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Décisions | Chambre civile

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C/6779/2022

ACJC/903/2022 du 24.06.2022 ( ADOPT ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6779/2022 ACJC/903/2022

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 24 JUIN 2022

 

Requête (C/6779/2022) formée le 21 mars 2022 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève), représenté par Me Luis ARIAS, avocat, en l’Etude duquel il fait élection de domicile, tendant à l'adoption de B______, née le ______ 1998.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier du 30 juin 2022 à :

 

- Monsieur A______
c/o Me Luis ARIAS, avocat.
Rue du Conseil-Général 8, 1205 Genève.

- Madame B______
______, ______.

- Madame C______
______, ______.

- DIRECTION CANTONALE DE L'ETAT CIVIL
Route de Chancy 88, 1213 Onex (dispositif uniquement).


EN FAIT

A.           a) A______, né le ______ 1938 à D______ (Algérie), de nationalité française et C______, née le ______ 1955 à E______ (France), de nationalité française, se sont mariés le ______ 2021 à F______ (Genève).

Ils se sont connus en 1992 et ont commencé à faire ménage commun en 1994.

Aucun enfant n’est issu de cette union.

b) C______ a adopté B______, née le ______ 1998 à G______ (Roumanie), de nationalité française, de père inconnu, de manière plénière le 9 novembre 2000 par jugement d’adoption du Tribunal de H______ (Roumanie).

Par jugement du 13 mars 2019, le Tribunal de Grande Instance de I______ [France] a prononcé l’adoption simple de B______ par A______ et a dit que l’adoptée porterait désormais le nom « B______-A______ ». Il ressort de la requête formée par A______ le 13 juin 2017 qu’il avait un domicile commun avec C______ au no. ______ rue 1______, [code postal] I______ et que C______ se déplaçait à Genève pour des raisons professionnelles; A______, retraité, l’accompagnait.

B______ et C______ sont toutes deux officiellement domiciliées à Genève depuis le 1er janvier 2014; A______ les a définitivement rejointes le 1er janvier 2020.

Pour les autorités suisses, B______ ne porte que le patronyme de B______.

B. a) Le 21 mars 2022, A______ a formé devant la Cour de justice du canton de Genève (ci-après : la Cour) une requête en adoption de B______, fille de son épouse.

Il a expliqué avoir fait ménage commun à I______ avec C______ et B______ depuis l’adoption de cette dernière, jusqu’à ce qu’elle s’installe à Genève pour ses études le 1er janvier 2014, études qu’il avait financées.

A______ avait participé activement à la procédure d’adoption de B______ initiée par C______ en Roumanie, ainsi qu’à son éducation depuis lors. B______ l’avait toujours appelé « papa ».

b) Dans un document du 7 mars 2022, B______ a déclaré consentir à son adoption par A______.

C______ a également, le 7 mars 2022, consenti à l’adoption de sa fille B______ par A______. Elle a exposé que celui-ci s’était considérablement impliqué dans l’éducation de B______ et avait participé à son entretien comme s’il était agi de sa propre fille ; le lien qui les unissait était comparable à une filiation naturelle.

c) Par courrier du 11 mai 2022, A______ a transmis à la Cour des pièces complémentaires, notamment divers témoignages de proches attestant de son implication dans l’éducation et la prise en charge de B______ depuis que celle-ci a été adoptée par C______. Il a enfin produit diverses photographies de voyages effectués en famille et d’autres documents attestant de la tendresse filiale manifestée par B______ à son égard.

d) Par courrier du 16 juin 2022, l’adoptée a précisé vouloir porter le patronyme [de] A______ après son adoption.

EN DROIT

1. Du fait de la nationalité étrangère de l’adoptant et de la personne majeure dont l'adoption est requise, la cause présente un élément d'extranéité. Le requérant et l’adoptée étant toutefois domiciliés à Genève, la Cour de céans est compétente pour se prononcer sur la requête (art. 75 al. 1 LDIP; 23 al. 1 et 268 al. 1 CC; 120 al. 1 let. c LOJ) et le droit suisse est applicable (art. 77 al. 1 LDIP).

2. 2.1.1 Selon l’art. 266 al. 1 ch. 2 CC, une personne majeure peut être adoptée lorsque, durant sa minorité, l’adoptant lui a fourni des soins et a pourvu à son éducation pendant au moins un an. Les dispositions sur l’adoption de mineurs s’appliquent par analogie, à l’exception de celle sur le consentement des parents (al. 2).

L’art. 264c al. 1 ch. 1 CC prévoit qu’une personne peut adopter l’enfant de son conjoint, à condition que le couple fasse ménage commun depuis au moins trois ans (al. 2). Cette condition n’est en principe considérée comme remplie que si le couple a vécu en ménage commun sans interruption. Cela n’exclut pas de manière générale les courtes interruptions de quelques semaines par exemple en raison de séjours professionnels ou linguistiques à l’étranger. La validation de la condition est par contre sujette à caution si la relation a été rompue de manière plus ou moins longue, car c’est là la stabilité du couple qui est en jeu (Message concernant la modification du code civil (FF 2015 835) p. 878).

Selon l’art. 264d al. 1 CC, la différence d’âge entre l’enfant et l’adoptant ne peut pas être inférieure à seize ans ni supérieure à quarante-cinq ans. Des exceptions sont possibles si le bien de l’enfant le commande (al. 2).

Le consentement de l’adopté capable de discernement est requis (art. 265 al. 1 CC). Avant l'adoption d'une personne majeure, l'opinion de ses parents biologiques doit être prise en considération (art. 268aquater al. 2 ch. 2 CC).

2.1.2 En l’espèce, une fois adoptée en l’an 2000 par C______, alors qu’elle n’avait que deux ans, B______ a intégré le ménage que sa mère formait avec l’adoptant à I______ ; elle y a vécu, selon ce qui ressort de la procédure, jusqu’à son installation à Genève en 2014 afin d’y poursuivre ses études. Le requérant a ainsi prodigué des soins et pourvu à l’éducation de l’adoptée pendant plus d’un an durant sa minorité, comme l’aurait fait un père biologique. Il ressort par ailleurs des diverses pièces produites que le requérant et l’adoptée ont tissé des liens filiaux. Cette prise en charge, analogue à celle découlant d’une filiation naturelle, perdure ainsi depuis 22 ans.

Il y a également lieu d’admettre que la condition posée par l’art. 264c al. 2 CC est remplie, même si C______ est venue s’installer à Genève avant A______, pour des raisons professionnelles. Rien ne permet toutefois de douter de la poursuite de la relation de couple, le requérant ayant déclaré avoir accompagné son épouse lors de ses déplacements professionnels à Genève, ville dans laquelle il s’est lui-même domicilié au début de l’année 2020, le couple faisant ménage commun de manière ininterrompue depuis lors.

La condition relative à la différence d’âge entre l’adoptant et l’adoptée n’est pas remplie, étant donné que 60 ans les séparent. Il convient toutefois d’appliquer le régime dérogatoire de l’al. 2. Malgré la différence d’âge, l’adoptant a en effet fourni des soins à l’adoptée et a pourvu à son éducation depuis ses 2 ans, soit depuis plus de 22 ans, dont 16 durant sa minorité. Depuis son adoption en 2000, l’adoptée a fait ménage commun avec le couple et a grandi dans une stabilité familiale, A______ ayant représenté pour elle sa seule figure paternelle.

L’adoptée a consenti à son adoption par le requérant par déclaration datée du 7 mars 2022. C______ a également manifesté son accord avec le projet d’adoption.

Au vu de ce qui précède, il sera donné une suite favorable à la requête.

3. Dans la mesure où il s’agit de l’adoption de l’enfant du conjoint, le lien de filiation entre l’adoptée et C______ n’est pas rompu (art. 267 al. 3 ch. 1 CC).

4. 4.1 L’autorité compétente peut autoriser une personne majeure qui fait l’objet d’une demande d’adoption à conserver son nom de famille s’il existe des motifs légitimes (art. 267a al. 3 CC).

4.2 En l’espèce, l’adoptée, qui porte, en Suisse, le nom de B______ [soit de C______], n’a pas déclaré vouloir le conserver postérieurement au prononcé de l’adoption, de sorte qu’elle portera désormais celui de A______.

4. Les frais de la procédure, arrêtés à 1'000 fr. (art. 19 al. 1 et 3 let. a LaCC; 18 RTFMC) sont mis à la charge du requérant et sont entièrement compensés avec l'avance de frais du même montant versée par celui-ci, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

* * * * *


 

 

 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


Prononce l’adoption de B______, née le ______ 1998, à G______ (Roumanie), de nationalité française, par A______, né le ______ 1938 à D______ (Algérie), de nationalité française.

Prescrit que les liens de filiation entre B______ et sa mère, C______, née le ______ 1955 à E______ (France), de nationalité française, ne sont pas rompus.

Dit que l’adoptée portera désormais le nom de A______, en lieu et place de B______.

Arrête les frais de la procédure à 1'000 fr., les met à la charge de A______ et dit qu’ils sont entièrement compensés avec l’avance de frais de même montant, qui reste acquise à l’Etat de Genève.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, juges; Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 308 ss du code de procédure civile (CPC), la présente décision peut faire l'objet d'un appel par-devant la Chambre de surveillance de la Cour de justice dans les 10 jours qui suivent sa notification.

 

L'appel doit être adressé à la Cour de justice, place du Bourg-de-Four 1,
case postale 3108, 1211 Genève 3.

 

Annexes pour le Service de l'état civil :

Pièces déposées par les requérants.