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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2455/2021

ATA/1366/2021 du 14.12.2021 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2455/2021-FORMA ATA/1366/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 décembre 2021

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Monsieur Éric Landenbergue

contre

SERVICE DES BOURSES ET PRÊTS D'ÉTUDES



EN FAIT

1) Le 3 décembre 2020, Madame A_____, née le _____ 2000, a déposé au service des bourses et prêts d'études (ci-après : SBPE) une demande de bourse d’études 2020/2021 pour sa première année de CFC d'assistante socioéducative.

2) Le 18 mars 2021, le SBPE a requis de sa part les documents manquants.

3) Par courrier du 25 mars 2021, le SBPE a informé la mère de la requérante qu’il collecterait des données auprès du fisc afin de calculer le droit de celle-ci à une bourse.

4) Le 8 avril 2021, le père de l’étudiante a indiqué au SBPE que celle-ci était dans l’impossibilité de transmettre les documents relatifs à sa mère, qui avait coupé toute relation avec elle. Il a joint une copie de son avis de taxation 2019.

5) Par décision du 20 avril 2021, le SBPE a refusé la demande, au motif que le budget était excédentaire. Il s’est fondé sur le bordereau de taxation du père et de la mère et a retenu pour cette dernière, en l’absence de toute indication de celle-ci, le forfait maximal pour un logement de trois pièces pour la mère.

6) Dans sa réclamation, l’étudiante a requis la prise en compte dans son budget d’une partie de son loyer et a contesté le revenu déterminant unifié (ci-après : RDU) retenu dans la décision.

7) Par décision du 17 juin 2021, le SBPE a confirmé son refus. Il constatait que la requérante vivait avec son père, de sorte qu’aucune charge de loyer ne pouvait être retenue en sa faveur.

8) Par acte expédié le 19 juillet 2021 à la chambre administrative de la Cour de justice, Mme A______, représentée par son père, a recouru contre cette décision, dont elle a demandé l’annulation.

Le SBPE avait violé les art. 28 al. 2, 18 al. 2 et 20 let. b ; elle ne précisait pas de quelle loi. Elle contestait le montant des prestations perçues par ses soins de septembre 2020 à août 2021. Les calculs effectués par le SBPE comportaient « une multitude de données » qui étaient « totalement erronées ».

Elle a produit de nombreuses pièces nouvelles.

9) Se déterminant sur le recours, le SBPE a constaté que son système informatique n’avait pas pris en compte les subsides d’assurance-maladie. Il a intégré les éléments ressortant des pièces nouvelles, en particulier les montants des prestations complémentaires perçues par les parents de la recourante pendant la période de septembre 2020 à août 2021. Il en ressortait néanmoins un excédent budgétaire au terme duquel la recourante ne pouvait toujours pas bénéficier d’une bourse. Le SBPE a encore précisé qu’il avait tenu compte du loyer du père, de sorte qu’il ne pouvait, à nouveau, le retenir dans les charges de la recourante.

10) Dans sa réplique, la recourante a indiqué qu’elle pouvait concevoir qu’une erreur se soit glissée dans les calculs du SBPE, mais pas que cela soit répétitif. Ainsi, la déduction liée aux prestations complémentaires dans le RDU de ses parents n’avait porté que sur huit au lieu de douze mois. Ainsi, son père n’avait perçu que CHF 8'680.- de prestations complémentaires et non CHF 13'020.-. Le montant de prestations perçues par sa mère était également erroné. Par ailleurs, le loyer devait être réparti pour moitié entre elle et son père. Son père ne demandait pas l’aide sociale pour elle afin d’en profiter lui, suivant uniquement les conseils donnés par une avocate du service social de Lancy.

11) Dans sa duplique, le SBPE a précisé que le montant des prestations complémentaires dont il avait tenu compte pour 2020 dans la décision querellée était correct. La rectification avait porté sur l’année 2021, soit de janvier à août 2020.

Selon les pièces établies par le service des prestations complémentaires, les prestations perçues par le père de septembre à décembre 2020 se montaient à CHF 5'248.- (4 x CHF 1'312.-) et à CHF 8'136.- pour la période de janvier à août 2021. Ainsi, le total pris en compte, de CHF 13'384.- (CHF 5'248.- + CHF 8'136.-) était correct. Il en allait de même des montants retenus pour la mère de la recourante, corrigés en ce sens que celle-ci avait perçu pendant la période concernée la somme totale de CHF 17'588.- et non de CHF 22'566.-.

12) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) La recourante conteste le montant retenu par l'autorité intimée des prestations complémentaires (ci-après : PC) perçues par ses parents dans le cadre du budget de sa famille et d'elle-même. Elle demande également que le loyer de l’appartement qu’elle partage avec son père soit retenu pour moitié dans leurs charges respectives.

a. Le financement de la formation incombe aux parents et aux personnes tierces qui y sont légalement tenus ainsi qu'à la personne en formation elle-même (art. 1 al. 2 LBPE). L'aide financière est subsidiaire (art. 1 al. 3 LBPE).

b. Si les revenus de la personne en formation, de ses parents (père et mère), de son conjoint ou sa conjointe ou sa ou son partenaire enregistré et des autres personnes qui sont tenues légalement au financement de la formation, ainsi que les prestations fournies par des personnes tierces ne suffisent pas à couvrir les frais de formation, le canton finance, sur demande, les besoins reconnus par le biais de bourses ou de prêts (art. 18 al. 1 LBPE).

c. Une aide financière est versée s'il existe un découvert entre les frais reconnus engendrés par la formation et l'entretien de la personne en formation et les revenus qui peuvent être pris en compte selon l'art. 18 al. 1 et 2 LBPE. Le découvert représente la différence négative entre les revenus de la personne en formation et des personnes légalement tenues de financer les frais de formation et les coûts d'entretien et de formation de ces mêmes personnes (art. 19 al. 2 LBPE). Le calcul du découvert est établi à partir du budget des parents ou des personnes légalement tenues au financement de la personne en formation. Ce budget tient compte des revenus et des charges minimales pour couvrir les besoins essentiels (art. 19 al. 3 LBPE). Pour le calcul du budget de la personne en formation, il est pris en compte le revenu réalisé durant la formation après déduction d'une franchise dont le montant est fixé par le règlement, la pension alimentaire et les rentes versées par les assurances sociales et la fortune déclarée (art. 19 al. 4 LBPE).

d. Le budget des parents ou des personnes légalement tenues au financement de la personne en formation sert à déterminer la situation financière de la personne en formation (art. 9 al. 1 du règlement d'application de la LBPE du 2 mai 2012 - RBPE - C 1 20.01). Si le budget présente un excédent de ressources, il est divisé par le nombre d'enfants et pris en considération dans le calcul du budget de la personne en formation (let. a) ; s'il présente un excédent de charges, il est divisé par le nombre de personnes qui composent la famille et considéré comme une charge dans le calcul du budget de la personne en formation (let. b ; art. 9 al. 4 RBPE).

Sont intégrés dans le budget de la personne en formation tous les revenus réalisés par la personne pendant son année de formation, ainsi que ceux des personnes définies à l'al. 1 (art. 10 al. 2 RBPE).

e. Le revenu déterminant est celui résultant de la LRDU (art. 18 al. 2 LBPE). Le calcul du RDU est individuel. Il s'applique aux personnes majeures et à l'ensemble des prestations sociales visées à l'art. 13 LRDU, parmi lesquelles les bourses d'études (art. 13 al. 1 let. b ch. 5 LRDU ; art. 8 al. 1 LRDU).

Les éléments énoncés aux art. 4 à 7 LRDU, constituant le socle du RDU, se définissent conformément à la législation fiscale genevoise, en particulier la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08). Le socle du RDU comprend l'ensemble des revenus conformément à l'art. 4 LRDU, lequel fait une énumération exemplative de ceux-ci. Le socle du RDU est calculé automatiquement sur la base de la dernière taxation fiscale définitive (art. 9 al. 1 LRDU). Il peut être actualisé (art. 9 al. 2 LRDU). Du montant obtenu à l'art. 4 LRDU, sont imputées les déductions mentionnées à l'art. 5 LRDU.

f. Sont notamment considérés comme frais d'entretien les frais de logement dans les limites des forfaits majorés de 20 % définis par le règlement sur la base des forfaits par nombre de personnes définis dans le règlement (art. 20 al. 1 let. b aLBPE). Les frais de logement pris en compte sont les frais effectifs dans la limite des forfaits établis sur la base des statistiques de l'office cantonal de la statistique en fonction du nombre de pièces. Il n'est pas fait de différence selon que les parents ou les personnes en formation sont locataires ou propriétaires (art. 12 al. 2 aRBPE).

L’art. 20 al. 1 let. b LBPE dans sa nouvelle teneur depuis le 1er juin 2021 considère comme frais résultant de l'entretien les frais de logement sur la base des forfaits par nombre de personnes définis dans le règlement. L’art. 12 al. 2 RBPE, dans sa nouvelle teneur, prévoit désormais que les frais annuels de logement sont pris en compte sur la base de différents forfaits, notamment de CHF 12'000.- lorsque la personne en formation ne fait pas ménage commun avec une personne tenue légalement au financement de sa formation et qu'elle est au bénéfice d'un contrat de bail à loyer ou de sous-location. Le montant pris en compte est le forfait total divisé par le nombre de personnes habitant dans le même logement (art. 12 al. 2 let. a RBPE).

g. En l’espèce, il ressort du dossier que l’autorité intimée s’est, à juste titre, fondée sur le socle du RDU 2020 à 2021 de la recourante et de ses parents ; ce point n’est au demeurant pas contesté. Celle-ci conteste le montant des PC retenues en déduction dudit socle.

Or, à teneur des décisions de PC du père, celui-ci a perçu de septembre 2020 à août 2021 la somme totale de CHF 13'384.-. C’est ainsi à juste titre que dans le calcul du RDU, le SBPE a déduit de la somme initialement retenue au titre des PC de CHF 22'064.- le montant de CHF 8'680.- afin de n’imputer que les CHF 13'384.- de PC effectivement perçues par celui-ci. Il en va de même en ce qui concerne la mère de la recourante, pour qui du montant de CHF 22'566.- initialement retenu au titre de PC, le SBPE a déduit la somme de CHF 5'008.- afin de tenir compte du fait que celle-ci avait perçu, de septembre 2020 à août 2021 le montant total de CHF 17'558.-, comme cela ressort des décisions PC, et non de CHF 22'566.-.

Contrairement à ce que soutient la recourante dans sa réplique, le nouveau calcul présenté par le SBPE avec sa réponse n’est donc pas entaché d’une erreur dans le décompte des PC allouées à ses parents entre septembre 2020 et août 2021.

S’agissant du loyer acquitté par le père de la recourante que celle-ci souhaite voir imputé par moitié dans ses charges et celles de son père, il convient de relever ce qui suit. D’une part, la recourante ne soutient pas qu’elle s’acquitte effectivement de la moitié du loyer. D’autre part, elle n’est ni titulaire du bail ni sous-locataire. Dans ces conditions, elle ne remplit pas les conditions permettant de retenir dans ses charges la moitié du loyer du logement qu’elle occupe avec son père, ceci au regard de la législation applicable tant au moment où la décision querellée a été rendue que dans sa teneur actuelle.

Pour le surplus, les autres paramètres de calcul pris en considération pour déterminer le droit de la recourante à une bourse d’études pour l’année scolaire 2020/2021 ne sont pas remis en cause. Ils apparaissent, au demeurant, conformes aux pièces produites et au droit.

Mal fondé, le recours sera donc rejeté.

3) Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu et l’issue du litige s’oppose à l’allocation d’une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 juillet 2021 par Madame A______ contre la décision du service des bourses et prêts d’études du 17 juin 2021 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’aucun émolument n’est perçu ni indemnité de procédure n’est allouée ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur Éric Landenbergue, représentant de la recourante, ainsi qu'au service des bourses et prêts d'études.

Siégeant : M. Verniory, président, Mmes Krauskopf et McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :