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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1305/2023

ATAS/929/2023 du 28.11.2023 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

 rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1305/2023 ATAS/929/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 28 novembre 2023

Chambre 2

 

En la cause

A______

représenté par le CSP-Centre social protestant, soit pour lui
Mme Sandra LACHAL, mandataire

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l'intéressé ou le recourant), né le ______ 1971, de nationalité portugaise, marié et père de quatre enfants nés en 2009, 2011 (jumeaux) et 2017, a déposé une demande de prestations complémentaires familiales (ci-après : PCFam) le 19 octobre 2020 auprès du service des prestations complémentaires (ci-après : SPC).

b. Le droit de l'intéressé à des PCFam a été reconnu dès le 1er février 2021, après réception par le SPC de l'ensemble des pièces déterminantes pour examiner la demande. L'intéressé était alors au bénéfice d'indemnités de chômage, dont le délai-cadre avait été ouvert le 2 mars 2020 et a couru jusqu'au 30 novembre 2022. Selon la confirmation d'inscription de l'office cantonal de l'emploi, le taux d'activité recherché était de 100%.

c. Au cours des années 2021 et 2022, le SPC a rendu plusieurs décisions de PCFam, en fonction du montant du loyer, du nombre d'enfants composant le groupe familial et des allocations familiales en leur faveur, ainsi que des revenus de l'intéressé (indemnités journalières du chômage, gain intermédiaire et indemnités de l'assurance-accidents suite à une incapacité de travail).

B. a. Par décision du 5 janvier 2023 envoyée par courrier B, le SPC a fixé le montant des PCFam à CHF 2'228.- pour le mois de décembre 2022 et CHF 2'375.- mensuellement dès le mois de janvier 2023, en tenant compte d'un gain de l'activité lucrative de l'intéressé de CHF 816.- par an et d'indemnités de chômage de CHF 44'014.80 par an, sur la base de la fiche de salaire de l'intéressé du mois de novembre 2022 (gain intermédiaire) et du décompte d'indemnités de chômage de la caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : CCGC) du même mois.

b. Le 8 février 2023, après avoir reçu le décompte de la CCGC concernant le mois de janvier 2023, le SPC a rendu une nouvelle décision adaptant le montant des indemnités du chômage, supprimant le gain de l'activité lucrative de l'intéressé et fixant le montant des PCFam à CHF 2'281.- dès le 1er janvier 2023.

c. Le 9 février 2023, l'intéressé s'est opposé à la décision du 5 janvier 2023 par l'intermédiaire du Centre social protestant, relevant que le décompte de la CCGC du mois de décembre 2022 – qu'il joignait à son pli – tenait compte d'un délai d'attente général de cinq jours suite à l'ouverture d'un nouveau délai-cadre au 1er décembre 2022, qui n'avait pas été pris en considération dans le calcul des prestations. L'intéressé a également informé le SPC que son loyer avait baissé dès le 1er février 2023.

d. Par décision sur opposition du 6 mars 2023, le SPC a déclaré l'opposition recevable et l'a rejetée. Il a considéré que la prise en compte du décompte du 23 décembre 2022 de la CCGC – qu'il avait reçu pour la première fois avec l'opposition – péjorerait la situation de l'intéressé. En effet, un revenu hypothétique de CHF 10'824.85 correspondant aux cinq jours du délai d'attente avant l'obtention des indemnités de chômage (5 jours x CHF 195.70 [montant de l'indemnité journalière] – 7.810% [cotisations] = CHF 902.07 ; CHF 902.07 x 12 = 10'824.85) devait alors être intégré dans les revenus de l'intéressé, qui se portaient par conséquent à CHF 46'584.85 (CHF 10'824.85 + CHF 35'760.00 [indemnités de chômage de décembre 2022]), au lieu de CHF 44'830.80 (CHF 816.- + CHF 44'014.80) retenus dans la décision du 5 janvier 2023. Le SPC renonçait au surplus à réformer sa décision au détriment de l'intéressé.

e. Dans une décision sur opposition séparée du même jour concernant les prestations d'aide sociale, le SPC a indiqué que la prise en compte du décompte de la CCGC de décembre 2022 ne modifiait pas la situation de l'intéressé, les dépenses reconnues étant toujours inférieures au revenu déterminant de l'intéressé.

C. a. Le 18 avril 2023, sous la plume de son mandataire, l'intéressé a interjeté recours à l'encontre de la décision du 6 mars 2023 concernant les PCFam devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans), concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation, à ce qu'il soit constaté que ses indemnités de chômage pour le mois de décembre 2022 s'élevaient à CHF 2'980.- et à ce qu'il soit constaté qu'il ne doit pas être tenu compte d'un revenu hypothétique pour le mois de décembre 2022. Le recourant a contesté que les jours déduits du droit aux indemnités de chômage à titre de délai d'attente général prévu par l'art. 18 de la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0) devaient être comptabilisés comme un gain hypothétique dans le calcul du droit aux PCFam. Les efforts de recherches d'emploi exigés de la personne au chômage durant le premier mois étaient les mêmes que les mois suivants, de sorte qu'il n’y avait pas lieu de tenir compte d'un gain hypothétique durant ce premier mois, au motif que la LACI prévoyait un délai d'attente général. Ce délai d'attente n'était pas une sanction résultant d'un comportement fautif de la personne indemnisée, mais un effet direct de la LACI à chaque nouvelle période de chômage. Seul le montant effectivement versé par la CCGC en décembre 2022 devait ainsi être pris en considération.

b. Par mémoire de réponse du 8 mai 2023, l'intimé a conclu au rejet du recours. La législation en vigueur en matière de PCFam ne prévoyait pas de tenir compte d'une éventuelle incapacité de travail (même partielle) dans la détermination du revenu déterminant. Une telle prise en considération reviendrait, selon la jurisprudence, à intégrer un facteur étranger aux situations pour lesquelles le législateur cantonal avait entendu instaurer une aide financière aux familles. Dès lors, peu importait le motif pour lequel le recourant n'avait pas perçu d'indemnités journalières de l'assurance-chômage pour certains jours du mois de décembre 2022 (délai d'attente, suspension du droit, etc.) ; un revenu hypothétique devait dans tous les cas être pris en considération.

c. Par observations du 8 juin 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions, soulignant qu'il avait travaillé à 100% avant d'être au chômage, de sorte que ce taux était également valable durant sa période d'indemnisation par l'assurance-chômage. Il ne demandait pas à bénéficier d'une exception à la prise en compte d'un gain hypothétique en raison d'une incapacité de travail.

d. Le 12 juin 2023, la chambre de céans a transmis, pour information, les observations précitées à l'intimé.

 

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice statue sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Interjeté dans les formes et le délai légal de 30 jours (art. 43 al. 1 LPCC), compte tenu du fait que les délais en jours ou en mois fixés par la loi ne courent pas du septième jour avant Pâques au septième jour après Pâques inclusivement (art. 43B let. a LPCC), le présent recours est recevable.

2.             Aux termes de l'art. 1A al. 2 LPCC, les PCFam sont régies par les dispositions figurant aux titres IIA et III de la LPCC (let. a), par les dispositions de loi fédérale auxquelles la LPCC renvoie expressément, ainsi que les dispositions d'exécution de la loi fédérale désignées par règlement du Conseil d'État (let. b) et par la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) et ses dispositions d'exécution (let. c).

L'art. 2 al. 1 du règlement relatif aux prestations complémentaires familiales du 27 juin 2012 (RPCFam - J 4 25.04) énonce que, conformément à l'article 1A al. 2 let. b LPCC, sont applicables les dispositions d'exécution de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (loi sur les prestations complémentaires, LPC - RS 831.30) concernant l'évaluation du revenu en nature, le revenu provenant de l'exercice d'une activité lucrative, la valeur locative et le revenu provenant de la sous‑location, le revenu résultant d'un contrat d'entretien viager, la prise en compte des rentes viagères ou de la prévoyance professionnelle, des frais d'entretien des bâtiments et des frais accessoires et de chauffage, le partage obligatoire du loyer, l'évaluation de la fortune, le dessaisissement, l'exercice du droit, l'obligation de renseigner et la compensation des créances en restitution. Au surplus, selon l'art. 2 al. 3 RPCFam, dans les limites des renvois prévus par la loi, les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI de l'Office fédéral des assurances sociales sont applicables par analogie.

3.             Le litige porte sur le calcul des PCFam en faveur du recourant pour le mois de décembre 2022, singulièrement sur le fait de savoir si un gain hypothétique à charge du recourant doit être retenu le mois en question.

4.             Le canton de Genève prévoit deux types de prestations sociales, en complément ou en marge des prestations complémentaires prévues par la LPC, ciblant deux catégories distinctes de bénéficiaires, à savoir d'une part les personnes âgées, les conjoints ou partenaires enregistrés survivants, les orphelins et les invalides – bénéficiaires pouvant prétendre le cas échéant au versement de prestations complémentaires cantonales (art. 1 al. 1 et 2 à 36 LPCC) – et d'autre part, les familles avec enfant(s) – bénéficiaires pouvant le cas échéant prétendre au versement de prestations complémentaires familiales (PCFam) (art. 1 al. 2, 36A à 36I LPCC ; ATAS/1195/2020 du 3 décembre 2020 consid. 5b ; ATAS/802/2019 du 9 septembre 2019 consid. 5).

Les PCFam ont été introduites à Genève depuis le 1er novembre 2012 (PL 10600 modifiant la LPCC du 11 février 2011). Elles visent une catégorie de bénéficiaires qui ne sont pas des rentiers AVS/AI, mais des familles pauvres dont les parents travaillent (Mémorial du Grand Conseil du 17 décembre 2009 et rapport de commission du 15 novembre 2010).

5.              

5.1 Selon l'art. 36A al. 1 LPCC, ont droit aux PCFam les personnes qui, cumulativement : ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève depuis cinq ans au moins au moment du dépôt de la demande de prestations (let. a) ; vivent en ménage commun avec des enfants de moins de 18 ans, respectivement 25 ans si l'enfant poursuit une formation donnant droit à une allocation de formation professionnelle (let. b) ; exercent une activité lucrative salariée (let. c) ; ne font pas l'objet d'une taxation d'office par l'administration fiscale cantonale, avec des exceptions possibles (let. d) ; et répondent aux autres conditions prévues par la LPCC (let. e).

En vertu de l’art. 36A al. 5 LPCC, aux fins de la présente loi, les personnes qui touchent des indemnités en application de la LACI sont assimilées aux personnes exerçant une activité lucrative.

L'art. 36D LPCC définit les principes et le calcul de la prestation complémentaire annuelle. Selon l'al. 1 de cette disposition, le montant annuel des PCFam correspond à la part des dépenses reconnues au sens de l'art. 36F qui excède le revenu déterminant au sens de l'art. 36E, mais ne doit pas dépasser le montant prévu à l'art. 15 al. 2.

Le revenu déterminant au sens de l'art. 36E al. 1 LPCC est calculé conformément à l'art. 11 LPC, moyennant les adaptations suivantes : les ressources en espèces ou en nature provenant de l'exercice d'une activité lucrative sont intégralement prises en compte (let. a) ; le revenu déterminant est augmenté d'un cinquième de la fortune calculée en application de l'art. 7 LPCC (let. b) ; les bourses d'études et autres aides financières destinées à l'instruction sont prises en compte (let. c) ; les ressources de l'enfant ou de l'orphelin à charge provenant de l'exercice d'une activité lucrative régulière sont prises en compte à raison de 50% (let. d). En cas d'activité lucrative exercée à temps partiel, il est tenu compte, pour chacun des adultes composant le groupe familial, d'un revenu hypothétique qui correspond à la moitié de la différence entre le revenu effectif et le montant qui pourrait être réalisé par la même activité exercée à plein temps (art. 36E al. 2 LPCC). Lorsque l'un des adultes composant le groupe familial n'exerce pas d'activité lucrative, il est tenu compte d'un gain hypothétique qui correspond à la moitié du montant destiné à la couverture des besoins vitaux de deux personnes selon l'art. 36B al. 2 (art. 36E al. 3 LPCC). Il n'est pas tenu compte d'un gain hypothétique lorsque le groupe familial est constitué d'un seul adulte faisant ménage commun avec un enfant âgé de moins d'un an (art. 36E al. 5 LPCC).

5.2 Sous le chapitre III du RPCFam concernant les règles de calcul des prestations, l'art. 18 traite de la question du gain hypothétique des personnes considérées comme exerçant une activité lucrative salariée. Le gain hypothétique qui leur est imputé est déterminé selon le gain et le taux d'activité réalisés avant la perception des indemnités pour perte de gain définies à l'art. 36A al. 5 LPCC (al. 1). Le gain hypothétique correspond à la moitié de la différence entre le gain assuré et le montant qui pourrait être réalisé pour une activité à plein temps si la personne était en activité (al. 3).

Quant à l'art. 19 RPCFam portant sur les « revenus auxquels il est renoncé », il énonce que lorsqu'un ayant droit ou un membre du groupe familial renonce à des éléments de revenus ou renonce à faire valoir un droit à un revenu, il est tenu compte d'un revenu hypothétique, conformément à l'art. 11 al. 1 let. g LPC.

5.3 Le commentaire par article du projet de loi ayant modifié la LPCC et introduit des PCFam au niveau cantonal relève ce qui suit : « Il est important de prévoir dans le dispositif des incitations au maintien ou à la reprise d'une activité lucrative. À défaut, les prestations complémentaires familiales pourraient constituer une trappe de pauvreté, étant donné qu'elles ne peuvent pas être accordées pour une durée indéterminée, mais uniquement pour la période pendant laquelle les enfants n'ont pas encore atteint 18 ans, respectivement 20 ans si l'enfant poursuit sa formation. En cas d'activité lucrative à temps partiel, le gain hypothétique fixé à l'alinéa 2 crée une incitation pour les ménages à obtenir une rémunération de l'activité lucrative au moins égale au montant ainsi fixé, respectivement sanctionne les ménages dont l'effort de travail est inférieur à cette exigence. Le gain hypothétique dépend du taux d'activité et du salaire effectifs de la personne qui travaille et correspond à la moitié de la différence entre le revenu effectif et le montant qui pourrait être réalisé par la même activité exercée à plein temps. […] Le principe de la prise en compte d'un gain hypothétique est également retenu par la législation fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS/AI » (Mémorial du Grand Conseil du 17 décembre 2009, PL 10600, p. 34).

6.             La chambre de céans a déjà jugé à plusieurs reprises que le but de la LPCC n'est pas de pallier aux difficultés financières des familles résultant d'une incapacité de travail temporaire ou d'une invalidité. De telles éventualités sont assurées notamment par l'assurance-accidents, l'assurance-invalidité, y compris les prestations complémentaires fédérales et cantonales, ou encore par les indemnités de l'assurance-chômage en cas de maladie et les prestations cantonales en cas de maladie. Tenir compte, dans l'établissement du droit aux PCFam, d'une incapacité de travail (temporaire ou permanente) reviendrait à intégrer un facteur étranger aux situations pour lesquelles le législateur cantonal a entendu instaurer une aide financière aux familles. Le but du législateur en instaurant des PCFam était précisément de valoriser le travail, d'encourager le maintien ou la reprise d'un emploi, ou l'augmentation du taux d'activité, notamment par la prise en compte d'un revenu hypothétique dans le calcul des prestations complémentaires (ATAS/1255/2013 du 17 décembre 2013 consid. 8 ; ATAS/527/2013 du 27 mai 2013 consid. 3c ; ATAS/955/2014 du 25 août 2014 consid. 7 et 8 ; ATAS/1195/2020 du 3 décembre 2020 consid. 7).

Dans l'ATAS/1195/2020 du 3 décembre 2020, la chambre de céans a au surplus précisé, sur la base d'une interprétation systématique, téléologique et historique de la loi cantonale, que la jurisprudence relative à l'art. 11 al. 1 let. g LPC – selon laquelle il convient de tenir compte de toutes les circonstances objectives et subjectives qui entravent ou compliquent la réalisation d'un revenu, telles que la santé, l'âge, la formation, les connaissances linguistiques, l'activité antérieure, l'absence de la vie professionnelle, le caractère admissible d'une activité, les circonstances personnelles et le marché du travail – n'est pas applicable à la prise en considération d'un gain hypothétique dans le cadre du calcul du revenu déterminant pour l'octroi de PCFam, la seule exception à la prise en compte d'un tel gain hypothétique étant celle prévue à l'art. 36E al. 5 LPCC.

7.             Aux termes de l'art. 10 al. 1 LACI, est réputé sans emploi celui qui n’est pas partie à un rapport de travail et qui cherche à exercer une activité à plein temps. Celui qui cherche du travail n’est réputé sans emploi ou partiellement sans emploi que s’il s’est inscrit aux fins d’être placé (art. 10 al. 3 LACI).

Des délais-cadres de deux ans s’appliquent aux périodes d’indemnisation et de cotisation, sauf disposition contraire de la loi (art. 9 al. 1 LACI). Le délai-cadre applicable à la période de l’indemnisation commence à courir le premier jour où toutes les conditions dont dépend le droit à l’indemnité sont réunies (art. 9 al. 2 LACI). Lorsque le délai-cadre s’appliquant à la période d’indemnisation est écoulé et que l’assuré demande à nouveau l’indemnité de chômage, de nouveaux délais-cadres de deux ans sont ouverts pour les périodes d’indemnisation et de cotisation, sauf disposition contraire de la loi (art. 9 al. 4 LACI).

Les conditions du droit à l'indemnité de chômage sont réglées à l'art. 8 al. 1 LACI, lequel renvoie, à sa lettre g, à l'art. 17 LACI. Selon l'art. 17 al. 1 LACI, l’assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit, avec l’assistance de l’office du travail compétent, entreprendre tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l’abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu’il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu’il a fournis. En vue de son placement, l’assuré est tenu de s’inscrire personnellement aussitôt que possible, mais au plus tard le premier jour pour lequel il prétend à l’indemnité de chômage ; il doit ensuite se conformer aux prescriptions de contrôle édictées par le Conseil fédéral (art. 17 al. 2 LACI). L’assuré est tenu d’accepter tout travail convenable qui lui est proposé (art. 17 al. 3 1ère phrase LACI).

Selon l'art. 26 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02), l’assuré doit cibler ses recherches d’emploi, en règle générale selon les méthodes de postulation ordinaires (al. 1). Il doit remettre la preuve de ses recherches d’emploi pour chaque période de contrôle (al. 2).

Le droit à l’indemnité commence à courir après un délai d’attente de cinq jours de chômage contrôlé, pour les personnes qui ont une obligation d'entretien envers des enfants de moins de 25 ans (art. 18 al. 1 LACI). Le délai d’attente général ne doit être observé qu’une seule fois durant le délai-cadre d’indemnisation et ne peuvent compter comme délai d’attente que les jours pour lesquels l’assuré remplit les conditions donnant droit à l’indemnité selon l'art. 8 al. 1 LACI (art. 6a al. 1 OACI).

8.             La jurisprudence du Tribunal fédéral considère que durant la période d'octroi d'indemnités de chômage, le bénéficiaire de prestations complémentaires fait tout ce que l'on peut attendre de lui pour retrouver un emploi, faute de quoi les organes de l'assurance-chômage lui dénieraient tout droit à de telles prestations (arrêts du Tribunal fédéral P 88/01 du 8 octobre 2002 consid. 3 ; 9C_549/2016 du 13 juillet 2017 consid. 5.3 et les références).

Les directives de l'Office fédéral des assurances sociales concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (DPC) retiennent également qu'aucun revenu hypothétique n'est pris en compte chez le bénéficiaire de prestations complémentaires lorsqu'il touche des allocations de chômage (n° 3424.07, version en vigueur au 1er janvier 2023).

9.              

9.1 En l'espèce, après l'opposition du recourant à la décision du 5 janvier 2023 qui se basait sur ses revenus du mois de novembre 2022 (gain intermédiaire réalisé et indemnités de chômage perçues pour 21.3 jours, à savoir sans délai d'attente), l'intimé a considéré qu'un revenu hypothétique devait être pris en considération durant les cinq jours du nouveau délai d'attente appliqué par l'assurance-chômage en décembre 2022, ce qui aboutissait à un revenu déterminant plus élevé que dans la décision initiale. Il est précisé qu'un premier délai-cadre a couru du 2 mars 2020 au 30 novembre 2022, puis qu'un nouveau délai-cadre a été ouvert du 1er décembre 2022 au 30 novembre 2024.

Le recourant fait valoir que la prise en compte d'un tel gain hypothétique contrevient à la LPCC et au RPCFam, en ce sens que le délai d'attente prévu par la LACI ne constitue pas une sanction de l'assurance-chômage mais est applicable lors de l'ouverture de tout nouveau délai-cadre, et que les efforts de recherches de la personne au chômage sont les mêmes durant le premier mois d'indemnisation que durant les mois suivants. Il faudrait donc uniquement tenir compte du montant qui lui avait été versé effectivement par la CCGC durant le mois de décembre 2022, sachant qu'il était demandeur d'emploi à 100% et travaillait auparavant à 100%.

Quant à l'intimé, en référence à la jurisprudence de la chambre de céans, il souligne que le régime des PCFam ne tient pas compte d'une incapacité de travail de la personne bénéficiaire, quel qu'en soit le motif, car cela reviendrait à intégrer un facteur étranger aux situations pour lesquelles le législateur a instauré une aide financière aux familles.

9.2 L'argument de l'intimé ne peut être suivi. La jurisprudence de la chambre de céans à laquelle il se réfère concerne des cas dans lesquels la personne requérante de PCFam ou son conjoint se trouvait en incapacité de travail en raison d'atteintes à la santé (cf. assurée apte au placement à 50% de son taux d'inscription au chômage dans l'ATAS/527/2013 du 27 mai 2013 ; épouse de l'assuré en incapacité totale de travail pour des raisons psychiatriques dans l'ATAS/1255/2013 du 17 décembre 2013 ; assurée déclarée inapte au placement par le médecin-conseil de l'assurance-chômage dans l'ATAS/955/2016 du 25 août 2014 ; assurée en incapacité totale de travail en raison de douleurs dorsales et cervicales, de fibromyalgie et de dépression dans l'ATAS/13/2016 du 12 janvier 2016 ; assurée à l'assurance-chômage en incapacité de travail durant quatre mois dans l'ATAS/1195/2020 du 3 décembre 2020), étant rappelé qu'en matière d'assurances sociales l'incapacité de travail est la perte, totale ou partielle, de l'aptitude de l'assuré à accomplir son travail, si cette perte résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique (cf. art. 6 LPGA). La chambre de céans a ainsi relevé qu'il n'appartenait pas au régime des PCFam de palier à des difficultés financières induites par une invalidité ou une incapacité temporaire de travail, de telles éventualités étant assurées par d'autres assurances, notamment l'assurance-accidents, l'assurance-invalidité ou les indemnités de l'assurance-chômage en cas de maladie et les prestations cantonales en cas de maladie.

Le cas d'espèce ne correspond pas aux situations susvisées, le recourant ayant disposé d'une pleine capacité de travail en décembre 2022.

9.3 Par ailleurs, l'intimé perd de vue qu'un gain hypothétique ne peut être imputé à la personne concernée qu'en cas d'activité lucrative exercée à temps partiel (éventualité de l'art. 36E al. 2 LPCC) ou lorsque l'un des adultes composant le groupe familial n'exerce pas d'activité lucrative (éventualité de l'art. 36E al. 3 LPCC), étant précisé que les personnes touchant des indemnités de l'assurance-chômage sont pleinement assimilées aux personnes exerçant une activité lucrative selon l'art. 36A al. 5 LPCC. Pour cette catégorie de personnes, l'art. 18 al. 1 RPCFam énonce que le gain hypothétique est déterminé selon le gain et le taux d'activité réalisés avant la perception des indemnités pour perte de gain définies à l'art. 36A al. 5 LPCC.

9.4 Au regard des circonstances particulières et dans la mesure où une personne au chômage est assimilée, sous l'angle des PCFam, à une personne exerçant une activité lucrative, le postulat – implicite – de l'intimé selon lequel le recourant n'a pas exercé une activité lucrative à temps complet en décembre 2022 à cause des cinq jours résultant du délai d'attente de l'assurance-chômage apparaît erroné. Il ne ressort en effet pas du dossier, ni même cela est allégué, que le taux d'activité du recourant avant la perception des indemnités de chômage ait été inférieur à 100%, le recourant ayant par ailleurs toujours cherché un emploi à 100% et été indemnisé selon cette disponibilité par l'assurance-chômage. Sous l'angle des prestations complémentaires fédérales, le Tribunal fédéral a par ailleurs estimé que l'intéressé qui bénéficie d'indemnités de chômage fait en principe tout ce que l'on peut attendre de lui pour retrouver une emploi, faute de quoi les organes de l'assurance-chômage lui auraient dénié le droit à de telles prestations. Ce qui précède est en outre rappelé par les DPC, auxquelles le régime des PCFam renvoie par analogie (art. 2 al. 3 RPCFam), et l'on constate en effet que les dispositions de la LACI subordonnent le versement des indemnités de chômage à la recherche effective de postes de travail par la personne assurée, dès le premier jour de contrôle, soit également durant le délai d'attente (cf. art. 6a al. 1 OACI, 8 al. 1 let. g, 17 et 18 al. 1 LACI).

9.5 Enfin, sous l'angle du but poursuivi par la loi, il sied de rappeler que la prise en compte d'un gain hypothétique répondait au souci du législateur d'inciter les personnes ne travaillant pas ou travaillant à temps partiel à reprendre une activité professionnelle, respectivement à augmenter leur taux d'activité, en sanctionnant les ménages dont le taux d'effort de travail n'est pas suffisant, afin d'éviter que les PCFam deviennent une « trappe de pauvreté ». On ne discerne pas en quoi un tel effet incitatif atteindrait son but dans le cas du recourant, au chômage, qui travaillait à 100% avant la perte de son emploi et qui n'a simplement pas reçu d'indemnités durant les cinq jours du délai d'attente au début du nouveau délai-cadre ouvert en sa faveur, en application de l'art. 18 al. 1 LACI.

9.6 Par conséquent, le fait que le recourant n'a pas été indemnisé par les organes de l'assurance-chômage durant les cinq jours du délai d'attente prévus par l'art. 18 al. 1 LACI ne signifie pas qu'il exerçait une activité lucrative seulement à temps partiel et qu'un gain hypothétique peut pour ce motif lui être imputé.

10.         Il sied de ce qui précède que la décision sur opposition du 6 mars 2023, qui retient, par substitution de motifs à la décision initiale du 5 janvier 2023, un gain hypothétique du recourant durant les cinq jours du délai d'attente pour le mois de décembre 2022, est contraire au droit.

La cause sera ainsi renvoyée à l'intimé afin qu'il calcule le montant des PCFam en faveur du recourant pour le mois de décembre 2022, en faisant abstraction de tout gain hypothétique le concernant, et en se basant sur les revenus qu'il a perçu de l'assurance-chômage le mois en question, étant rappelé que le décompte de la CCGC de décembre 2022 a été transmis ultérieurement à la décision du 5 janvier 2023 et n'a donc alors pas été pris en compte.

11.         Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la décision sur opposition du 6 mars 2023 sera annulée et la cause sera renvoyée à l'intimé pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Le recourant obtenant gain de cause sur le principe, une indemnité de CHF 2'500.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA cum art. 1A al. 2 let. c LPCC ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).

 

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition rendue le 6 mars 2023 par l'intimé.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

5.        Condamne l'intimé à verser au recourant une indemnité de CHF 2'500.- à titre de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF-RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le