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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3796/2019

ATA/51/2021 du 19.01.2021 sur JTAPI/677/2020 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3796/2019-PE ATA/51/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 janvier 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______, agissant en son nom personnel et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs B______ et C______ A______
représentés par Me Andrea Von Flüe, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 août 2020 (JTAPI/677/2020)


EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______1977, est ressortissant du Kosovo.

2) Il a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour en Suisse, le 16 mai 2009, puis d'établissement, le 26 septembre 2017.

3) Le 23 janvier 2018, M. A______ a déposé une demande de regroupement familial auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) en faveur de ses enfants, ressortissants du Kosovo, B______, né le ______ 2002, et C______, née le ______2006, issus de sa relation avec Madame D______, née le ______1977, également ressortissante du Kosovo.

Étaient joints à la demande les formulaires M à son nom et à ceux des enfants, qui ne portaient nulle mention de la date d'arrivée de ces derniers à Genève, ainsi que le consentement parental de Mme D______, par acte notarié et traduit à E______ (France) le 12 décembre 2017, pour la garde et le déplacement des enfants auprès de M. A______ en Suisse, « dans le but que ses enfants aient une vie meilleure ».

4) Le 4 juillet 2019, l'OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser d'octroyer une autorisation de séjour au titre du regroupement familial en faveur de ses enfants B______ et C______ et de prononcer leur renvoi de Suisse.

La demande était tardive. Les conditions légales n'étaient pas remplies.

5) Le 30 juillet 2019, M. A______, a présenté ses observations et contesté le contenu de ce courrier.

Ses enfants vivaient à ses côtés depuis le 10 janvier 2016, et non depuis 2017. Sa demande de regroupement familial n'était pas tardive. Il avait eu des problèmes de santé. L'absence d'emploi fixe ne lui aurait pas permis de subvenir aux besoins de ses enfants avant que lui-même soit au bénéfice d'une autorisation d'établissement. Il avait toujours refusé de faire appel à l'aide sociale. Leur mère s'était opposée à leur venue en Suisse. Il avait entamé la procédure aussitôt qu'il avait disposé des garanties tant personnelles que financières suffisantes pour s'occuper de ses enfants. Ils vivaient dans un logement adéquat et étaient à la recherche d'un appartement plus spacieux. Il n'avait pas de dettes.

Le départ des enfants du Kosovo s'était imposé car leurs grands-parents n'étaient plus en mesure de s'en occuper en raison de leur âge et de leur état de santé. Les enfants étaient maintenant intégrés en Suisse. Ils parlaient français et suivaient le cursus scolaire ordinaire. B______ était promu en 2ème année au collège F______ et C______ allait intégrer, à la rentrée 2019, le cycle d'orientation. Ils jouaient respectivement dans un club de football et de basketball.

6) Le 10 septembre 2019, l'OCPM a refusé d'octroyer une autorisation de séjour au titre du regroupement familial en faveur des enfants B______ et C______ et prononcé leur renvoi de Suisse.

La demande était tardive puisqu'elle aurait dû être déposée avant le 15 mai 2014, compte tenu de l'autorisation de séjour délivrée le 16 mai 2009 en faveur de leur père et de son autorisation d'établissement le 26 septembre 2017. Il n'était pas démontré que la mère n'était pas en mesure de s'occuper des enfants dont les principales attaches étaient au Kosovo. Les déclarations des grands-parents ne suffisaient pas à démontrer qu'aucune solution alternative à leur prise en charge au Kosovo n'était envisageable. Ceux-ci avaient vécu respectivement quatorze et dix ans auprès des autres membres de leur famille dans ce pays. La date de leur arrivée en Suisse n'était pas clairement établie.

7) Il ressort du dossier de l'OCPM qu'B______ et C______, par leur représentant légal, ont sollicité des visas de retour aux dates suivantes :

- le 14 mars 2018, pour un séjour de trois mois afin de se rendre en vacances au Kosovo, ainsi qu'en France et en Angleterre ;

- le 20 juin 2018, pour trois mois afin de rendre visite à leur famille au Kosovo ;

- le 2 mai 2019, pour trois mois pour des vacances et voyage d'étude, afin de se rendre en Allemagne, en France et au Kosovo.

8) Le 11 octobre 2019, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce qu'il soit dit que les enfants B______ et C______ avaient droit à une autorisation de séjour au titre de regroupement familial.

Le délai pour demander le regroupement familial n'était pas échu dans la mesure où ce n'était que dès l'obtention d'une autorisation d'établissement que sa situation personnelle et financière s'était suffisamment améliorée pour pouvoir assumer la venue de ses enfants.

Il existait des raisons familiales majeures, dès lors que les grands-parents tant maternels que paternels, qui s'étaient occupés des enfants au Kosovo, ne bénéficiaient désormais plus des capacités personnelles et financières pour prendre en charge leurs petits-enfants. Hormis les grands-parents, il n'existait aucune solution de prise en charge au Kosovo. Seul le regroupement familial en Suisse avec leur père permettait de garantir leur bien-être. L'OCPM violait le principe de proportionnalité en ignorant la situation personnelle des enfants et leur excellente intégration en Suisse depuis leur arrivée.

À titre subsidiaire, les enfants devaient être admis provisoirement. Leur retour au Kosovo serait vécu comme un déracinement et engendrerait des difficultés d'intégration. À une période charnière de leur vie, ils avaient besoin de leur père à leurs côtés pour se construire une identité.

Un bordereau de pièces était joint au recours soit notamment :

·      les attestations notariées et signées des grands-parents paternels (nés en 1951 et 1948) et maternels (nés en 1947 et 1945), traduites en français et certifiées conformes, attestant qu'ils s'étaient occupés jusqu'en janvier 2016 de leurs deux petits-enfants, mais étaient désormais incapables de prendre soin d'eux en raison de leur âge et de leur état de santé, ainsi que des photocopies de leurs pièces d'identités respectives ;

·      un courrier de l'enseignante responsable de groupe d'B______ au collège F______, attestant que celui-ci était appliqué, intelligent, soucieux de bien réussir ses études, et bien intégré auprès de ses camarades du collège F______. Il avait bien réussi sa première année et son enseignante pensait « qu'il était en très bonne voie pour obtenir sa maturité » ;

·      le bulletin scolaire de C______ pour l'année scolaire 2018-2019 attestant de sa promotion en fin de 8ème année primaire.

9) Le 27 novembre 2019, M. A______ a transmis au TAPI un certificat médical attestant qu'B______ était suivi à la consultation de l'office médico-pédagogique (ci-après : OMP) en raison d'une symptomatologie anxieuse développée à cause de ses préoccupations concernant son avenir en Suisse et la possibilité d'un renvoi au Kosovo. Il avait des projets d'avenir en Suisse.

10) Dans ses observations du 11 décembre 2019, l'OCPM a conclu au rejet du recours, se rapportant aux motifs et arguments de sa décision.

Les conditions strictes du délai pour demander le regroupement familial n'étaient pas remplies. Les documents produits en lien avec la prétendue incapacité des grands-parents de s'occuper des deux enfants, n'étant plus en bas âge, ne permettaient pas, à eux seuls, de conclure à un changement important de circonstances. En particulier, aucune précision n'était donnée au sujet de leur état de santé (certificats médicaux). Les enfants n'avaient plus vécu avec leur père et la relation familiale prépondérante n'avait pas été prouvée à satisfaction de droit.

Si les enfants se trouvaient dans une phase de vie importante, leur situation ne pouvait pas être assimilée à celle d'adolescents ayant effectué toute leur scolarité obligatoire en Suisse et entrepris une formation professionnelle nécessitant l'acquisition de qualifications et connaissances spécifiques. Leur retour dans leur pays d'origine, où ils avaient encore tous leurs grands-parents et d'autres membres de leur famille, ainsi qu'un cercle d'amis, pouvait être envisagé, étant souligné qu'ils se trouvaient depuis seulement deux ans en Suisse, en contravention aux prescriptions légales.

L'OCPM s'interrogeait sur la relation entretenue entre les enfants et leur mère et leur véritable date d'arrivée en Suisse, les documents et informations transmises à cet égard par M. A______ étant contradictoires.

11) Dans sa réplique du 15 janvier 2020, M. A______ a relevé qu'à suivre le raisonnement de l'OCPM, il fallait attendre que les enfants soient seuls au Kosovo dans une situation de détresse pour envisager le regroupement familial. Pouvoir rester en Suisse aux côtés de leur père était conforme à leur intérêt supérieur.

12) Le 4 février 2020, l'OCPM a relevé que M. A______ ne répondait pas à ses interrogations.

13) Dans des écritures du 20 mars 2020, M. A______ a précisé ne jamais avoir été marié avec Mme D______, dont il était séparé depuis 2006. Il n'avait appris qu'en 2017 qu'elle avait quitté le Kosovo en janvier 2015 à destination de Genève et vivait chez son cousin, Monsieur G______, au H______. Son départ du Kosovo avait précédé de plusieurs années celui de leurs enfants. Elle avait refusé pendant longtemps que ces derniers rejoignent leur père, alors même qu'ils le souhaitaient et que leurs grands-parents n'étaient plus en mesure de s'occuper d'eux dans de bonnes conditions. Elle n'était pas investie dans leur éducation, contrairement à lui.

Dans l'hypothèse où le permis de séjour de Mme D______ serait refusé, comme ceux des enfants, et qu'ils soient contraints de retourner au Kosovo, la prise en charge par leur mère n'était pas garantie, celle-ci faisant passer ses intérêts propres avant ceux de ses enfants. Il existait de forts risques que Mme D______ décide à nouveau de quitter le Kosovo en abandonnant les enfants à leur sort dans une situation précaire.

14) Le 4 mai 2020, l'OCPM a considéré qu'une résidence de la mère des enfants à Genève depuis janvier 2015 constituait un élément important et qui n'avait jusque-là pas été examiné à ce jour. Se posait la question des liens entretenus entre les enfants et leur mère avant 2015 et leur arrivée en Suisse. Il sollicitait l'audition de Mme D______.

15) a. Devant le TAPI le 28 mai 2020, M. A______ a confirmé les termes de son recours. Les deux enfants vivaient avec leur mère au Kosovo, puis à l'arrivée de celle-ci en Suisse en 2016, ce qu'il ignorait en raison de problèmes de santé. Il l'avait appris en 2017 et avait décidé de déménager du canton de Vaud à Genève, les enfants ne souhaitant pas le rejoindre dans le canton de Vaud. Ses frères et les cousins de ses enfants vivaient à Genève. L'une de ses soeurs y vivait aussi et la seconde à I______, de même que des oncles, tantes et cousins. En réalité, au Kosovo, Mme D______ déplaçait leurs enfants entre les domiciles des grands-parents maternels et paternels. Il avait toujours contribué à l'entretien des enfants, parfois avec l'aide de ses frères. Il avait fait environ six courts séjours au Kosovo, pas davantage en raison de ses soucis de santé. Il n'y avait jamais eu de mariage, traditionnel ou non, avec Mme D______.

Lors de son arrivée en Suisse, Mme D______ avait été logée chez son frère, Monsieur J______. M. A______ et Mme D______ avaient ensuite organisé la garde des enfants, Mme D______ s'en occupant pendant qu'il travaillait. En mars 2020, il avait pris un appartement plus spacieux et proposé à Mme D______ de s'y installer avec eux. Ils n'étaient pas en couple mais formaient une vraie famille. Il n'excluait pas de reformer avec elle un couple à l'avenir, mais ce n'était pour l'instant pas envisagé.

Il prenait note qu'il lui était demandé de démontrer par des attestations scolaires l'arrivée des enfants en Suisse dès 2016. B______ allait mieux mais continuait à être suivi par un psychologue. Il manifestait des signes de stress, notamment lors de convocations par le tribunal ou lorsqu'il entendait des sirènes, craignant son renvoi ou celui de sa mère.

b. Mme D______ a déclaré s'être occupée des enfants depuis leur naissance. Elle n'avait jamais été mariée à M. A______, même traditionnellement. Elle vivait avec les enfants chez ses parents et faisait des séjours chez ses beaux-parents afin de leur rendre visite environ quelques jours tous les mois. Elle avait quitté le Kosovo en 2015 pendant trois mois pour se rendre compte de la situation en Suisse. C'était le seul moment où les grands-parents s'étaient occupés exclusivement des deux enfants. Elle avait à nouveau quitté son pays en 2016 avec ses enfants. Il n'avait jamais été question qu'elle les laisse au Kosovo, ceux-ci manifestant leur désir de rejoindre leur père. En cas de renvoi au Kosovo, il ne lui serait pas possible de vivre sans ses enfants, même s'ils restaient auprès de leur père en Suisse. Elle souhaitait pouvoir vivre en Suisse avec eux et les voir grandir. Elle insistait sur la nécessité que ses enfants puissent y rester et sur le fait qu'elle-même n'avait plus rien dans son pays. Elle ne pouvait pas vivre sans ses enfants et était prête « à s'occuper d'eux jusqu'à ce qu'ils n'aient plus besoin [d'elle] ».

Ils vivaient depuis mars 2020 tous ensemble, comme une famille, mais elle ne formait pas un couple avec M. A______. Elle ne travaillait pas. Au Kosovo, elle recevait l'aide financière de M. A______ et de sa famille de Genève. Ce dernier venait quelques semaines, deux fois par an, leur rendre visite.

Elle suivait des cours de français depuis 2016, le comprenait mais préférait s'exprimer dans sa langue maternelle.

16) Le 5 juin 2020, M. A______ a transmis des attestations scolaires démontrant l'arrivée en Suisse de ses deux enfants lors de l'année scolaire 2015-2016, le rapport médical pour le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) complété le 3 juin 2020 par le médecin assurant la prise en charge d'B______ depuis septembre 2019 au sein de l'office médico-pédagogique, ainsi que copie du formulaire de changement d'adresse pour Mme D______ envoyé à l'OCPM.

À teneur du rapport médical, la situation d'instabilité créée par le refus d'un séjour en Suisse avait contribué aux angoisses d'B______ avec un impact négatif sur son état psychique. Le traitement consistait en des séances de psychothérapie hebdomadaire individuelle.

17) Le 22 juin 2020, l'OCPM a relevé que des problèmes de santé tels que rencontrés par B______ n'étaient pas rares chez une personne dont la demande d'autorisation de séjour avait été rejetée. B______ serait majeur en octobre 2020. Si la décision de l'OCPM était confirmée, un délai raisonnable lui serait octroyé pour quitter la Suisse, et préparer le retour dans son pays natal, où il avait vécu durant quatorze ans. Au Kosovo, il pourrait se réinstaller chez ses grands-parents maternels chez qui il avait grandi. Mme D______ pourrait le rejoindre, étant précisé que l'OCPM avait l'intention de refuser une autorisation de séjour en sa faveur également. Le renvoi de C______ était également exigible.

18) Le 10 juillet 2020, M. A______ a présenté ses observations finales. Aucune analyse n'avait été faite de la situation de C______. La prise en charge par les grands-parents n'était plus possible en raison de leurs très faibles ressources. La situation de Mme D______, même si celle-ci n'obtenait pas d'autorisation de séjour, n'était pas claire. Rien n'indiquait qu'elle retournerait au Kosovo. L'intention de l'autorité intimée de refuser de lui octroyer une autorisation de séjour ne devait pas être un argument en faveur d'un refus d'autorisation de séjour pour les enfants.

19) Le TAPI a, par jugement du 20 août 2020, rejeté le recours.

Il a retenu que la demande pour regroupement familial en faveur des deux enfants avait été déposée tardivement dans la mesure où le délai de cinq ans courant depuis l'obtention d'une autorisation de séjour par leur père était venu à échéance le 16 mai 2014.

Seule demeurait donc ouverte la question du regroupement familial différé pour des raisons familiales majeures au sens de l'art. 47 al. 4 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), dont les conditions n'étaient pas réalisées en l'espèce.

20) Agissant en son nom et pour le compte de ses deux enfants, M. A______ a formé le 21 septembre 2020 recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement et a conclu à son annulation et à ce qu'une autorisation de séjour au titre de regroupement familial soit accordée à ses enfants B______ et C______.

Les faits tels que retenus en première instance, auxquels il se référait, devaient être complétés, à savoir que Mme D______ avait déposé une demande d'autorisation de séjour à la fin de l'année 2019. Rien n'indiquait qu'elle retournerait dans son pays d'origine si cette demande devait être rejetée et partant qu'elle y prendrait ses enfants en charge, étant relevé qu'elle ne s'était pas réellement souciée de leur qualité de vie et de leur bien-être au moment de quitter le Kosovo pour venir en Suisse.

B______ et C______ ne comprenaient et ne parlaient que peu albanais. En cas de retour au Kosovo, ils devraient débuter une toute nouvelle scolarité leur étant totalement inconnue. Au vu des circonstances, il pouvait être considéré qu'ils étaient parfaitement intégrés dans leur pays d'accueil. On ne pouvait leur imputer les conséquences actuelles des choix faits par leurs parents par le passé.

Sous l'angle de l'application de l'art. 47 al. 4 LEI dont les conditions étaient réalisées en l'espèce, c'était à tort que le TAPI avait écarté, au titre d'élément déterminant pour admettre l'existence de raisons familiales majeures, l'âge avancé ou la mauvaise santé des grands-parents des deux enfants. C'était aussi à tort qu'il avait estimé que dans ces conditions, ces derniers pourraient être pris en charge par leur mère, ce qui était incertain, celle-ci ayant toujours fait passer ses propres intérêts avant ceux de ses enfants. Elle avait certes pris en charge B______ et C______ lors de leurs premières années de vie, mais avait par la suite subitement quitté le Kosovo sans eux, les laissant presque livrés à eux-mêmes. Il était fortement probable qu'à l'avenir elle ne s'en occupe pas au Kosovo, quand bien même sa demande d'autorisation de séjour serait rejetée, étant relevé que dans un tel cas il était probable qu'elle continue à séjourner illégalement en Suisse ou se rende en France sans en informer les enfants ni leur père, comme par le passé. Son ambivalence à cet égard ressortait de ses déclarations devant le TAPI. L'omission par le TAPI de prendre en considération ces circonstances prévisibles était contraire au droit. Ainsi, si les enfants devaient être renvoyés au Kosovo, la situation personnelle et financière des grands-parents paternels et maternels, les seules personnes de la famille y vivant encore puisque la quasi-totalité de la famille de M. A______ vivait désormais à Genève, représenterait un élément déterminant permettant d'admettre l'existence de raisons familiales majeures, sous l'angle du bien des enfants qui devait être préservé.

B______ et C______ avaient émis depuis de nombreuses années le souhait de vivre auprès de leur père et l'aîné souffrait de problèmes de santé, attestés par différents certificats médicaux, liés à sa crainte d'un retour dans un pays où il n'avait plus d'attaches socio-culturelles. Enfin, en dépit d'une séparation entre le père et ses enfants, de ses importants problèmes de santé jusqu'en 2015 et de l'absence de situation financière stable, celui-là avait toujours cherché à rester en contact avec eux par le biais d'envoi d'argent, d'appels téléphoniques ou de visites sur place. Il était incontestable qu'il avait eu un rôle prépondérant dans leur éducation, contrairement à leur mère qui, par des visites régulières chez leurs grands-parents, avait cherché à se décharger d'une partie de cette responsabilité.

Les conséquences d'un renvoi au Kosovo seraient dévastatrices pour le développement des deux enfants, parfaitement intégrés à Genève, ville dans laquelle ils vivaient désormais depuis plusieurs années. Ils maîtrisaient parfaitement le français et avaient rapidement intégré le cursus scolaire ordinaire, l'aîné ayant l'intention d'intégrer la faculté de droit une fois sa maturité obtenue. Un retour au Kosovo leur causerait un traumatisme profond. Ils devraient se reconstruire dans un pays dans lequel ils n'avaient presque plus d'attaches, leur personne de référence, leur père, se trouvant à Genève. Un renvoi ne serait pas raisonnable et risquerait de faire éclater la famille qui s'était reformée en Suisse.

21) Le 21 octobre 2020, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

M. A______ invoquait pour l'essentiel une impossibilité de renvoi de ses enfants, dans la mesure où leur prise en charge au Kosovo ne serait pas garantie, alors que leur bien commandait qu'ils restent auprès de leur père en Suisse. Ces arguments avaient déjà été invoqués devant le TAPI et en l'absence d'élément probant nouveau, l'OCPM se rapportait au jugement querellé et à ses observations du 11 décembre 2019.

22) M. A______ a indiqué ne pas avoir d'observations complémentaires. La cause a été gardée à juger le 12 novembre 2020.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant, agissant pour son compte et celui de ses deux enfants mineurs, ne remet plus en cause la tardiveté de la demande formée au titre de regroupement familial (art. 47 al. 1 LEI). Ainsi l'objet du litige porte désormais uniquement sur les conditions d'application au cas d'espèce de l'art. 47 al. 4 LEI.

3) a. Les raisons familiales majeures au sens des art. 47 al. 4 LEI et 73 al. 3 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) peuvent être invoquées, selon l'art. 75 OASA, lorsque le bien de l'enfant ne peut être garanti que par un regroupement familial en Suisse. C'est l'intérêt de l'enfant, non les intérêts économiques (prise d'une activité lucrative en Suisse), qui prime. Selon la jurisprudence, il faut prendre en considération tous les éléments pertinents du cas particulier. Il y a lieu de tenir compte du sens et des buts de l'art. 47 LEI. Il s'agit également d'éviter que des demandes de regroupement familial différé soient déposées peu avant l'âge auquel une activité lucrative peut être exercée lorsque celles-ci permettent principalement une admission au marché du travail facilitée plutôt que la formation d'une véritable communauté familiale. D'une façon générale, il ne doit être fait usage de l'art. 47 al. 4 LEI qu'avec retenue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1/2017 du 22 mai 2017 consid. 4.1.3 et les références citées).

La reconnaissance d'un droit au regroupement familial suppose qu'un changement important de circonstances, notamment d'ordre familial, se soit produit, telle qu'une modification des possibilités de la prise en charge éducative à l'étranger (ATF 130 II 1 consid. 2 ; 124 II 361 consid. 3a). Il existe ainsi une raison familiale majeure lorsque la prise en charge nécessaire de l'enfant dans son pays d'origine n'est plus garantie, à la suite par exemple du décès ou de la maladie de la personne qui s'en occupait. Lorsque le regroupement familial est demandé en raison de changements importants des circonstances à l'étranger, il convient toutefois d'examiner s'il existe des solutions alternatives permettant à l'enfant de rester où il vit. De telles solutions correspondent en effet mieux au bien-être de l'enfant, parce qu'elles permettent d'éviter que celle-ci ou celui-ci ne soit arraché à son milieu et à son réseau de relations de confiance. Cette exigence est d'autant plus importante pour les adolescentes et adolescents qui ont toujours vécu dans leur pays d'origine dès lors que plus une ou un enfant est âgé, plus les difficultés d'intégration qui la ou le menacent apparaissent importantes. Il ne serait toutefois pas compatible avec l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) de n'admettre le regroupement familial différé qu'en l'absence d'alternative. Simplement, une telle alternative doit être d'autant plus sérieusement envisagée et soigneusement examinée que l'âge de l'enfant est avancé et que la relation avec le parent vivant en Suisse n'est pas (encore) trop étroite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1172/2016 du 26 juillet 2017 consid. 4.3.2 et les références citées).

Le regroupement familial ne saurait être motivé principalement par des arguments économiques (meilleures perspectives professionnelles et sociales en Suisse, prise en charge des frères et soeurs moins âgés, conduite du ménage familial en Suisse) ou par la situation politique dans le pays d'origine (SEM, Directives et commentaires, Domaine des étrangers, 2013, état au 1er novembre 2019 SEM ch. 10.6.2).

 

b. Le parent qui fait valoir le regroupement familial doit disposer de l'autorité parentale ou au moins du droit de garde sur l'enfant (ATF 137 I 284 consid. 2.7 ; 136 II 78 consid. 4.8 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_576/2011 du 13 mars 2012 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-4615/2012 du 9 décembre 2014).

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral rendue sous l'ancien droit mais encore pertinente, le regroupement familial suppose que le parent établi en Suisse ait maintenu avec ses enfants une relation familiale prépondérante en dépit de la séparation et de la distance (ATF 133 II 6 consid. 3.1). On peut notamment admettre qu'il y a une relation familiale prépondérante entre les enfants et le parent vivant en Suisse lorsque celui-ci a continué d'assumer de manière effective pendant toute la période de son absence la responsabilité principale de leur éducation, en intervenant à distance de manière décisive pour régler leur existence sur les questions essentielles, au point de reléguer le rôle de l'autre parent à l'arrière-plan. Pour autant, le maintien d'une telle relation ne signifie pas encore que le parent établi en Suisse puisse faire venir ses enfants à tout moment et dans n'importe quelles conditions. Il faut, comme dans le cas où les deux parents vivent en Suisse depuis plusieurs années séparés de leurs enfants, réserver les situations d'abus de droit, soit notamment celles dans lesquelles la demande de regroupement vise en priorité une finalité autre que la réunion de la famille sous le même toit. Par ailleurs, indépendamment de ces situations d'abus, il convient, surtout lorsque la demande de regroupement familial intervient après de nombreuses années de séparation, de procéder à un examen d'ensemble des circonstances portant en particulier sur la situation personnelle et familiale de l'enfant et sur ses réelles possibilités et chances de s'intégrer en Suisse et d'y vivre convenablement. Pour en juger, il y a notamment lieu de tenir compte de son âge, de son niveau de formation et de ses connaissances linguistiques. Un soudain déplacement de son centre de vie peut en effet constituer un véritable déracinement pour elle ou lui et s'accompagner de grandes difficultés d'intégration dans le nouveau cadre de vie ; celles-ci seront d'autant plus probables et potentiellement importantes que son âge sera avancé (ATF 133 II 6 consid. 3.1.1 ; ATF 129 II 11 consid. 3.3.2).

c. Le désir - pour compréhensible qu'il soit - de voir (tous) les membres de la famille réunis en Suisse, souhait qui est à la base de toute demande de regroupement familial et représente même une condition d'un tel regroupement, ne constitue pas en soi une raison familiale majeure. Lorsque la demande de regroupement familial est déposée hors délai et que la famille a vécu séparée volontairement, d'autres raisons sont nécessaires (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1025/ 2017 du 22 mai 2018 consid. 6.1 et 6.2 et la jurisprudence citée).

 

d. Tant que des raisons objectives et plausibles ne justifient pas le contraire, il y a lieu d'admettre que les conjoints qui vivent volontairement séparés pendant des années manifestent ainsi un moindre intérêt à vivre ensemble (arrêts du Tribunal fédéral 2C_348/2016 du 17 mars 2017 consid. 2.3 et 2C_914/2014 du 18 mai 2015 consid. 4.1 ; SEM, op. cit., ch. 6.10.3).

4) a. Il faut également tenir compte de l'intérêt de l'enfant à maintenir des contacts réguliers avec ses parents, ainsi que l'exige l'art. 3 § 1 de la convention du 20 novembre 1989 relative aux droits de l'enfant (CDE - RS 0.107), étant précisé que les dispositions de la convention ne font toutefois pas de l'intérêt de l'enfant un critère exclusif, mais un élément d'appréciation dont l'autorité doit tenir compte lorsqu'il s'agit de mettre en balance les différents intérêts en présence (ATF 139 I 315 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_153/2018 du 25 juin 2018 consid. 5.2 et 5.3 et les références citées). Lorsque l'enfant est devenu majeur au cours de la procédure de regroupement familial, la CDE ne lui est plus applicable (art. 1 CDE ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_767/2013 du 6 mars 2014 consid. 3.5). Le pouvoir d'appréciation de l'autorité est donc encore plus restreint (arrêt du Tribunal fédéral C/4615/2012 du 9 décembre 2014 consid. 4.4).

b. Enfin, les raisons familiales majeures pour le regroupement familial ultérieur doivent être interprétées d'une manière conforme au droit fondamental au respect de la vie familiale (art. 13 Cst. et 8 CEDH ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1102/2016 du 25 avril 2017 consid. 3.2).

c. Aux termes de l'art. 8 CEDH, toute personne a notamment droit au respect de sa vie privée et familiale. Cette disposition ne confère cependant pas un droit à séjourner dans un État déterminé. Le fait de refuser un droit de séjour à une personne étrangère dont la famille se trouve en Suisse peut toutefois porter atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par cette disposition (ATF 139 I 330 consid. 2.1 ; 135 I 143 consid. 1.3.1 ; 135 I 153 consid. 2.1). Pour autant, les liens familiaux ne sauraient conférer de manière absolue, en vertu de l'art. 8 CEDH, un droit d'entrée et de séjour. Ainsi, lorsqu'une personne étrangère a elle-même pris la décision de quitter sa famille pour aller vivre dans un autre État, ce dernier ne manque pas d'emblée à ses obligations de respecter la vie familiale s'il n'autorise pas la venue des proches de la personne étrangère ou qu'il la subordonne à certaines conditions (arrêt du Tribunal fédéral 2C_153/2018 du 25 juin 2018 consid. 5.3 et les références citées).

Les relations visées par l'art. 8 CEDH sont avant tout celles qui existent entre époux ainsi que les relations entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (ATF 127 II 60 consid. 1d/aa ; 120 Ib 257 consid. 1d). S'agissant d'autres relations entre proches parents, la protection de l'art. 8 CEDH suppose qu'un lien de dépendance particulier lie la personne étrangère majeure qui requiert la délivrance de l'autorisation de séjour et le parent ayant le droit de résider en Suisse en raison, par exemple, d'un handicap ou d'une maladie grave. En revanche, des difficultés économiques ou d'autres problèmes d'organisation ne sauraient être assimilés à un handicap ou une maladie grave rendant irremplaçable l'assistance de proches parents (arrêts du Tribunal fédéral 2C_614/2013 du 28 mars 2014 consid. 3.1 ; 2C_817/2010 du 24 mars 2011 consid. 4).

d. Une ingérence dans l'exercice du droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 CEDH est possible aux conditions de l'art. 8 § 2 CEDH. La question de savoir si, dans un cas d'espèce, les autorités compétentes sont tenues d'accorder une autorisation de séjour fondée sur l'art. 8 CEDH doit être résolue sur la base d'une pesée de tous les intérêts publics et privés en présence. S'agissant d'un regroupement familial, il convient de tenir compte dans la pesée des intérêts notamment des exigences auxquelles le droit interne soumet celui-ci. Il n'est en effet pas concevable que, par le biais de l'art. 8 CEDH, une personne étrangère qui ne dispose, en vertu de la législation interne, d'aucun droit à faire venir sa famille proche en Suisse, puisse obtenir des autorisations de séjour pour celle-ci sans que les conditions posées par les art. 42 ss LEI ne soient réalisées (ATF 142 II 35 consid. 6.1 ; 139 I 330 consid. 2 ; 137 I 284 consid. 2.6).

e. La protection accordée par l'art. 8 CEDH suppose que la relation avec l'enfant - qui doit être étroite et effective (ATF 139 I 330 consid. 2.1) - ait préexisté (arrêts du Tribunal fédéral 2C_537/2009 du 31 mars 2010 consid. 3 ; 2C_490/2009 du 2 février 2010 consid. 3.2.3). On ne saurait accorder le regroupement familial si le regroupant et le regroupé n'ont jamais vécu ensemble, sous réserve de la situation dans laquelle le regroupant fait établir le lien de filiation ultérieurement (Eric BULU, Le regroupement familial différé, in Actualité du droit des étrangers, les relations familiales, 2016, p. 88).

En matière de regroupement familial, sous l'angle de l'art. 8 CEDH, c'est l'âge atteint au moment où le Tribunal fédéral statue qui est déterminant (ATF 120 Ib 257 consid. 1f ; 129 II 11 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_606/2009 du 17 mars 2010 consid. 1).

5) En l'espèce, le changement de circonstances que le recourant invoque est celui de la difficulté des grands-parents maternels et paternels à s'occuper à l'avenir de leurs deux petits-enfants, désormais âgés de 17 et 14 ans, en raison de leur âge et de leur état de santé, respectivement de leur mère, pour le cas où elle devait aussi être renvoyée au Kosovo, dans la mesure où elle ne se plierait pas à cette décision et ferait en tout état passer son propre intérêt avant celui de ses enfants.

Aucun élément, le recourant ayant fini par l'admettre devant le TAPI, ne permet de mettre en doute les affirmations de la mère des enfants devant cette même instance selon lesquelles elle-même et ses enfants ont toujours vécu ensemble au Kosovo, depuis leur naissance et qu'ils n'y pas été pris en charge exclusivement par leurs grands-parents. Ils l'ont en revanche été depuis le départ de Mme D______ du Kosovo en 2015 pendant trois mois et en tous les cas tout au plus jusqu'à l'arrivée des enfants en Suisse en janvier 2016, soit une année au maximum. À leur arrivée en Suisse, c'est encore leur mère qui s'en est occupée, au domicile du frère du recourant, jusqu'à ce que ce dernier déménage en 2017 du canton de Vaud à Genève puis propose à la mère et aux enfants d'emménager dans un appartement (cf. déclarations du recourant devant le TAPI). Ainsi, le fait que les grands-parents soient désormais trop âgés et en mauvaise santé pour s'occuper d'eux ne peut être un élément déterminant vu le rôle éducationnel prépondérant de leur mère dans leur prise en charge, fût-ce alternativement aux domiciles des grands-parents au Kosovo, puis en Suisse.

Dans ces conditions et contrairement à ce que le recourant a soutenu en particulier dans ses écritures du 20 mars 2020, il ne peut être retenu que la mère de ses enfants ne s'est pas investie dans leur éducation et que seul lui l'aurait fait. Au contraire, il n'a plus été présent auprès d'eux depuis au plus tard son arrivée en Suisse en 2009 et ce jusqu'à ce qu'il apprenne en 2017 leur arrivée en Suisse. Le consentement parental signé par Mme D______, précisant que celle-ci consentait à ce que le recourant « prenne la garde des enfants », dans le seul but qu'ils aient « une vie meilleure » n'y change rien.

Au vu du rôle prépondérant et effectivement tenu par Mme D______ dans l'éducation des deux enfants depuis leur naissance, il ne peut être valablement soutenu, comme le fait le recourant, qu'elle ne ferait pas passer les intérêts de ses enfants avant les siens propres en cas de décision de renvoi au Kosovo, étant rappelé que sa situation en Suisse demeure problématique, l'OCPM ayant indiqué son intention de lui refuser une autorisation de séjour et de lui impartir un délai raisonnable pour le départ. Cette mère a au contraire accompagné ses enfants en Suisse sans autorisation de séjour et s'est déclarée prête à s'en occuper jusqu'à ce qu'ils n'aient plus besoin d'elle et faire ce qu'elle pourrait pour leur bien-être.

Durant les onze années, soit de 2006 à 2017, où le père a vécu séparé de la mère de ses enfants et partant de ces derniers, étant rappelé qu'ils n'étaient âgés que de 6 et 2 ans et demi au moment de sa venue en Suisse en 2009, le recourant ne leur a, selon ses propres dires, rendu visite qu'à l'occasion de six courts séjours, et téléphoné. Il n'a nullement prouvé avoir assumé de manière effective leur éducation ni s'être investi d'une quelconque manière dans leur scolarité. Il n'a pas non plus démontré avoir contribué financièrement à leur entretien durant cette période, ne se souvenant pas des montants envoyés pour soutenir ses enfants, tandis que depuis 2016, il a déclaré assumer dans un premier temps partiellement leur prise en charge financière, avec ses frères, puis seul depuis 2017. Le recourant ne peut ainsi se prévaloir d'avoir entretenu une relation étroite et effective avec ses enfants durant ces onze années de séparation.

Même si, à ce jour, les enfants vivent et sont scolarisés en Suisse depuis cinq ans, qu'ils ont renforcé leurs liens avec leur père et qu'ils se sont familiarisés avec les us et coutumes suisses, ces éléments - bien que d'une certaine importance pour leur développement - ne constituent pas à eux seuls des raisons familiales impératives au sens de l'art. 47 al. 4 LEI. Il apparaît également que la venue des enfants en Suisse a été principalement motivée par des considérations d'ordre éducatif et financier. Bien que ces motifs soient compréhensibles, ils ne justifient pas le regroupement familial. Par ailleurs, le recourant ne peut se prévaloir de la bonne intégration sociale et scolaire de ses enfants en Suisse, en reprochant à l'autorité intimée d'en avoir insuffisamment tenu compte, puisque le temps passé par ses enfants en Suisse découle de la politique du fait accompli et relève de la seule responsabilité du recourant et de Mme D______ (arrêts 2C_473/2017 du 2 novembre 2017 consid. 3.2; 2C_153/2018 du 25 juin 2018 consid. 3.5 et 5.5 ; 2C_969/2017 du 2 juillet 2018 consid. 3.5 et les références citées).

Enfin, les enfants sont nés et ont vécu au Kosovo jusqu'à l'âge de 14 et 10 ans. Ils y sont retournés pour des séjours en mars et juin 2018, ainsi que le 2 mai 2019 à teneur des demandes de visas figurant à la procédure. Ils y ont de fortes attaches familiales, notamment en l'état tant avec leurs grands-parents maternels que paternels, et des attaches socio-culturelles. Il est difficile de suivre le recourant lorsqu'il soutient qu'ils ne parleraient que peu la langue de leur pays d'origine où ils ont grandi et ont été scolarisés durant plusieurs années avant d'arriver en Suisse. Leur retour au Kosovo, après un séjour de cinq ans en Suisse, ne sera certes pas exempt de difficultés, en particulier pour l'aîné des enfants, chez lequel cette situation d'incertitude est cause d'angoisses, difficultés qui ne s'avèrent toutefois pas insurmontables, étant relevé que leurs parents ont pris l'initiative de déplacer leur centre de vie - avant d'avoir obtenu l'autorisation idoine - prenant et acceptant le risque de les voir renvoyés avec les conséquences qui en découlent.

Rien n'indique, selon le dossier, que les soins médicaux actuellement en cours en faveur de B______, sous la forme d'un soutien psychothérapeutique, ne pourraient être poursuivis au Kosovo.

Au surplus, la décision litigieuse est conforme au droit sous l'angle de la CDE qui n'accorde aucun droit à une réunification familiale.

Sous l'angle de l'art. 8 CEDH, l'ensemble des circonstances précitées ne donne pas davantage de droits au recourant, étant relevé que celui-ci tente de justifier l'application de cette disposition en raison de l'impossibilité de ramener les enfants auprès de leurs grands-parents au Kosovo. Or, cette éventualité n'a comme retenu ci-dessus pas à être prise en considération.

En tout état, le recourant pourra continuer à entretenir des relations avec ses enfants, comme il l'a fait entre 2006 et janvier 2017, via des séjours au Kosovo et les divers moyens de communication actuels. Il lui sera également loisible de les faire venir en Suisse durant les vacances.

En définitive, le recourant n'invoque en réalité pas de modification de la prise en charge éducative de ses enfants. Certes, les quatre grands-parents étaient impliqués dans la prise en charge de leurs petits-enfants au Kosovo, ce toutefois avec la mère de ces derniers, qui a néanmoins déclaré avoir alors tenu le rôle éducationnel prépondérant. L'élément qui a été en 2018 le déclencheur de la demande de regroupement familial différée du recourant correspond ni plus ni moins à une régularisation d'une situation prévalant depuis janvier 2016.

Par conséquent, le changement de circonstances invoqué par le recourant ne constitue pas des raisons familiales majeures.

Le recourant a également invoqué que ses enfants faisaient déjà montre d'une intégration réussie en Suisse. Il est certes vrai que ses enfants, âgés de 13 et 9 ans au moment de leur arrivée en Suisse en 2016, ont été scolarisés en Suisse, ont appris le français et se sont familiarisés avec les us et coutumes locaux. Cette situation est toutefois contraire à la législation qui impose d'attendre à l'étranger le résultat de la demande de regroupement familial. Le recourant ne peut donc dans ce cadre déduire aucun droit de ce que ses enfants se trouvent déjà en Suisse, ce qui reviendrait à encourager la politique du fait accompli et, par conséquent, à porter atteinte au principe de l'égalité par rapport aux nombreux étrangers qui respectent les procédures établies pour obtenir un titre de séjour en Suisse (ATF 129 II 249 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_969/2017 du 2 juillet 2018 consid. 3.5).

Compte tenu du fait que la mère des enfants, qui a vécu auprès d'eux dans leur pays d'origine avant leur arrivée en Suisse, s'en est occupée sans son époux depuis leur naissance et durant la majeure partie de leur vie au Kosovo, où ces derniers ont suivi la scolarité et possèdent des attaches, notamment familiales et culturelles, un retour dans ce pays - après un séjour de cinq ans en Suisse et des retours sur place en mars et juin 2018 puis en mai 2019 -, n'apparaît pas contraire au bien de l'enfant, étant relevé que l'aîné est désormais majeur et que la CDE ne lui est plus applicable.

Sous l'angle de l'art. 8 CEDH, les parents des deux enfants ont fondé leur famille au Kosovo, le père étant venu vivre en Suisse en 2009 déjà, sans solliciter le regroupement familial avant 2018. Par conséquent, ni Mme D______, ni les deux enfants - les regroupés - n'ont vécu avec leur père - le regroupant - durant les années précédant leur venue en Suisse et le refus des autorisations demandées a pour seule conséquence que le père retrouvera les relations avec ses enfants telles qu'elles ont existé avant la venue de ces derniers en Suisse. Dans ces conditions, la décision attaquée ne saurait être considérée comme contraire à l'art. 8 CEDH.

Au vu de ce qui précède, la condition des raisons familiales majeures au sens de l'art. 47 al. 4 LEI n'est pas réalisée, de sorte que le regroupement familial différé ne peut être admis, ce qui, au regard des principes et circonstances susmentionnés, est conforme à la LEI, à la CDE et à la CEDH. Pour ces raisons, l'autorité intimée n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en refusant au recourant des autorisations de séjour au titre du regroupement familial pour son épouse et leurs enfants, ce que le TAPI a, à juste titre, confirmé.

6) a. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, toute personne étrangère dont l'autorisation est refusée, révoquée ou qui n'est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyée. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64 let. d al. 1 LEI).

b. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI). L'exécution n'est pas possible lorsque la personne concernée ne peut quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers ni être renvoyée dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n'est pas licite lorsqu'elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEI). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger la personne étrangère, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

c. En l'espèce, le recourant invoque que le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse, soit la CDE. Tel n'est cependant pas le cas, comme examiné précédemment.

Certes, un retour au Kosovo n'ira pas sans difficultés de réintégration pour les deux adolescents, qui y retrouveront néanmoins notamment leurs grands-parents paternels et maternels avec lesquels ils ont gardé des contacts à tout le moins de par leurs séjours sur place en 2018 et 2019.

Il ne ressort pour le reste pas du dossier que le renvoi serait impossible, illicite ou inexigible.

C'est par conséquent à bon droit que le renvoi des deux enfants du recourant a été prononcé et l'exécution de celui-ci ordonnée.

Dans ces circonstances, la décision de l'OCPM est conforme au droit et le recours contre le jugement du TAPI, entièrement mal fondé, sera rejeté.

7) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 21 septembre 2020 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 20 août 2020 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Andrea Von Flüe, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Lauber et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.