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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/3169/2021

CAPH/92/2024 du 12.11.2024 sur JTPH/7/2024 ( OO ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/3169/2021 CAPH/92/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU MARDI 12 NOVEMBRE 2024

 

Entre

A______, sise ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 18 janvier 2024 (JTPH/7/2024), représentée par Me B______, avocat,

et

Monsieur C______, domicilié ______, intimé, représenté par Me Olivier ADLER, avocat, BM AVOCATS, quai Gustave-Ador 26, case postale 6253, 1211 Genève 6.


EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/7/2024 du 18 janvier 2024, reçu le 24 janvier 2024 par [l'organisation internationale] A______ (ci-après: A______ ou l'organisation), le Tribunal des prud'hommes (ci-après: le Tribunal) a déclaré irrecevable la conclusion de C______ en délivrance d'un certificat de travail (chiffre 1 du dispositif), déclaré, pour le surplus, recevable sa demande formée le 28 juin 2021 à l'encontre de A______ (ch. 2 et 3), ainsi que la demande reconventionnelle formée par celle-ci (ch. 4), déclaré irrecevable le procès-verbal de constat produit par A______ le 3 avril 2023 (ch. 5), rejeté les requêtes de C______ en production de pièces (ch. 6), condamné A______ à verser à celui-ci la somme brute de 311'130 fr. 20, avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020 (ch. 7), invité la partie qui en avait la charge à opérer les déductions sociales et légales usuelles (ch. 8), ainsi que la somme nette de 173'226 fr. 10, avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020 (ch. 9), et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 10).

Le Tribunal a arrêté les frais judiciaires à 6'040 fr. (ch. 11), mis à la charge de A______ (ch. 12) et partiellement compensés avec l'avance de frais de 4'870 fr. effectuée par C______, acquise à l'État de Genève (ch. 13), condamné en conséquence A______ à verser le solde de 1'170 fr. aux Services financiers du Pouvoir judiciaire (ch. 14) et à rembourser la somme de 4'870 fr. à C______ (ch. 15), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 16) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 17).

B.            a. Par acte expédié le 23 février 2024 au greffe de la Cour de Justice, A______ a formé appel de ce jugement, sollicitant l'annulation des chiffres 4 à 12 [recte: 7 à 17] de son dispositif. Cela fait, elle a conclu à ce que la Cour constate que C______ avait abandonné son emploi, sans justes motifs, dès le 13 octobre 2020, que la résiliation immédiate du contrat de travail du précité le 19 octobre 2020 était justifiée, qu'aucune indemnité au sens de l'art. 337c al. 3 CO n'était donc due à celui-ci, subsidiairement que celle-ci devait être fixée à un mois de salaire, que les rapports de travail entre les parties étaient terminés depuis la date précitée pour faute grave et qu'aucune indemnité de départ n'était due à C______. Elle a également conclu à la condamnation de ce dernier à lui verser 6'801 fr. 10, avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020, à titre d'indemnité pour abandon de poste, sous suite de frais judiciaires et dépens.

Cette écriture a été rédigée et signée par Me B______, mandaté par A______ selon la procuration du 18 mars 2024 signée par son secrétaire général actuel, D______, à teneur de laquelle "l'avocat pourra, après approbation par écrit du client, représenté par le Secrétaire Général, le cas échéant par le Secrétaire Général adjoint, représenter le client dans le cadre des litiges par-devant les juridictions des Prud'hommes de la République et du canton de Genève (…)".

Elle a produit des pièces figurant déjà au dossier.

b. Dans sa réponse, C______ a conclu à l'irrecevabilité de cet appel, subsidiairement à son rejet, et à la confirmation du jugement entrepris, sous suite de frais judiciaires et dépens.

Il a produit une pièce nouvelle, soit les décisions rendues lors de la ______ème session du conseil exécutif de A______ les 18 et 19 octobre 2023.

c. Dans sa réplique, A______ a conclu à l'irrecevabilité de la pièce nouvelle susvisée et a, pour le surplus, persisté dans ses conclusions.

Elle a produit des pièces nouvelles, soit des courriers datés des 15 et 23 novembre 2023.

d. Dans sa duplique, C______ a persisté dans ses conclusions.

e. Par avis du greffe de la Cour du 21 août 2024, les parties ont été informées de ce que la cause était gardée à juger.

C.           Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure:

a. A______ est une organisation intergouvernementale, sise à Genève, dont le fonctionnement est assuré par trois organes, soit l'assemblée générale, le conseil exécutif et le secrétariat permanent.

L'organisation et le fonctionnement de A______ sont définis par une constitution et un règlement intérieur. Selon l'art. 47 de ce règlement, l'anglais, l'arabe, le français, le russe, le chinois et l'espagnol sont les langues officielles de l'organisation.

L'assemblée générale, organe suprême de l'organisation, est composée de délégués représentant les États membres et se réunit tous les deux ans. Elle a notamment pour fonction principale d'étudier et d'approuver les rapports et les activités du conseil exécutif et du secrétariat permanent (art. 14 let. d de la constitution) et de contrôler la politique financière de l'organisation, examiner et approuver son budget (let. f).

Le conseil exécutif met en œuvre les décisions prises par l'assemblée générale et dirige les activités de l'organisation. Il est composé des représentants de ______ États membres et se réunit une fois par année. Il a notamment pour fonction principale de gérer les finances de l'organisation conformément aux dispositions de la constitution (art. 23 let. e de la constitution).

Le secrétariat permanent exécute les travaux de l'organisation sur les plans technique et administratif. Il est composé d'un secrétaire général, d'un secrétaire général adjoint et du personnel nécessaire à l'accomplissement de sa mission.

L'art. 40 de la constitution précise que le secrétaire général prépare et soumet au conseil exécutif les prévisions budgétaires et les soumet à l'assemblée générale en les accompagnant des recommandations opportunes.

Par déclaration du 7 décembre 2015, A______ a formellement renoncé à l'immunité de juridiction et d'exécution pour tous litiges découlant des rapports de service de ses fonctionnaires ou anciens fonctionnaires.

b. Par contrat de travail déterminé du 4 novembre 2010, A______ a engagé C______, ressortissant algérien né en 1960, en qualité d'expert-conseiller, dès le 1er janvier 2011.

c. Lors de la ______ème session de l'assemblée générale de A______ des 28 et 29 novembre 2012, celle-ci a, par résolution 1______, fixé l'indemnité de départ du secrétaire général, laquelle était calculée sur la base du dernier salaire multiplié par le nombre d'années de service, plafonné à douze années, étant précisé que toute période excédant six mois comptait comme une année.

Cette indemnité était due en cas de cessation anticipée du mandat du secrétaire général en raison de son incapacité à exercer ses fonctions, de démission et de décès. Aucune indemnité n'était due si l'employé quittait l'organisation en raison de son "incompétence ou de mesures disciplinaires punitives".

d. Par contrat de travail du 12 juillet 2013, A______ a engagé C______ en qualité de secrétaire général adjoint par intérim, pour une durée limitée du 13 juillet 2013 au 31 décembre 2014.

e. Le 24 avril 2014, C______ a été engagé par A______ en qualité de secrétaire général adjoint, pour une durée limitée du 24 avril 2014 au 31 décembre 2019.

f. Lors de la ______ème session de l'assemblée générale de A______ du 27 mars 2018, E______ et C______ ont été reconduits aux postes de secrétaire général, respectivement de secrétaire général adjoint, pour un mandat de six ans.

Le 18 octobre 2018, E______ a démissionné de son poste de secrétaire général. C______ devait alors assurer l'intérim jusqu'à la prochaine session du conseil exécutif, conformément à l'art. 80 du règlement intérieur de A______.

g. Lors de la ______ème session du conseil exécutif des 8 et 9 avril 2019, C______ a été nommé secrétaire général ad intérim jusqu'à la prochaine session de l'assemblée générale prévue en 2020 et F______ a été nommé secrétaire général adjoint pour une durée de six ans.

Le conseil exécutif a requis du secrétaire général ad intérim la mise en place, avant juin 2019, d'une commission administrative et financière afin de préparer une profonde réforme du fonctionnement administratif et financier de l'organisation. Le conseil exécutif a également sollicité l'élaboration d'une réforme de différents règlements de celle-ci et ordonné la mise en œuvre d'un audit indépendant portant sur les activités financières et administratives de l'organisation depuis 2014.

h. Le 8 avril 2019, A______ et C______ ont conclu un nouveau contrat de travail, par lequel celui-ci était engagé en tant que secrétaire général ad intérim à compter du 1er mai 2019 et "jusqu'à la fin des trois mois qui suivent la tenue de la ______ème session de l'assemblée générale, qui nommera le secrétaire général". Le salaire mensuel brut convenu était de 27'204 fr. 35.

Ce contrat prévoyait que C______ pouvait se voir octroyer un montant maximum de 10'000 fr. pour couvrir les frais de déménagement encourus pour regagner son pays d'origine à l'issue de son contrat. Il avait également droit à une indemnité de fin de service calculée conformément à la résolution 1______ de la ______ème session de l'assemblée générale. Son droit aux vacances était de trente jours par an.

Ce contrat pouvait être résilié de manière anticipée, par l'assemblée générale sur proposition du conseil exécutif, "en cas de force majeure exceptionnelle susceptible de nuire aux intérêts de A______" moyennant un préavis de trois mois.

i. Le 30 mai 2019, A______ a mandaté G______ SA pour procéder à un audit indépendant du secrétariat permanent, plus exactement d'examiner les activités de E______ entre janvier 2014 et octobre 2018.

j. Selon une circulaire interne du 15 juin 2019, le secrétaire général ad interim a informé l'ensemble du personnel que le secrétariat permanent serait fermé du 30 décembre 2019 au 5 janvier 2020 et que cette semaine de fermeture n'aurait pas d'influence sur leur droit annuel aux vacances.

k. G______ SA a rendu son rapport d'audit le 16 novembre 2019.

l. La commission financière s'est réunie les 18 et 19 novembre 2019 et a émis sept recommandations.

Par courrier du 21 février 2020, le président du conseil exécutif a indiqué à C______ qu'il était nécessaire d'organiser une deuxième réunion de la commission financière.

m. Par courriers des 30 juin, 2, 6 et 13 juillet 2020, F______ a fait part à C______ de ses préoccupations, notamment en lien avec des avantages accordés à un employé du secrétariat permanent, H______, ainsi que d'autres problématiques financières.

Par courrier du 7 juillet 2020, F______ a informé le président du conseil exécutif des irrégularités financières constatées dans le cadre de ses fonctions.

n. Le 18 septembre 2020, le président du conseil exécutif a adressé un courrier à l'ensemble des représentants permanents des États membres de A______ dans la perspective de la prochaine session du conseil exécutif. Il a notamment listé les préoccupations qui devaient être discutées lors de celle-ci, à savoir l'échec de la réforme administrative, l'audit réalisé par G______ SA, les irrégularités persistantes en matière de personnel et de finances, ainsi que le non-respect, par le secrétaire général ad interim, de la constitution, du règlement intérieur et des décisions des organes constitutifs de l'organisation.

o. Par décisions de fin de service ("Decision of End of Service") datées du 12 octobre 2020, A______, soit pour elle C______, a indiqué à I______ et H______ que leur contrat de travail prendrait fin le 30 novembre 2020, respectivement le 15 novembre 2020.

p. La ______ème session du conseil exécutif de A______ s'est tenue les 12 et 13 octobre 2020.

Le 13 octobre 2020, le conseil exécutif a démis C______ de ses fonctions de secrétaire général ad interim avec effet immédiat et a nommé F______ à ce poste.

Le 13 octobre 2020, les présidents du conseil exécutif et de l'assemblée générale, ainsi que F______, en ses qualités de secrétaire général ad interim et de secrétaire général adjoint, ont signé un courrier, intitulé "décision de renvoi", destiné à l'ensemble des États membres de A______, confirmant la destitution de C______, avec effet au 13 octobre 2020 à 11h00, ainsi que la nomination de F______ au poste de secrétaire général ad interim, avec pouvoir de signature individuelle, en ces termes: "les membres du Conseil exécutif ont pris la décision, sur proposition de la Fédération de Russie, de renvoyer C______ […] avec effet immédiat […]. Dès lors, toutes les fonctions de Monsieur C______ au sein de l'Organisation cessent dès ce jour, 11h00".

q. Dans la soirée du 13 octobre 2020, A______ a scellé le bureau de C______ et lui a retiré ses accès informatiques.

r. Lors de la ______ème session de l'assemblée générale de A______ du 14 octobre 2020, D______ a été nommée secrétaire général pour une période de six ans.

s. Par courrier recommandé du 19 octobre 2020, A______, soit pour elle F______, a résilié avec effet immédiat le contrat de travail de C______, au motif qu'il avait abandonné son poste de manière injustifiée lors des sessions du conseil exécutif et de l'assemblée générale des 12 au 14 octobre 2020.

A______ indiquait que C______ avait quitté la réunion après avoir été démis de ses fonctions de secrétaire général ad interim et ne s'était plus présenté à son poste de travail et ce, sans explication. Il avait vidé, sans droit, son bureau et avait détruit des documents.

t. Le 2 novembre 2020, A______ a versé à C______ un montant net de 11'164 fr. 60 à titre de salaire du mois d'octobre 2020.

u. A teneur des pièces produites, C______ a déménagé à J______ (Algérie) en janvier 2021.

Selon les factures produites des 14 janvier 2021, 18 février 2021, 14 juillet 2021 et 14 octobre 2021, ses frais de déménagement se sont élevés à 16'000 fr., ses frais d'entreposage entre mars et septembre 2021 à 2'584 fr. 75 et ses frais d'assurance de transport à 1'690 fr.

D. a. Par acte du 28 juin 2021, après l'échec de la tentative de conciliation, C______ a assigné A______ en paiement de la somme totale de 486'251 fr. 87, avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020, due à titre de salaire pour les mois d'octobre 2020 à janvier 2021 (81'913 fr. 05), d'indemnité de départ prévue contractuellement (191'130 fr. 45), d'indemnité pour licenciement immédiat injustifié (163'826 fr. 10), d'indemnité pour vacances non prises en nature (39'381 fr. 27) et de participation aux frais de déménagement (10'000 fr.). Il a également conclu à la remise d'un certificat de travail.

Il a allégué que la session du conseil exécutif des 12 et 13 octobre 2020 s'était déroulée en violation du règlement intérieur et de la constitution de l'organisation. Le 13 octobre 2020, il avait présenté son rapport d'activités et exposé les irrégularités constatées. Alors qu'il lisait ce rapport, il avait été abruptement interrompu par le représentant de la fédération de Russie, lequel avait réclamé sa destitution. Il avait été démis de ses fonctions avec effet immédiat à 11h00. Ce licenciement immédiat ne reposait sur aucun juste motif. Le conseil exécutif n'était d'ailleurs pas habilité à prendre cette décision. Il avait toutefois pris acte de sa destitution. Le 14 octobre 2020, il avait voulu se rendre à son bureau pour trouver une solution, dans la mesure où il désirait poursuivre la défense des intérêts de A______. Ses accès professionnels ayant été bloqués dans la soirée du 13 octobre 2020, il ne pouvait plus accéder à son ordinateur, ni à sa messagerie électronique. F______ avait ordonné de changer la serrure de son bureau et il avait été invité à restituer ses clés, ainsi que sa voiture de fonction. Le motif de son licenciement immédiat du 19 octobre 2020, soit un prétendu abandon de poste, n'était pas conciliable avec les mesures précitées. En 2020, il n'avait pris aucun jour de vacances, à l'exception des jours de fermeture de A______, lesquels ne devaient pas être décomptés de son solde de vacances.

b. Dans sa réponse, A______ a conclu au déboutement de C______ de toutes ses conclusions, précisant s'en rapporter à justice quant à la délivrance d'un certificat de travail.

Sur demande reconventionnelle, elle a conclu à la condamnation du précité à lui verser 6'801 fr. 10, avec intérêts à 5% dès le 13 octobre 2020, à titre d'indemnité pour abandon de poste.

Elle a allégué qu'après la démission de E______, le conseil exécutif avait confié à C______ la mission de réaliser un audit du secrétariat permanent et une réforme administrative, afin d'éviter de futures malversations. Or, le précité n'avait pas convoqué la commission financière dans le délai imparti, ni mis en œuvres les recommandations de celle-ci, alors qu'elle avait identifié de graves irrégularités. Il n'avait pas non plus organisé la deuxième réunion de la commission financière, malgré sa nécessité et les réitérées demandes de F______ et du président du conseil exécutif. De plus, lors d'une réunion interne des 3 et 4 février 2020, C______ avait été interpellé sur plusieurs problématiques financières, notamment le remboursement des impôts d'un employé, H______, et sur sa gestion budgétaire. C______ avait refusé de signer le procès-verbal de cette réunion. En outre, il avait limité, de manière intentionnelle, la mission d'audit confiée à G______ SA, afin que celle-ci n'analyse pas ses activités. Enfin, il avait favorisé deux employés du secrétariat permanent, soit H______ et I______, en leur accordant des avantages indus. C______ avait ainsi perturbé la réforme administrative pour maintenir le système corruptif mis en place par son prédécesseur.

Après sa destitution, C______ avait quitté la session en criant, puis s'était rendu à son bureau, l'avait saccagé et avait détruit des documents. A cet égard, A______ a produit des photographies d'un bureau, sur lesquelles on observe des tiroirs ouverts, vidés et une poubelle remplies (pièce n° 32), ainsi qu'un extrait du suivi des badges de l'organisation en date du 13 octobre 2020, dont les noms indiqués sont I______, "K______", "Personne" et "DSG" (pièce n° 34). C______ avait également établi de fausses conventions de fin de service, antidatées, pour H______ et I______. Par la suite, il n'était plus revenu sur son lieu de travail et avait abandonné son poste.

Enfin, C______ avait omis de mettre en place un registre des décomptes des vacances. Elle n'était donc pas en mesure de déterminer le nombre de jours de vacances qu'il avait pris, mais ses absences étaient nombreuses et répétées. Son droit aux vacances était ainsi épuisé. Le précité n'avait, en outre, pas déménagé en Algérie.

c. Dans sa réplique et réponse sur demande reconventionnelle, C______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions et a, pour le surplus, persisté dans ses conclusions. Il a également conclu, à titre préalable, à la production de diverses pièces et, à titre subsidiaire, à la modification de la date de départ des intérêts moratoires requis au 19 octobre 2020. Plus subsidiairement encore, il a conclu au constat du caractère nul de son licenciement immédiat.

Il a soutenu que F______ menait "une guerre intestine" au sein de l'organisation dirigée à son encontre. Poursuivant sa volonté de lui nuire et de l'humilier, le précité l'avait interrompu lors de la session du 13 octobre 2020 et avait demandé et obtenu sa destitution. Or, le conseil exécutif n'était pas habilité à prendre une telle décision, laquelle avait, en outre, été prise sans vote. Après sa destitution, il était évident que A______ n'attendait pas de lui qu'il continue son activité, ce que confirmait le courrier du 13 octobre 2020. Elle ne l'avait d'ailleurs jamais mis en demeure de reprendre son poste. Les reproches que celle-ci formulait à son encontre étaient infondés. Il avait occupé le poste de secrétaire général ad interim pendant deux ans et avait procédé, durant cette période, à d'importantes réformes, afin d'assainir le fonctionnement de l'organisation. Il avait été convenu que l'audit indépendant ne devait porter que sur la période 2014-2018. En raison de la pandémie, son déménagement en Algérie avait été retardé, mais avait finalement eu lieu début 2021.

d. Dans sa duplique, A______ a persisté dans ses conclusions.

Elle a soutenu que le courrier du 13 octobre 2020 avait été rédigé en russe, puis traduit en français. Cette traduction était toutefois erronée et il fallait en réalité comprendre que C______ était immédiatement libéré de la fonction de secrétaire général ad interim. Il ne s'agissait pas d'un licenciement immédiat, le précité ayant été uniquement démis de ses fonctions. Les frais de déménagement de C______ étaient contestés, ceux-ci étant "gonflés" et comprenant des frais d'assurance et d'entreposage. Enfin, l'ancienne comptable de A______, L______, avait été reconnue coupable, par ordonnance pénale du 10 décembre 2021, d'abus de confiance, de faux dans les titres et de diffamation. Dans le cadre de cette procédure, la précitée avait déclaré avoir travaillé sous la supervision de E______ et C______, ceux-ci approuvant systématiquement toutes transactions et avances de paiement. Ce dernier avait donc participé au système mis en place par son prédécesseur et l'avait perpétué.

e. C______ s'est déterminé sur l'écriture susvisée et a contesté l'argumentation de sa partie adverse.

f. Lors des audiences du Tribunal des 3 avril et 16 mai 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

C______ a déclaré avoir déménagé en Algérie dès la fin de la pandémie, étant précisé que ses meubles étaient restés chez le transporteur jusqu'en novembre 2021. Il était officiellement domicilié en Algérie et logeait chez ses enfants lorsqu'il venait à Genève.

A______, représentée par F______, a déclaré ne pas se souvenir s'il avait été demandé à C______ de restituer ses clés et son véhicule de fonction le 14 octobre 2020. L'assemblée générale avait lieu ce jour-là et le précité ne l'intéressait pas. Cela étant, quelqu'un avait dû lui demander de restituer ces biens.

g. Lors des audiences des 19 avril, 16 et 22 mai 2023, le Tribunal a entendu des témoins.

I______, ancien employé de A______, a déclaré être actuellement en litige avec celle-ci au sujet de son licenciement immédiat. C______ exécutait bien son travail, malgré les circonstances ayant entouré le départ de E______. En effet, après ce départ, C______ avait pris ses fonctions dans une situation chaotique. Cela étant, en 2019, certains pays s'étaient acquittés de leurs arriérés, de nouveaux candidats s'étaient manifestés pour devenir membre, des programmes de formation avaient été mis en place et ce, à moindre coûts. Il existait des tensions entre C______ et F______. Il lui avait été demandé, implicitement, de choisir son camp. La session du conseil exécutif des 12 et 13 octobre 2020 ne s'était pas déroulée conformément à la constitution et au règlement de l'organisation. Le 12 octobre 2020 en fin de journée, pour des raisons techniques, les représentants, qui assistaient en visioconférence, étaient privés de parole dès qu'une personne présente dans la salle parlait. Le 13 octobre 2020, alors qu'il présentait son rapport, C______ avait été interrompu, sauf erreur par les représentants de la fédération de Russie, participant en visioconférence. Ils avaient demandé sa destitution, au motif qu'il effectuait un travail inefficace et gérait mal l'organisation. Cette destitution n'avait été précédée d'aucun vote et avait été faite de manière humiliante. Après celle-ci, C______ lui avait demandé, ainsi qu'à H______, de le suivre dans les locaux de A______ pour notamment préparer l'assemblée générale du lendemain.

H______, ancien employé de A______, a déclaré être actuellement en litige avec celle-ci au sujet de son licenciement immédiat. C______ avait bien accompli son mandat de secrétaire général ad interim, d'autant plus qu'il avait assumé cette fonction durant une période difficile. Il existait des tensions entre le précité et F______, qui donnaient des instructions contradictoires. C______ avait été destitué, lors de la session du 13 octobre 2020, de manière perfide. Alors qu'il n'avait pas terminé la lecture de son rapport, il avait été interrompu par le représentant de la fédération de Russie, lequel avait réclamé sa destitution, au motif qu'il n'avait rien fait pendant son intérim. Aucune des personnes présentes dans la salle ne s'était opposée à cette destitution et ceux présents par visioconférence n'avaient pas eu l'opportunité de le faire. Le principe et l'étendue de l'audit confié à G______ SA avaient été décidés par le conseil exécutif en 2019, à savoir l'activité de E______ entre 2014 et 2018. Ses accès informatiques, de même que ceux de C______ et I______, avaient été bloqués, en tous les cas, dès le 14 octobre 2020.

M______, ancienne employée de A______, a déclaré qu'il existait des tensions et des mésententes entre C______ et F______. Implicitement, ce dernier demandait aux collaborateurs de choisir un camp. Ils avaient des visions divergentes concernant l'avenir de l'organisation, raison pour laquelle F______ souhaitait écarter C______. Ce dernier respectait les lois nationales et internationales. Elle avait eu le sentiment que F______ voulait qu'un nouveau secrétaire général soit nommé le plus rapidement possible. En effet, durant les semaines précédant les sessions d'octobre 2020, il y avait eu des indices en ce sens, F______ lui ayant indiqué que les choses allaient changer. Elle ignorait si les accès informatiques de C______ avaient été bloqués. En revanche, F______ avait demandé la mise sous scellé de son bureau, voire le changement de la serrure. Dans la soirée du 13 octobre 2020, elle avait reçu du précité une photographie du bureau de C______, lequel avait été "saccagé". Elle avait été surprise de voir son bureau dans cet état, car cela ne correspondait pas au caractère du précité qui était calme et pondéré.

N______, employée au sein de A______, a déclaré que C______ n'avait rien fait pour mettre en œuvre les recommandations de la commission financière. Ce dernier avait favorisé H______ et I______. Il avait été destitué avec effet immédiat le 13 octobre 2020, parce qu'il n'avait pas accompli les tâches confiées lors de sa nomination au poste de secrétaire général ad interim en 2019. Personne ne s'était opposé à sa destitution. Après celle-ci, C______ avait exprimé son indignation et il lui avait été demandé de quitter le podium. Il avait alors quitté la séance et son bureau avait été retrouvé en désordre dans la soirée du 13 octobre 2020, avec des documents jetés au sol.

O______, employé au sein de A______, a déclaré avoir bloqué, à la demande de F______, les accès informatiques de C______ dans la soirée du 13 octobre 2020 ou le 14 octobre 2020. En outre, il avait constaté que le bureau de ce dernier était en grand désordre, lorsqu'il s'était rendu dans les locaux de A______ en fin de journée le 13 octobre 2020, avec F______. C______ avait favorisé H______ et I______.

h. Le 9 juin 2023, A______ a produit un jugement du Tribunal de police du 23 janvier 2023, par lequel L______ était reconnue coupable d'abus de confiance, de faux dans les titres et de diffamation. Selon elle, cela confirmait les schémas de fraudes révélés par G______ SA et le fait que E______ et C______ n'avaient pas supervisé, ni révisé le travail de la précitée.

C______ a conclu à l'irrecevabilité de cette pièce nouvelle et a allégué que le jugement susvisé ne le citait pas, ne le concernait pas et n'avait aucun lien avec la présente procédure.

A réception de ces déterminations, le Tribunal a gardé la cause à juger.

E. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a considéré que la destitution de C______ le 13 octobre 2020 équivalait à un licenciement immédiat. En effet, dans la soirée du 13 octobre 2020 ou le lendemain, ses accès professionnels avaient été bloqués et son bureau avait été scellé. Il avait également dû restituer ses clés et sa voiture de fonction. Ces éléments confirmaient que A______ avait choisi de se séparer de lui avec effet immédiat. Elle ne l'avait d'ailleurs pas mis en demeure de reprendre son poste. De plus, les termes du courrier du 13 octobre 2020, selon lesquels le précité était démis de "toutes ses fonctions avec effet au 13 octobre 2020 à 11h00", étaient clairs et ne laissaient pas matière à interprétation. Le français étant une langue officielle de l'organisation, celle-ci ne pouvait pas se prévaloir d'une erreur de traduction à cet égard.

Or, ce licenciement immédiat était tardif, A______ étant informée des prétendus manquements reprochés à C______ depuis le 18 septembre 2020, au plus tard. En juillet 2020, F______ écrivait déjà au président du conseil exécutif pour l'informer des irrégularités financières reprochées à C______. En tous les cas, A______ n'avait pas démontré l'existence de justes motifs de congé immédiat. Les motifs invoqués n'avaient pas été discutés lors de la session du 13 octobre 2020 et la prétendue mauvaise gestion du précité ne justifiait pas un tel licenciement, sans avertissement préalable.

Ainsi, C______ avait droit à son salaire jusqu'au 14 janvier 2021, date à laquelle son contrat de travail prenait fin (81'613 fr. 05 = 27'204 fr. 35 bruts x 3 mois), à l'indemnité de départ prévue dans celui-ci (190'430 fr. 45 = 27'204 fr. 35 bruts x 7 mois, compte tenu des conclusions de C______), à l'indemnité pour vacances non prises en nature - A______ n'ayant pas démontré que le précité avait bénéficié de l'entier de ses jours de vacances, alors qu'elle en avait la charge - [39'086 fr. 70 bruts = (27'204 fr. 35 x 12 mois) / (12 mois x 21.75 jours de travail par mois en moyenne) x 31.25 jours de solde de vacances)]. Il avait également droit à une indemnité pour licenciement immédiat injustifié, les circonstances entourant sa destitution étant humiliantes et son licenciement étant intervenu par pure convenance personnelle (163'226 fr. 10 nets = 27'204 fr. 35 x 6 mois), ainsi qu'une participation à ses frais de déménagement (10'000 fr.).


 

F. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure d'appel:

a. La ______ème session du conseil exécutif de A______ s'est tenue les 18 et 19 octobre 2023.

A teneur de la décision n° 8, concernant le budget de l'exercice 2024, le conseil exécutif, "profondément préoccupé par l'écart croissant entre les recettes et les dépenses du Secrétariat permanent", "réitérant sa préoccupation face aux dépenses excessives" de celui-ci, a notamment approuvé les propositions "Campagne de soutien à la résilience de l'organisation" émises par [l'État] P______ (annexe n° 4).

A teneur de l'annexe n° 4 susvisé, la recommandation n° 11 est libellée comme suit: "L'arrêt de toutes les poursuites judiciaires contre les anciens fonctionnaires du secrétariat permanent, compte tenu du fait que toute responsabilité administrative et financière incombe strictement au Secrétaire Général en accord avec l'article 27 de la Constitution, sans oublier de mentionner les coûts injustifiés de ces procédures (frais des avocats et autres coûts juridiques) à ce jour et ceux à venir.

Les procédures en cours, qu'elles soient pénales ou civiles, devraient être closes et régler toutes les indemnités dues aux anciens fonctionnaires du Secrétariat permanent conformément à leurs contrats respectifs."

b. Par courrier du 15 novembre 2023, le conseil de C______ a indiqué à A______ que, compte tenu de la décision n° 8 susvisée, il lui faisait parvenir le calcul des indemnités dues à son mandant.

c. Par courrier du 22 novembre 2023, F______ a indiqué au conseil de l'organisation que la recommandation susvisée n'était en l'état qu'indicative, l'assemblée générale ne l'ayant pas validée, de sorte qu'il ne devait pas interrompre la présente procédure. De plus, dans le cadre de celle-ci, les indemnités n'étant pas dues, sa poursuite n'était pas contraire à cette recommandation.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance lorsque, dans les affaires patrimoniales, la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 1 let. a et al. 2 CPC).

En l'espèce, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.2 Déposé dans le délai utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1, 131 et 311 al. 1 CPC), l'appel est recevable à cet égard.

1.3 L'intimé fait valoir que suite à l'adoption de la décision n° 8, lors de la ______ème session du conseil exécutif les 18 et 19 octobre 2023, le secrétaire général n'était plus autorisé à mandater au nom de l'appelante Me B______ pour déposer le présent appel.

L'appel a effectivement été déposé le 29 janvier 2024, soit après l'adoption de la décision susvisée, qui concerne le budget de l'exercice 2024 de l'appelante. A teneur de l'annexe n° 4 de cette décision, le conseil exécutif a approuvé une recommandation tendant à l'arrêt de toutes les poursuites judiciaires concernant les anciens fonctionnaires du secrétariat permanent, soit notamment l'intimé.

Cela étant, il ressort de l'art. 14 de la constitution de l'organisation que les décisions prises concernant son budget doivent être approuvées par l'assemblée générale, à la suite des recommandations faites selon la procédure prévue à l'art. 40 de ladite constitution.

Comme soutenu par l'appelante, il apparaît ainsi que la décision n° 8 et ses annexes ne sont, en l'état, pas contraignants, l'assemblée générale n'ayant pas encore approuvé les décisions relatives au budget 2024, ce qui n'est pas contesté. Les pouvoirs de représentation du conseil de l'appelante (art. 68 CPC) n'ont donc pas été retirés à ce dernier à la suite de l'adoption par le conseil exécutif de ladite décision.

Par ailleurs, le fait que la procuration du 19 mars 2024 ne mentionne pas expressément le litige à l'encontre de l'intimé n'est pas déterminant. Ce dernier ne peut pas non plus se prévaloir du fait que l'appelante n'aurait pas produit d'approbation écrite de son secrétaire général actuel pour l'engagement de la présente procédure ou le dépôt de l'appel du 23 février 2024. En effet, ladite procuration est bel et bien signée par l'actuel secrétaire général de l'appelante, soit D______.

L'appel sera ainsi déclaré recevable.

1.4 Les parties ne contestent pas, à juste titre, la compétence des juridictions genevoises pour connaître du présent litige, dans la mesure où l'appelante a, par déclaration du 7 décembre 2015, formellement renoncé à l'immunité de juridiction pour tous litiges découlant des rapports de service de ses fonctionnaires ou anciens fonctionnaires.

De plus, l'intimé accomplissait habituellement son travail à Genève et le siège de l'appelante s'y trouve également (art. 34 CPC).

2.             La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit (art. 310 CPC), mais uniquement dans la limite des griefs motivés qui sont formulés (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4). En particulier, elle contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l’art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

La valeur litigieuse étant supérieure à 30'000 fr., la procédure ordinaire s'applique et le procès est régi par la maxime des débats, qui prévoit que les parties allèguent les faits sur lesquels elles fondent leurs prétentions et produisent les preuves qui s'y rapportent (art. 55 al. 1 CPC, art. 243 et art. 247 al. 2 CPC a contrario).

3.             Les parties ont produit des pièces nouvelles et allégué des faits nouveaux devant la Cour.

3.1 La Cour examine d'office la recevabilité des pièces produites en appel (Reetz/Hilber, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2013, n° 26 ad art. 317 CPC).

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de la diligence requise (let. b).

3.2 En l'occurrence, les pièces nouvelles produites par les parties sont toutes postérieures à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger, de sorte qu'elles sont recevables, de même que les faits s'y rapportant.

4.             L'appelante fait grief au Tribunal de ne pas avoir considéré que l'intimé avait abandonné son poste dès le 13 octobre 2020 et que son licenciement immédiat du 19 octobre 2020 était ainsi justifié.

4.1.1 L'employeur et le travailleur peuvent résilier immédiatement le contrat en tout temps pour de justes motifs (art. 337 al. 1 CO). Sont notamment considérés comme de justes motifs, toutes les circonstances qui, selon les règles de la bonne foi, ne permettent pas d'exiger de celui qui a donné le congé la continuation des rapports de travail (art. 337 al. 2 CO).

Mesure exceptionnelle, la résiliation immédiate pour justes motifs doit être admise de manière restrictive (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1). Les faits invoqués à l'appui d'un renvoi immédiat doivent avoir entraîné la perte du rapport de confiance qui constitue le fondement du contrat de travail (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_395/2018 du 10 décembre 2019 consid. 5.1). Seul un manquement particulièrement grave du travailleur justifie son licenciement immédiat (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Si le manquement est moins grave, il ne peut entraîner une résiliation immédiate que s'il a été répété en dépit d'un ou de plusieurs avertissements (ATF 142 III 579 consid. 4.2; 130 III 213 consid. 3.1; 130 III 28 consid. 4.1). L'employeur peut toutefois s'en abstenir lorsqu'il ressort de l'attitude de l'employé qu'une telle démarche serait inutile (ATF 127 III 153 consid. 1b).

Le juge apprécie librement s'il existe de justes motifs (art. 337 al. 3 CO); il applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC) et il dispose d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 4A_105/2018 du 10 octobre 2018 consid. 3.2.2). Savoir si le comportement incriminé atteint la gravité nécessaire dépend des circonstances du cas concret (ATF 142 III 579 consid. 4.2). Dans son appréciation, le juge doit notamment tenir compte de la position du travailleur au sein de l'entreprise, du type et de la durée des rapports contractuels, de la nature et de l'importance des manquements (ATF 137 III 303 consid. 2.1.1; 130 III 28 consid. 4.1; 127 III 351 consid. 4a).

Un brusque départ de la place de travail par suite d'une perturbation psychique (énervement) ne justifie pas un licenciement immédiat (Gloor, Commentaire du contrat de travail, 2022, n° 29 ad art. 337 CO).

Il appartient à la partie qui se prévaut de justes motifs de résiliation immédiate d'en établir l'existence (art. 8 CC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2010 du 13 avril 2010 consid. 4.1).

4.1.2 La partie qui entend se prévaloir de justes motifs doit le faire en principe sans délai, par quoi il faut entendre une manifestation de volonté intervenant après un bref temps de réflexion; une trop longue attente comporterait la renonciation à se prévaloir de ce moyen. La durée dépend des circonstances, mais un délai d'un à trois jours ouvrables est présumé approprié (ATF 138 I 113 consid. 6.3.1;
127 III 310 consid. 4b; arrêt du Tribunal fédéral 4A_559/2016 du 18 janvier 2017 consid. 4.1).

Un délai supplémentaire n'est accordé à celui qui entend résilier le contrat que lorsque les circonstances particulières du cas concret exigent d'admettre une exception à cette règle (par exemple attendre le retour de l'employé fautif de ses vacances (arrêt du Tribunal fédéral 4A_236/2012 du 2 août 2012) ou lorsque au sein d'une personne morale la décision de licenciement relève de la compétence d'un organe constitué de plusieurs membres (ATF 130 III 28, consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 4C_364/2001 du 19 juillet 2002 consid. 1.2.1).

4.1.3 Aux termes de l'art. 337c al. 1 CO, lorsque la résiliation immédiate du contrat est injustifiée, le travailleur a droit à ce qu'il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l'expiration du délai de congé ou à la cessation du contrat conclu pour une durée déterminée.

La prétention du travailleur fondée sur cet article est une créance en dommages-intérêts qui inclut non seulement le salaire, y compris en nature, mais également la compensation des autres avantages résultant du contrat de travail, tels que les gratifications ou les indemnités de départ (arrêt du Tribunal fédéral 4C_321/2005 du 27 février 2006 consid. 8.3). Elle comprend également le paiement des vacances lorsque le contrat aurait pu prendre fin normalement dans un délai relativement bref (Wyler/Heinzer, Droit du travail, 2019, p. 760).

Conformément à l'art. 329d al. 1 CO, l'employeur verse au travailleur le salaire total afférent aux vacances et une indemnité équitable en compensation du salaire en nature.

La loi réglemente les vacances comme un droit contractuel du travailleur à une prestation de la part de l'employeur, et non comme une simple restriction des prestations dues par le travailleur. Il appartient dès lors au travailleur de prouver l'existence d'une obligation contractuelle de l'employeur de lui accorder des vacances, et la naissance de cette obligation du fait de la durée des rapports de travail. Il incombe en revanche à l'employeur, débiteur des vacances, de prouver que le travailleur a bénéficié des vacances auxquelles il avait droit
(ATF 128 III 271 consid. 2a, in JdT 2003 I 606; arrêt du Tribunal fédéral 4C_230/1999 du 15 septembre 1999 consid. 4; Dietschy-Martenet, Commentaire romand CO I, 2021, n° 7 ad art. 329a CO).

4.1.4 Lorsque l'employeur résilie immédiatement le contrat de travail sans justes motifs, le juge peut condamner celui-ci à verser au travailleur une indemnité dont il fixera librement le montant, compte tenu de toutes les circonstances; cette indemnité ne peut toutefois dépasser le montant correspondant à six mois de salaire du travailleur (art. 337c al. 3 CO).

En principe, cette indemnité couvre le tort moral subi par le travailleur (ATF 135 III 405 consid. 3.1). Sauf cas exceptionnel, elle doit être versée pour tout licenciement immédiat dénué de justes motifs (ATF 133 III 657 consid. 3.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_173/2018 du 29 janvier 2019 consid. 5.1).

Cette indemnité, qui s'ajoute aux droits découlant de l'art. 337c al. 1 CO, revêt une double finalité, à la fois réparatrice et punitive, quand bien même elle ne consiste pas en des dommages-intérêts au sens classique, car elle est due même si la victime ne subit ou ne prouve aucun dommage; revêtant un caractère sui generis, elle s'apparente à la peine conventionnelle (ATF 135 III 405 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_173/2018 précité consid. 5.1).

L'indemnité est fixée d'après la gravité de la faute de l'employeur, la mesure de l'atteinte portée aux droits de la personnalité du travailleur et la manière dont la résiliation a été annoncée. D'autres critères tels que la durée des rapports de travail, l'âge du lésé, sa situation sociale et les effets économiques du licenciement entrent aussi en considération (arrêt du Tribunal fédéral 4A_161/2016 du 13 décembre 2016 consid. 3.1).

L'indemnité consécutive à une faute grave de l'employeur se situe le plus souvent entre quatre et six mois de salaire. Une éventuelle faute concomitante du travailleur est prise en considération et peut donner lieu à une réduction, voire à une suppression de l'indemnité lorsque la faute du travailleur est grave, mais insuffisante pour justifier le licenciement avec effet immédiat, ou encore lorsque tout manquement de l'employeur ou tout reproche d'un autre ordre est exclu (Wyler/Heinzer, op. cit., p. 765).

4.1.5 L'abandon de poste, au sens de l'art. 337d CO, entraîne l'expiration immédiate du contrat. Il est réalisé lorsque le travailleur refuse consciemment, intentionnellement et définitivement de continuer à fournir le travail convenu (ATF 121 V 277 consid. 3a). Dans ce cas, le contrat de travail prend fin immédiatement, sans que l'employeur doive adresser au salarié une résiliation immédiate de son contrat (ATF 121 V 277 consid. 3a; 112 II 41 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral 4C_303/2005 du 1er décembre 2005 consid. 2.2 et 4C_370/2001 du 14 mars 2002 consid. 2a).

La décision du travailleur d'abandonner son emploi doit apparaître nettement. Lorsque celle-ci ne ressort pas d'une déclaration explicite du travailleur, le juge doit examiner si l'employeur a pu de bonne foi, en considération de l'ensemble des circonstances, comprendre son attitude comme un abandon de poste; le principe de la confiance, relatif à l'interprétation des déclarations et autres manifestations de volonté entre cocontractants (ATF 144 III 93 consid. 5.2.3; 135 III 410 consid. 3.2) est déterminant (arrêts du Tribunal fédéral 4A_337/2013 du 12 novembre 2013 consid. 3 et 4C_339/2006 du 21 décembre 2006 consid. 2.1). Lorsque l'attitude du travailleur est équivoque, il appartient à l'employeur de le mettre en demeure de reprendre son activité (arrêt du Tribunal fédéral 4A_91/2021 du 19 juillet 2021 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, lorsque l'absence injustifiée du travailleur est de courte durée, soit quelques jours, l'employeur ne peut pas déduire des circonstances que le travailleur a abandonné son emploi; il peut seulement lui reprocher un manquement de nature à justifier une résiliation immédiate des rapports de travail, au besoin après avertissement, soit en le mettant en demeure de reprendre le travail ou, le cas échéant, de présenter un certificat médical (arrêt du Tribunal fédéral 4C_370/2001 précité consid. 2a). Ne constitue pas non plus un abandon d'emploi le fait pour le travailleur de partir sur un mouvement d'humeur (Gloor, op. cit., n° 10 ad art. 337d CO).

Il incombe à l'employeur de prouver les faits propres à dénoter un abandon de poste (arrêt du Tribunal fédéral 4A_91/2021 précité consid. 3.1).

A teneur de l'art. 337d al. 1 CO, lorsque le travailleur n'entre pas en service ou abandonne son emploi abruptement sans justes motifs, l'employeur a droit à une indemnité égale au quart du salaire mensuel; il a en outre droit à la réparation du dommage supplémentaire.

4.2.1 En l'espèce, l'appelante persiste à soutenir que la destitution de l'intimé lors de la session du conseil exécutif du 13 octobre 2020, en raison de sa prétendue mauvaise gestion du secrétariat permanent, ne constituait pas un licenciement immédiat. Celui-ci était intervenu, selon elle, le 19 octobre 2020, l'intimé ayant abandonné son poste dès sa destitution.

Cela étant, l'appelante ne remet pas en cause le constat des premiers juges, selon lequel il ressort expressément du courrier du 13 octobre 2020 des présidents du conseil exécutif et de l'assemblée générale, ainsi que de F______, destiné aux États membres de l'organisation, que l'intimé avait été licencié avec effet immédiat à cette date. En effet, ce courrier, intitulé "décision de renvoi", indique que l'intimé a été renvoyé avec effet immédiat et que toutes ses fonctions cessaient dès le 13 octobre 2020 à 11h00. Les premiers juges étaient ainsi fondés à retenir que la destitution de l'intimé à ladite date constituait un licenciement immédiat.

A cela s'ajoute que, dans la soirée du 13 octobre 2020 ou le lendemain, F______, en ses qualités de secrétaire général ad interim et de secrétaire général adjoint, a demandé à ce que le bureau de l'intimé soit scellé et tous ses accès professionnels bloqués, ce qui n'est pas contesté et ressort des témoignages de O______ et M______. A cet égard, l'appelante allègue - pour la première fois en appel et donc de manière irrecevable - qu'il s'agissait de mesures temporaires prises en raison du "saccage" du bureau de l'intimé, ainsi que du vol et la destruction de documents, et non en raison de la destitution de ce dernier. Cette thèse n'est toutefois pas convaincante. Ces mesures ont été définitives, l'intimé ayant été licencié avec effet immédiat. Par ailleurs, le suivi des badges produit par l'appelante n'est pas probant, contrairement à ce qu'elle soutient. En effet, le nom de l'intimé n'y figure pas. De plus, le témoin O______ a déclaré s'être rendu dans les locaux de l'appelante le 13 octobre 2020, avec F______ - dont la présence ressort également du témoignage de M______ -, alors que leurs noms ne sont pas mentionnés dans ce suivi. Il n'est donc pas établi que le prétendu "saccage" du bureau de l'intimé serait le fait de celui-ci. Le témoin M______ a également déclaré avoir été surprise de voir le bureau de l'intimé dans cet état, ce qui ne correspondait pas à son caractère calme et pondéré. Dans ces circonstances, interdire à l'intimé l'accès à son bureau et bloquer ses accès informatiques sont des mesures disproportionnées et elles accréditent la thèse selon laquelle ce dernier a été licencié de manière immédiate le 13 octobre 2020.

De plus, F______, entendu en qualité de partie, a admis qu'il avait été demandé à l'intimé de restituer ses clés, ainsi que son véhicule de fonction, sans se rappeler si cela avait eu lieu le 14 octobre 2020. L'appelante n'a toutefois pas allégué que cette requête en restitution serait intervenue après le 19 octobre 2020.

L'appelante n'a pas non plus allégué, ni a fortiori établi, avoir requis de l'intimé qu'il maintienne une activité après sa destitution ou lui avoir confié une quelconque tâche liée à la transition avec le nouveau secrétaire général, ce qui atteste encore du fait qu'il a été congédié avec effet immédiat le 13 octobre 2020. F______ a d'ailleurs déclaré qu'en date du 14 octobre 2020 l'intimé "ne l'intéressait pas".

Enfin, dans ses écritures d'appel, l'appelante a allégué, à plusieurs reprises, que l'intimé s'était rendu, après sa destitution, "sans droit" dans ses locaux. Or, si ce dernier n'avait pas été licencié le 13 octobre 2020 avec effet immédiat, il aurait été autorisé à se rendre dans ceux-ci après cette date.

L'ensemble des éléments qui précèdent confirment que l'appelante a choisi de se séparer de l'intimé dès le 13 octobre 2020 et que sa destitution constituait donc un licenciement immédiat, comme retenu par les premiers juges.

4.2.2 Ces derniers ont considéré que ce licenciement était tardif et injustifié.

Concernant le caractère tardif, l'appelante fait grief aux premier juges d'avoir retenu qu'elle était au courant des manquements reprochés à l'intimé depuis le 18 septembre 2020. Or, par courrier du 7 juillet 2020, F______ informait le président du conseil exécutif des irrégularités financières qu'il imputait à l'intimé. Par courrier du 18 septembre 2020, ledit président informait, à son tour, l'ensemble des États membres de l'organisation des sujets qui devaient être discutés lors de la prochaine session, à savoir l'échec de la réforme administrative, l'audit réalisé par G______ SA, les irrégularités persistantes en matière de personnel et de finances, ainsi que le non-respect, par l'intimé, de la constitution, du règlement intérieur et des décisions des organes constitutifs. L'appelante ne peut donc pas, de bonne foi, soutenir qu'elle n'était pas au courant des manquements reprochés à l'intimé, alors même que tous ses États membres en étaient informés le 18 septembre 2020.

De plus, comme relevé par les premiers juges, le témoin M______ a sous-entendu que le licenciement de l'intimé était prévu depuis un moment, en déclarant que F______ voulait écarter celui-ci et qu'il lui avait indiqué, les semaines précédant les sessions d'octobre 2020, que "les choses allaient changer".

Le fait qu'une session du conseil exécutif ou de l'assemblée générale soit complexe à organiser ne suffit pas à justifier une attente d'environ un mois avant de licencier l'intimé de manière immédiate, prétendument pour de justes motifs. Les sessions des 12, 13 et 14 octobre 2020 ont d'ailleurs été suivies, par certains membres, en visioconférence. Une session extraordinaire aurait donc pu être rapidement organisée par ce biais.

En tous les cas, même à admettre que le licenciement immédiat de l'intimé serait intervenu dans les délais, celui-ci n'est aucunement justifié. En effet, les prétendus manquements reprochés à l'intimé, qui sont contestés, à savoir la mauvaise gestion du secrétariat permanent et les faveurs accordées à deux collaborateurs, ne sont pas établis à satisfaction de droit. Comme relevé par les premiers juges, ceux-ci n'ont d'ailleurs pas été évoqués, ni discutés, lors de la session du conseil exécutif du 13 octobre 2020. Contrairement à ce que soutient l'appelante, la condamnation pénale de L______ ne permet pas d'établir la véracité de ces prétendus manquements reprochés à l'intimé, le jugement condamnant celle-ci ne mettant pas en cause le précité.

De plus, lesdits manquements ne suffisent pas à justifier un licenciement immédiat, sans avertissement préalable. A cet égard, l'appelante n'a pas établi qu'un tel avertissement avait eu lieu. Les courriers de F______, alors secrétaire général adjoint, adressés à l'intimé en juillet 2020 ne constituent pas de tels avertissements.

Il s'ensuit que le licenciement immédiat de l'intimé du 13 octobre 2020 n'est pas justifié.

4.2.3 Même à suivre la thèse de l'appelante, selon laquelle l'intimé aurait été licencié avec effet immédiat le 19 octobre 2020 - ce qui est contesté -, en raison de son abandon de poste, ce licenciement ne serait pas non plus justifié.

En effet, lors de la session du mardi 13 octobre 2020, l'intimé a été démis de ses fonctions et tous ses accès professionnels ont été bloqués par la suite. Il ne saurait donc lui être reproché de ne pas avoir repris son poste les jours suivants sa destitution et ce, jusqu'à son licenciement immédiat le lundi 19 octobre 2020. Un tel blocage n'est, en effet, pas compatible avec la thèse d'un abandon de poste.

De plus, compte tenu de la courte durée d'absence de l'intimé, soit seulement quelques jours ouvrables, l'appelante ne pouvait pas déduire des circonstances que celui-ci avait abandonné son emploi.

L'appelante n'a d'ailleurs pas démontré une intention ferme et définitive de l'intimé de ne plus continuer à fournir sa prestation de travail. En effet, il ressort du témoignage de I______ que l'intimé est retourné dans les locaux de l'appelante, après sa destitution, pour préparer la session de l'assemblée générale du lendemain. Contrairement à ce que soutient l'appelante, elle n'a pas établi que l'intimé aurait, à ce moment-là, établi de fausses conventions de départ en faveur de I______ et H______. En tous les cas, le fait que l'intimé ait quitté son poste lors de la session du 13 octobre 2020, sur un mouvement d'humeur, ne constitue pas un abandon de poste.

A cela s'ajoute que l'appelante n'a aucunement mis l'intimé en demeure de reprendre son activité, ni requis de celui-ci des explications concernant son absence, ce qui lui incombait si elle suspectait un abandon de poste. En effet, l'appelante n'a pas allégué, ni a fortiori établi, avoir tenté de joindre l'intimé le 14 octobre 2020, ni les jours suivants.

Compte tenu de ce qui précède, l'appelante ne pouvait pas, de bonne foi, comprendre le comportement de l'intimé comme un refus conscient, intentionnel et définitif de poursuivre l'exécution de son travail, étant rappelé qu'il avait été démis de ses fonctions. Elle n'a donc pas établi que l'intimé avait abandonné son poste au sens des principes rappelés supra.

Il s'ensuit que les conclusions de l'appelante en constatation d'un abandon de poste et en versement d'une indemnité fondée sur l'art. 337d CO (6'801 fr. 10) ne sont pas fondées et ont été, à juste titre, rejetées par les premiers juges.

Pour les mêmes motifs, l'absence de l'intimé depuis sa destitution ne justifierait pas non plus son licenciement immédiat du 19 octobre 2020, d'autant plus sans avertissement préalable. En effet, comme déjà relevé, l'appelante n'a pas mis l'intimé en demeure de reprendre son travail durant son absence, soit entre le 14 et le 19 octobre 2020 - correspondant à seulement quatre jours ouvrables -, ni averti celui-ci des éventuelles conséquences s'il ne reprenait pas son activité. Elle n'a pas non plus requis d'explications concernant son absence.

L'appelante soutient également que l'intimé aurait quitté la session du 13 octobre 2020 d'une "manière unilatérale, voire scandaleuse, en vociférant", ce qui était suffisant à rompre le lien de confiance entre les parties. Ce fait n'est toutefois pas établi. Le témoin N______ a seulement déclaré que l'intimé avait exprimé son indignation après sa destitution et qu'il lui avait été demandé de quitter le podium. En tous les cas, un mouvement d'humeur ne saurait à lui seul justifier un licenciement immédiat, d'autant plus sans avertissement préalable.

4.2.4 Le licenciement immédiat de l'intimé étant injustifié, ce dernier a droit à ce qu'il aurait gagné si les rapports de travail avaient pris fin à l'expiration de son contrat.

L'appelante reproche aux premiers juges d'avoir "arbitrairement" retenu qu'elle avait la charge de prouver que l'intimé avait pris ses jours de vacances en 2020. Or, à teneur des principes rappelés sous consid. 4.1.3 ci-dessus, l'employeur supporte le fardeau de la preuve des jours de vacances pris par son employé. A cet égard, l'appelante ne peut pas se prévaloir du fait que ce dernier n'aurait pas mis en place un registre des décomptes des vacances des collaborateurs du secrétariat permanent. En effet, aucun élément du dossier ne permet d'établir ce fait et aucun des témoins entendus n'a été interrogé sur cette problématique. De plus, l'appelante aurait pu établir par d'autres moyens de preuve que l'intimé avait pris des jours de congé en 2020, notamment par la production de courriels ou tous autres document attestant d'une absence, ainsi que par témoignages. Dans ces circonstances, les premiers juges étaient fondés à retenir que l'intimé disposait, lors de son licenciement immédiat, de son solde entier de vacances pour l'année 2020, comme allégué par lui.

L'intimé a également droit à l'indemnité de départ prévue dans son contrat de travail, les conditions d'exclusion prévues dans celui-ci ne trouvant pas application. En effet, il n'est pas établi qu'il aurait abandonné son poste, "saccagé" son bureau, volé et détruit des documents ou encore rédigé de fausses conventions de départ en faveur de I______ et H______.

Ainsi, l'intimé a droit aux sommes brutes de 81'613 fr. 05 dues à titre de salaire, 190'430 fr. 45 à titre d'indemnité de départ et 39'086 fr. 70 à titre de vacances non prises en nature, étant relevé que ces montants ne sont pas remis en cause en appel.

4.2.5 Enfin, les premiers juges ont, à bon droit, accordé à l'intimé une indemnité au sens de l'art. art. 337c al. 3 CO, son licenciement immédiat étant injustifié. L'appelante soutient toutefois que le montant de celle-ci, correspondant à six mois de salaire, serait disproportionné.

Or, il est suffisamment établi que le licenciement litigieux était, en réalité, motivé par le souhait de F______ de ne plus collaborer avec l'intimé. En effet, les témoins I______, H______ et M______ ont tous expliqué qu'il existait de fortes tensions entre l'intimé et F______. Le témoin M______ a précisé que les précités avaient des visions divergentes sur l'avenir de l'organisation, raison pour laquelle F______ souhaitait "écarter" l'intimé. Les premiers juges étaient ainsi fondés à retenir que l'appelante, sous l'impulsion de F______, avait licencié l'intimé avec effet immédiat par pure convenance personnelle et ce, en utilisant le motif prétexte d'un abandon de poste, alors même qu'elle l'a démis de ses fonctions et ne l'a aucunement enjoint à reprendre une activité ni à justifier son absence.

De plus, l'intimé a été démis de ses fonctions au milieu de la session du conseil exécutif du 13 octobre 2020, après avoir été interrompu alors qu'il présentait son rapport, ce qui ressort des témoignages concordant de H______ et I______. Le fait que ce dernier ait déclaré que, le 12 octobre 2020, il y avait un problème technique privant de parole les représentants en visioconférence, lorsqu'une personne présente dans la salle s'exprimait, n'est pas suffisant pour remettre en cause ce qui précède. Or, une telle interruption pour démettre immédiatement de ses fonctions l'intimé, qui occupait la plus haute fonction au sein du secrétariat permanent, n'est pas acceptable. Les témoins I______ et H______ ont d'ailleurs confirmé que cette destitution avait été faite de manière humiliante, respectivement perfide. Compte tenu des circonstances, il n'y pas lieu de remettre en cause la perception de ces témoins et ce, indépendamment de leur proximité avec l'intimé, contrairement à ce que soutient l'appelante.

A cela s'ajoute que, lors du licenciement litigieux, l'intimé était dans sa vingtième année de service et était âgé de soixante ans. Par ailleurs, à teneur de son contrat de travail, celui-ci aurait, en toute hypothèse, pris fin trois mois après la session de l'assemblée générale du 14 octobre 2020, ce qui justifiait d'autant moins de mettre fin immédiatement aux rapports de travail.

Contrairement à ce que soutient l'appelante, celle-ci n'a pas établi que l'intimé voulait lui nuire. A nouveau, les prétendus manquements reprochés à l'intimé, à savoir la mauvaise gestion du secrétariat permanent et les faveurs accordées à deux collaborateurs, ne sont pas établis. Il en va de même du fait qu'il aurait établi de fausses conventions de départ en faveur de I______ et H______, "saccagé" son bureau ou encore volé et détruit des documents. Le fait que l'appelante ait initié une procédure pénale à l'encontre de l'intimé - allégué pour la première fois en appel et donc de manière irrecevable - n'est pas déterminant et ne permet pas d'établir la véracité des reproches formulés à son encontre.

Dans ces circonstances, il n'est pas critiquable d'avoir alloué à l'intimé l'indemnité maximale pour un licenciement immédiat injustifié correspondant à six mois de salaire, soit le montant non contesté de 163'226 fr. 10 nets, la faute de l'appelante étant importante.

4.2.6 Par conséquent, le jugement entrepris sera entièrement confirmé.

5. 5.1 L'appel étant infondé, il n'y a pas lieu de revoir les frais de première instance (art. 318 al. 3 CPC a contrario). Les chiffres du dispositif du jugement attaqué y afférents seront donc également confirmés.

5.2 La valeur litigieuse étant supérieure à 50'000 fr., il y a lieu de percevoir des frais judiciaires pour la procédure d'appel (art. 114 let. c cum 116 al. 1 CPC; art. 19 al. 3 let. c LaCC; art. 71 RTFMC). Ceux-ci seront arrêtés à 4'000 fr., mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC), et entièrement compensés avec l'avance de même montant versée par celle-ci, qui reste acquise à l'État de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

La procédure d'appel ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 22 al. 2 LaCC).

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 23 février 2024 par A______ contre le jugement JTPH/7/2024 rendu le 18 janvier 2024 par le Tribunal des prud'hommes dans la cause C/3169/2021.

Au fond :

Confirme le jugement entrepris.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 4'000 fr., les met à la charge de A______ et les compense entièrement avec l'avance déjà versée par celle-ci, qui demeure acquise à l'État de Genève.

Dit qu'il n'est pas alloué de dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Monsieur Pierre-Alain L'HÔTE, Madame Filipa CHINARRO, juges assesseurs; Madame Fabia CURTI, greffière.

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.