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Décisions | Chambre civile

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C/19852/2021

ACJC/1375/2022 du 18.10.2022 sur OTPI/480/2022 ( SDF ) , MODIFIE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/19852/2021 ACJC/1375/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU MARDI 18 OCTOBRE 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______[GE], appelante d'une ordonnance rendue par la 22ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 14 juillet 2022, comparant par Me B______, avocat, ______, Genève, en l'Etude duquel elle fait élection de domicile,

et

Monsieur C______, domicilié ______[GE], intimé, comparant par Me Lida LAVI, avocate, Lavi Avocats, Grand-Rue 8, 1204 Genève, en l'Etude de laquelle il fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/480/2022 du 14 juillet 2022, reçue le 19 juillet 2022 par A______, le Tribunal de première instance, statuant sur mesures provisionnelles de divorce, a condamné C______ à payer à la précitée 9'000 fr. à titre de provisio ad litem (chiffre 1 du dispositif), réservé sa décision finale quant au sort des frais judiciaires (ch. 2), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 3) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 4).

B. a. Par acte déposé le 29 juillet 2022 au greffe universel du Pouvoir judiciaire, A______ forme appel contre l'ordonnance précitée, dont l'on comprend qu'elle requiert l'annulation. Elle conclut à ce que C______ soit condamné à lui verser, à titre de provisio ad litem, 15'000 fr. "pour toute la procédure de divorce" et 5'000 fr. "pour la présente procédure d'appel", "le sort des frais de la présente procédure d'appel" devant être "réservé jusqu'au jugement au fond".

Elle allègue des faits nouveaux et produit des pièces qui ne figurent pas au dossier de première instance, soit une décision du 14 décembre 2020 de refus de l'assistance juridique (pièce 1.02), ainsi que quatre factures de son conseil, datées des 12 avril 2021, 1er novembre 2021, 4 avril 2022 et 29 juillet 2022 (pièces 1.04 et 1.05).

Cette dernière facture s'élève à 3'388 fr. 10, TVA à 7.7 % comprise, pour 5.416 heures de chef d'étude (500 fr./h) et 1.75 heures d'avocat-stagiaire (250 fr./h) effectuées du 5 avril au 27 juillet 2022. Il en résulte que l'activité déployée après le prononcé de l'ordonnance attaquée représente 3.25 heures de chef d'étude et 1.70 heures d'avocat-stagiaire; cette activité peut être chiffrée à 2'207 fr. 85 ([1'625 fr. + 425 fr.] + 7.7 %).

b. A______ a versé l'avance de frais de 800 fr. qui lui avait été demandée par décision du 3 août 2022.

c. Dans sa réponse du 5 septembre 2022, C______ conclut à la confirmation de l'ordonnance attaquée, avec suite de frais.

Il allègue des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles, soit un courrier qu'il a adressé le 2 août 2022 au conseil de son épouse, un avis de débit du 3 août 2022 et un ordre permanent créé le 1er septembre 2022 (pièce 3). Il résulte de ces pièces son engagement à verser à A______ la provisio ad litem de 9'000 fr. par six versements de 1'500 fr. d'août 2022 à janvier 2023.

d. Les parties ont été informées le 26 septembre 2022 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent du dossier soumis à la Cour de justice.

a. C______, né le ______ 1957, et A______, née le ______ 1969, se sont mariés le ______ 1995 à D______ sous le régime de la séparation de biens.

Ils sont les parents de E______, née le ______ 1995, et F______, né le ______ 1998, actuellement majeurs.

b. Par arrêt du 9 juin 2017, la Cour, statuant sur un appel formé par A______ contre un jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale rendu par le Tribunal le 9 novembre 2016, a attribué à celle-ci la jouissance exclusive du domicile conjugal et du mobilier le garnissant, à charge pour elle d'en acquitter les frais, notamment hypothécaires, à hauteur de 2'200 fr. par mois, condamné C______ à quitter le domicile conjugal dans un délai de trois mois à compter du prononcé de l'arrêt, condamné C______ à verser à F______, par mois et d'avance, allocations familiales ou d'études non comprises, la somme de 2'950 fr. à titre de contribution à son entretien, en cas de formation ou d'études régulièrement suivies, et invité, et condamné en tant que de besoin, C______ à rétrocéder à F______ et à E______ les allocations familiales ou d'études reçues le cas échéant en leur faveur.

La Cour a en outre condamné C______ à verser à A______, à titre de contribution à son entretien, par mois et d'avance, la somme de 4'950 fr. et à s'acquitter des frais du domicile conjugal, notamment hypothécaires, sous déduction des montants de 2'200 fr. par mois à charge de A______, de 472 fr. par mois à charge de E______ et de 472 fr. par mois à charge de F______.

La Cour a également condamné C______ à verser à A______ la somme de 9'000 fr. à titre de provisio ad litem pour la procédure de première instance, étant précisé qu'en appel l'épouse réclamait en dernier lieu une provisio ad litem de 25'000 fr. pour les deux instances.

Pour le surplus, la Cour a confirmé le jugement attaqué, notamment en tant qu'il arrêtait les frais judiciaires à 2'000 fr. et les compensait avec l'avance du même montant qu'avait versée A______.

b.a La Cour a retenu que l'épouse, âgée à l'époque de 48 ans, n'avait pas exercé d'activité lucrative depuis 22 ans. Elle s'était exclusivement dédiée à l'éducation des enfants des parties. Avant son mariage, elle avait exercé une activité professionnelle durant seulement six ans en tant qu'employée de commerce. Même si elle n'avait pas de problème de santé particulier, que ses enfants étaient majeurs et qu'elle tentait de trouver un emploi, il paraissait peu probable qu'elle y parvienne. Au vu de ces circonstances, l'on ne pouvait attendre d'elle qu'elle reprenne, à tout le moins à court ou moyen terme, une activité lucrative.

Les charges mensuelles incompressibles de l'épouse rendues vraisemblables s'élevaient à 4'954 fr., arrêtées à 4'950 fr., comprenant 1'350 fr. d'entretien de base OP, 2'204 fr. de frais de logement (70% de 3'148 fr., les enfants participant chacun à hauteur de 15%), 646 fr. de primes d'assurance maladie,
88 fr. de frais médicaux, 70 fr. de frais de transport et 600 fr. de charge fiscale estimée.

b.b La Cour a considéré que la situation financière de l'époux était "organisée de façon complexe, si ce n'était opaque". Elle a retenu, sur la base de l'ensemble des éléments du dossier, qu'il disposait de ressources s'élevant à 12'000 fr. nets par mois au minimum, comprenant les prestations de l'assurance chômage et/ou ses revenus découlant de son activité d'indépendant, ainsi que ceux provenant de sa fortune immobilière et mobilière.

Les charges mensuelles incompressibles de C______ rendues vraisemblables s'élevaient à 4'111 fr., arrêtées à 4'100 fr., comprenant 1'200 fr. d'entretien de base OP, 1'300 fr. de frais de logement estimés, 637 fr. de prime d'assurance maladie, 154 fr. de frais médicaux, 70 fr. de frais de transport et 750 fr. de charge fiscale estimée.

b.c La Cour a estimé l'activité déployée pour la défense de l'épouse en première instance à 18 heures de travail, soit quatre heures d'entretien avec la cliente, trois heures pour deux audiences tenues devant le Tribunal, huit heures de rédaction de la requête, une heure de production d'un chargé de pièces, une heure de prise de connaissance du mémoire et des pièces de la partie adverse et une heure de téléphones et courriers. Au taux horaire de 400 fr., tarif raisonnable au vu de la complexité et de la nature de la procédure, le montant des honoraires pouvait être estimé à 7'200 fr., auquel il convenait d'ajouter les débours y relatifs, la TVA et la somme de 1'000 fr. de frais judiciaires, à savoir un montant total raisonnable arrêté à 9'000 fr.

Pour ce qui était de la provisio ad litem sollicitée pour la procédure d'appel, celle-ci se terminait par le prononcé de l'arrêt du 9 juin 2017, qui allait condamner l'époux à s'acquitter des frais judiciaires y relatifs ainsi qu'à verser en faveur de A______ une somme à titre de dépens. La condamnation de C______ à verser à son épouse une provisio ad litem pour la procédure d'appel n'était donc pas justifiée.

c. Par acte du 14 octobre 2021, A______ a formé devant le Tribunal une requête unilatérale en divorce, en concluant à l'attribution à son mari de la jouissance exclusive du domicile conjugal avec tous les droits et obligations en résultant, ainsi que du mobilier le garnissant, exceptés les biens mobiliers relevant de sa propriété exclusive, à la condamnation de C______ à lui verser, par mois et d'avance, une contribution d'entretien de 8'000 fr., avec effet rétroactif au 1er octobre 2021, sous déduction des montants déjà versés à ce titre, ainsi qu'au partage par moitié des avoirs de prévoyance professionnelle.

Sur mesures provisionnelles, A______ a conclu à la condamnation de C______ à lui verser une provisio ad litem de 15'000 fr. "pour toute la procédure de divorce".

Préalablement, elle a sollicité la production par son mari de toutes les pièces concernant sa situation personnelle et financière, à savoir notamment, pour la période de 2017 au 14 octobre 2021, ses déclarations fiscales suisses et étrangères, annexes comprises, ses avis de taxation et ses bordereaux de taxation ICC/IFD, les relevés détaillés de ses comptes postaux et bancaires en Suisse et à l'étranger et les relevés détaillés de ses cartes de crédit. Elle a demandé également la production par son époux de toutes pièces justificatives concernant la cession ou vente de ses actions et parts sociales de G______, tous les contrats de bail à loyer des biens lui appartenant, les éventuelles attestations d'intégralité auprès des institutions bancaires suivantes: "H______, I______, P______, J______, K______, L______, M______", le relevé actualisé de ses avoirs LPP, ainsi que toutes les pièces justifiant ses charges mensuelles incompressibles.

d. Par ordonnance du 21 octobre 2021, le Tribunal a fixé l'avance de frais due par A______ à 15'500 fr., dont 15'000 fr. pour la requête de divorce, et a suspendu le délai de paiement jusqu'à décision sur la requête de provisio ad litem.

e. Lors de l'audience de conciliation du Tribunal du 13 janvier 2022, à laquelle l'époux n'était ni présent ni représenté, A______ a déclaré que le précité lui versait "actuellement" une contribution d'entretien de 5'350 fr. et avait pris à sa charge des frais médicaux non couverts pour 600 fr. environ, ainsi que ses cotisations AVS.

Elle a produit notamment un relevé bancaire faisant état de crédits mensuels en sa faveur de 5'350 fr. d'avril à septembre 2021.

f. Lors de l'audience du Tribunal du 10 février 2022, C______ s'est déclaré d'accord sur le principe du divorce ainsi qu'avec l'attribution à lui-même du domicile conjugal. Dans la mesure où les époux étaient séparés de biens, les rapports patrimoniaux avaient d'ores et déjà été liquidés. C______ était en outre d'accord avec le partage des avoirs de prévoyance professionnelle: dans la mesure où son épouse n'avait pas travaillé pendant le mariage, seuls ses propres avoirs LPP accumulés du ______ 1995 au 14 octobre 2021 devaient être partagés.

L'époux a déclaré qu'il allait avoir 65 ans quelques semaines plus tard et qu'il n'avait plus d'activité professionnelle. Il s'opposait au versement d'une provisio ad litem, dans la mesure où il n'avait plus de revenus.

g. Dans sa réponse du 28 avril 2022, C______ a conclu, sur le fond, au prononcé du divorce, à l'attribution à lui-même de la jouissance exclusive du domicile conjugal, avec les droits et obligations en résultant, ainsi que du mobilier le garnissant, à sa condamnation à verser à son épouse une contribution d'entretien de 3'920 fr. à compter de l'entrée en force du jugement de divorce, avec clause d'indexation, à la constatation du fait que le régime matrimonial était liquidé, ainsi qu'au partage par moitié des avoirs de prévoyance professionnelle.

Sur mesures provisionnelles, il a conclu au rejet de la requête de provisio ad litem de son épouse.

Préalablement, il a demandé au Tribunal d'inviter A______ à produire les relevés de ses comptes bancaires en Suisse et à l'étranger pour les deux dernières années, toutes attestations relatives à ses prestations de libre passage et toutes attestations relatives à ses assurances-vie.

g.a C______ a allégué que ses revenus mensuels s'élevaient en moyenne à 17'518 fr. 85, comprenant 13'266 fr. 66 et 600 fr. de revenus locatifs d'un immeuble aux N______, 2'889 fr. 19 de revenus locatifs d'une partie de sa villa et 763 fr. de revenu locatif net provenant d'un bien immobilier situé à O______ (France). Il ne percevait aucun revenu de ses activités ponctuelles de "consulting" en stratégie, lesquelles consistaient à "conseiller gratuitement de jeunes entrepreneurs".

Il a allégué 22'900 fr. 18 de charges mensuelles, comprenant 1'200 fr. de base mensuelle OP, 260 fr. d'AVS, 460 fr. 80 d'assurance-maladie, 35 fr. 60 à titre de LCA, 271 fr. 40 d'"assurance complémentaire", 3'833 fr. d'impôts, 800 fr. de "ménage", 250 fr. pour le mazout, 333 fr. pour l'entretien de la piscine, 250 fr. pour l'"eau", 875 fr. d'électricité, 600 fr. des frais de fiduciaire, 270 fr. pour le téléphone et Internet, 1'543 fr. dus à la Régie Q______ (N______), 38 fr 25 de protection juridique, 129 fr 45 d'assurance bâtiment, 31 fr. 52 d'assurance combinée (choses), 91 fr. 66 de frais de gestion (assurances), 1'097 fr. 50 d'intérêts hypothécaires, 2'420 fr. pour l'entretien de son fils F______ (2019), 4'950 fr. pour l'entretien de son épouse, 260 fr. pour l'AVS de son épouse et 3'000 fr. à titre de "remboursement cartes de crédit".

Il devait ainsi faire face à un déficit de 5'381 fr. 33, ce qui l'obligeait à "continuellement puiser dans sa fortune, notamment en vendant divers biens immobiliers". C'est ainsi qu'il avait "d'ores et déjà été dans l'obligation de se séparer" d'un immeuble situé à R______ (VD), d'un étage de bureaux (5ème) aux N______ vendu à S______ en 2017, ainsi que d'un étage de bureaux (1er) aux N______ vendu à terme en 2017 avec une échéance au 30 novembre 2022.

h. Par acte expédié le 16 mai 2022 au Tribunal, C______ a allégué qu'à compter du 1er novembre 2022, il ne percevrait qu'un revenu AVS de 2'350 fr. par mois, une rente du deuxième pilier estimée à 1'555 fr., 780 fr. de revenu de l'appartement de O______ et 2'889 fr. correspondant aux revenus de la colocation de la villa de T______, soit au total 7'574 fr.

Il a en outre fait valoir que son épouse pouvait "trouver une activité peu qualifiée, tout au moins à temps partiel pour compléter ses revenus".

"La proposition d'une rente de CHF 3'900.-- n'[était] donc plus opportune au vu de ce qui préc[édait] compte tenu des charges qui [lui] incomb[aient]".

i. La cause a été gardée à juger sur mesures provisionnelles par le Tribunal dès l'attribution de la cause à la 22ème chambre par ordonnance du 11 juillet 2022.

D. Dans l'ordonnance attaquée, le Tribunal a considéré que A______ n'avait ni revenu ni fortune et dépendait exclusivement de la contribution d'entretien versée par son époux. Celui-ci alléguait percevoir des loyers pour un total de 17'519 fr. et possédait une fortune immobilière importante. Indépendamment de la situation financière de C______, qui n'était pas démontrée concernant tant ses revenus que sa fortune, le premier juge a retenu que la seule fortune alléguée par celui-ci lui permettait de verser une provisio ad litem.

Sur la question demeurée litigieuse en appel, soit la quotité de la provisio ad litem, le Tribunal a considéré que A______ n'avait produit aucune note d'honoraires intermédiaire. Cela étant, la demande en divorce intervenait suite à une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale et ne portait que sur la contribution d'entretien et le partage des avoirs LPP, de sorte que le montant de la provisio ad litem ne devait pas excéder celui accordé dans le cadre de la précédente procédure, soit 9'000 fr.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions sur mesures provisionnelles sont susceptibles d'appel, lorsque l'affaire est de nature pécuniaire, si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions devant le Tribunal atteint 10'000 fr. (art. 308 al. 1 let. b et
al. 2 CPC).

En l'espèce, la cause porte sur une provisio ad litem de 15'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Interjeté dans le délai utile de dix jours (art. 271 let. a, 276 al. 1 et 314 al. 1 CPC) et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable.

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC). L'instance d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1). Conformément à l'art. 311 al. 1 CPC, elle le fait cependant uniquement sur les points du jugement que l'appelant estime entachés d'erreurs et qui ont fait l'objet d'une motivation suffisante - et, partant, recevable - pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) ou pour constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). Hormis les cas de vices manifestes, elle doit en principe se limiter à statuer sur les critiques formulées dans la motivation écrite contre la décision de première instance (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_111/2016 du 6 septembre 2016 consid. 5.3).

1.4 Les mesures provisionnelles étant soumises à la procédure sommaire, avec administration restreinte des moyens de preuve, la cognition du juge est limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, l'exigence de célérité étant privilégiée par rapport à celle de sécurité (ATF 127 III 474 consid. 2b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1).

1.5 En tant qu'il concerne l'entretien de l'épouse (provisio ad litem), le litige est soumis à la maxime inquisitoire simple (art. 272 et 276
al. 1 CPC) et au principe de disposition (art. 58 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_970/2017 du 7 juin 2018 consid. 3.1).

2. Les parties allèguent des faits nouveaux et produisent de nouvelles pièces.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

2.2 En l'espèce, la facture du 29 juillet 2022 du conseil de l'appelante, produite par celle-ci, le courrier du 2 août 2022 de l'intimé au conseil de l'appelante, l'avis de débit du 3 août 2022 et l'ordre permanent du 1er septembre 2022, produits par l'intimé, sont recevables, dans la mesure où ces pièces sont postérieures à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger. Les faits nouveaux résultant de ces pièces sont également recevables.

Les autres pièces nouvelles des parties - comme les faits qu'elles visent - sont en revanche irrecevables, puisqu'elles auraient pu être produites en première instance.

3. L'appelante fait grief au Tribunal d'avoir fixé une provisio ad litem insuffisante, sans tenir compte "de la différence substantielle existante entre une procédure MPUC - soumise à la procédure sommaire -, d'une part, et une procédure en divorce - soumise à la procédure ordinaire -, d'autre part", ni de l'avance de frais qui lui avait été demandée le 21 octobre 2021.

L'intimé allègue que les charges actuelles de l'appelante sont de 4'235 fr. 60 par mois (1'200 fr. de base mensuelle OP, 1'810 fr. de loyer, 556 fr. d'assurance-maladie, 37 fr. 60 d'assurance-ménage, 50 fr. de frais de téléphone "usuels" et 582 fr. d'impôts estimés), de sorte que celle-ci bénéficie d'un disponible mensuel de 714 fr. (4'950 fr. de pension, sous déduction des charges admises), lui permettant d'assumer seule la couverture des frais, après qu'il se sera acquitté de la provisio ad litem de 9'000 fr. Par ailleurs, l'intimé allègue que son revenu sera de 6'019 fr. par mois dès novembre 2022 (rente AVS estimée à 2'350 fr., 2'889 fr. de revenus relatifs à la location des chambres de la villa et 780 fr. provenant de la location du bien immobilier de O______). Il fait valoir que, compte tenu de ses charges, il "accusera très prochainement un déficit très conséquent l'obligeant d'une part à réduire drastiquement son train de vie et, d'autre part, à puiser dans sa fortune personnelle".

3.1

3.1.1 D'après la jurisprudence, une provisio ad litem est due à l'époux qui ne dispose pas lui-même des moyens suffisants pour assumer les frais du procès; le juge ne peut toutefois imposer cette obligation que dans la mesure où son exécution n'entame pas le minimum nécessaire à l'entretien du conjoint débiteur et des siens (ATF 103 Ia 99 consid. 4; arrêts du Tribunal fédéral 5A_808/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.1; 5A_784/2008 du 20 novembre 2009 consid. 2). Le fondement de cette prestation - devoir d'assistance (art. 159 al. 3 CC) ou obligation d'entretien (art. 163 CC) - est controversé (arrêts du Tribunal fédéral 5A_62/2011 du 26 juillet 2011 consid. 2.2; 5P.346/2005 du 15 novembre 2015 consid. 4.3 et les références citées, publié in FamPra.ch 2006 p. 892), mais cet aspect n'a pas d'incidence sur les conditions qui président à son octroi. En tout état de cause, selon l'art. 163 al. 1 CC, la loi n'institue plus un devoir général d'entretien à la charge du mari (art. 160 al. 2 aCC; ATF 110 II 116 consid. 2a), mais une prise en charge conjointe des besoins de la famille au regard des facultés de chacun des époux (arrêt du Tribunal fédéral 5A_590/2019 du 13 février 2020 consid. 3.3).

Le montant de la provisio ad litem doit être proportionné aux facultés financières de l'autre conjoint et correspondre aux frais prévisibles de l'action judiciaire entreprise (ATF 103 Ia 99 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_778/2012 du 24 janvier 2013 consid. 6.1; arrêt de la Cour de justice du 30 mai 1980 publié in SJ 1981 p. 126).

Les contributions d'entretien ayant, en principe, pour but de couvrir les besoins courants des bénéficiaires, et non de servir, comme la provisio ad litem, à assumer les frais de procès en divorce, l'octroi d'une telle provision peut donc être justifié indépendamment du montant de la contribution d'entretien (arrêts du Tribunal fédéral 5A_808/2016 du 21 mars 2017 consid. 4.1 et 5A_372/2015 du 29 septembre 2015 consid. 4.1).

Le versement d'une provisio ad litem interviendra lorsque la partie qui la requiert ne pourrait pas assumer les frais d'un procès sans recourir à des moyens qui lui seraient nécessaires pour couvrir son entretien courant. La situation de besoin peut être admise même lorsque les revenus excèdent de peu les besoins courants. Un éventuel excédent entre le revenu à disposition et le minimum vital de la partie requérante doit être mis en relation avec les frais prévisibles de justice et d'avocat dans le cas concret : l'excédent mensuel devrait lui permettre de rembourser les frais de justice dans un délai d'un an s'ils sont peu élevés ou de deux ans s'ils sont plus importants. Il est également déterminant que la partie puisse, au moyen de l'excédent dont elle dispose, procéder aux avances de frais de justice et d'avocat dans un délai raisonnable (FamPra 2008, n. 101, p. 965; ACJC/1212/2020 du 1er septembre 2020 consid. 3.1.1).

3.1.2 Aux termes de l'art. 98 CPC, le tribunal peut exiger du demandeur une avance à concurrence de la totalité des frais judiciaires présumés. Pour déterminer le montant des frais, il y a lieu de se référer au tarif des frais prévu par le droit cantonal (art. 96 CPC).

L'art. 5 RTFMC dispose que les émoluments et les dépens sont arrêtés compte tenu, notamment, des intérêts en jeu, de la complexité de la cause, de l'ampleur de la procédure ou de l'importance du travail qu'elle a impliqué.

L'émolument forfaitaire de décision pour une demande unilatérale en divorce est fixé entre 1'000 fr. et 3'000 fr. (art. 30 al. 1 RTFMC). Ce montant, au vu des critères de l'article 5 RTFMC, peut être augmenté jusqu'à 20'000 fr. au plus si l'un au moins des montants figurant dans les conclusions ou fixé par convention ou alloué par jugement dépasse 5'000 fr. par mois pour les contributions en faveur d'une partie ou d'un enfant ou 400'000 fr. pour une prétention en capital ou en nature (art. 30 al. 2 let. b RTFMC).

Selon le ch. 5.3.2 du tarif interne des demandes d'avances de frais pour le TPI - adopté par la présidence du Tribunal le 28 janvier 2011 et modifié en dernier lieu le 12 octobre 2018 (ci-après: le tarif interne du Tribunal), disponible sur le site internet du Pouvoir judiciaire -, pour une contribution mensuelle entre 7'501 fr. et 10'000 fr. ou une prétention en capital ou en nature entre 600'001 fr. et 1'000'000 fr., le montant de l'avance de frais est de 15'000 fr.

3.1.3 Le devoir de l'Etat d'accorder l'assistance judiciaire à un plaideur impécunieux dans une cause non dénuée de chances de succès est subsidiaire à l'obligation d'entretien qui résulte du droit de la famille (ATF 138 III 672 consid. 4.2.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_556/2014 du 4 mars 2015 consid. 3.1).

3.2 En l'espèce, en considérant que la provisio ad litem ne devait pas excéder le montant de 9'000 fr. accordé dans le cadre de la procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, le Tribunal a perdu de vue le fait que, par ordonnance du 21 octobre 2021, il avait réclamé à l'appelante une avance de frais de 15'000 fr. - calculée conformément aux dispositions du RTFMC et du tarif interne du Tribunal - pour la requête unilatérale de divorce. Il apparaît ainsi que le montant alloué par le premier juge ne correspond pas aux frais prévisibles de l'action judiciaire entreprise, sans qu'il ne soit nécessaire de déterminer si la somme réclamée est raisonnable par rapport à l'activité à déployer par le conseil de l'appelante. Il est rappelé en outre que l'obligation d'assistance et d'entretien entre époux prime le devoir de l'Etat d'accorder l'assistance judiciaire au plaideur indigent dans un procès non dénué de chances de succès.

La question de savoir si, compte tenu de la contribution d'entretien qu'elle perçoit et de ses charges actualisées, l'appelante bénéficie d'un disponible mensuel, comme le soutient l'intimé, peut demeurer indécise. En effet, si tel était le cas, elle devrait consacrer l'éventuel excédent au paiement, dans un délai raisonnable, de ses frais d'avocat.

Enfin, l'intimé ne fournit aucun élément concret permettant de douter de son aisance financière. Comme en 2017, la situation financière de l'intimé est organisée de façon complexe et opaque. Celui-ci admet, en tout cas jusqu'à fin octobre 2022, un revenu mensuel de l'ordre de 17'500 fr., composé exclusivement de revenus locatifs. Il ne fournit aucune précision ni aucune pièce relative à sa fortune immobilière et mobilière. Il admet qu'il a vendu divers biens immobiliers, notamment un immeuble situé dans le canton de Vaud et deux étages de bureaux situés dans le quartier des N______, sans cependant préciser les bénéfices réalisés. Dans ces conditions, il y a lieu de retenir que sa faculté de verser une provisio ad litem de 15'000 fr. est rendue vraisemblable.

En définitive, le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance attaquée sera modifié en ce sens que la provisio ad litem due par l'intimé à l'appelante sera fixée à 15'000 fr.

4. L'appelante conclut au versement d'une provisio ad litem de 5'000 fr. pour faire face à ses frais de la présente procédure d'appel. Elle conclut à ce que le sort de ces frais soit "réservé jusqu'au jugement de divorce au fond", alors que l'intimé conclut à ce que les frais judiciaires et dépens de la présente procédure soient mis à la charge de l'appelante.

4.1

4.1.1 Le tribunal statue sur les frais en règle générale dans la décision finale (art. 104 al. 1 CPC). La décision sur les frais des mesures provisionnelles peut être renvoyée à la décision finale (art. 104 al. 3 CPC).

Les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie succombante (art. 95 et 106 1ère phrase CPC). La Cour peut s'écarter des règles générales et répartir les frais selon sa libre appréciation, notamment lorsque le litige relève du droit de la famille (art. 107 al. 1 let. c CPC).

4.1.2 Lorsque la procédure est arrivée à son terme, il ne se justifie plus de statuer sur l'octroi d'une provisio ad litem. Une telle requête ne devient toutefois pas sans objet. Ainsi, dans l'hypothèse où des frais devraient être mis à charge de la partie ayant requis une provisio ad litem, et/ou qu'aucun dépens ne lui est alloué (p. ex. en cas de compensation de dépens), la situation financière de ladite partie, ainsi que celle de l'autre partie, doivent être examinées, afin de déterminer si la partie ayant requis la provisio ad litem a les moyens d'assumer les frais demeurant à sa charge (arrêt du Tribunal fédéral 5A_590/2019 du 13 février 2020 consid. 3.5).

4.2 En l'espèce, il y a lieu de statuer sur les frais d'appel dans la présente décision au fond.

Les frais judiciaires d'appel seront fixés à 800 fr. (art. 31 et 37 RTFMC). Ils seront mis à la charge de l'intimé, qui succombe intégralement, et compensés avec l'avance effectuée par l'appelante, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). L'intimé versera à l'appelante 800 fr. à titre de restitution de l'avance de frais (art. 111 al. 2 CPC).

L'intimé versera également à l'appelante 2'300 fr., débours et TVA compris (art. 84, 85 et 90 RTFMC; art. 25 et 26 LaCC), de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de provisio ad litem formée par cette dernière pour la présente procédure.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 29 juillet 2022 par A______ contre l'ordonnance OTPI/480/2022 rendue le 14 juillet 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/19852/2021.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du dispositif de l'ordonnance attaquée et, statuant à nouveau sur ce point :

Condamne C______ à verser à A______ une provisio ad litem de 15'000 fr.

Confirme l'ordonnance attaquée pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., les met à la charge de C______ et les compense avec l'avance effectuée, laquelle demeure acquise à l'État de Genève.

Condamne C______ à verser à A______ 800 fr. à titre de restitution de l'avance des frais d'appel et 2'300 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Sophie MARTINEZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 113 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours constitutionnel subsidiaire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF inférieure à 30'000 fr.