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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/9114/2021

ACPR/94/2025 du 30.01.2025 sur OTMC/147/2025 ( TMC ) , REJETE

Descripteurs : MESURE DE SUBSTITUTION À LA DÉTENTION;RISQUE DE RÉCIDIVE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : CPP.237; CPP.221; Cst.29.al2

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/9114/2021 ACPR/94/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du jeudi 30 janvier 2025

 

Entre

A______, représenté par Me B______, avocat,

recourant,

 

contre l'ordonnance de mesures de substitution rendue le 15 janvier 2025 par le Tribunal des mesures de contrainte,

 

et

LE TRIBUNAL DES MESURES DE CONTRAINTE, rue des Chaudronniers 9,
1204 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B,
1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


EN FAIT :

A.            Par acte expédié le 16 janvier 2025, A______ recourt contre l'ordonnance du 15 précédent, notifiée le lendemain, par laquelle le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après : TMC) a ordonné la prolongation, pour une durée de six mois, soit jusqu'au 19 juillet 2025, des mesures de substitution prononcées à son encontre le 21 juillet 2024.

Le recourant conclut, sous suite de frais, à l'annulation de cette ordonnance et à ce qu'il soit renoncé à prolonger les mesures de substitution en vigueur.

B.            Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, ressortissant suisse, né le ______ 2001, est prévenu d'incendie intentionnel aggravé (art. 221 al. 1 et 2 CP), violation de domicile (art. 186 CP), tentative de vol (art. 139 ch. 1 cum art. 22 al. 1 CP), usage abusif de permis et de plaques (art. 97 LCR), infractions à l'art. 19 al. 1 let. c et d et 19a ch.1 LStup pour avoir, à Genève:

-        le 24 décembre 2020, de concert avec C______ et D______, pénétré sans droit dans la salle de gymnastique de l'école E______;

-        le 30 janvier 2021, dans les sous-sols des allées 54-56-58 des immeubles locatifs sis à la rue 1______, de concert avec d'autres individus, intentionnellement causé un incendie dans le parking sous-terrain, en boutant le feu à divers endroits du sous-sol, en utilisant notamment des produits inflammables; d'avoir agi ainsi, en pleine nuit, au 2ème sous-sol d'un immeuble comptant des appartements locatifs, au moment où tous les locataires se trouvaient assoupis, en utilisant un additif de plomb – soit un liquide inflammable – trouvé dans une voiture dont le coffre avait été forcé, en provoquant divers foyers à proximité immédiate de véhicules automobiles dotés de réservoirs d'essence ou de diesel, sachant le danger qu'il créait, causant ainsi sciemment une situation dont il savait pertinemment qu'il en découlait un danger pour la vie ou l'intégrité corporelle des locataires de l'immeuble;

-        pénétré dans un véhicule de marque F______, appartenant à G______, et l'avoir fouillé, sans toutefois rien emporter;

-        le 27 mai 2022, rempli, signé et déposé une demande de permis d'élève conducteur en donnant des renseignements inexacts et en dissimulant des faits importants, soit en particulier en répondant par la négative à la question "consommez-vous ou avez-vous consommé des stupéfiants?", alors qu'en réalité, il en consommait;

-        depuis une date indéterminée, participé à un trafic de stupéfiants portant sur une quantité indéterminée de haschich, en détenant, respectivement en vendant cette drogue, notamment à des connaissances du quartier, utilisant pour ce faire son compte Snapchat, jouant également les intermédiaires entre les vendeurs et les toxicomanes;

-        dans ce cadre, le 24 novembre 2023, vendu, contre la somme de CHF 10.-, 2 grammes bruts de haschich à H______, à qui il en avait déjà vendu à une reprise par le passé; détenu sur lui, lors de son interpellation, une balance électronique, un sachet contenant 47.3 grammes bruts de haschich et un parachute d'un poids de 1.8 gramme brut de haschich et, à son domicile, 87.2 grammes bruts de haschich, drogue destinée à la vente;

-        régulièrement consommé du haschich en 2023.

b. A______ a été arrêté le 18 janvier 2022, puis placé en détention provisoire, le 20 suivant, avant d'être libéré le 22 février 2022.

Il a une nouvelle fois été arrêté le 24 novembre 2023, puis placé en détention provisoire le 26 suivant jusqu'au 29 janvier 2024, date de sa libération moyennant la mise en œuvre des mesures de substitution suivantes, ordonnées pour une durée de six mois, soit jusqu'au 28 juillet 2024: (i) obligation d'exercer une activité lucrative régulière, notamment au sein de la société I______, ou, à défaut, de rechercher activement un emploi (avec présentation au Ministère public non seulement des preuves d'offres d'emploi, mais également des envois postaux correspondants); (ii) obligation de se présenter au Service de probation et d'insertion (ci-après: SPI); (iii) interdiction de consommer des produits stupéfiants, quels qu'ils soient, et ce dès la sortie de prison; (iv) obligation d'entreprendre, au rythme et conditions fixées par le thérapeute, un suivi en addictologie auprès de la Fondation J______ ou de tout autre spécialiste en addictologie; (v) obligation de se soumettre à des tests d'abstinence inopinés, réguliers, étant précisé qu'un seul test positif valait non-respect des mesures de substitution; (vi) obligation de fournir mensuellement des attestations de ce suivi auprès du Ministère public.

A______ a été arrêté une troisième fois, le 19 juillet 2024, après qu'un mandat d'arrêt eut été émis le même jour par le Ministère public en raison de son inobservation des mesures de substitution précitées. Il a été libéré le surlendemain par le TMC, moyennant la mise en œuvre de mesures de substitution identiques à celles ordonnées le 29 janvier 2024 – à l'exclusion de celle consistant à se présenter au SPI –, auxquelles s'ajoutaient les deux mesures suivantes, ordonnées pour une durée de six mois, soit jusqu'au 19 janvier 2025: (vii) obligation de déférer aux convocations du pouvoir judiciaire et/ou de la police et (viii) obligation de résider chez ses parents, rue 1______ no. ______, [code postal] Genève.

c. Lors de ses auditions par la police et le Ministère public, A______ a admis avoir pénétré dans la salle de gymnastique de l'école E______, en passant par la fenêtre. S'il lui était arrivé de trainer dans des parkings avec des amis, y compris dans celui de la rue 1______, il contestait toute implication dans l'incendie, admettant toutefois avoir brûlé une poubelle en 2018 ou 2019. Il était bel et bien entré dans le véhicule de marque F______, sans toutefois le forcer, afin d'y fumer et y avait laissé un mégot. Il avait utilisé l'additif de plomb se trouvant dans le coffre afin d'effacer ses empreintes, avant d'en jeter le bouchon, raison pour laquelle son ADN avait été retrouvé sur ces objets. Il a contesté s'adonner au trafic de stupéfiants, notamment avoir vendu du haschich à H______, admettant toutefois avoir agi comme intermédiaire et lui en avoir remis, ainsi qu'à d'autres personnes, à diverses occasions, parfois gratuitement afin de les "dépanner", d'autres fois en vue d'obtenir quelques billets ou grammes gratuitement. La drogue retrouvée sur lui était destinée à sa consommation personnelle. Il avait commencé à fumer des joints après le collège, sa consommation ayant varié au fil du temps pour atteindre parfois 30 à 40 grammes par semaine – correspondant à environ 20 à 30 joints – lors des "grosses semaines". S'il avait répondu par la négative à la question qui lui était posée dans le formulaire en lien avec sa demande de permis d'élève conducteur, c'était parce qu'il ne fumait plus à ce moment et ne souhaitait pas revenir sur son passé.

d. Lors de ses auditions par la police et le Ministère public, H______ a expliqué que c'était bien à l'individu interpellé avec lui – qu'il ne reconnaissait toutefois pas sur la planche photographique – qu'il avait acheté la drogue retrouvée en sa possession, précisant lui en avoir déjà achetée à une autre reprise par le passé. Il est dans un deuxième temps revenu partiellement sur ses déclarations, prétendant avoir "dépanné" A______ et reçu la drogue gratuitement.

e. Le 15 novembre 2024, le Ministère public a ordonné l'expertise psychiatrique de A______ aux fins de déterminer l'étendue de sa responsabilité au moment des faits ou si des mesures étaient préconisées au vu de l'addiction au haschich/cannabis dont celui-ci pourrait souffrir. Le dossier a été transmis aux experts, un délai de trois mois leur étant imparti pour déposer leur rapport.

f. Selon le rapport du SPI du 9 janvier 2025, A______ indique que son suivi en addictologie se déroule bien et qu'il est régulier. Les tests d'urine restaient positifs, tant s'agissant de sa consommation de cannabis que de celle d'alcool. Sa consommation de THC était très modérée, voire nulle en semaine, mais elle augmentait le week-end, ce qui l'aidait à se calmer. Il travaillait, depuis le 6 octobre 2024, en tant que coursier à vélo.

g. Selon l'attestation de la Fondation J______ du 10 janvier 2025, le suivi se poursuivait, entre octobre et décembre 2024, de manière plus régulière qu'auparavant, A______ semblant progressivement trouver plus de sens à ses entretiens et les annulant moins souvent qu'auparavant. Il avait toutefois manqué deux rendez-vous depuis mi-décembre.

h. S'agissant de sa situation personnelle, A______ est célibataire, sans enfant, et travaille actuellement comme coursier à vélo.

À teneur de l'extrait de son casier judiciaire, il a été condamné, le 2 juin 2023, par le Ministère public de la Confédération, à une peine pécuniaire de 50 jours-amende à CHF 30.- le jour, avec sursis pendant deux ans, ainsi qu'à une amende de CHF 300.-, pour injure et violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires. Lors de son audition par la police, le 21 février 2021, il a déclaré avoir occupé les services de police, lorsqu'il était mineur.

i. Dans sa demande de prolongation des mesures de substitution du 14 janvier 2025, le Ministère public a invoqué un risque de réitération fondé sur l'art. 221 al. 1 let. c CPP.

j. Dans ses observations du 14 janvier 2025 destinées au TMC, A______ a relevé que le Ministère public n'avait mentionné que l'art. 221 al. 1 let. c CPP, à l'exclusion de l'art. 221 al. 1bis CPP, ajoutant que les réquisits de ces deux dispositions n'étaient de toute manière pas réalisés in casu.

C.            Dans son ordonnance querellée, le TMC renvoie expressément à son ordonnance du 21 juillet 2024 s'agissant de l'existence de charges suffisantes et d'un risque de réitération, considérant qu'aucun élément n'était intervenu depuis lors justifiant une reconsidération des critères l'ayant conduit à prononcer les mesures de substitution.

Dans cette précédente ordonnance, le TMC retenait, s'agissant de l'incendie, que les charges étaient suffisantes et graves au vu des éléments provenant de l'enquête technique et du téléphone utilisé par A______, ainsi que des déclarations de ce dernier, qui, certes, avait contesté la matérialité des faits en lien avec l'incendie, mais avait néanmoins admis, en présence de son conseil, s'être déjà rendu sur les lieux par le passé, en compagnie d'amis, et avoir été en mesure d'accéder à ce lieu fermé, par un procédé particulier et forcément réfléchi, ainsi qu'avoir déjà commis des vols par le passé, forcé des voitures et incendié. Il en allait de même s'agissant du trafic de stupéfiants, au vu des constatations de la police, des déclarations de H______, qui avait clairement mis en cause A______, des saisies de drogue et de matériel (balance électronique), des messages Snapchat retrouvés dans le téléphone de A______ et de ses aveux, bien que partiels. A______ était par ailleurs impliqué dans plusieurs procédures pénales depuis plusieurs années, aucune de ces affaires ne l'ayant dissuadé de persister dans ses comportements illicites. Il avait également été condamné, le 2 juin 2023, par le Ministère public de la Confédération, en lien avec des faits survenus le 23 février 2023, alors qu'il faisait déjà l'objet de la présente procédure. Il n'avait par ailleurs pas respecté plusieurs des mesures de substitution ordonnées à son encontre pour diminuer le risque de récidive, soit en particulier son suivi psychothérapeutique, et ne s'était pas présenté à l'audience du 19 juillet 2024 devant le procureur.

L'instruction arrivait désormais à son terme, le Ministère public devant encore recevoir l'expertise psychiatrique, laquelle renseignerait utilement sur les éventuelles mesures à mettre en place en lien avec la problématique de consommation de A______. Les mesures ordonnées, qui restaient proportionnées à la peine menace et concrètement encourue, paraissaient encore nécessaires pour diminuer le risque que présentait celui-ci, même si, à teneur du rapport du SPI du 9 janvier 2025, il évoluait globalement positivement.

D.           a. Dans son recours, A______ fait grief au TMC d'avoir violé son droit d'être entendu, en se contentant de renvoyer à sa précédente ordonnance, sans discuter de son argumentation. Aucun risque de réitération ne pouvait être retenu, dès lors qu'il n'avait pas fait l'objet de deux condamnations pour des infractions du même genre. Or, la commission d'au moins deux de telles infractions était désormais exigée au vu du récent changement de jurisprudence.

b. À réception du recours, la cause a été gardée à juger sans échange d'écritures, ni débats.

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 222 et 393 al. 1 let. c CPP) et émaner du prévenu qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. a CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP).

2.             La Chambre pénale de recours peut décider d'emblée de traiter sans échange d'écritures ni débats les recours manifestement irrecevables ou mal fondés (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP). Tel est le cas en l'occurrence, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, le TMC s'étant contenté de renvoyer à sa précédente ordonnance s'agissant de l'existence de charges graves et suffisantes et d'un risque de réitération, sans discuter de son argumentation.

3.1.       Le droit d'être entendu, garanti à l'art. 29 al. 2 Cst., implique pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision, afin que le destinataire puisse la comprendre, l'attaquer utilement s'il y a lieu et afin que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle. L'autorité doit ainsi mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 IV 40 consid. 3.4.3 p. 46 ; 142 I 135 consid. 2.1 p. 145). La motivation peut également être implicite et résulter des différents considérants de la décision. Dès lors que l'on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l'autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 p. 565).

3.2.       En l'espèce, si l'ordonnance querellée ne contient pas de développements détaillés sur les charges pesant à l'encontre du recourant et le risque de réitération, elle renvoie toutefois expressément à ses explications circonstanciées du 21 juillet 2024. Dans la mesure où le TMC a estimé qu'aucun élément nouveau n'était intervenu justifiant une reconsidération des critères l'ayant conduit à prononcer les mesures de substitution, il pouvait se référer à sa précédente motivation, sans devoir la reprendre intégralement. La lecture en parallèle de ces deux ordonnances permettait au recourant de comprendre les raisons ayant conduit le premier juge à estimer que le risque de réitération perdurait et, partant, qu'une prolongation des mesures de substitution s'imposait, et de faire valoir en toute connaissance de cause ses arguments devant la Chambre de céans, qui jouit d'un plein pouvoir de cognition (art. 391 al. 1 et 393 al. 2 CPP) et est ainsi en mesure de contrôler le bien-fondé de cette décision.

Partant, le grief de violation de cette garantie formelle sera rejeté.

4.             Le recourant ne se prononce pas sur les charges pesant à son encontre, lesquelles apparaissent suffisantes au regard des éléments figurant au dossier. Il n'y a donc pas lieu d'y revenir (art. 82 al. 4 CPP; ACPR/747/2020 du 22 octobre 2020 consid. 2 et les références).

5.             Le recourant conteste l'existence d'un risque de réitération et, partant, s'oppose à la prolongation des mesures de substitution prononcées à son encontre.

5.1.       Conformément au principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst., concrétisé par l'art. 237 al. 1 CPP), le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention si elles permettent d'atteindre le même but que la détention, par exemple l'assignation à résidence ou l'interdiction de se rendre dans un certain lieu ou un certain immeuble (al. 2 let. c), l'obligation de se présenter régulièrement à un service administratif (al. 2 let. d), d'avoir un travail régulier (al. 2 let. e) et de se soumettre à un traitement médical ou à des contrôles (al. 2 let. f). La liste des mesures de substitution énoncée à l'art. 237 CPP n'est pas exhaustive (arrêt du Tribunal fédéral 1B_654/2011 du 7 décembre 2011 consid. 4.2).

5.2.       L'art. 221 al. 1 let. c CPP, relatif au risque de récidive, dans sa nouvelle teneur au 1er janvier 2024 (RO 2023 468), présuppose désormais que l'auteur compromette sérieusement et de manière imminente la sécurité d'autrui en commettant des crimes ou des délits graves après avoir déjà commis des infractions du même genre.

Selon la jurisprudence relative à l'art. 221 al. 1 let. c aCPP (dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2023 [RO 2010 1881]) – transposable au nouveau droit (ATF 150 IV 149 consid. 3.1 s.) –, trois éléments doivent être réalisés pour admettre le risque de récidive : en premier lieu, le prévenu doit en principe déjà avoir commis des infractions du même genre, et il doit s'agir de crimes ou de délits graves; deuxièmement, la sécurité d'autrui doit être sérieusement compromise; troisièmement, une réitération doit, sur la base d'un pronostic, être sérieusement à craindre (ATF 146 IV 136 consid. 2.2; 143 IV 9 consid. 2.5).

Bien qu'une application littérale de l'art. 221 al. 1 let. c CPP suppose l'existence d'antécédents, le risque de réitération peut être également admis dans des cas particuliers alors qu'il n'existe qu'un antécédent, voire aucun dans les cas les plus graves. La prévention du risque de récidive doit en effet permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur la liberté personnelle du prévenu (ATF 137 IV 13 consid. 3 et 4).

5.3.       Le nouvel art. 221 al. 1bis CPP prévoit pour sa part que la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté peut exceptionnellement être ordonnée si le prévenu est fortement soupçonné d'avoir porté gravement atteinte à l'intégrité physique, psychique ou sexuelle d'autrui en commettant un crime ou un délit grave et s'il y a un danger sérieux et imminent qu'il commette un crime grave du même genre (cf. ATF 150 IV 149 susmentionné, consid. 3.2, et arrêt du Tribunal fédéral 7B_1025/2023 du 23 janvier 2024 consid. 3.2).

Comme il est renoncé à toute infraction préalable (seul indice fiable permettant d'établir un pronostic légal), il semble justifié de restreindre les infractions soupçonnées aux crimes et délits graves contre des biens juridiques particulièrement importants (par ex., la vie, l'intégrité physique ou l'intégrité sexuelle). L'exigence supplémentaire de l'atteinte grave a pour objectif de garantir que lors de l'examen de la mise en détention, on prendra en considération non seulement les peines encourues, mais aussi les circonstances de chaque cas. Ces restrictions sont de plus requises en ce qui concerne le risque de crime grave du même genre. En effet, la détention préventive ne paraît justifiée que si le prévenu risque de mettre gravement en danger les biens juridiques des victimes potentielles (comme lorsque le motif de mise en détention est le passage à l'acte). Enfin, ces restrictions ont pour objectif d'exclure que ce motif de mise en détention soit avancé en cas de dommages purement matériels ou de comportements socialement nuisibles (Message du Conseil fédéral du 28 août 2019 [19.048] concernant la modification du Code de procédure pénale – mise en œuvre de la motion 14.3383 de la Commission des affaires juridiques du Conseil des États « Adaptation du code de procédure pénale » –, FF 2019 6351, p. 6395).

5.4.       Le TMC n'est nullement lié par les motifs invoqués par le Ministère public dans ses demandes de mise en détention ou de mesures de substitution – respectivement de prolongation. Comme autorité pénale, il est indépendant et n'est soumis qu'aux règles du droit (art. 4 al. 1 CPP). Il en va évidemment de même pour la Chambre de céans (ACPR/695/2024 du 27 septembre 2024, consid. 5.3; ACPR/309/2017 du 11 mai 2017, consid. 6.2). Il importe ainsi peu, à cet égard, que le Ministère public n'ait mentionné que l'art. 221 let. c CPP, à l'exclusion de l'art. 221 al. 1bis CPP, dans sa demande destinée au TMC.

En l'occurrence, une seule condamnation figure au casier judiciaire du recourant, pour injure et violence ou menace contre les autorités ou les fonctionnaires, de sorte que l'art. 221 al. 1 let. c CPP ne lui est pas applicable.

5.5.       Reste à examiner si un risque de réitération peut être retenu sur le fondement de l'art. 221 al. 1bis CPP.

Il sera à cet égard relevé que les faits pour lesquels le recourant a été prévenu sont particulièrement graves, puisqu'il est fortement soupçonné d'avoir notamment causé un incendie dans le parking sous-terrain d'un immeuble, la nuit, mettant ainsi sciemment en danger la vie où l'intégrité corporelle de ses résidents. Si personne n'a été blessé à cette occasion et seuls des dégâts matériels sont à déplorer, une mise en danger suffit à teneur de l'art. 221 al. 2 CP, étant précisé que les conséquences auraient pu être bien plus dramatiques si le feu s'était propagé dans les étages supérieurs. Certes, le recourant conteste être l'auteur de ces faits. Il sera toutefois relevé qu'à ce stade, le juge de la détention doit évaluer le risque de réitération en fonction de la solidité des charges et des indices permettant de redouter une récidive.

C'est précisément afin d'évaluer ce risque – plus particulièrement celui que le recourant mette en danger la vie ou l'intégrité corporelle d'autrui – et, dans l'affirmative, l'opportunité de la mise en œuvre d'éventuelles mesures destinées à le contenir, qu'une expertise a été ordonnée par le Ministère public, le 15 novembre 2024, étant rappelé que les experts se sont vu impartir un délai de trois mois pour ce faire et que l'expertise est actuellement toujours en cours. Les charges sont en l'occurrence sérieuses et, quand bien même les experts n'ont pas encore rendu leur rapport, il existe un risque, au vu de l'addiction au haschich/cannabis dont pourrait souffrir le recourant – ce dernier ne contestant au demeurant pas en consommer depuis plusieurs années –, qu'il commette des infractions de même nature, risque qu'il y a lieu de prendre au sérieux au regard du bien juridique protégé, à savoir la vie et l'intégrité corporelle d'autrui. La prévention de ce risque doit sans conteste permettre de faire prévaloir l'intérêt à la sécurité publique sur l'intérêt personnel du recourant, ce d'autant que ce dernier ne se trouve pas en détention provisoire, mais sous des mesures de substitution qui n'entravent que très partiellement sa liberté personnelle.

C'est donc à bon droit que le TMC a considéré que le recourant présentait un risque de réitération, lequel était susceptible d'être pallié par les mesures de substitution actuellement en place, et, partant, en a ordonné la prolongation.

6.             Le recours s'avère ainsi infondé et doit être rejeté.

7.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui comprendront un émolument de CHF 900.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03). En effet, l'autorité de recours est tenue de dresser un état de frais pour la procédure de deuxième instance, sans égard à l'obtention de l'assistance judiciaire (arrêts du Tribunal fédéral 1B_372/2014 du 8 avril 2015 consid. 4.6 et 1B_203/2011 du 18 mai 2011 consid. 4).

8.             Le recourant plaide au bénéfice d'une défense d'office.

8.1.       Selon la jurisprudence, le mandat de défense d'office conféré à l'avocat du prévenu pour la procédure principale ne s'étend pas aux procédures de recours contre les décisions prises par la direction de la procédure en matière de détention avant jugement, dans la mesure où l'exigence des chances de succès de telles démarches peut être opposée au détenu dans ce cadre, même si cette question ne peut être examinée qu'avec une certaine retenue. La désignation d'un conseil d'office pour la procédure pénale principale n'est pas un blanc-seing pour introduire des recours aux frais de l'État, notamment contre des décisions de détention provisoire (arrêt du Tribunal fédéral 1B_516/2020 du 3 novembre 2020 consid. 5.1).

8.2.       En l'occurrence, quand bien même le recourant succombe, on peut admettre que l'exercice du présent recours ne procède pas d'un abus.

L'indemnité du défenseur d'office sera fixée à la fin de la procédure (art. 135 al. 2 CPP).

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours.

Met à la charge de A______ les frais de la procédure de recours, qui comprennent un émolument de CHF 900.-.

Notifie le présent arrêt, en copie, au recourant (soit, pour lui, son défenseur), au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte.

Siégeant :

Madame Daniela CHIABUDINI, présidente; Madame Françoise SAILLEN AGAD et Monsieur Vincent DELALOYE, juges; Monsieur Sandro COLUNI, greffier.

 

Le greffier :

Sandro COLUNI

 

La présidente :

Daniela CHIABUDINI

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/9114/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

ACPR/

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

 

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

 

- délivrance de copies (let. b)

CHF

 

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

 

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

900.00

 

 

Total

CHF

985.00