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C/2266/2023

ACJC/1120/2023 du 01.09.2023 sur OTPI/366/2023 ( SP ) , CONFIRME

Normes : CC.837.al1.ch3; CC.839.al1; CC.839.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/2266/2023 ACJC/1120/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU VENDREDI 1ER SEPTEMBRE 2023

 

Entre

A______ SARL, sise ______, recourante contre une ordonnance rendue par la 16ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 25 mai 2023, comparant par Me Butrint AJREDINI, avocat, SAINT-JEAN AVOCATS, rue de Saint-Jean 15, case postale 23, 1211 Genève 13, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,

et

Madame B______, domiciliée ______, intimée, comparant par Me Caroline FERRERO MENUT, avocate, Etude Canonica & Associés , rue François-Bellot 2, 1206 Genève, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance OTPI/366/2023 du 25 mai 2023, le Tribunal de première instance (ci-après: le Tribunal), statuant sur mesures provisionnelles, a rejeté la requête en inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs formée par A______ SARL contre B______ (chiffre 1 du dispositif), révoqué en conséquence l'ordonnance superprovisionnelle rendue le 10 février 2023 dans la présente cause (ch. 2) et dit que les chiffres 1 et 2 précités ne seraient exécutoires, en cas d'appel, que pour autant que l'effet suspensif n'ait pas été accordé (ch. 3).

Pour le surplus, le Tribunal a mis les frais judiciaires, arrêtés à 1'500 fr., à la charge de A______ SARL (ch. 4), condamné cette dernière à verser à sa partie adverse 2'000 fr. à titre de dépens (ch. 5) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 6).

B. a. Par acte du 16 juin 2023, A______ SARL forme appel contre l'ordonnance précitée, requérant préalablement l'octroi de l'effet suspensif, lequel a été accordé par décision de la Cour de justice du 23 juin 2023.

Elle conclut à l'annulation de l'ordonnance entreprise et, cela fait, à ce que l'ordonnance rendue sur mesures superprovisionnelles le 10 février 2023 soit confirmée et, partant, à ce que l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs soit ordonnée en sa faveur sur l'immeuble n° 1______ de la commune de C______ [GE], propriété de B______, pour un montant de 105'564 fr. 40 avec suite d'intérêts et qu'un délai de trois mois lui soit imparti pour ouvrir action au fond. Subsidiairement, en cas de rejet de son appel, elle conclut à ce que l'inscription soit maintenue pendant 30 jours afin de lui permettre d'obtenir l'effet suspensif de l'autorité de recours.

b. B______ conclut à ce que A______ SARL soit déboutée de toutes ses conclusions d'appel et à la confirmation de l'ordonnance entreprise.

Elle produit une pièce complémentaire, soit un extrait du site internet "D______" (pièce 10).

c. En l'absence de réplique, les parties ont été informées par avis du greffe de la Cour du 21 juillet 2023 de ce que la cause était gardée à juger.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure.

a. La société A______ SARL, sise à Genève, a pour but l'exploitation d'une entreprise d'aménagements intérieurs et extérieurs ainsi que tous travaux et conseils en qualité d'entreprise générale.

b. B______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ sise chemin 2______ no. ______ de la commune de C______.

c. Au début de l'année 2022, B______ a décidé d'entreprendre des travaux de rénovation de sa piscine, lesquels ont été confiés à A______ SARL.

d. Par courriel du 14 mars 2022, A______ SARL a transmis deux devis pour la rénovation de la piscine.

- Le premier devis n° 3______ concernait des travaux de maçonnerie de la piscine pour un montant de 135'675 fr. 60 TTC.

La description des travaux mentionnait notamment le piquage du carrelage du bassin, des anciennes margelles et du revêtement de l’escalier, la reprise des surfaces et la préparation du support, l'étanchéité du bassin, la pose du revêtement bassin et terrasse, la découpe de la dalle de la terrasse, l'évacuation des déchets, le scellement de nouveaux skimmers et des buses de refoulement.

- Le second devis n° 7______ concernait des travaux de rénovation technique de la piscine pour un montant de 31'575 fr. 70 TTC.

La description des travaux mentionnait les éléments suivants: Skimmer XXL prestige, prise balai, refoulement, traversée de paroi et boîte de connexion électrique.

e. Par courriels des 24 mars et 5 avril 2022, A______ SARL a transmis à l'architecte en charge des travaux ainsi qu'à B______ trois autres devis (4______, 5______ et 6______), de plusieurs pages chacun, ainsi qu'une première facture d'acompte de 32'310 fr.

B______ conteste avoir reçu les devis 4______, 5______ et 6______, alléguant que seule la facture d'acompte figurait dans les pièces jointes contenues dans le courriel qui lui était destiné.

f. Après paiement de l'acompte demandé en 32'310 fr., les travaux ont débuté le 12 avril 2022.

g. Dans le courant du mois de juin 2022, B______ a sollicité de A______ SARL des travaux complémentaires, à savoir le carrelage du local technique de la piscine.

h. Au mois de juillet 2022, d'autres travaux complémentaires portant sur l'ajout d'éléments de balnéothérapie (nage à contre-courant, cascade de massages et espace jacuzzi) ont été réalisés.

i. Entre les 1er et 12 août 2022, B______ a encore demandé à A______ SA divers travaux, notamment tailler des végétaux, souffler la cour, ajouter une barrière autour de la piscine et monter un trampoline.

j. Le 19 août 2022, A______ SA a procédé à la mise en eau de la piscine.

k. Trois jours plus tard, B______ a informé A______ SA que la piscine perdait de l'eau.

Par courriel du 30 août 2022, A______ SA a constaté que la piscine était affectée de malfaçons qu'elle s'est engagée à réparer et de nombreux échanges sont encore intervenus entre les parties.

l. Les travaux de remise en état de la piscine ont repris au début du mois de septembre 2022 et se sont terminés le 14 octobre 2022, date à laquelle la piscine a été remise en eau.

m. Par message WhatsApp du 21 octobre 2022, B______ a informé A______ SA qu'elle mettait fin à leur relation contractuelle.

n. Le 25 octobre 2022, B______ a informé A______ SA que la statique, les buses et la pompe à chaleur ne fonctionnaient pas et qu'elle avait demandé à une autre entreprise de tout remettre en ordre et de finaliser les travaux.

A______ SA a contesté les reproches formulés.

o. Durant l'accomplissement des travaux, A______ SA a transmis à B______ de nombreuses demandes d'acomptes et factures, dont une partie a été réglée et une autre partie contestée. Il n'y a pas lieu d'en établir ici le détail.

D. a. Par acte déposé au greffe du Tribunal de première instance le 10 février 2023, A______ SA a requis, sur mesures superprovisionnelles et provisionnelles, l'inscription provisoire d'une hypothèque légale des artisans et entrepreneurs sur la parcelle n° 1______ de la commune de C______, propriété de B______, à concurrence de 105'564 fr. 40 avec intérêts à 5% l'an dès le 14 octobre 2022, plus accessoires légaux.

Elle a allégué qu'au cours de son mandat, B______ avait requis la réalisation de divers travaux complémentaires dont l'ajout de la balnéothérapie, la pose du carrelage dans le local technique, l'entretien du jardin. La piscine avait été mise en eau le 19 août 2022, lors de laquelle une importante fuite avait été constatée engendrant des travaux de réfection qu'elle avait effectués à ses frais. La dernière mise en eau avait ainsi eu lieu le 14 octobre, date à laquelle la piscine était parfaitement fonctionnelle et opérationnelle.

b. Par ordonnance du 10 février 2023, le Tribunal a fait droit à la requête de mesures superprovisionnelles.

L'hypothèque légale a en conséquence été inscrite provisoirement auprès du Registre foncier.

c. Dans sa réponse du 13 mars 2023, B______ a conclu au rejet de la requête en inscription d'une hypothèque légale et à la radiation de l'inscription provisoire figurant au Registre foncier.

Elle a fait valoir que l'ouvrage était terminé et livré le 19 août 2022, de sorte que l'hypothèque légale n'avait pas été inscrite dans le délai légal. Les travaux intervenus postérieurement avaient consisté en la réparation des défauts constatés et ils n'entraient pas en ligne de compte pour la computation du délai. L'installation de la balnéothérapie était indissociable des travaux de rénovation de la piscine et devaient être achevée en même temps. En tout état ces travaux étaient intervenus en août et septembre 2022. Les travaux de carrelage des locaux techniques étaient terminés le 2 septembre 2022. Enfin, les travaux d'entretien du jardin, qui étaient des travaux d'importance secondaire ne faisant pas partie du contrat d'entreprise étaient, quoiqu'il en soit, terminés le 21 septembre 2022. Après cette date, plus aucune prestation n'avait été effectuée par A______ SA.

d. Les parties ont répliqué et dupliqué les 30 mars et 20 avril 2023, en persistant dans leurs conclusions.

A______ SA a indiqué que la première mise en eau aurait certes dû marquer la fin du contrat principal. Cela étant, durant les travaux de réfection, B______ avait décidé de modifier certains éléments de la piscine concernant notamment la zone jacuzzi. Ces travaux complémentaires dépassaient le cadre de la rénovation et formaient un tout indissociable avec le contrat initial de rénovation de la piscine. C'était donc bien le 14 octobre 2022 qui marquait la fin des travaux.

La cause a ensuite été gardée à juger par le Tribunal.

E. Dans la décision attaquée, le Tribunal a retenu que les travaux de rénovation de la piscine, qui avaient débuté le 14 avril 2022, s'étaient terminés avec la mise en eau de la piscine, le 19 août 2022. A ce moment, les travaux commandés étaient terminés. Les travaux supplémentaires concernant la zone jacuzzi, que A______ SA alléguait avoir réalisés pendant les travaux de réfection, n'étaient pas rendus suffisamment vraisemblables, étant relevé que le système de balnéothérapie avait été installé avant la livraison de l'ouvrage le 19 août 2022. Par conséquent, l'ouvrage avait été livré le 19 août 2022 et les travaux réalisés sur la piscine entre le début du mois de septembre et le 14 octobre 2022 étaient des travaux de remise en état consécutifs aux défauts constatés, qui ne faisaient pas courir un nouveau délai pour requérir une hypothèque légale. La requête était donc tardive.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions de première instance sur mesures provisionnelles (art. 308 al. 1 let. b CPC), lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

En l'espèce, l'appel a été introduit en temps utile, selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1 et 311 al. 1 et 314 al. 1 CPC), et porte sur des conclusions supérieures à 10'000 fr.

Il est donc recevable.

1.2 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, un fait ou un moyen de preuve nouveau n'est pris en compte au stade de l'appel que s'il est produit sans retard (let. a) et avec la diligence requise (let. b).

S’agissant des faux novas, à savoir les faits et moyens de preuve qui existaient déjà en première instance, il incombe au plaideur qui désire les invoquer devant l’instance d’appel de démontrer qu’il a fait preuve de la diligence requise en exposant précisément les raisons pour lesquelles le moyen de preuve ou le fait nouveau n’a pas été porté plus tôt à la procédure (ATF 144 III 349 consid. 4.2.1; 143 III 42 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 5A_392/2021 du 20 juillet 2021 consid. 3.4.1.2).

En l'occurrence, l'intimée produit une pièce complémentaire devant la Cour à l'appui de son mémoire de réponse, destinée à répondre aux nouveaux arguments de sa partie adverse. La recevabilité de cette pièce peut en l'état rester indécise dans la mesure où elle n'est pas déterminante pour l'issue du litige au vu des développements qui vont suivre.

1.3 La cause est soumise à la maxime des débats (art. 55 cum 255 CPC a contrario) et au principe de disposition (art. 58 al. 1 CPC).

1.4 La Cour revoit la cause en fait et en droit avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

La requête en inscription provisoire d'une hypothèque légale est une mesure provisionnelle (art. 261 ss CPC) à laquelle la procédure sommaire s'applique (art. 248 ss, 249 let. d ch. 5 et 11 CPC; ATF 137 III 563 consid. 3.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_630/2021 du 26 novembre 2021 consid. 3.3.2.2). Le juge peut dès lors s'en tenir à la vraisemblance des faits allégués et à un examen sommaire du droit (ATF 139 III 86 consid. 4.2; 131 III 473 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_916/2019 du 12 mars 2020 consid. 3.4).

2. L'appelante reproche au Tribunal d'avoir considéré que sa requête en inscription d'une hypothèque légale était tardive. Selon elle, les travaux commandés n'étaient pas terminés lors de la mise en eau du 19 août 2022, de sorte que c'était la date de la seconde mise en eau qui aurait dû être retenue pour calculer le délai de quatre mois.

2.1.1 A teneur de l'art. 837 al. 1 ch. 3 CC, peuvent requérir l'inscription d'une hypothèque légale, les artisans et entrepreneurs employés à la construction ou à la destruction d'un bâtiment ou d'autres ouvrages, au montage d'échafaudages, à la sécurisation d'une excavation ou à d'autres travaux semblables, sur l'immeuble pour lequel ils ont fourni des matériaux et du travail ou du travail seulement, que leur débiteur soit le propriétaire foncier, un artisan ou un entrepreneur, un locataire, un fermier ou une autre personne ayant un droit sur l'immeuble.

L'inscription peut être requise dès le moment de la conclusion du contrat (art. 839 al. 1 CC) et doit être obtenue au plus tard dans les quatre mois qui suivent l'achèvement des travaux (art. 839 al. 2 CC). Il incombe à l'entrepreneur d'établir, ou à tout le moins de rendre vraisemblable que le délai de quatre mois a été respecté (Bovey, in Commentaire romand CC II, 2016, n. 87 ad art. 839 CC).

Le délai légal commence à courir dès l'achèvement des travaux, et non pas dès l'établissement de la facture, même si cet élément peut constituer un indice de la fin des travaux (arrêt du Tribunal fédéral 5A_420/2014 du 27 novembre 2014 consid. 3.1 et les références citées).

Il y a achèvement des travaux quand tous les travaux qui constituent l'objet du contrat d'entreprise ont été exécutés et que l'ouvrage est livrable. Ne sont considérés comme travaux d'achèvement que ceux qui doivent être exécutés en vertu du contrat d'entreprise et du descriptif, non les prestations commandées en surplus sans qu'on puisse les considérer comme entrant dans le cadre élargi du contrat. Des travaux de peu d'importance ou accessoires différés intentionnellement par l'artisan ou l'entrepreneur, ou bien encore des retouches (remplacement de parties livrées mais défectueuses, correction de quelque autre défaut) ne constituent pas des travaux d'achèvement (ATF 102 II 206 consid. 1a; arrêts du Tribunal fédéral 5A_630/2021 du 26 novembre 2021 consid. 3.3.2.4; 5A_518/2020 du 22 octobre 2020 consid. 3.1).

Si un artisan ou un entrepreneur a travaillé en exécution de plusieurs contrats, il possède autant de créances distinctes. Le délai d'inscription d'une hypothèque légale court en principe séparément, pour chaque contrat, dès l'achèvement des travaux auxquels il se rapporte (ATF 76 II 134 consid. 1). Cependant, si les objets des divers contrats sont étroitement liés les uns aux autres au point de constituer économiquement et matériellement un tout, il faut les traiter comme s'ils avaient donné lieu à une seule convention. Il faut considérer que des contrats forment une unité s'ils sont à ce point imbriqués les uns dans les autres qu'ils forment un tout d'un point de vue pratique (ATF 106 II 123 consid. 5b et c; 104 II 348 consid. II.2). Dans cette hypothèse, l'entrepreneur est en droit de faire inscrire l'hypothèque légale pour le montant total de ce qui lui est dû dans les quatre mois dès l'achèvement des derniers travaux formant cette unité. En revanche, lorsqu'un entrepreneur se voit attribuer après coup d'autres travaux de nature différente, le délai commence à courir pour chacun d'eux séparément, à partir de l'achèvement des travaux auxquels il se rapporte (ATF 111 II 343 consid. 2c; 104 II 248 consid. II.2; 76 II 134 consid. 1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_630/2021 du 26 novembre 2021 consid. 3.3.2.4; 5A_282/2016 du 17 janvier 2017 consid. 7.1 et les autres références, publié in SJ 2017 I p. 265 et in RNRF 2019 (100) p. 109).

En cas de retard dans l'achèvement des travaux, le délai ne court que dès la date à laquelle les travaux sont effectivement terminés. L'entrepreneur ne peut cependant pas se prévaloir de ce que les travaux ne sont pas terminés et que le délai de quatre mois n'a pas encore commencé à courir, lorsque cela est dû à son propre retard fautif (Bovey, op.cit., n. 97 ad art. 839 CC et les références citées).

2.1.2 Conformément à la maxime des débats (art. 55 al. 1 CPC), il incombe aux parties, et non au juge, de rassembler les faits du procès, c'est-à-dire d'alléguer les faits pertinents (fardeau de l'allégation subjectif) et d'offrir les moyens de preuve propres à établir ceux-ci (fardeau de l'administration de la preuve) (ATF 144 III 519 consid. 5.1). En vertu des art. 221 al. 1 let. d et 222 al. 2 CPC, les faits pertinents doivent être allégués en principe dans la demande, respectivement dans la réponse, et ils doivent être suffisamment motivés (charge de la motivation) pour que la partie adverse puisse se déterminer sur eux et que le juge puisse savoir quels sont les faits admis, respectivement les faits contestés sur lesquels des moyens de preuve devront être administrés (art. 150 al. 1 CPC; pour plus de détails, cf. ATF 144 III 519 consid. 5.2.1). En vertu des art. 221 al. 1 let. e et 222 al. 2 CPC, les moyens de preuve propres à établir les faits pertinents doivent également y être indiqués (ATF 143 III 1 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 4A_164/2021 du 21 décembre 2021 consid. 3.1; 4A_560/2020 du 27 septembre 2021 consid. 5.1.1 et 5.1.2; 4A_288/2018 du 29 janvier 2019 consid. 3.1.2).

Le demandeur supporte ainsi le fardeau de l'allégation objectif et le fardeau de la preuve (art. 8 CC). Si un fait pertinent n'a pas été allégué par lui ou par sa partie adverse, il ne fait pas partie du cadre du procès et le juge ne peut pas en tenir compte, ni ordonner l'administration de moyens de preuve pour l'établir. La partie qui supporte les fardeaux de l'allégation objectif et de la preuve d'un fait supporte l'échec de l'allégation, respectivement de la preuve de ce fait (ATF 147 III 463 consid. 4.2.3; 143 III 1 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_560/2020 du 27 septembre 2021 consid. 5.1.2 et les références citées).

L'art. 52 CPC impose à quiconque participe à la procédure de se conformer aux règles de la bonne foi, principe qui contraint le plaideur à se prévaloir de ses moyens au moment prévu par la loi et sans tarder. Il est ainsi contraire au principe de la bonne foi d'invoquer après coup des moyens que l'on avait renoncé à faire valoir en temps utile en cours de procédure, parce que la décision intervenue a finalement été défavorable (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2; arrêts du Tribunal fédéral 4A_261/2018 du 22 novembre 2018 consid. 5 et les références citées; 5D_136/2014 du 3 février 2015 consid. 4.2.2).

2.2.1 En l'espèce, l'appelante fait grief au Tribunal d'avoir tenu compte des devis 3______ et 7______ en lieu et place des devis 4______ et 5______ et, par voie de conséquence, d'avoir retenu à tort que l'ensemble des travaux étaient réalisés lors de la première mise en eau du 19 août 2019.

Se fondant sur le devis 5______, elle allègue pour la première fois devant la Cour que la pose du volet de la piscine faisait partie du contrat initial et qu'en l'absence de celui-ci les travaux ne pouvaient être considérés comme terminés. Ce faisant, l'appelante soulève un nouveau moyen reposant sur de nouveaux allégués de fait.

En effet, l'appelante a, en premier lieu, fait valoir devant le Tribunal que la piscine avait été livrée le 19 août 2022 et que seuls des travaux de réfection avaient été réalisés par la suite jusqu'à la seconde livraison, le 14 octobre 2022, date à laquelle la piscine était parfaitement fonctionnelle et opérationnelle. Elle a ensuite allégué, dans sa réplique, que des travaux complémentaires dépassant la simple réfection (zone jacuzzi) avaient été entrepris après la première mise en eau, sans pour autant alléguer que des travaux initiaux restaient à terminer. Ce n'est qu'au stade de l'appel qu'elle invoque la pose du volet de la piscine comme faisant partie intégrante des travaux faisant l'objet du contrat de base et le fait qu'en son absence, les travaux ne pouvaient être considérés comme terminés.

Eu égard à la maxime des débats et du devoir d'allégation qui en découle, il revenait à l'appelante d'exposer les faits de manière soigneuse et complète en première instance déjà. Or, dans ses écritures déposées devant le Tribunal, celle-ci n'a jamais exposé quels travaux restaient en souffrance et n'a à aucun moment mentionné la pose du volet de la piscine. L'appelante ne saurait compléter son état de fait devant la Cour, sans que les conditions de l'art. 317 CPC ne soient réalisées, pour étayer une nouvelle thèse selon laquelle les travaux initiaux n'étaient pas terminés. Aussi, bien que la pose du volet figure dans le devis 5______, dont l'application est au demeurant contestée, le premier juge ne pouvait en tenir compte, faute d'allégation, ce d'autant plus que le devis en question comportait de nombreux postes listés sur plusieurs pages. Il ne revient pas au juge, en maxime des débats, de rassembler les faits du procès, de sorte qu'un élément factuel qui ressort des pièces déposées par une partie mais que celle-ci n'a pas allégué formellement ne peut être retenu par le juge.

Pour ce motif déjà, l'appel doit être rejeté.

2.2.2 Quoi qu'il en soit, la thèse soutenue par l'appelante en appel est contredite par ses propres explications fournies précédemment en procédure. Il ressort, en effet, des débats de première instance que les parties considéraient toutes deux que les travaux principaux étaient terminés lors de la première mise en eau. A cet égard, l'appelante a elle-même indiqué de manière claire et sans équivoque ce qui suit: "Malheureusement, lors de la première mise en eau, qui aurait dû certes marquer la fin de ce contrat principal, les parties ont constaté des défauts […]". Elle a, par la suite, indiqué qu'après la réfection des défauts, la piscine était parfaitement fonctionnelle et opérationnelle, sans mentionner de quelconques travaux à terminer. A cela s'ajoute le fait qu'aucun élément, hormis le devis contesté, tend à démontrer que la pose du volet était comprise dans les travaux confiés à l'appelante.

Le revirement de position de l'appelante en appel est difficilement compatible avec les règles de la bonne foi en procédure au sens de l'art. 52 CPC, qui impose à chaque partie de se prévaloir de ses moyens au moment prévu par la loi et sans tarder. En invoquant après coup un nouveau moyen, parce que la décision intervenue lui a finalement été défavorable, l'appelante agit de manière contraire à la bonne foi.

C'est donc à bon droit que le Tribunal a retenu que les travaux de rénovation de la piscine étaient terminés lors de la première mise en eau du 19 août 2022, les travaux ultérieurs consistant en des travaux de réfection.

2.2.3 Par surabondance, quand bien même la pose du volet devrait être considérée comme partie intégrante des travaux commandés, l'appelante n'explique pas pour quels motifs elle n'aurait pas été en mesure de réaliser cette partie des travaux pour la mise en eau du 19 août 2022 qui, selon ses propres termes, devait marquer la fin du contrat principal. Le devis qu'elle invoque à cet égard date de fin mars-début avril 2022, de sorte qu'elle disposait de plus de quatre mois pour effectuer cette prestation, ce qui parait raisonnablement suffisant. Elle ne saurait en conséquence se prévaloir du fait que les travaux n'étaient pas terminés, dès lors que cette situation était vraisemblablement due à son propre retard.

2.3 Au vu de ce qui précède, l'appel doit être rejeté et l'ordonnance confirmée.

3. Conformément à la conclusion subsidiaire de l'appelante, qui risque de subir un préjudice difficilement réparable en ce sens que l'hypothèque légale, dont le délai d'inscription est de nature péremptoire, risque d'être radiée sans qu'elle ne puisse par la suite requérir sa réinscription (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5P.344/2005 du 23 décembre 2005 consid. 3.1), le présent arrêt ne sera exécutoire qu'après l’expiration du délai de recours auprès du Tribunal fédéral et, en cas de recours, pour autant que l'effet suspensif n'ait pas été accordé (art. 315 al. 5 CPC).

4. Les frais d'appel seront mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront arrêtés à 1'400 fr. (art. 26 et 37 RTFMC) et entièrement compensés avec l'avance du même montant fournie par cette dernière, qui demeure acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

L'appelante sera, en outre, condamnée aux dépens de sa partie adverse, fixés à 2'000 fr. (art. 85, 88 et 90 RTFMC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 16 juin 2023 par A______ SARL contre l'ordonnance OTPI/366/2023 rendue le 25 mai 2023 par le Tribunal de première instance dans la cause C/2266/2023.

Au fond :

Confirme cette ordonnance.

Dit que le présent arrêt ne sera exécutoire qu'après l’expiration du délai de recours auprès du Tribunal fédéral et, en cas de recours, pour autant que l'effet suspensif n'ait pas été accordé.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais d'appel :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'400 fr., les met à la charge de A______ SARL et dit qu'ils sont entièrement compensés avec l'avance de frais fournie par cette dernière, qui reste acquise à l’Etat de Genève.

Condamne A______ SARL à verser à B______ 2'000 fr. à titre de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Paola CAMPOMAGNANI, présidente; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.

 

La présidente :

Paola CAMPOMAGNANI

 

La greffière :

Mélanie DE RESENDE PEREIRA

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.