éventail suffisamment large d'activités accessibles à l'assuré (arrêts du Tribunal fédéral 8C_659/2021 du 17 février 2022 consid. 4.3.1 ; 8C_122/2019 du 10 septembre 2019 consid. 4.3.1.4 ; 8C 174/2019 du 9 juillet 2019 consid. 5.2.2 et les arrêts cités). De plus, au regard des activités physiques ou manuelles simples que recouvrent les secteurs de la production et des services, un nombre suffisant d'entre elles correspondent à des travaux légers ne nécessitant pas le port régulier de charges ou de mouvement répétitif de flexion-extension, comme en particulier les activités de contrôle et de surveillance (8C_122/2019 du 10 septembre 2019 consid. 4.3.1.4).

S'agissant d'atteintes au membre inférieur, dans un cas où la personne assurée devait alterner les positions assises et debout, éviter le port de charges supérieures à 10-15 kg de manière répétée, ne pas monter sur des échelles et ne pas se déplacer de manière prolongée, surtout en terrain irrégulier, le Tribunal fédéral a annulé le jugement cantonal ayant accordé un abattement de 15%, relevant que de telles limitations fonctionnelles n'étaient pas susceptibles d'influencer les perspectives salariales, au regard des activités physiques ou manuelles simples que recouvrent les secteurs de la production et des services (arrêt du Tribunal fédéral 8C_659/2021 du 17 février 2022 consid. 4). Dans un autre cas où la personne assurée se déplaçait en cannes anglaises, devait impérativement travailler en position assise avec la jambe droite allongée et ne pouvait transporter aucune charge, même minime, notre Haute Cour a confirmé un abattement de 10% (arrêt du Tribunal fédéral 8C_800/2015 du 7 juillet 2016 consid. 3.4).

19.2.2 En l'occurrence, les limitations fonctionnelles du recourant, même en tenant compte de celles de la cuisse gauche et de celles listées par le Dr G______, sont les suivantes : s'agissant de l'épaule droite, pas de port au-dessus de la taille avec les bras en avant de charges supérieures à 15 kg (respectivement 10 kg selon le Dr G______), pas d'activité répétitive au-dessus de la tête, pas d'utilisation d'outils lourds et/ou vibratoires nécessitant d'être maniés avec les deux mains, pas de travaux nécessitant une force importante de serrage et, s'agissant de la cuisse gauche, pas de course rapide et montée répétitive d'échafaudages et/ou échelles avec des charges lourdes (selon la CRR), respectivement, pas de position assise plus de deux heures, alternance des positions assis/debout/marche, pas de trajet de plus de 1 km à la fois et de plus de 5 km par jour (selon le Dr G______).

De telles limitations sont compatibles avec le marché équilibré du travail qui propose suffisamment de postes légers, permettant l'alternance des positions, et ne nécessitant pas de déplacements. Le cas n'apparaît en particulier pas similaire à celui de la personne assurée devant se déplacer avec des cannes anglaises et devant travailler avec la jambe étendue, qui avait justifié un abattement de 10%.

19.3 Au surplus, le reste du calcul de l'invalidité du recourant opéré par l'intimée doit être approuvé.

L'activité lucrative que celui-ci a reprise auprès de son ancienne employeuse, pour autant qu'elle soit réellement adaptée à ses limitations fonctionnelles, ne met en effet pas pleinement à profit sa capacité de travail résiduelle car elle n'est exercée qu'à 50%, de sorte que le revenu avec invalidité doit bel et bien être fondé sur les statistiques de l'ESS.

Par ailleurs, l'intimée a appliqué les bonnes données statistiques (tableau TA1_tirage_skill_level pour l'année 2018, celui de l'année 2020 n'ayant pas encore été publié lors du prononcé de la décision litigieuse, niveau de compétence 1), a procédé à une correcte indexation de ce salaire jusqu'à l'année 2021 et tenu compte de l'horaire normal de travail.

20.         Enfin, le recourant conteste le taux d'IPAI qui lui a été accordé (10%).

Il ne fournit cependant aucune pièce médicale à l'appui de sa contestation et, sur une question essentiellement médicale, il n'y a aucune raison de s'éloigner de l'appréciation du médecin d'arrondissement, étant relevé que, comme déjà vu (cf. consid. 16), l'argument du recourant selon lequel ce médecin aurait omis la lésion des ischio-jambiers dans le cadre de l'analyse de l'IPAI est infondé.

Au demeurant, le complément d'information fourni par le Dr F______ dans son appréciation médicale du 12 décembre 2022 expliquant pour quelles raisons l'atteinte au membre inférieur gauche n'est pas importante apparaît convaincante. Il sied en outre de souligner qu'une atteinte aux ischio-jambiers ne donne pas droit, ni selon l'annexe 3 de l'OLAA, ni selon la table 2 de la SUVA, à une indemnité.

Quant à l'évaluation de l'atteinte à l'épaule droite, au vu du type d'atteinte durable dont souffre le recourant, il n'y a pas non plus de motifs de s'éloigner de l'appréciation du Dr F______. Il convient donc d'appliquer par analogie l'indemnité prévue en cas de périarthrite scapulo-humérale moyenne, laquelle se monte effectivement à 10% selon la table 1 de la SUVA.

Le grief est ainsi infondé.

21.         Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la décision du 19 mai 2022 sera confirmée.

22.         Le recourant, qui succombe, n'a pas droit à des dépens (art. 61 let. g LPGA a contrario).

L'intimée, représentée et qui obtient gain de cause, a conclu à l’octroi de dépens.

Toutefois, étant une organisation chargée de tâches de droit public (ATF 112 V 44 consid. 3), et compte tenu du fait que le recours n'est ni téméraire ni ne témoigne de légèreté, elle n’a pas droit à des dépens (ATF 126 V 143 consid. 4).

23.         Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le