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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/858/2021

ATA/304/2022 du 22.03.2022 sur JTAPI/1093/2021 ( PE ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/858/2021-PE ATA/304/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 22 mars 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du
1er novembre 2021 (JTAPI/1093/2021)


EN FAIT

1) Madame B______, née le ______1977, est originaire de Colombie.

Elle est la mère de Monsieur A______ , né le ______ 2003, ressortissant colombien.

2) À la suite de son mariage, le ______ 2007 en Colombie, avec Monsieur B______ , ressortissant suisse, elle a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial.

3) Elle a acquis la nationalité suisse le 17 mars 2017.

4) Par courrier du 16 juillet 2019, Mme B______ a sollicité auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) l’octroi d’une autorisation de séjour au titre de regroupement familial en faveur de son fils.

Ce dernier était arrivé en Suisse le 1er avril 2019. Il avait vécu en Colombie auprès de sa grand-mère maternelle, qui s’était occupée de lui depuis son départ pour la Suisse en 2008. Cependant, depuis le début de l’année 2019, sa grand-mère était tombée en grave dépression à la suite du décès de son fils cadet et n’était plus capable de prendre en charge son petit-fils. Le père de M. A______ s’était remarié, ne vivait pas dans la même ville et ne s’était jamais occupé de l’éducation de son fils.

Elle a notamment produit un formulaire M mentionnant que M. A______ était arrivé à Genève le 1er avril 2019, une attestation de scolarité de l’enseignement obligatoire du canton de Genève certifiant que l’intéressé était inscrit en classe d’accueil au cycle d’orientation du Marais depuis le 8 avril 2019, un rapport d’évaluation psychologique daté du 9 juillet 2019 concernant sa mère, Madame C______ , réalisé en Colombie par Madame D______ , spécialiste en psychologie juridique, et la traduction libre de certains passages, ainsi que la traduction française d’une « déclaration volontaire » datée du 24 mai 2019 à teneur de laquelle Monsieur E______ , père de M. A______, autorisait ce dernier à quitter la Colombie pour aller vivre auprès de sa mère en Suisse.

5) Par courrier du 1er décembre 2020, l’OCPM a fait part à Mme B______ de son intention de refuser l’octroi d’une autorisation de séjour en faveur de son fils et de prononcer son renvoi de Suisse.

La demande de regroupement familial était tardive et les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour au sens de l’art. 42 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) n’étaient pas remplies.

6) Par courrier du 30 décembre 2020, Mme B______ a exposé que deux raisons expliquaient le caractère tardif de sa demande de regroupement familial. D’une part, le père de M. A______ était resté introuvable pendant de nombreuses années, et elle n’avait ainsi pu obtenir que récemment une autorisation permettant à son fils de quitter la Colombie. D’autre part, elle avait vécu dès son arrivée à Genève en 2008 dans un logement communautaire qu’elle ne considérait pas comme étant adéquat pour héberger son enfant. Récemment, elle avait enfin trouvé un logement décent et retrouvé un emploi, après une période de chômage.

Par ailleurs, l’état de santé de sa mère en Colombie s’était beaucoup dégradé et celle-ci n’était plus en mesure de s’occuper de son petit-fils. Ce dernier s’était bien intégré en Suisse, tant au niveau scolaire que sur le plan social. Il n’était pas concevable que ce dernier, alors encore mineur, puisse être renvoyé dans un pays où il n’avait plus aucune attache familiale ni logement.

Elle a notamment produit les livrets scolaires de son fils pour les années 2019-2020 et 2020-2021, une lettre de recommandation de son professeur de français, une lettre de soutien de Madame F______ chez qui son fils passait presque tous les week-ends, un contrat de bail pour un logement de trois pièces débutant le 1er décembre 2020, ainsi qu’un contrat de mission temporaire comme opératrice en salle à plein temps à Tolochenaz à partir du 5 novembre 2020.

7) Par courrier du 10 janvier 2021, Mme B______ a transmis à l’OCPM, notamment, la traduction d’un certificat médical du 2 octobre 2020 ainsi que du rapport d’évaluation psychologique de Mme C______ du 10 octobre 2020 ayant une teneur identique au précédent, sous réserve des dates. Selon ce rapport, Mme C______ , âgée de soixante-quatre ans, était veuve depuis huit ans et avait eu cinq enfants (G______, B______, H______, I______et J______ ). Elle vivait dans une maison à la périphérie de Bucaramanga (Colombie), où elle élevait des animaux. Ses deux filles, dont Mme B______, étaient parties vivre à l’étranger pour trouver un avenir meilleur. Lors de son départ pour la Suisse, Mme B______ lui avait confié la garde de ses trois enfants. Les deux aînés étaient désormais âgés de vingt et un ans. L’un d’eux vivait encore avec elle et travaillait dans le domaine de la climatisation, l’autre avait quitté la maison et travaillait pour payer ses études. N’ayant plus la force de s’occuper du plus jeune, elle avait demandé à sa fille de le « reprendre » pour qu’il termine ses études et soit auprès d’elle. Son état de santé avait commencé à se dégrader à la mort de son fils cadet (I______ ) en 2015. Elle souffrait de douleurs physiques (maux de tête, jambes, dos) et de pertes de mémoire. Selon les conclusions de ce rapport, Mme C______ présentait un état de dépression évolutif et ne disposait plus des capacités physiques et émotionnelles pour pouvoir continuer à s’occuper de son dernier petit-fils.

8) Par décision du 1er février 2021, l’OCPM a refusé d’octroyer une autorisation de séjour à M. A______ et prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 9 avril 2021 pour quitter le territoire.

La demande de regroupement familial était tardive. Mme B______ ayant obtenu une autorisation de séjour valable à partir du 16 juillet 2008, la demande aurait dû être déposée au plus tard le 15 juillet 2013.

Par ailleurs, il n’existait pas de raison personnelle majeure permettant d’autoriser un regroupement familial différé. M. A______ était arrivé en Suisse le 1er avril 2019 à l’âge de quinze ans révolus. Bien qu’il fût scolarisé depuis plus d’une année à Genève, il avait passé son enfance et son adolescence en Colombie et avait effectué l’essentiel de sa scolarité dans ce pays, de sorte que son intégration en Suisse n’était pas encore déterminante. Il était en outre en bonne santé. Sa réintégration dans son pays d’origine, où il disposait de ses repères et de ses principales attaches socioculturelles, ne devrait ainsi pas lui poser des problèmes insurmontables. Âgé de dix-sept ans révolus, il atteindrait prochainement sa majorité et serait par conséquent en mesure de vivre de manière autonome en Colombie. Il semblait disposer d’un réseau familial dans son pays d’origine, représenté par sa grand-mère, ses deux frères aînés ainsi que deux oncles. Des solutions de garde alternatives en Colombie paraissaient ainsi envisageables.

9) Par acte du 4 mars 2021, Mme B______, agissant en son nom et en celui de son fils, a interjeté recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision précitée, concluant à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour en faveur de son fils.

Il n’était pas contesté que la demande de groupement familial était tardive. En revanche, les circonstances familiales avaient changé de manière importante, ce qui justifiait un regroupement familial différé.

Lorsqu’elle avait quitté la Colombie, elle avait confié son fils à sa mère. Elle lui avait régulièrement envoyé de l’argent pour pourvoir à ses besoins ainsi qu’à son éducation. Malheureusement, l’état de santé de sa mère s’était dégradé ces dernières années, notamment en raison du décès de son père, mais surtout de celui de son frère I______ . En mars 2019, lorsque sa sœur J______ était venue la voir en Colombie, elle avait constaté qu’elle était devenue incapable de s’occuper de son petit-fils. N’ayant personne sur place à qui le confier et ne pouvant laisser son fils de quinze ans livré à lui-même, elle l’avait fait venir à Genève, certes dans la précipitation et sans respecter la procédure idoine, mais dans son intérêt.

Il n’existait pas de solutions alternatives sur place : son père et son frère cadet étaient décédés, sa sœur J______ vivait en Espagne et sa sœur H______ , qui vivait dans un village isolé en Colombie, n’entretenait pas de bonnes relations avec son fils. Le père de M. A______, dont elle était séparée depuis quinze ans, ne s’était jamais occupé de lui, ni d’ailleurs aucun membre de sa famille, et leur relation avait été quasi-inexistante : M. E______ n’appelait ou ne passait voir son fils qu’une fois tous les deux ans environ. Chauffeur poids-lourds, il avait refait sa vie à Bogota (Colombie) depuis de nombreuses années et fondé une nouvelle famille.

Elle avait toujours été très proche de son fils. Malgré la distance et la séparation, elle avait toujours tenu son rôle de mère. Durant les années où ils avaient été séparés, elle lui avait parlé tous les jours au téléphone et se rendait trois semaines par année en Colombie pour le voir.

Depuis son arrivée en Suisse, M. A______ avait fait beaucoup d’efforts pour s’intégrer. Un retour en Colombie serait une catastrophe : il serait livré à lui-même, sans personne pour l’accueillir ni l’aider. Ayant par ailleurs été déscolarisé dans ce pays depuis ses quinze ans, il lui serait très compliqué de reprendre l’école sur place et, a fortiori, de trouver un travail, alors qu’il n’avait aucune formation.

10) L’OCPM a conclu au rejet du recours.

L’intéressée, qui se prévalait d’un changement de circonstances, n’était pas parvenue à expliquer de manière convaincante pour quel motif elle n’avait pas déposé de demande de regroupement familial plus tôt. Il ressortait de ses explications qu’elle parlait chaque jour à son fils par téléphone et qu’elle s’était rendue chaque année en Colombie pour lui rendre visite. Elle ne pouvait donc pas ignorer que l’état de santé de sa mère s’était dégradé à la suite des deux deuils subis en 2014 et 2015, alors que son fils était âgé de onze/douze ans. Il paraissait également peu probable qu’aucune solution alternative n’ait pu être trouvée sur place pour la prise en charge de son fils, qui allait bientôt devenir majeur et qui avait passé toute sa vie en Colombie.

11) Dans sa réplique, Mme B______ a expliqué qu’elle avait fait venir son fils en Suisse parce que sa mère n’avait plus été en mesure de s’occuper de lui. Les deux deuils auxquels celle-ci avait dû faire face l’avaient beaucoup affectée et certainement déclenché la dépression, l’anxiété et les troubles émotionnels dont elle souffrait. Toutefois, en 2015, elle était encore capable de s’occuper de son petit-fils. C’était seulement plus tard, en raison de la dégradation continue de son état de santé psychique et physique, que sa mère n’avait plus été en mesure de s’en occuper. Ni sa sœur J______ ni elle, qui n’avaient pas revu leur mère depuis plus d’un an, ne s’en étaient rendu compte avant début 2019.

Contrairement à ce qu’avait retenu l’autorité intimée, il n’existait aucune solution alternative sur place, sans quoi elle aurait laissé son fils en Colombie et ne l’aurait pas fait venir dans l’urgence et sans visa. Elle avait dû prendre une décision rapidement, car elle n’avait personne pour prendre en charge son fils et sa sœur devait rentrer en Europe.

12) Par jugement du 1er novembre 2021, le TAPI a rejeté le recours.

Les conditions à un regroupement familial différé n’étaient pas remplies.

13) Par acte expédié le 3 décembre 2021 à la cambre administrative de la Cour de justice, Mme B______ a recouru contre ce jugement, dont elle a demandé l’annulation. Elle a conclu à l’octroi d’une autorisation de séjour en faveur de son fils.

Le jugement querellé ne tenait pas compte de la réalité des faits. Elle avait dû faire venir son fils après que sa sœur, qui s’était rendue sur place, eut constaté que sa mère n’était plus en mesure de s’occuper de lui. Aucune personne en Colombie n’aurait pu assumer la prise en charge de A______ . Elle n’avait pas eu le choix de le faire venir.

14) M. A______ a indiqué, dans le délai imparti à cet effet par la chambre administrative, qu’il souscrivait aux conclusions de sa mère.

15) L’OCPM a conclu au rejet du recours.

Il a relevé que la mère et le fils ne semblaient pas vivre à la même adresse, comme cela ressortait des attestations établies en leur faveur.

16) Dans le délai de réplique, M. A______ a expliqué que lorsque sa mère était arrivée en Suisse avec l’intention de la faire venir, elle avait constaté que la chambre de 15 m2 qu’elle occupait avec son mari ne le permettait pas. Le logement communautaire dans lequel elle vivait n’avait pas de salle d’eau et les installations sanitaires ne fonctionnaient pas. Le mari de sa maman avait ensuite construit, dans la chambre, un petit espace pour maintenir l’hygiène personnelle. Celui-ci ne souhaitait pas déménager.

À la suite du décès de son grand-père, l’état de santé de sa grand-mère avait commencé à se détériorer. L’accident tragique de son oncle I______ et de l’épouse de celui-ci avait été une épreuve pour lui et sa grand-mère, ces deux personnes leur étant proches. La détérioration de l’état de santé s’était faite petit à petit jusqu’au point où elle avait demandé à sa maman de le prendre chez elle.

Malgré la distance, sa mère avait toujours assumé son rôle parental avec fermeté. Elle était son soutien financier, émotionnel et son représentant légal. Il n’avait plus vraiment de réseau social et familial en Colombie. L’un de ses frères vivait alors à Medellin, l’autre à Bogota ; il n’avait vécu dans aucune de ces villes. Sa tante H______ avait deux enfants en bas âge et ne pouvait, en sus, s’occuper de lui. Elle confiait souvent ses enfants à leur grand-mère paternelle, qui peinait à s’en occuper. Il ne pouvait rester livré à lui-même. La situation à Bucaramanga, proche de la frontière du Venezuela, était précaire et avait empiré ces dernières années.

Dès lors qu’une naturalisation facilitée était possible s’il avait vécu en bénéfice d’une autorisation de séjour pendant plus de cinq ans avant d’atteindre l’âge de 22 ans, il s’interrogeait si l’OCPM, par son refus, ne tentait pas de faire obstacle à cette possibilité.

Il s’était bien intégré, constitué un réseau social et poursuivait ses études. Il s’était inscrit au CFP Art en vue d’obtenir un diplôme d’architecte d’intérieur.

Il espérait pouvoir s’expliquer de vive voix.

17) Lors de l’audience, qui s’est tenue le 14 mars 2022 devant la chambre de céans, M. A______ a déclaré qu’en Colombie, c'était surtout sa grand-maman maternelle qui s'occupait de lui. Il avait trois oncles, dont seul un vivait en Colombie ; c’était celui qui était décédé. Ce dernier avait vécu dans un village pas très proche d'où habitait sa grand-mère. Avant que sa grand-mère tombe malade, elle le suivait sur le plan scolaire. Lorsqu’il avait eu 13/14 ans, elle n'avait plus tellement pu le suivre. Il avait été livré à lui-même. Il appelait sa mère tous les deux à trois jours, mais ne lui avait pas dit que sa grand-mère n'arrivait plus à s'occuper de lui, car il n’avait pas voulu l'inquiéter.

Sa tante, une sœur de sa maman qui vivait en Espagne, était venue leur rendre visite. C’est elle qui avait estimé que la situation ne pouvait pas continuer ainsi et qu'il fallait qu’il rejoigne sa maman. Il avait été d'accord avec ce que disait sa tante car il était conscient que sa grand-maman ne pouvait plus s'occuper de lui.

Il était actuellement en classe d'insertion professionnelle et prévoyait d'entreprendre un apprentissage à la rentrée 2022 en vue d'obtenir un diplôme d'architecte d'intérieur. Le concours avait lieu le lendemain de l’audience. Il vivait avec sa maman à la rue K______ . Avant, ils habitaient à la rue de L______ .

Il avait parfois des contacts avec ses frères par Whatsapp, environ tous les trois mois. M______ , son frère de 23 ans, vivait et travaillait à Bogota. Il avait une amie et un enfant ; il n’avait jamais rencontré ces derniers. N______ , son frère qui avait 24 ans, vivait dans la même localité que sa grand-mère et s'occupait parfois d’elle. Il n'avait des contacts plus qu'avec un ou deux de ses amis en Colombie ; ils s’appelaient environ tous les cinq mois. Il s’était constitué un cercle d'amis à Genève. En été, ils allaient ensemble à Baby-Plage ou aux Charmilles où ils jouaient au volley-ball. Depuis qu’il préparait le concours sus-évoqué, il n'avait plus le temps de s'entraîner au volley avec l'équipe dont il était membre. Il avait plusieurs amis proches avec qui il pouvait parler de choses personnelles, comme par exemple de la présente audience.

Ses notes étaient plutôt bonnes, soit 4, 4,5 et parfois 5. Il n’avait pas de problème de discipline à l'école et n’avait jamais eu non plus de problème avec la police. Il n’avait aucun contact avec son père. Il n’était pas retourné en Colombie depuis son arrivée en Suisse.

Le mal-être de sa grand-mère s’exprimait par exemple par le fait qu'elle ne quittait plus sa chambre et pleurait. Il avait dû s'occuper de lui-même. Il avait dû cuisiner et faire les courses. De temps en temps, elle arrivait elle-même à faire ces activités, mais de moins en moins. Elle essayait de s'occuper de ses poules et de ses canards, mais avait parfois des difficultés à s'en occuper, même si ces animaux n'avaient pas besoin de beaucoup d'entretien. Elle restait essentiellement dans sa chambre.

Mme B______ a indiqué que lorsque son fils était arrivé en Suisse, il était très renfermé sur lui-même et parlait peu. Depuis lors, il s'était ouvert et pleinement investi dans ses apprentissages scolaires. Cela faisait plaisir de voir à quel point il travaillait pour son concours. Le renvoyer en Colombie constituerait un nouveau déracinement. Sa maman avait dû déménager et vendre les poules et les canards, car elle ne pouvait plus rester dans sa maison. Elle vivait désormais seule, mais N______ , son fils, essayait de venir le plus souvent possible lui rendre visite. La dernière fois que Mme B______ l’avait vue, c'était en 2018. Lorsqu’elle avait procédé au changement d'adresse auprès de l’OCMP, par internet, il manquait une ligne pour enregistrer A______ , raison pour laquelle l'ancienne adresse apparaissait encore pour lui auprès de l'OCPM.

La représentante de l’OCPM a déclaré qu’au vu des explications données au sujet de l'adresse du recourant et de sa maman, il ne subsistait plus aucun doute pour l'OCPM que les deux occupaient en commun un logement à la rue K______ .

Mme B______ a répété que lorsqu’elle était arrivée en Suisse, son intention était de faire venir ses enfants. Toutefois, son mari et elle n'avaient pas un logement qui permettait de les recevoir. Elle y avait donc renoncé, et sa maman s'était bien occupée des enfants. A______ lui disait toujours au téléphone que tout allait bien, car sa maman lui avait dit de ne pas l'inquiéter. C'était quand sa sœur s'était rendue compte sur place que sa maman n'était plus en mesure de s'occuper de A______ et qu'elle avait insisté pour qu'il ne reste pas avec celle-ci que les choses s’étaient décidées dans la précipitation. Il était alors parti avec sa sœur pour Madrid où elle était allée le chercher. Elle était consciente de ne pas avoir observé la procédure, mais il y avait eu urgence et il fallait agir tout de suite.

À l’issue de l’audience, la cause a été gardée à juger.

18) Il ressort de l’évaluation scolaire du 5 mai 2020 portant sur l’année scolaire 2019 à 2020 que M. A______ avait connu « une très bonne progression ». Il avait un « bon investissement », une « grande motivation ». Son travail était « sérieux et appliqué ». Il était régulier dans ses résultats, qui étaient bons, se montrait intéressé. Il était un élève « assidu et persévérant ». Il faisait montre d’un « excellent comportement en classe ». Il « motiv[ait] et pouss[ait] le groupe vers le haut ».

Le service de l’accueil lui a délivré, le 26 juin 2020, un certificat « pour son assiduité et sa conduite ».

L’évaluation du 1er trimestre 2020/2021, effectuée le 9 décembre 2020, est également très bonne, l’investissement dans ses apprentissages, les bonnes bases en mathématiques, le très bon travail fourni en classe, corroboré par les tests, la bonne maîtrise des rapports de logique, l’aisance à l’expression orale en français et l’attitude participative en classe étaient notamment relevés.

Dans une attestation du 21 décembre 2020, Monsieur O______ , professeur du recourant, a souligné que les progrès de celui-ci étaient constants. Son comportement était « irréprochable ». C’était un élève « poli, respectueux, sympathique, souriant et travailleur », qui avait l’esprit d’équipe, de l’humour et était capable d’autodérision, comme il l’avait démontré dans un travail écrit « original et de qualité ». Il progressait rapidement en français, ce qui était d’autant plus remarquable qu’en raison de la pandémie, il n’avait pas eu accès aux activités sportives et culturelles, qui lui auraient permis de fréquenter de jeunes francophones de son âge et ainsi de progresser. Le professeur ne doutait pas que A______ atteindrait bientôt le niveau de langue nécessaire pour effectuer un apprentissage. C’était « pratiquement le cas en compréhension orale et en expression orale ».

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Le recours a été formé par la mère de l’intéressé, devenu majeur durant la procédure devant le TAPI. Celui-ci ayant souscrit aux conclusions prises dans le recours, il convient de procéder à la substitution de la partie recourante.

2) a. La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissantes et ressortissants du Kosovo.

b. Le conjoint d'un ressortissant suisse et ses enfants célibataires de moins de 18 ans ont droit à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec lui (art. 42 al. 1 LEI). Le regroupement familial doit être demandé dans les cinq ans. Pour les enfants de plus de 12 ans, le regroupement doit intervenir dans un délai de douze mois (art. 47 al. 1 LEI et 73 al. 1 OASA). Selon le texte clair de l’art. 47 al. 1 LEI, le délai est respecté si la demande de regroupement familial est déposée avant son échéance. L’âge de l’enfant au moment du dépôt de la demande est déterminant (ATF 136 II 78 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1025/2017 du 22 mai 2018 consid. 1.1).

c. Passé ce délai, le regroupement familial différé n’est autorisé que pour des raisons familiales majeures (art. 47 al. 4 LEI et 73 al. 3 OASA). Les limites d'âge et les délais prévus à l'art. 47 LEI visent à permettre une intégration précoce et à offrir une formation scolaire en Suisse aussi complète que possible (ATF 133 II 6 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1176/2016 du 26 juillet 2017 consid. 4.2.2 et les arrêts cités). Les délais prévus à l'art. 47 LEI ont également pour objectif la régulation de l'afflux d'étrangers (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1/2017 du 22 mai 2017 consid. 4.1.2).

d. Le parent qui fait valoir le regroupement familial doit disposer de l'autorité parentale ou au moins du droit de garde sur l'enfant (ATF 137 I 284 consid. 2.7 ; 136 II 78 consid. 4.8 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_576/2011 du 13 mars 2012 consid. 3.4).

Le regroupement familial suppose que le parent établi en Suisse ait maintenu avec ses enfants une relation familiale prépondérante en dépit de la séparation et de la distance (ATF 133 II 6 consid. 3.1). On peut notamment admettre qu'il y a une relation familiale prépondérante entre les enfants et le parent vivant en Suisse lorsque celui-ci a continué d'assumer de manière effective pendant toute la période de son absence la responsabilité principale de leur éducation, en intervenant à distance de manière décisive pour régler leur existence sur les questions essentielles, au point de reléguer le rôle de l'autre parent à l'arrière-plan. Pour autant, le maintien d'une telle relation ne signifie pas encore que le parent établi en Suisse puisse faire venir ses enfants à tout moment et dans n'importe quelles conditions. Il faut, comme dans le cas où les deux parents vivent en Suisse séparés de leurs enfants depuis plusieurs années, réserver les situations d'abus de droit, soit notamment celles dans lesquelles la demande de regroupement vise en priorité une finalité autre que la réunion de la famille sous le même toit. Par ailleurs, indépendamment de ces situations d'abus, il convient, surtout lorsque la demande de regroupement familial intervient après de nombreuses années de séparation, de procéder à un examen d'ensemble des circonstances portant en particulier sur la situation personnelle et familiale de l'enfant et sur ses réelles possibilités et chances de s'intégrer en Suisse et d'y vivre convenablement. Pour en juger, il y a notamment lieu de tenir compte de son âge, de son niveau de formation et de ses connaissances linguistiques. Un soudain déplacement de son centre de vie peut en effet constituer un véritable déracinement pour elle ou lui et s'accompagner de grandes difficultés d'intégration dans le nouveau cadre de vie ; celles-ci seront d'autant plus probables et potentiellement importantes que son âge sera avancé (ATF 133 II 6 consid. 3.1.1 ; 129 II 11 consid. 3.3.2).

e. Il faut également tenir compte de l'intérêt de l'enfant à maintenir des contacts réguliers avec ses parents, comme l'exige l'art. 3 § 1 de la convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE – RS 0.107), étant précisé que les dispositions de la convention ne font pas de l'intérêt de l'enfant un critère exclusif, mais un élément d'appréciation dont l'autorité doit tenir compte lorsqu'il s'agit de mettre en balance les différents intérêts en présence (ATF 139 I 315 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_153/2018 du 25 juin 2018 consid. 5.2 et 5.3). Lorsque l'enfant est devenu majeur au cours de la procédure de regroupement familial, la CDE ne lui est plus applicable (art. 1 CDE ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_767/2013 du 6 mars 2014 consid. 3.5).

f. Enfin, les raisons familiales majeures pour le regroupement familial ultérieur doivent être interprétées d'une manière conforme au droit fondamental au respect de la vie familiale (art. 13 Cst. et 8 CEDH ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1102/2016 du 25 avril 2017 consid. 3.2).

Aux termes de l'art. 8 CEDH, toute personne a notamment droit au respect de sa vie privée et familiale. Cette disposition ne confère cependant pas un droit à séjourner dans un État déterminé. Le fait de refuser un droit de séjour à une personne étrangère dont la famille se trouve en Suisse peut toutefois porter atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par cette disposition (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; 135 I 143 consid. 1.3.1 ; 135 I 153 consid. 2.1). Pour autant, les liens familiaux ne sauraient conférer de manière absolue, en vertu de l'art. 8 CEDH, un droit d'entrée et de séjour. Ainsi, lorsqu'une personne étrangère a elle-même pris la décision de quitter sa famille pour aller vivre dans un autre État, ce dernier ne manque pas d'emblée à ses obligations de respecter la vie familiale s'il n'autorise pas la venue des proches de la personne étrangère ou qu'il la subordonne à certaines conditions (arrêt du Tribunal fédéral 2C_153/2018 précité consid. 5.3 et les références citées).

Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH est possible aux conditions de l'art. 8 § 2 CEDH. La question de savoir si, dans un cas d'espèce, les autorités compétentes sont tenues d'accorder une autorisation de séjour fondée sur l'art. 8 CEDH doit être résolue sur la base d'une pesée de tous les intérêts publics et privés en présence. S'agissant d'un regroupement familial, il convient de tenir compte dans la pesée des intérêts notamment des exigences auxquelles le droit interne soumet celui-ci. Il n'est en effet pas concevable que, par le biais de l'art. 8 CEDH, une personne étrangère qui ne dispose, en vertu de la législation interne, d'aucun droit à faire venir sa famille proche en Suisse, puisse obtenir des autorisations de séjour pour celle-ci sans que les conditions posées par les art. 42 ss LEI ne soient réalisées (ATF 142 II 35 consid. 6.1 ; 139 I 330 consid. 2 ; 137 I 284 consid. 2.6).

La protection accordée par l'art. 8 CEDH suppose que la relation avec l'enfant – qui doit être étroite et effective (ATF 139 I 330 consid. 2.1) – ait préexisté (arrêts du Tribunal fédéral 2C_537/2009 du 31 mars 2010 consid. 3 ; 2C_490/2009 du 2 février 2010 consid. 3.2.3).

g. Les raisons familiales majeures au sens des art. 47 al. 4 LEI et 73 al. 3 OASA peuvent être invoquées, selon l'art. 75 OASA, lorsque le bien de l'enfant ne peut être garanti que par un regroupement familial en Suisse. C'est l'intérêt de l'enfant, non les intérêts économiques (prise d'une activité lucrative en Suisse), qui prime. Il faut prendre en considération tous les éléments pertinents du cas particulier. Il y a lieu de tenir compte du sens et des buts de l'art. 47 LEI. Il s'agit également d'éviter que des demandes de regroupement familial différées soient déposées peu avant l'âge auquel une activité lucrative peut être exercée lorsque celles-ci permettent principalement une admission facilitée au marché du travail plutôt que la formation d'une véritable communauté familiale. D'une façon générale, il ne doit être fait usage de l'art. 47 al. 4 LEI qu'avec retenue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1/2017 précité consid. 4.1.3 et les références citées).

La reconnaissance d'un droit au regroupement familial suppose qu'un changement important de circonstances, notamment d'ordre familial, se soit produit, telle qu'une modification des possibilités de la prise en charge éducative à l'étranger (ATF 130 II 1 consid. 2 ; 124 II 361 consid. 3a). Il existe ainsi une raison familiale majeure lorsque la prise en charge nécessaire de l'enfant dans son pays d'origine n'est plus garantie, à la suite par exemple du décès ou de la maladie de la personne qui s'en occupait. Lorsque le regroupement familial est demandé en raison de changements importants des circonstances à l'étranger, il convient toutefois d'examiner s'il existe des solutions alternatives permettant à l'enfant de rester où il vit. De telles solutions correspondent en effet mieux au bien-être de l'enfant, parce qu'elles permettent d'éviter que celle-ci ou celui-ci ne soit arraché à son milieu et à son réseau de relations de confiance. Cette exigence est d'autant plus importante pour les adolescentes et adolescents qui ont toujours vécu dans leur pays d'origine dès lors que plus un enfant est âgé, plus les difficultés d'intégration qui le menacent apparaissent importantes. Il ne serait toutefois pas compatible avec l'art. 8 CEDH de n'admettre le regroupement familial différé qu'en l'absence d'alternative. En revanche, une telle alternative doit être d'autant plus sérieusement envisagée et soigneusement examinée que l'âge de l'enfant est avancé et que la relation avec le parent vivant en Suisse n'est pas (encore) trop étroite (ATF 137 I 284 consid. 2.2 ; 133 II 6 consid. 3.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_207/2017 du 2 novembre 2017 consid. 5.3).

3) En l'espèce, il n'est pas contesté que la demande de regroupement familial a été déposée tardivement. Seule demeure donc ouverte la possibilité offerte par l'art. 47 al. 4 LEI de bénéficier d'un regroupement familial différé pour des raisons familiales majeures.

Il convient donc d’examiner si la situation du recourant remplit les conditions restrictives permettant un regroupement familial différé.

Il ressort des attestations médicales produites que la grand-mère du recourant a commencé à présenter, à la suite du décès de son mari, des signes de dépression, Ceux-ci se sont accentués après l’accident dans lequel son fils cadet et l’épouse de celui-ci, qui vivaient proche d’elle, sont décédés. Ces événements douloureux ont affecté tant le recourant que sa grand-mère. Cette dernière a cependant sombré dans un état dépressif, qualifié de « dépression sévère » le 9 juillet 2019 à la suite du « test de Beck » effectué par une psychologue en Colombie. Selon cette dernière, la dépression se manifestait par de l’anxiété, une instabilité émotionnelle, de la tristesse, une humeur dépressive et une perte de mémoire. Lors de son audition par la chambre de céans, le recourant a expliqué que sa grand-mère avait progressivement commencé à rester dans sa chambre où elle pleurait. Il avait été livré à lui-même, devant faire les courses et cuisiner. Sa grand-mère n’arrivait plus non plus à s’occuper de ses poules et canards, alors que ces volatiles ne requéraient pas beaucoup de soin.

Au vu de ces éléments, il est établi que l’état de santé de la grand-mère du recourant ne lui permettait plus de s’occuper de l’adolescent qu’il était alors.

Il ressort des allégations concordantes de la mère du recourant et de ce dernier que l’un de ses frères aînés vit à Bogota avec son amie et leur enfant et l’autre à Bucaramanga. Vu le jeune âge des deux frères du recourant (20 et 21 ans en 2019) et de la situation familiale de l’un d’eux, il est manifeste que ni l’un ni l’autre n’était en mesure d’assurer la prise en charge et l’éducation de leur frère cadet, alors âgé de 15 ans. L’oncle et la tante dont ce dernier était proche sont décédés dans un accident de voiture. Une autre tante vit en Espagne et ses deux autres oncles ne vivent pas en Colombie. Enfin, sa tante H______ ne semble pas pouvoir s’occuper de ses deux enfants en bas âge, les confiant souvent à leur grand-mère paternelle, de sorte qu’elle n’était pas non plus à même de s’occuper de lui.

Ainsi, à la suite de la dégradation de l’état de santé de sa grand-mère, qui l’hébergeait, le recourant s’est retrouvé dépourvu d’un cadre familial. Il n’avait pas terminé sa scolarité ni entamé de formation et ne pouvait, par conséquent, subvenir à ses propres besoins.

Arrivé en Suisse en avril 2019, le recourant a noué des relations d’amitié à Genève, notamment au travers de l’activité sportive qu’il exerce. Ses évaluations scolaires ont été extrêmement positives, ses enseignants soulignant son assiduité, ses capacités d’apprentissage et ses qualités personnelles. Le 26 juin 2020, il s’est d’ailleurs vu délivré par son école un certificat « pour son assiduité et sa conduite ». Son professeur, M. O______ , a exposé en décembre 2020 qu’il ne doutait pas que le recourant atteindrait bientôt le niveau de langue nécessaire pour effectuer un apprentissage ; c’était alors « pratiquement le cas en compréhension orale et en expression orale ». Le recourant d’ailleurs démontré lors de l’audience son aisance dans l’expression orale en français.

Son comportement en Suisse a été irréprochable, le recourant ne faisant l’objet d’aucune condamnation ni de poursuites et ses professeurs ayant souligné son « excellent comportement en classe » et le fait qu’il « motivait et poussait le groupe vers le haut ».

Le jeune homme vit avec sa mère, qui a retrouvé un emploi à plein temps lui permettant d’assumer ses charges et celles de son fils. Rien ne permet de douter des allégations concordantes du recourant et de sa mère qu’ils ont maintenu depuis le départ de celle-ci de Colombie et l’arrivée du recourant en Suisse des contacts étroits et réguliers via les moyens de télécommunication moderne. Le fait de ne pas avoir, lors de leurs conversations téléphoniques, évoqué les problèmes de santé que rencontrait sa grand-mère témoigne de l’attachement du recourant à sa mère, qu’il cherchait à préserver. Le rapport de la psychologue mentionne la présence chez la grand-mère du recourant d’une « dépression évolutive », devenue en juillet 2019 « sévère ». Compte tenu du caractère évolutif de la dépression, il ne peut être retenu que la mère du recourant, lorsqu’elle s’est rendue en Colombie en 2018, aurait pu et dû se rendre compte, comme le soutient l’OCPM, que l’état de santé de sa mère – qui avait alors été confrontée au deuil successif de trois de ses proches – allait évoluer vers une dépression sévère.

Par ailleurs, il est indéniable qu’un retour en Colombie constituerait pour le recourant un très important déracinement. Arrivé en Suisse en pleine adolescence, il a traversé une partie de celle-ci dans son pays d’origine et l’autre en Suisse. Cette période de la vie étant particulièrement marquante pour la formation de la personnalité, les trois dernières années, passées à Genève, revêtent à cet égard une importance particulière. Le recourant est scolarisé depuis son arrivée à Genève en avril 2019, est actuellement en classe d'insertion professionnelle et s’est récemment présenté au concours d’entrée visant à pouvoir entreprendre un apprentissage à la rentrée 2022 en vue d'obtenir un diplôme d'architecte d'intérieur. Son assiduité dans ses études et ses capacités scolaires permettent de retenir qu’il sera en mesure d’entamer et de mener à terme une formation professionnelle à Genève. Enfin, il a tissé des liens amicaux à Genève et n’entretient plus que peu de contacts avec un ou deux amis en Colombie.

Au regard de l’ensemble des circonstances particulières du présent cas, les intérêts privés du recourant à pouvoir demeurer aux côtés de sa mère en Suisse s’avèrent prépondérants.

L’OCPM a ainsi abusé de son pouvoir d’appréciation en refusant au recourant une autorisation de séjour au titre du regroupement familial différé.

Le recours sera en conséquence admis. Le jugement du TAPI et la décision de l’OCPM seront annulés. La cause sera retournée à l’OCPM pour qu’il délivre l’autorisation de séjour ad hoc au recourant.

4) Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu. Il n’y a pas lieu à l’allocation d’une indemnité de procédure, le recourant n’y ayant pas conclu (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 décembre 2021 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 1er novembre 2021 ;

au fond :

l’admet ;

annule le jugement précité et la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 1er février 2021 ;

renvoie la cause à l’office cantonal de la population et des migrations afin qu’il délivre à Monsieur A______ une autorisation de séjour ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'office cantonal de la population, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.