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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4128/2023

JTAPI/315/2024 du 10.04.2024 ( LCR ) , REJETE

Descripteurs : EXPERTISE;STUPÉFIANT
Normes : LCR.15d.al1; OAC.28a.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4128/2023 LCR

JTAPI/315/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 10 avril 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Sara PEREZ, avocate, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

 


EN FAIT

1.             Le 25 août 2023, Monsieur A______ a été entendu par la police dans le cadre d’une procédure pénale.

Lors de son audition, il a déclaré consommer de la cocaïne de manière occasionnelle, lors de fêtes, depuis 2020 : il sniffait un rail de cocaïne pour les trois mois environ. Sa consommation n’était pas régulière. Il ne conduisait pas quand il consommait, faisait du parachutisme et avait un métier à responsabilités, il n’était donc pas drogué en permanence.

2.             Par courrier du 20 septembre 2023, intitulé « Infraction à la loi fédérale du 3 octobre 1951 sur les stupéfiants (LStup ; RS 812.121) constatée le 18 août 2023 à 17h00 », l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a informé M. A______ que les autorités de police avaient porté à sa connaissance l’infraction visée en titre. Un délai de quinze jours lui était accordé pour transmettre ses observations quant à sa consommation de stupéfiants.

3.             M. A______ s’est déterminé par courriel du 6 octobre 2023. Il contestait avec la plus grande fermeté tant l’intitulé du courrier que les « Indications générales/événements » figurant dans le dossier qu’il avait pu consulter.

Le vendredi 18 août 2023 à 17h00, il travaillait et ne pouvait en aucun cas être sous influence d’une quelconque substance psychoactive. Les photographies qui lui avaient été soumises lors de son audition par la police avaient de toute évidence été prises en son absence à une heure qui lui était inconnue. Il contestait donc l’infraction du 18 août 2023.

Pour le reste, il confirmait sa déposition à la police et ainsi des prises récréatives très occasionnelles et en très faible quantité. La prise très faible de cocaïne qui avait eu lieu le 18 août 2023 s’était faite vers 23h00 lors du festival de musique d’B______ ; il s’y était rendu en bus et était revenu en fin de soirée avec le bus des TPG affrété par les organisateurs du festival.

4.             Le 30 novembre 2023, l’OCV a rendu une décision d’obligation de se soumettre à une expertise à l’encontre de M. A______.

Il était titulaire d’un permis de conduire valable pour les catégories A, A1, B, BE, B1, D1, D1E, F, G et M. Par rapport de transmission d’information établi par la police le 25 août 2023 à la suite d’un événement du 23 août 2023, il ressortait qu’il avait reconnu être consommateur de cocaïne. Lors de son audition, il avait reconnu en effet consommer de la cocaïne depuis 2020 de manière occasionnelle, lors des fêtes.

L’examen de son dossier l’incitait à concevoir des doutes quant à son aptitude à conduire des véhicules à moteur. Dès lors, afin d’élucider cette question, une expertise par un médecin de niveau 4 était ordonnée. Une décision sera prise lorsque les questions relatives à son aptitude auront été élucidées ou, en cas de non soumission à l’examen imposé, dans un délai de trois mois. Les frais d’expertise étaient à sa charge.

La présente décision était inscrite dans le système d’information relative à l’admission de la circulation (ci-après : SIAC).

5.             Par acte du 9 décembre 2023, M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), la trouvant scandaleuse.

L’intitulé du dossier de l’OCV était faux - le vendredi 18 août 2023 à 17h00 il travaillait - et l’inscription dans le SIAC revenait à affirmer un fait qui pouvait porter atteinte à son honneur ou à la considération de sa personne ; ce faux constat et cette inscription fallacieuse n’étaient donc rien d’autre que de la diffamation à son égard et devraient être considérés comme tel.

Il n’avait aucun antécédent en 33 ans de conduite, travaillait à C______ depuis bientôt douze ans et s’y rendait en transports publics. Il utilisait si possible des véhicules à moteur avec parcimonie et était en parfaite condition physique.

Il ne prenait pas de la cocaïne depuis 2020 ; il lui était juste arrivé d’en prendre une infime quantité lors d’événements sporadiques. Une prise régulière serait irréfléchie pour sa santé et celle de ses proches, incompatible avec son niveau de responsabilités professionnelles voire tout simplement irréaliste au regard de ses 8h30 de travail quotidien qui consistait à programmer des calculs financiers complexes dont il avait la charge.

6.             L’OCV s’est déterminé sur le recours le 12 février 2024, concluant au maintien de sa décision du 30 novembre 2023. Il a produit son dossier.

Dans le cadre de son audition par la police et après présentation de photographies prises par sa fille le soir du 18 août 2023, dans lesquelles apparaissaient des restes de cocaïne, un emballage de boulette de cette même drogue ainsi qu’une carte bancaire à son nom, souillée de poudre blanche, le recourant avait avoué consommer de la cocaïne de manière occasionnelle, lors de fêtes, depuis 2020, à raison d’un rail de cocaïne tous les trois mois environ.

Dans ses observations, le recourant contestait la date de l’infraction reprochée et le fait d’avoir été sous influence d’une quelconque substance psychoactive. Pour le surplus, il confirmait le rapport de police et précisait que la prise du 18 août 2023 s’était faite à 23h00. Compte tenu de ces déclarations et des doutes qui subsistaient sur son aptitude à la conduire, il avait prononcé la décision du 30 novembre 2023.

En référence au Guide d’aptitude à la conduite du 27 novembre 2020, il estimait ne pas avoir mésusé de son pouvoir d’appréciation en prononçant la décision querellée, étant précisé qu’il aurait été tout aussi légitimé à prononcer un retrait préventif du permis de conduire.

7.             Le 21 février 2024, M. A______ a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public pour infraction à l’art. 19a ch. 1 LStup à réitérées reprises, à une amende CHF 300.-. Cette ordonnance est entrée en force.

Il lui était reproché d’avoir, à tout le moins depuis février 2021 et jusqu’au 25 août 2023 consommé régulièrement et sans droit des stupéfiants, en particulier de la cocaïne.

L’ordonnance retenait que depuis son divorce en 2017, des amis communs avaient rapporté à son ex-femme qu’il consommait de la cocaïne. Au mois d’août 2020, leur fille D______ avait révélé à sa mère avoir vu son père sniffer un rail de cocaïne dans sa chambre et lui avait envoyé des photographies des restes de cocaïne. M. A______ avait avoué à son ex-épouse consommer des stupéfiants et vouloir se rendre à l’hôpital pour une consultation, mais le suivi avait été rapidement interrompu. Le 18 août 2023, la seconde fille du couple, E______, avait appelé sa mère pour quelle vienne chercher sa sœur D______ chez son père car une dispute avait éclaté : cette dernière avait alors révélé à sa mère avoir découvert de la cocaïne dans la chambre de son père.

8.             M. A______, sous la plume de son conseil, a répliqué le 7 mars 2024, concluant à l’annulation de la décision.

Au-delà de la procédure pénale menée à son endroit, il convenait de prendre en considération ses déclarations faites dans le cadre de la présente procédure, lesquelles démontraient que sa consommation de cocaïne n’était absolument pas régulière.

L’examen exigé dans la décision querellée était totalement dégradant à ses yeux et absolument pas justifié.

Il conduisait des voitures de manière totalement occasionnelle et consommait en aucun cas des stupéfiants de manière régulière, si bien qu’il ne pouvait être retenu, en se basant sur le Guide d’aptitude à la conduite du 27 novembre 2020, qu’une expertise de niveau 4 devait être prononcée pour avoir consommée de manière répétée de la cocaïne au cours de six derniers mois. Il n’avait par ailleurs jamais conduit sous l’influence d’une quelconque substance, l’art. 15d al. 1 let. b de la LCR n’était donc pas applicable.

9.             L’OCV a dupliqué le 27 mars 2024, maintenant sa position.

La décision n’avait pas été prononcée en application de l’art. 15d al. 1 let. b LCR mais 15d al. 1 et 14 LCR. La situation du recourant comportait effectivement des indices suffisants pour que se posât la question de son aptitude à conduire eu égard à ses déclarations. Seule l’expertise pourra y répondre.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal des véhicules (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).

2.             Interjeté en temps utile, c’est-à-dire dans le délai de dix jours, s’agissant d’une décision incidente (art. 4 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), car prise pendant le cours de la procédure et ne représentant qu’une étape vers la décision finale (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. aussi ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 1 et l'arrêt cité ; Cédric MIZEL, La preuve de l'aptitude à la conduite et les motifs autorisant une expertise, Circulation routière 3/2019, p. 35 ; cf. encore, par analogie, ATF 122 II 359 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_212/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1 ; 1C_154/2018 du 4 juillet 2018 consid. 1.1 et 1C_514/2016 du 16 janvier 2017 consid. 1.1, portant sur le retrait à titre préventif du permis de conduire), et devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 115 et 116 LOJ ; art. 17 LaLCR ; art. 17 al. 1, 3 et 4, 57 let. c, 62 al. 1 let. b, 62 al. 3 1ère phr. et 63 al. 1 let. c LPA).

3.             À teneur de l'art. 57 let. c LPA, les décisions incidentes sont susceptibles de recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.

4.             Lorsqu’il n’est pas évident que le recourant soit exposé à un préjudice irréparable, il lui incombe d’expliquer dans son recours en quoi il serait exposé à un tel préjudice et de démontrer ainsi que les conditions de recevabilité de son recours sont réunies (ATF 136 IV 92 consid. 4 ; 133 II 353 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 2).

5.             Selon la jurisprudence, une décision est susceptible de causer un préjudice irréparable si le recourant encourt un retrait provisoire du permis de conduire et doit avancer les frais de l'examen médical auquel il doit se soumettre et qui ne lui seront peut-être pas restitués (arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_248/2011 du 30 janvier 2012 consid. 1 et les références ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. également arrêt 1C_328/2011 du 8 mars 2012 consid. 1).

6.             En l'occurrence, le recourant ne s'est aucunement prononcé sur cette question, alors qu'il lui incombait de le faire. Néanmoins, dès lors que ladite décision stipule, conformément à ce que prévoit l'art. 45 du règlement sur les émoluments de l’office cantonal des véhicules du 15 décembre 1982 (REmOCV - H 1 05.08), que les frais d'expertise seront à sa charge (cf. à cet égard art. 9 al. 1 let. d du règlement du centre universitaire romand de médecine légale, site de Genève, du 25 septembre 2013 - RCURML - K 1 55.04), qu'il devra (très vraisemblablement) s'acquitter d'une avance et que s'il ne se soumet pas à l'expertise, son permis de conduire lui sera retiré, la condition de l'art. 57 let. c LPA apparaît réalisée, si bien qu'il convient d'entrer en matière (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1).

7.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

8.             Selon l'art. 14 al. 1 LCR, tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite. Est apte à la conduite, aux termes de l'art. 14 al. 2 LCR, celui qui a atteint l’âge minimal requis (let. a), a les aptitudes physiques et psychiques requises pour conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. b), ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. c) et dont les antécédents attestent qu’il respecte les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route (let. d).

9.             Si l'aptitude à la conduite soulève des doutes, la personne concernée fera l'objet d'une enquête dans les cas énumérés de manière non exhaustive à l'art. 15d al. 1 let. a à e LCR (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1), notamment en cas d'infractions aux règles de la circulation dénotant un manque d'égards envers les autres usagers de la route (art. 15d al. 1 let. c LCR).

10.         Les faits objet des hypothèses de l’art. 15d al. 1 LCR fondent un soupçon préalable que l'aptitude à la conduite pourrait être réduite (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1 ; ATA/1138/2017 du 2 août 2017 consid. 5d et la référence). Si des indices concrets soulèvent des doutes quant à l'aptitude à la conduite de la personne concernée, un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un médecin et/ou un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un psychologue du trafic doivent être ordonnés (art. 28a al. 1 OAC ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 1C_76/2017 du 19 mai 2017 consid. 5 ; cf. aussi ATF 139 II 95 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.4.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1).

11.         L'art. 28a al. 1 OAC précise que, si l'aptitude à la conduite d'une personne soulève des doutes (art. 15d al. 1 LCR), l'autorité cantonale ordonne : a) en cas de questions relevant de la médecine du trafic: un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un médecin selon l'art. 5abis ; b) en cas de questions relevant de la psychologie du trafic, notamment dans les cas visés à l'art. 15d al. 1 let. c LCR: un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un psychologue du trafic selon l'art. 5c.

Selon l'al. 2 de cette disposition, le médecin qui procède à l'examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite doit : a) avoir obtenu une reconnaissance de niveau 4 dans les cas visés à l'art. 15d al. 1 let. a et b LCR; b) avoir obtenu au minimum une reconnaissance de niveau 3 dans les cas visés à l'art. 15d al. 1 let. d et e LCR.

12.         Aux termes de l'art. 16d al. 1 let. b LCR, le permis d'élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée à la personne qui souffre d'une forme de dépendance la rendant inapte à la conduite. La consommation de stupéfiants est considérée comme une dépendance aux drogues au sens de cette disposition lorsque sa fréquence et sa quantité diminuent l'aptitude à conduire et qu'il existe un risque majeur que l'intéressé se mette au volant d'un véhicule dans un état qui, partiellement ou de manière durable, compromet la sûreté de la conduite. En d'autres termes, ces conditions sont remplies lorsque le consommateur n'est plus en mesure de s'abstenir lorsqu'il doit conduire (ATF 129 II 82 consid. 4.1 p. 86; 127 II 122 consid. 3c p. 126; 124 II 559 consid. 3d p. 564; arrêt 1C_328/2013 du 18 septembre 2013 consid. 3.1).

13.         Ces mesures constituent un retrait de sécurité (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 122 II 359 consid. 1a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_384/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3.1), en ce sens qu'elles ne tendent pas à réprimer et ne supposent pas la commission d'une infraction fautive à une règle de la circulation, mais sont destinées à protéger la sécurité du trafic contre les conducteurs inaptes (cf. not. ATF 133 II 331 consid. 9.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_819/2013 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a ; 6A.114/2000 du 20 février 2001 consid. 2).

14.         La décision de retrait de sécurité du permis de conduire, notamment pour alcoolisme ou d'autres causes de toxicomanie, constitue une atteinte grave à la sphère privée de l'intéressé ; elle doit donc reposer sur une instruction précise des circonstances déterminantes (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 133 II 284 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_557/2014du 9 décembre 2014 consid. 3 ; 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a ; cf. en ce qui concerne le retrait justifié par des raisons médicales ou l'existence d'une dépendance : ATF 129 II 82 consid. 2.2 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2), le pronostic devant être posé sur la base des antécédents du conducteur et de sa situation personnelle (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 125 II 492 consid. 2a).

15.         Avant d'ordonner un retrait de sécurité, l'autorité doit éclaircir d'office la situation de la personne concernée. En particulier, elle doit examiner l'incidence de la toxicomanie sur son comportement comme conducteur ainsi que le degré de la dépendance. En cas de doute, il y a lieu d'ordonner un examen médical (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1), l'intérêt public lié à la sécurité routière commandant en effet que l'on procède à un examen approfondi à chaque fois qu'il existe suffisamment d'éléments pour faire naître un doute au sujet de l'aptitude à la conduite (arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.3 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.4).

16.         Un tel doute peut reposer sur de simples indices, en particulier lorsqu'il en va d'une dépendance en matière de produits stupéfiants (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1).

17.         La jurisprudence considère que les mesures appropriées à cet effet, notamment l'opportunité d'une expertise médicale, varient en fonction des circonstances et relèvent du pouvoir d'appréciation de l'autorité cantonale appelée à se prononcer sur le retrait (ATF 129 II 82 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_248/2011 du 30 janvier 2012 consid. 3.1 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a). Cela étant, en cas de soupçon de dépendance à une drogue, l'autorité de retrait doit soumettre l'intéressé à une expertise médicale ; elle ne peut y renoncer qu'à titre exceptionnel, par exemple en cas de toxicomanie grave et manifeste (arrêts du Tribunal fédéral 1C_819/2013 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.3, in JdT 2008 I 464).

18.         Ainsi, un défaut d'aptitude à conduire peut être admis lorsque la personne considérée n'est plus capable de séparer de façon suffisante sa consommation de cannabis et la conduite d'un véhicule automobile, ou s'il y a un risque important qu'elle conduise un véhicule automobile sous l'effet aigu de cette drogue (ATF 129 II 82 consid. 4.1 ; 127 II 22 consid. 3c ; 124 II 559 consid. 3d ; arrêt du Tribunal fédéral 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3b).

19.         Selon le Guide d’aptitude à la conduite du 27 novembre 2020, en matière de stupéfiants, dans le cadre d’une consommation répétée de cocaïne, d’héroïne ou d’amphétamines au cours des six derniers mois, la détermination de l’aptitude à la conduite se fait par une expertise de niveau 4, avec en règle général un retrait préventif du permis de conduire, selon l’art. 15d al. 1 LCR et 28a OAC.

20.         En présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressé a données en premier lieu, alors qu'il en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2 ; ATA/286/2017 du 14 mars 2017).

21.         En l'espèce, la question à trancher est celle de savoir s'il existe des doutes suffisants quant à l'aptitude à la conduite du recourant, susceptibles de justifier la mise en œuvre d'une expertise.

Pour fonder sa décision, l’OCV s'appuie sur le fait que le recourant a reconnu dans le cadre de la procédure pénale ayant abouti à sa condamnation par ordonnance pénale du 21 février 2024 consommer de la cocaïne de manière occasionnelle, lors de fêtes depuis 2020 ; il reconnaissait sniffer un rail de cocaïne tous les trois mois environ. Sa condamnation pénale retenait dès lors une infraction à l’art. 19a ch. 1 LStup a réitérées reprises, condamnation n’ayant pas été contestée et étant donc entrée en force.

Dans le cadre de la présente procédure, qui est ultérieure à la procédure pénale susmentionnée, le recourant minimise sa consommation, ne reconnaissant finalement qu’une consommation non régulière, lors d’événements sporadiques et portant sur d’infimes quantité de cocaïne. Or, en application de la jurisprudence précitée, il doit être retenu que le recourant, comme il l’a reconnu lors de son audition par le police le 25 août 2023, consomme depuis 2020 de la cocaïne à raison d’un rail tous les trois mois, déclaration ayant par ailleurs conduit au prononcé de l’ordonnance pénale du 21 février 2024, non contestée. Dès lors, c’est à juste titre que l’OCV conçoit des doutes sérieux sur l’aptitude à la conduite du recourant et a ordonné une expertise auprès d’un médecin de niveau 4.

22.         Mal fondé, le recours sera rejeté.

23.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA)


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 9 décembre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 30 novembre 2023 ;

2.             le rejette;

3.             met à la charge de monsieur A______ un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière