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Décisions | Chambre civile

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C/19461/2020

ACJC/1171/2022 du 06.09.2022 sur DTPI/1115/2022 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/19461/2020 ACJC/1171/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du mardi 6 septembre 2022

 

Pour

A______, sise ______[GE], recourante contre une décision rendue par la 22ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 2 février 2022, comparant par Me Marc BELLON, avocat, BELLON & DE RHAM, rue Pierre-Fatio 12, case postale 3055, 1211 Genève 3, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A. Par décision DTPI/1115/2022 du 2 février 2022, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) a imparti à A______ un ultime délai au
16 février 2022 pour fournir une avance de frais de 8'000 fr., à défaut de quoi il ne serait pas entré en matière sur sa requête.

B. a. Par acte déposé au greffe de la Cour de justice (ci-après : la Cour) le
9 février 2022, A______ a recouru contre cette décision, qu'il a reçue le 4 février 2022, requérant son l'annulation, avec suite de frais judiciaires et dépens. A titre préalable, il a sollicité l'octroi de l'effet suspensif à son recours.

b. Par décision du 10 février 2022, la Cour a accordé la suspension de l'effet exécutoire attaché à la décision entreprise compte tenu du l'existence d'un préjudice difficilement réparable en cas de non-paiement de l'avance de frais contestée.

c. Invité à se déterminer sur le recours, le Tribunal s'en est rapporté à justice.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. B______ et C______ exploitent conjointement un bureau d'architectes au travers d'une société en nom collectif ayant pour raison sociale A______ .

b. Par décision du 1er mars 2021, C______ a été admise au bénéfice de l'assistance juridique avec effet au 27 janvier 2021 (date de la requête) en vue d'agir en paiement à l'encontre de D______ dans les causes C/19461/2020 et C/1______/2021. La première procédure, introduite le
30 septembre 2020 en vue de conciliation, visait à récupérer la somme de
95'134 fr. 45 TTC (intérêts en sus). La seconde, introduite le 8 février 2021 en vue de conciliation, visait à récupérer la somme de 34'496 fr. 47 (intérêts en sus) ainsi qu'à obtenir la mainlevée définitive formée au commandement de payer,
poursuite n° 2______.

c. Par actes du 21 juin 2021, A______ a introduit les causes précitées devant le Tribunal, vu l'échec de conciliation. Par ordonnance du
12 juillet 2021, cette juridiction a joint les procédures sous n° C/19461/2020. Elle a suspendu la procédure par ordonnance du 4 octobre 2021 après que D______ avait relevé que les demandes au fond avaient été déposées par la société en nom collectif et non par C______, qui était seule bénéficiaire de l'aide étatique.

d. Par décisions des 26 novembre et 9 décembre 2021, notifiées le
13 décembre 2021, la Vice-présidente du Tribunal a, respectivement, refusé d'octroyer l'aide étatique à A______ , qui n'en remplissait pas les conditions, et retiré le bénéfice de l'assistance juridique à C______ avec effet au 10 décembre 2021.

e. Par ordonnance ORTPI/1439/2021 du 21 décembre 2021, le Tribunal a ordonné la reprise de la procédure sur le fond, transmis les décisions rendues par l'Assistance juridique à D______ et imparti un délai à A______ pour verser une avance de frais de 8'000 fr.

Par ordonnance OTPI/962/2021 du même jour, le Tribunal a condamné la précitée à fournir, dans un délai de 30 jours à compter de la notification de la décision, soit en espèces auprès des Services financiers du Pouvoir judiciaire, soit sous forme de garantie d'une banque établie en Suisse ou d'une société d'assurance autorisée à exercer en Suisse auprès de la chambre du Tribunal, des sûretés en garantie des dépens d'un montant de 14'034 fr. 40.

f. Par actes du 23 décembre 2021, A______ et C______ ont recouru contre les décisions de l'Assistance juridique des 26 novembre et
9 décembre 2021.

g. Par courrier du 4 janvier 2022, A______ a informé le Tribunal du dépôt des recours précités et sollicité à la suspension de la présente procédure jusqu'à droit jugé sur l'assistance juridique. Cette requête a été rejetée par le Tribunal par ordonnance du 26 janvier 2022, au motif que les ordonnances entreprises étaient exécutoires et définitives et que les recours formés à leur encontre n'avaient pas d'effet suspensif.

h. Par décision DTPI/1115/2022 du 2 février 2022, le Tribunal a rendu la décision entreprise.

i. Par décision DAAJ/6/2022 du 11 février 2022, notifiée au bureau d'architectes le 25 février 2022, l'Autorité de recours en matière d'assistance juridique a admis le recours interjeté par le bureau d'architectes, annulé la décision du
26 novembre 2021 refusant l'aide étatique à la société et renvoyé la cause en première instance pour complément d'instruction et nouvelle décision.

Par décision DAAJ/7/2022 du 11 février 2022, notifiée à la même date, cette même autorité a rejeté le recours portant sur le retrait de l'aide étatique à C______.

EN DROIT

1.             1.1 Le recours, dirigé contre une décision relative aux avances de frais (art. 103 CPC) – laquelle constitue une ordonnance d'instruction au sens de l'art. 319 let. b ch. 1 CPC (Tappy, in Commentaire romand, Code de procédure civile, 2019, n. 4 ad art. 103 CPC) – est recevable pour avoir été interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), par une partie qui y a intérêt (art. 59 al. 2 let. a CPC), dans le délai utile de dix jours prévu pour les ordonnances d'instruction (art. 321 al. 2 CPC) et suivant la forme prévue par la loi (art. 130, 131, 142 al. 1 et 321 al. 1 CPC).

1.2 La cognition de la Cour est limitée à la constatation manifestement inexacte des faits et à la violation du droit (art. 320 CPC).

2. 2.1 De manière générale, le CPC prévoit la possibilité pour le tribunal d'exiger du demandeur une avance à concurrence de la totalité des frais judiciaires présumés (art. 98 CPC). Cette avance a un double but : éviter que le demandeur puisse s'avérer insolvable ou doive être poursuivi si c'est finalement lui qui doit supporter les frais judiciaires en tout ou en partie, dans le cadre de leur répartition finale, d'une part, et assurer que l'Etat n'aura pas de peine à recouvrer les montants mis à la charge du défendeur dans cette même répartition finale, l'avance en question servant au fond dans ce cas de garantie de paiement, d'autre part (Tappy,
in Commentaire romand, op. cit., n. 3 ad art. 98 CPC).

Conformément aux règles du CPC, le tribunal impartit un délai pour la fourniture des avances de frais (art. 101 al. 1 CPC); si l'avance n'est pas fournie à l'échéance d'un délai supplémentaire, le tribunal n'entre pas en matière sur la demande ou la requête (art. 101 al. 3 CPC; cf. art. 59 al. 2 let. f CPC).

La décision incidente impartissant un délai pour régler l'avance des frais judiciaires est immédiatement exécutoire. Une telle décision déploie ainsi ses effets aussi longtemps qu'elle n'est pas contestée et que l'effet suspensif n'est pas accordé au recours formé contre elle. Si la partie qui conteste le montant de l'avance de frais ne recourt pas immédiatement contre la décision relative à l'avance de frais et n'obtient pas l'effet suspensif, elle s'expose en principe au risque, compte tenu du caractère immédiatement exécutoire de ladite décision, de voir sa demande être déclarée irrecevable par le tribunal saisi en application de l'art. 101 al. 3 CPC (arrêts du Tribunal fédéral 4A_594/2021 du 1er décembre 2021 consid. 5.1 et 5A_446/2021 du 29 novembre 2021 consid. 5.1.1 et les références citées).

2.2 Selon la jurisprudence rendue en application de l'art. 101 al. 3 CPC, la requête d'assistance judiciaire – qui, si elle aboutit, comprend notamment l'exonération des avances de frais (cf. art. 118 al. 1 let. a CPC) – entraîne une sorte d'effet suspensif implicite du délai imparti pour payer l'avance de frais et, en cas de rejet de la requête, le tribunal doit accorder d'office une prolongation du délai, voire fixer un nouveau délai. Tant qu'une décision sur l'assistance judiciaire n'a pas été prise, le tribunal ne peut exiger d'avance de frais et fixer de délai à cette fin (ATF 138 III 672 consid. 4.2.1; 138 III 163 consid. 4.2 et les références; arrêt du Tribunal fédéral 4A_541/2012 du 18 janvier 2013 consid. 7). Admettre le contraire reviendrait à contraindre le recourant, alors qu'il est dans l'incertitude quant à l'issue de sa requête d'assistance judiciaire, à verser l'avance réclamée afin de sauvegarder la recevabilité de son recours (arrêt du Tribunal fédéral 4D_49/2019 du 14 novembre 2019 consid. 3.2). Si l’assistance judiciaire est accordée sans limitation, l’ordonnance d’avance de frais devient caduque; si elle est définitivement refusée, un nouveau délai doit être imparti au demandeur afin qu’il puisse – encore – verser l’avance de frais (arrêt du Tribunal fédéral 5A_241/2012 du 3 mai 2012 consid 2.3).

Tout comme la décision impartissant un délai pour régler l'avance de frais judiciaires, la décision incidente rejetant une requête d'assistance juridique est immédiatement exécutoire et déploie ses effets aussi longtemps qu'elle n'est pas contestée et que l'effet suspensif n'est pas accordé au recours formé contre elle (arrêts du Tribunal fédéral 4A_308/2021 du 10 juin 2021 consid. 5.3 et 4A_185/2021 du 31 mars 2021 consid. 4.2).

2.3 En l'espèce, c'est à tort que la recourante reproche au Tribunal de lui avoir imparti un ultime délai pour verser l'avance de frais, alors qu'elle avait formé recours auprès de la Présidente de la Cour pour se plaindre de la décision qui lui avait dénié le bénéfice de l'assistance juridique.

En effet, dans la mesure où le recours en matière d'assistance juridique n'est pas revêtu ex lege de l'effet suspensif et que la suspension de l'effet exécutoire attaché à la décision du 26 novembre 2021 n'a pas été attribuée in casu, cette décision était exécutoire dès sa communication et l'est restée pendant la durée de la procédure devant l'Autorité de recours en matière d'assistance juridique.

Il s'ensuit que le Tribunal, saisi de l'affaire au fond, pouvait valablement impartir un ultime délai à la recourante pour s'acquitter de l'avance de frais, quand bien même l'Autorité de recours en matière d'assistance juridique ne s'était pas encore prononcée sur le refus d'octroi de l'aide étatique.

La décision du 2 février 2022 est ainsi conforme au droit.

Cela étant, le renvoi de la cause à l'Autorité de première instance en matière d'assistance juridique entraîne la poursuite de cette procédure, puisque le juge devra statuer à nouveau sur la requête initiale de la société. Partant, la procédure est à nouveau suspendue implicitement en première instance, ce qui a pour effet que le Tribunal, saisi de l'affaire au fond, n'était pas fondé à entrer en matière sur la requête de la recourante pour défaut de paiement de l'avance de frais tant qu'une décision n'est pas intervenue à cet égard. Il devra en outre fixer un ultime délai supplémentaire à la recourante pour effectuer l'avance de frais dans l'hypothèse où le bénéfice de l'aide étatique lui est définitivement refusé.

En définitive, le recours sera rejeté.

3. Les frais judiciaires du recours, comprenant l'émolument relatif à la décision sur effet suspensif, seront arrêtés à 400 fr. (art. 41 RTFMC), mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), et compensés avec l'avance de même montant effectuée par cette dernière, laquelle demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 9 février 2022 par A______ contre la décision DTPI/1115/2022 rendue le 2 février 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/19461/2020-22.

Au fond :

Le rejette.

Déboute A______ de toutes autres conclusions.

Sur les frais du recours :

Arrête les frais judiciaires à 400 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont compensés avec l'avance de frais versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, présidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Sandra CARRIER, greffière.

La Présidente :

Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI

 

La greffière :

Sandra CARRIER

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.