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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/60/2021

ACPR/776/2022 du 08.11.2022 sur OTPM/142/2022 ( TPM ) , ADMIS/PARTIEL

Descripteurs : DÉFENSE D'OFFICE;TRAITEMENT AMBULATOIRE;INDEMNITÉ(EN GÉNÉRAL);ASSISTANCE JUDICIAIRE
Normes : CP.63; CPP.135; RAJ.16

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/60/2021 ACPR/776/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mardi 8 novembre 2022

 

Entre

 

A______, avocat, rue ______, Genève, comparant en personne,

recourant,

 

contre l'ordonnance d'indemnisation rendue le 13 mai 2022 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

 

et

 

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9 - 1204 Genève, case postale 3715, 1211 Genève 3,

intimé.

 


EN FAIT :

A. Par acte expédié au greffe de la Chambre de céans le 27 mai 2022, A______ recourt contre l'ordonnance rendue le 13 précédent, communiquée par pli simple, à teneur de laquelle le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après : TAPEM) a fixé à CHF 2'053.50 l'indemnité pour son activité de défenseur d'office de B______.

Il conclut, sous suite de frais et dépens chiffrés à CHF 900.-, à l'annulation de cette décision, sa rémunération devant être portée à CHF 4'049.48.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. Le 24 septembre 2018, le Tribunal criminel a condamné B______ – dont la défense d'office était assurée par A______ – à une peine privative de liberté de seize ans pour assassinat, tentative de lésions corporelles graves ainsi que menaces, et prononcé, au titre de mesure, un traitement ambulatoire (art. 63 CP; JTCR/3/2018 rendu dans la procédure P/1______/2014).

b. Par jugement du 21 janvier 2020, le TAPEM a ordonné – au terme d'une procédure où B______ comparaissait en personne – la continuation de ce traitement jusqu’au prochain contrôle annuel (JTPM/47/2020 rendu dans la cause PM/2______/2019).

c.a. Le 26 janvier 2021, le Ministère public a requis du tribunal précité la poursuite de la mesure.

c.b. Le 5 février suivant, A______ a sollicité du TAPEM sa nomination en qualité d’avocat d'office d'B______ "pour l'ensemble des procédures relatives à l'exécution de sa peine et de sa mesure, de manière à [ce qu'il puisse] bénéficier d'une défense suivie et cohérente à toutes les étapes de celles-ci".

c.c. Par décision du 8 du même mois, l'avocat prénommé a été désigné à la défense des intérêts du condamné. Elle spécifiait que ce dernier était "partie à la procédure visée sous rubrique [i.e. PM/60/2021] tendant à l'examen annuel du traitement ambulatoire ( )".

c.d. Le dossier comporte un peu plus de 250 pages, composées de documents, pour partie, antérieurs/concomitants à la condamnation d'B______ – parmi lesquels le jugement du Tribunal criminel (111 pages), l'expertise psychiatrique du prévenu ainsi que ses deux compléments (85 pages au total) – et, pour partie, postérieurs.

c.e. Par jugement du 4 mars 2021, le TAPEM a ordonné la poursuite du traitement ambulatoire, précisant que la mesure était "valable" jusqu'au 24 septembre 2023 (JTPM/148/2021).

c.f. Le 17 février 2022, A______ a déposé, au nom et pour le compte d'B______, une demande de levée de cette mesure (ci-après : la demande).

Cette requête a fait l'objet d'une procédure distincte.

d. L'état de frais établi le 27 avril 2022 par l'avocat prénommé totalise CHF 4'049.48; il comprend : 15 heures et 20 [recte : 40] minutes d'activité, au tarif horaire de CHF 200.- ; le forfait courriers et téléphones de 20% ; la TVA.

D’après ce document, A______ a consacré 3 heures à la rédaction de la demande et 8 heures à l'étude du dossier.

C. Dans sa décision querellée, le TAPEM a réduit de 7 heures ce décompte, aux motifs que la demande sortait du cadre de la défense d’office et qu’une durée de 4 heures paraissait suffisante pour prendre connaissance de la procédure. Il a, par ailleurs, fixé à 10% le forfait réclamé "vu l'importance de l'activité déployée".

D. a. À l'appui de son recours, A______ expose avoir reçu le 16 mai 2022 cette décision.

Sur le fond, les 3 heures consacrées à la rédaction de la demande devaient être prises en compte. En effet, son mandat n’était, à teneur de la décision de nomination, nullement limité à la "révision annuelle" de 2021; il portait, bien plutôt, sur la sauvegarde des intérêts de son client en lien avec la "peine et ( ) la mesure". Il convenait d’indemniser les 8 heures dédiées à l’étude du dossier. Il avait dû se replonger dans l’affaire P/1______/2014, alors terminée depuis plus de deux ans, et analyser les données techniques qu’elle comportait (expertise et ses deux compléments) à l’aune des questions soulevées par la présente cause. Il avait également dû prendre connaissance des pièces nouvelles. Quant à la réduction du forfait de 20% à 10%, elle était arbitraire.

b. Invité à se déterminer, le TAPEM maintient les termes de sa décision, soulignant que la présente procédure se compose, pour l’essentiel, de pièces déjà connues de l'avocat.

c. Le prénommé n’a pas répliqué.

 

 

EN DROIT :

1.             Le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et – faute de respect des réquisits de l’art. 85 al. 2 CPP – dans le délai prescrits (art. 90 al. 2, 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une décision sujette à contestation auprès de la Chambre de céans (art. 135 al. 3 let. a et 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de l’avocat d'office, qui a qualité pour recourir (art. 382 al. 1 CPP).

2. 2.1. L'art. 135 al. 1 CPP prévoit que le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. À Genève, ce tarif est édicté à l'art. 16 RAJ et s'élève à CHF 200.- de l’heure pour un chef d'étude (al. 1 let. c).

Seules les activités nécessaires sont retenues; elles sont appréciées en fonction, notamment, de la nature, l'importance et les difficultés de la cause, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu (art. 16 al. 2 RAJ).

2.2. Le droit à l'assistance judiciaire – et partant à la désignation d’un avocat d’office (arrêt du Tribunal fédéral 6B_580/2021 du 22 septembre 2021 consid. 6.5 in fine) – n'existe que pour une cause déterminée, et non pour toute la durée de l'exécution d’une mesure, s'agissant de ses modalités et de son contrôle périodique (ATF 128 I 225 consid. 2.4; arrêt du Tribunal fédéral 6B_580/2021 précité).

2.3. Le temps consacré à la procédure ne doit être pris en considération que s’il apparaît raisonnablement nécessaire à l'accomplissement du mandat par un avocat expérimenté. On exige du défenseur d'office qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être défrayées (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2022.7 du 9 mai 2022 consid. 4.1.1).

Le temps dédié à l'étude du dossier doit être indemnisé en fonction de la durée effectivement consacrée, pour autant que l'activité soit nécessaire. D'autant plus de retenue s'imposera que la constitution de l'avocat est ancienne, de sorte qu'il est censé maîtriser la cause et/ou que le dossier n'a pas connu de développements particuliers (ACPR/896/2021 du 20 décembre 2021, consid. 2.2).

2.4. Selon les instructions du Pouvoir judiciaire du 17 décembre 2004 – disponibles sur le site internet de l'État de Genève –, les frais de courriers et de téléphones, c'est-à-dire les coûts et le temps consacré à ceux-ci, sont pris en compte sur la base d'un forfait correspondant à 20% des heures d'activité dont l'autorité admet la nécessité ou de 10% au-delà de 30 heures de travail (décision du Tribunal pénal fédéral BB.2021.77 du 8 juin 2021 consid. 3.3.1; ACPR/421/2022/ du 14 juin 2022, consid. 6.1).

Lorsque le défenseur d'office entend remettre en question le forfait alloué, il doit établir que la procédure a généré des échanges/contacts importants susceptibles d'excéder les heures de travail admises par l’autorité. En règle générale, il suffit que la somme octroyée couvre les frais concrètement encourus, ainsi que le temps consacré à cette activité. Dite autorité peut ainsi s'éloigner, sans arbitraire, du taux de 20%, l'aspect déterminant étant que lesdits frais et activité soient couverts (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.1 et 3.5.2).

2.5.1. En l'espèce, l’ordonnance de nomination d’avocat d’office circonscrit, de façon claire et intelligible, le mandat du recourant à la présente cause – i.e. à la vérification, pour l’année 2021, du bien-fondé du maintien du traitement ambulatoire –.

À juste titre, puisque la jurisprudence proscrit la désignation d’un défenseur permanent au condamné, pour toute la durée d’une mesure.

Les 3 heures consacrées par le recourant à la rédaction de la demande sont donc exorbitantes au litige.

Il s’ensuit que le premier grief doit être rejeté.

2.5.2. Le recourant était tenu, pour se prononcer sur les conditions régissant la poursuite/levée de la mesure, d’étudier les données du dossier se rapportant à l’état psychique de son mandant.

Si les 4 heures de temps accordées par le TAPEM permettaient à l’avocat, qui connaissait la procédure P/1______/2014, de lire les pièces issues de celle-ci, en particulier l’expertise et ses compléments, documents plutôt volumineux, elles étaient toutefois insuffisantes pour les analyser/apprécier à l’aune des spécificités de la présente cause, activité pourtant indispensable.

Elles étaient également insuffisantes pour examiner les documents recueillis/établis après la condamnation d’B______.

Le temps sus-évoqué doit donc être augmenté de 2 heures et 30 minutes, durée qui apparaît raisonnable pour accomplir les démarches complémentaires précitées.

Le grief est donc partiellement fondé.

2.5.3. Concernant la réduction du forfait de 20% à 10%, le recourant ne détaille pas le nombre de contacts, téléphoniques et/ou épistolaires, nécessaires à l’exécution de son mandat.

Rien ne permet donc de retenir que la somme qui lui a été allouée ne couvrirait pas ses coûts et prestations effectifs.

Partant, le troisième grief doit être rejeté.

2.6. En conclusion, le recours sera partiellement admis et l’indemnisation allouée par le TAPEM, complétée à hauteur de CHF 592.35, équivalant à 2 heures et 30 minutes d’activité, à rétribuer au tarif horaire de CHF 200.- (CHF 500.-), majorées du forfait de 10% (CHF 50.-) – pour les raisons exposées au considérant 2.5.3 supra – ainsi que de la TVA à 7.7% (CHF 42.35).

3. L'admission partielle du recours ne donne pas lieu à la perception de frais (art. 428 al. 1 CPP).

4. L’avocat sollicite l’octroi d’une indemnité de CHF 900.- pour la procédure de recours.

4.1. Le défenseur d'office a droit à des dépens lorsqu'il conteste avec succès une décision d'indemnisation (ATF 125 II 518 consid. 5; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1251/2016 du 19 juillet 2017 consid. 4 et 6B_439/2012 du 2 octobre 2012 consid. 2).

4.2. In casu, il y a lieu, compte tenu de l'admission partielle des conclusions du recourant, de lui allouer, à titre de juste indemnité, un montant de CHF 300.- TTC pour son acte, lequel comporte huit pages de développements factuels et juridiques (pages d’en-tête et de conclusions non incluses).

* * * * *

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Admet partiellement le recours et complète le dispositif de l’ordonnance querellée comme suit :

- arrête à CHF 592.35, TVA à 7.7% comprise, le complément d'indemnité dû à A______ pour l'activité déployée dans la procédure PM/60/2021.

Laisse les frais de la procédure de recours à la charge de l'État.

Alloue à A______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 300.- TTC pour la procédure de recours.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, au recourant et au Tribunal d’application des peines et des mesures.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Mesdames Daniela CHIABUDINI et Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

Voie de recours si seule l'indemnité pour la procédure de première instance est contestée :

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué. Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

 

Voie de droit si seule l'indemnité pour la procédure de recours est contestée (art. 135 al. 3 let. a CPP et 37 al. 1 LOAP), respectivement si les deux indemnités, de première et de seconde instances, sont contestées (ATF 140 IV 213 consid. 1.6) :

 

Le Tribunal pénal fédéral connaît des recours du défenseur d'office dans les cas précités. Le recours doit être adressé dans les 10 jours, par écrit, au Tribunal pénal fédéral, case postale 2720, 6501 Bellinzone.