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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4108/2022

ATAS/514/2023 du 27.06.2023 ( LPP ) , 79LP

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4108/2022 ATAS/514/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 27 juin 2023

Chambre 2

 

En la cause

TELLCO PK

représentée par Me Thomas KÄSLIN, avocat

 

demanderesse

 

contre

A______ SÀRL

 

défenderesse

 


 

EN FAIT

 

A. a. Le 4 mai 2020, A______ SÀRL (ci-après : la société ou la défenderesse), sise à Onex (GE) et, à teneur du registre du commerce (RC), active dans le domaine de l'automobile et représentée par son associé gérant (avec signature individuelle) Monsieur B______, a signé un contrat n° 2______ d'affiliation (ci-après : le contrat d'affiliation) à la TELLCO PK (ci-après : la caisse de pensions, la fondation ou la demanderesse), institution de prévoyance professionnelle sise à Schwyz, à la suite d'une offre de cette dernière, en vue de réaliser la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité pour son seul employé et donc le seul assuré, Monsieur C______ (ci-après: l'assuré), sur la base du salaire AVS de CHF 72'000.- et du salaire assuré de CHF 47'115.- par an et pour une prime annuelle prévue à CHF 7'998.15 au total (cf. document "Résumé des prestations et coûts" au 1er avril 2020), ce avec effet dès le 1er avril 2020.

b. Un décompte de primes a, le 7 mai 2020, été établi par la caisse de pensions pour la période du 1er avril au 31 décembre 2020, montrant un "1er décompte de prime" de CHF 5'998.65 au total, résultant de l'addition des postes "épargne" par CHF 5'300.45, "risque" par CHF 525.70 et "frais d'administration" par CHF 172.50.

c. Par "rappel" du 5 novembre 2020, la caisse de pensions a constaté l'échéance de la prime – non encore versée – de CHF 698.20, valeur au 30 septembre 2020, plus frais de rappel de CHF 50.-, à payer d'ici au 23 novembre 2020.

Ces montants n'ayant pas été acquittés, elle a, le 4 décembre 2020 et sur la base de la situation des paiements au 2 décembre précédent, réitéré sa prétention en paiement de cette prime échue de CHF 698.20, plus frais de "1er rappel" de CHF 50.- et de "2ème rappel" de CHF 100.-, à régler jusqu'au 19 décembre 2020, à défaut de quoi elle se verrait contrainte de résilier le contrat avec effet au 31 décembre 2020.

Par lettre (recommandée) du 24 décembre 2020, constatant "le non-paiement de la prime", la fondation a résilié le contrat d'affiliation pour le 31 décembre 2020.

d. Le 8 septembre 2021, la caisse de pensions a établi un décompte final, montrant un solde en sa faveur de CHF 5'494.70, avec délai de paiement au 1er octobre 2021.

e. Le même jour, elle a informé la société que la prestation de libre passage au 31 décembre 2020 se montait à CHF 5'300.45.

f. Par "rappel – décompte final au 31.12.2020" du 18 novembre 2021, constatant l'absence de réception du solde de CHF 5'494.70 précité au 31 décembre 2020, la caisse de pensions a réclamé à la société ce montant, plus un "émolument de sommation selon règlement concernant les frais" de CHF 50.-, soit au total CHF 5'544.70.-, à régler dans les dix jours, à défaut de quoi des mesures de recouvrement par voie légale seraient prises.

g. Le 13 décembre 2021, la caisse de pensions a fait notifier à la société, par l'office cantonal des poursuites de Genève, un commandement de payer la somme de CHF 5'844.70 au titre de « non-paiement des primes Contrat LPP n° 2______. Créance 1ère classe », avec intérêts à 6% dès le 1er octobre 2021, plus des frais de poursuite de CHF 60.-, poursuite n° 1______, commandement de payer qui a été notifié le 12 janvier 2022 et auquel la société a fait opposition le même jour.

h. Par pli du 28 janvier 2022, la fondation, avant de requérir devant les tribunaux la mainlevée de cette opposition, a donné à la société la possibilité de retirer son opposition d'ici au 4 février 2022 et de lui faire parvenir la somme due de CHF 5'844.70 (plus l'intérêts) d'ici la même date.

i. Un plan de prévoyance "à compter du 8 février 2022" a été établi.

j. Un extrait de compte de la caisse de pensions à cette même date a fait état, pour la période du 1er avril 2020 au 31 décembre 2022, des sommes dues à celle-ci, au total à hauteur de CHF 7'202.25 (sous "débit") et de montants versés par la société à concurrence d'au total CHF 1'201.55 (sous "crédit"), d'où un solde en faveur de ladite caisse de CHF 6'000.70 au 21 janvier 2022.

B. a. Le 1er décembre 2022, la caisse de pensions a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans) d'une demande en paiement ("action de droit administratif"), concluant, avec suite de frais et dépens, à la condamnation de la société à lui payer CHF 5'844.70 avec intérêts à 6% dès le 1er octobre 2021 ainsi que CHF 1'250.- avec intérêts à 6% "dès le jour de la présente action" et les frais de poursuite de CHF 73.30, et, par conséquent, à la mainlevée de l'opposition pour le montant de CHF 5'844.70 avec intérêts à 6% dès le 1er octobre 2021 dans la poursuite n° 1______.

b. La défenderesse n'a pas réagi au courrier par pli simple de la chambre des assurances sociales du 2 décembre 2022 lui accordant un délai au 3 janvier 2023 pour faire parvenir sa réponse et son dossier, ni à la lettre de ladite chambre du 9 janvier 2023 en recommandé, distribuée au guichet postal le 11 janvier 2023, prolongeant ce délai au 24 janvier 2023, pas plus qu'elle ne s'est manifestée à la suite du courrier recommandé de la chambre de céans du 30 janvier 2023, distribué au guichet postal le 3 février 2023, la priant de donner suite à ses précédents plis des 2 décembre 2022 et 9 janvier 2023 d'ici au 17 février 2023 avec la précision qu'à défaut la cause serait jugée en l'état.

 

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce ou de dissolution du partenariat enregistré, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO - RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40] ; ancien art. 142 du Code civil [CC - RS 210]).

Aux termes de l’art. 73 al. 3 LPP, le for est au siège ou domicile suisse du défendeur ou au lieu de l’exploitation dans laquelle l’assuré a été engagé.

La défenderesse ayant son siège dans le canton de Genève, la compétence de la chambre de céans pour juger du cas d’espèce est établie.

2.             La demande respecte en l'occurrence la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), de sorte qu'elle est recevable.

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la demande en paiement des cotisations ("primes") échues, des intérêts et des frais, déposée par la caisse de pensions auprès de la chambre de céans.

4.              

4.1 Conformément à l’art. 10 LPP, l’assurance obligatoire – au sens de l’art. 2 LPP – commence en même temps que les rapports de travail (al. 1 1ère phr.). Durant un mois après la fin des rapports avec l’institution de prévoyance, le salarié demeure assuré auprès de l’ancienne institution de prévoyance pour les risques de décès et d’invalidité. Si un rapport de prévoyance existait auparavant, c’est la nouvelle institution de prévoyance qui est compétente (al. 3).

Aux termes de l'art. 11 al. 1 LPP, tout employeur occupant des salariés soumis à l’assurance obligatoire doit être affilié à une institution de prévoyance inscrite dans le registre de la prévoyance professionnelle.

4.2 En vertu de l’art. 66 al. 1 LPP, l’institution de prévoyance fixe dans ses dispositions réglementaires le montant des cotisations de l’employeur et de celles des salariés. La somme des cotisations (contribution) de l’employeur doit être au moins égale à la somme des cotisations de tous les salariés. La contribution de l’employeur ne peut être fixée plus haut qu’avec son assentiment.

La convention dite d’affiliation d’un employeur à une fondation collective ou à une fondation commune est un contrat sui generis fondé sur l’art. 11 LPP (ATF 120 V 299 consid. 4a et les références citées).

4.3 À teneur de l’art. 66 al. 2 LPP, l’employeur est débiteur de la totalité des cotisations – fixées dans les dispositions réglementaires – envers l’institution de prévoyance. Celle-ci peut majorer d’un intérêt moratoire les cotisations payées tardivement.

4.3.1 Le taux d'intérêts se détermine en premier lieu selon la convention conclue par les parties dans le contrat de prévoyance et, à défaut, selon les dispositions légales sur les intérêts moratoires des art. 102 ss CO (SVR 1994 BVG n° 2 p. 5 consid. 3b/aa ; RSAS 1990 p. 161 consid. 4b).

Aux termes de l'art. 102 CO, le débiteur d'une obligation exigible est mis en demeure par l'interpellation du créancier (al. 1). Lorsque le jour de l'exécution a été déterminé d'un commun accord, ou fixé par l'une des parties en vertu d'un droit à elle réservé et au moyen d'un avertissement régulier, le débiteur est mis en demeure par la seule expiration de ce jour (al. 2). Le débiteur qui est en demeure pour le paiement d'une somme d'argent doit l'intérêt moratoire à 5% l'an, dans la mesure où un taux d'intérêts plus élevé n'a pas été convenu par contrat (art. 104 al. 1 et 2 CO; ATF 130 V 414 consid. 5.1 ; ATF 127 V 377 consid. 5e/bb et les références). Des intérêts ne peuvent être portés en compte pour cause de retard dans le paiement des intérêts moratoires (art. 105 al. 3 CO ; RSAS 2003 p. 500 consid. 6.1).

4.3.2 Selon la doctrine, le solde reconnu du compte courant étant une créance nouvelle issue de la novation, convenue par avance, il est le fruit d’une convention qui ne peut être anéantie ou modifiée qu’aux conditions des art. 21 (lésion) et 23 ss CO (vices du consentement), la novation étant elle-même réputée être causale, sauf disposition contraire voulue par les parties (Denis PIOTET, Commentaire romand Code des obligations I, 2021, n. 18 ad art. 117 CO). À teneur de la jurisprudence fédérale, dans des relations contractuelles complexes, il est possible de revenir sur un article comptabilisé à tort lors du bouclement du compte, en cas de vice du consentement (ATF 127 III 147 consid. 2d et e; ATF 135 V 113 consid. 3.6 ; ATAS/1187/2021 du 23 novembre 2021 consid. 4d; ATAS/721/2018 du 22 août 2018 consid. 7c/cc ; ATAS/292/2014 du 12 mars 2014 consid. 6).

4.3.3 Les institutions de prévoyance ont des frais administratifs, pour le financement desquels elles peuvent prévoir des cotisations et adopter des dispositions dans leurs règlements (cf. art. 65 al. 3 LPP et 48a de l’ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité, du 18 avril 1984 [OPP 2 – RS 831.441.1] ; Jürg BRECHBÜHL/Lara FRETZ respectivement Maya GECKELER HUNZIKER [traduction], in Jacques-André SCHNEIDER/Thomas GEISER/Thomas GÄCHTER, Commentaire LPP et LFLP, 2020, n. 35ss. ad art. 65 LPP et n. 5ss. ad art. 66 LPP ; aussi ATAS/1055/2021 du 13 octobre 2021 consid. 5d).

4.3.4 Des intérêts ne peuvent être portés en compte pour cause de retard dans le paiement des intérêts moratoires (art. 105 al. 3 CO). Cette disposition interdit la composition (anatocisme) de l'intérêt moratoire : le créancier ne peut pas faire courir un (nouvel) intérêt moratoire sur une dette d'intérêt moratoire déjà échue par une (nouvelle) interpellation, ni même une poursuite ou une demande en justice, le but étant de protéger le débiteur contre une augmentation exponentielle imprévue de sa dette qui résulterait de la composition des intérêts. Les parties peuvent cependant convenir d'ajouter un intérêt moratoire échu au capital et faire courir un intérêt sur le tout : il s'agit en principe d'une novation. Celle-ci peut être convenue d'avance, notamment par une convention de compte courant (art. 117 CO). C'est pourquoi le Tribunal fédéral considère que l'art. 105 al. 3 CO est une règle de droit dispositif qui interdit au créancier de provoquer unilatéralement une capitalisation des intérêts, mais pas aux parties de la stipuler (Luc THÉVENOZ, in Commentaire romand, Code des obligations I, 2021, n. 6 et 7 ad art. 105 CO, et les références ; aussi ATAS/1055/2021 précité consid. 5c). Cela étant, l'interdiction de l'anatocisme n'est pas applicable aux contrats de compte courant (art. 314 al. 3 CO). Le Tribunal fédéral a toutefois précisé que les intérêts ne sont susceptibles de rapporter eux-mêmes des intérêts que si, par novation, ils sont devenus des éléments du capital. À défaut de reconnaissance du solde, les intérêts ne peuvent donc pas porter intérêts. La fin du contrat de compte courant transforme en solde la position du compte existant à ce moment-là. La doctrine considère, au sujet de l'art. 105 al. 3 CO (interdiction de l'anatocisme en matière d'intérêts moratoires), que les parties peuvent convenir que les paiements partiels effectués par le débiteur éteignent tout d'abord la créance principale avant d'éteindre la dette en intérêts moratoires; dans ce cas, une fois la dette principale éteinte, l'intérêt moratoire échu se transforme par novation en un montant en capital, sur lequel l'intérêt moratoire convenu est dû. Il doit toutefois y avoir entente des parties à cet égard; une simple comptabilisation en compte courant n'est pas suffisante (ATF 130 III 694 consid. 2.2.3 et les références citées ; ATAS/721/2018 précité consid. 7c/aa).

4.4  

4.4.1 Aux termes de l'art. 41 al. 2 LPP, les actions en recouvrement de créances se prescrivent par cinq ans quand elles portent sur des cotisations ou des prestations périodiques, par dix ans dans les autres cas. Les art. 129 à 142 CO sont applicables.

Le versement des cotisations à l'institution de prévoyance tombe sous le délai de prescription de cinq ans. Le délai de prescription commence à courir uniquement à partir du moment où la prestation est devenue exigible. En effet, l'art. 41 al. 2 LPP renvoie notamment à l'art. 130 al. 1 CO, qui associe le début du délai de prescription à l'exigibilité de la créance (Sylvie PÉTREMAND in Commentaire LPP et LFLP, 2ème éd., 2020, n. 23 et 26 ad art. 41 LPP). Il faut, par exemple, partir de l'exigibilité des cotisations définie dans le règlement ou le contrat d'affiliation (ATAS/474/2019 du 29 mai 2019 consid. 6a).

4.4.2 En matière de prévoyance professionnelle, le juge saisi d'une action doit se prononcer sur l'existence ou l'étendue d'un droit ou d'une obligation dont une partie prétend être titulaire contre l'autre partie (arrêt du Tribunal fédéral B 91/05 du 17 janvier 2007 consid. 2.1). L'objet du litige devant la juridiction cantonale est déterminé par les conclusions de la demande introduite (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 72/04 du 31 janvier 2006 consid. 1.1). C'est ainsi la partie qui déclenche l'ouverture de la procédure et détermine l'objet du litige (maxime de disposition). L'état de fait doit être établi d'office selon l'art. 73 al. 2 LPP - qui prévoit aussi que les cantons doivent prévoir une procédure simple, rapide et, en principe, gratuite -, seulement dans le cadre de l'objet du litige déterminé par la partie demanderesse. La maxime inquisitoire ne permet pas d'étendre l'objet du litige à des questions qui ne sont pas invoquées (ATF 129 V 450 consid. 3.2). Le juge n'est toutefois pas lié par les conclusions des parties ; il peut ainsi adjuger plus ou moins que demandé à condition de respecter leur droit d'être entendu (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 59/03 du 30 décembre 2003 consid. 4.1).

Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré et le défaut de preuve au détriment de la partie qui entendait tirer un droit du fait non prouvé (ATF 126 V 319 consid. 5a ; arrêt du Tribunal fédéral I 339/03 du 19 novembre 2003 consid. 2).

4.4.3 La chambre des assurances sociales, statuant en dernière instance cantonale et dans l'accomplissement de tâches de droit public, peut prononcer la mainlevée définitive d'une opposition à un commandement de payer puisque, statuant au fond, la condamnation au paiement est assimilée à un jugement exécutoire. Cette solution est d'ailleurs la conséquence du fait que, dans les matières qui sont de son ressort, le juge des assurances est effectivement le juge ordinaire selon l'art. 79 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP – RS 281.1) et qu'il a qualité pour lever une opposition à la poursuite en statuant sur le fond (ATF 109 V 46).

Il est précisé que les frais de poursuite sont d'office supportés par le débiteur lorsque la poursuite aboutit (ATAS/1055/2021 précisé consid. 16c ; JdT 1974 III 32). Il n'y a donc effectivement pas lieu de prononcer la mainlevée définitive pour les frais du commandement de payer, dont le sort suit celui de la poursuite (art. 68 LP ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_8/2008 du 11 avril 2008 consid. 4 ; ATAS/1055/2021 précisé consid. 16c).

4.4.4 À teneur de l'art. 88 al. 2 LP, le droit du créancier de requérir la continuation de la poursuite se périme par un an à compter de la notification du commandement de payer. Si opposition a été formée, ce délai ne court pas entre l'introduction de la procédure judiciaire ou administrative et le jugement définitif.

5.              

5.1 En l'espèce, la demande du 1er décembre 2022 a été formée dans le délai de prescription de cinq ans. Le commandement de payer, poursuite n° 1______, a été notifié à la défenderesse le 12 janvier 2022, date dès laquelle le délai de péremption d’un an de l’art. 88 al. 2 LPP a commencé à courir. Par conséquent, celui-ci n’était pas atteint lorsque la demanderesse a saisi la chambre de céans, le 1er décembre 2022, ce délai ne courant par ailleurs pas durant la présente procédure judiciaire vu l'opposition de la société.

5.2 En sa qualité d'employeuse occupant des salariés, la défenderesse devait être affiliée à une caisse de prévoyance professionnelle et verser les primes convenues avec la demanderesse.

5.3 Aux termes du contrat d'affiliation, sous "attestation de l'employeur", il est notamment écrit que celui-ci certifie avoir pris connaissance, entre autres, des "conditions générales de la fondation", valables au 15 novembre 2018, du "règlement des coûts" – règlement concernant les frais –, valable au 3 juillet 2019, et du "règlement de prévoyance", valable au 18 octobre 2018, "qui font partie intégrante, dans leur version actuelle, du contrat d'affiliation", et en approuver l'intégralité de la teneur.

5.3.1 Selon le ch. 2.3 des conditions générales de la fondation, l’employeur est débiteur envers la fondation de toutes les cotisations facturées par la fondation, notamment les cotisations pour les bonifications de vieillesse, les contributions aux coûts liés au risque et aux frais d’administration, les indemnités de conseil et de suivi, les intérêts débiteurs ainsi que, le cas échéant, les coûts supplémentaires générés par une liquidation partielle ou totale de l’œuvre de prévoyance ou de la fondation (let. a). La fondation facture à l’employeur les cotisations réglementaires ainsi que les frais supplémentaires. Les primes de risque et pour frais supplémentaires sont en principe échues dans les 30 jours à partir de la date de mutation, les bonifications d’épargne au 31 décembre de chaque année. La fondation peut prévoir d’autres échéances pour certains employeurs et certaines associations sectorielles (let. b). L’employeur s’engage à verser les cotisations – en particulier les cotisations retenues sur le salaire des employés – dans les délais prescrits sur le compte de cotisation et à régulariser ce compte avant le 31 décembre de chaque année, s’il présente un solde en faveur de la fondation (let. d). Indépendamment du moment de la facturation et sans rappel, un intérêt moratoire de 6% par an est prélevé à partir de la date d’échéance sur les créances (primes, frais d’administration etc.) qui n’ont pas été payées à échéance. Les paiements effectués avant échéance bénéficient d’une bonification d’intérêts jusqu’à la date d’échéance (let. f). Tout solde en faveur de la fondation en fin d’année civile, y compris d’éventuels intérêts débiteurs accumulés, est reporté sur l’année civile suivante comme créance en capital. Tout solde en faveur de l’employeur, y compris d’éventuels intérêts débiteurs accumulés, est déduit comme acompte avec les cotisations de l’année suivante (let. h). La fondation établit un extrait du compte de cotisation à la fin de chaque trimestre et facture à l’employeur le solde dû à la fondation. Si ce solde n’est pas réglé dans les 30 jours, la fondation somme l’employeur de le payer dans les 14 jours à compter de l’envoi du rappel. Si la sommation reste sans effet, la fondation se réserve le droit de prélever le montant des cotisations dues sur les éventuelles réserves pour cotisation, d’exiger le paiement des cotisations dues, des intérêts et des frais par la voie légale et de résilier le contrat d’affiliation avec effet immédiat (let. i). Le solde de l’extrait de compte établi pour la fin de l’année civile est considéré comme accepté pour autant que l’employeur n’y fasse pas opposition par écrit dans les quatre semaines après réception de l’extrait (let. k).

Toujours à teneur des conditions générales, ch. 4.1 let. c, la fondation a le droit de résilier le contrat sans respecter le délai de résiliation si, notamment, l’employeur ne donne pas suite au rappel selon le ch. 2.3 let. i.

5.3.2 S'agissant des différents frais, le règlement concernant les frais prévoit, en son ch. 2.1, que la fondation prélève les cotisations pour frais d'administration, afin de financer ses frais administratifs, avec des coûts fixes par assuré de CHF 0.- à CHF 250.- et des coûts variables en 0 à 0,25% de l'avoir de vieillesse accumulé (pro rata temporis), au maximum CHF 600.- par an. Au ch. 2.3 (titre "autres frais d'administrations"), concernant la "procédure d'encaissement", le "1er rappel" se monte à CHF 50.-, le "2ème rappel" à CHF 100.-, la réquisition de poursuite à CHF 300.-, "la mainlevée d'opposition, demande incl." à CHF 1'250.-; en cas d'"annulation du contrat", les frais s'élèvent à CHF 50.- par personne assurée, mais au minimum CHF 300.- et au maximum CHF 20'000.-.

5.4 Dans le cas présent, le montant principal de CHF 5'844.70 réclamé dans la demande du 1er décembre 2022 est celui qui figure, à la date du 13 décembre 2021 ("date" et "valeur"), dans l'extrait de compte du 1er avril 2020 au 31 décembre 2022 établi le 8 février 2022 par la demanderesse.

Ce montant est constitué tout d'abord du "1er décompte de prime" pour la période du 1er avril au 31 décembre 2020 de CHF 5'998.65 au total résultant de l'addition des postes "épargne" par CHF 5'300.45, "risque" par CHF 525.70 et "frais d'administration" par CHF 172.50; s'y ajoutent ensuite les frais de sommation de CHF 50.- ("1er rappel") au 5 novembre 2020 et de CHF 100.- ("2ème rappel") à la valeur au 4 décembre 2020, les "frais de résiliation" – ou d'"annulation du contrat" – de CHF 300.- (le minimum) à la valeur au 31 décembre 2020, l'"intérêt débiteur de CHF 247.60 à la valeur au 1er octobre 2021, les "frais de sommation / 1er rappel facture finale" de CHF 50.- à la valeur au 18 novembre 2021 et afférents au "rappel – décompte final au 31.12.2020" du même jour et, enfin, les "frais de sommation / poursuite" de CHF 300.- au 13 décembre 2021, date de la réquisition de poursuite; sont en outre déduits les réceptions des paiements par bulletin de versement de CHF 748.20 à la valeur au 24 décembre 2020 et de CHF 100.- au 31 décembre 2020 ainsi que le subside du Fonds de garantie de CHF 353.35 à la valeur au 30 juin 2021.

Ces montants constituant celui – total – de CHF 5'844.70 apparaissent conformes à ce qui est dû selon la loi ainsi que le contrat d'affiliation et les conditions générales et règlements qui en font partie intégrante.

Il sied de préciser que la prise en compte, y compris pour le calcul de l'intérêt moratoire, de l'intérêt débiteur de CHF 247.60 (à la valeur du 1er octobre 2021) est conforme au droit, mais seulement à partir du 1er janvier 2022, vu la novation acceptée par la société dans le cadre du contrat d'affiliation, puisqu'à teneur du ch. 2.3 let. h (in initio) des conditions générales, tout solde en faveur de la fondation en fin d’année civile, y compris d’éventuels intérêts débiteurs accumulés, est reporté sur l’année civile suivante comme créance en capital.

De surcroît, la défenderesse n'a pas contesté ces montants, alors qu'il est précisé à la fin de cet extrait de compte que "sans opposition de [sa] part dans les 14 jours, ce décompte est considéré comme accepté" (cf. aussi le ch. 2.3 let. k des conditions générales de la fondation).

Au demeurant, les uniques montants de cotisations – ou primes – réclamés pour la somme totale de CHF 5'998.65, à savoir "épargne" par CHF 5'300.45, "risque" par CHF 525.70 et "frais d'administration" par CHF 172.50, correspondent, ratione temporis pour la période du 1er avril au 31 décembre 2020, à la prime annuelle initialement prévue à CHF 7'998.15 au total ([CHF 7'998.15 / 4] x 3 = CHF 5'998.61).

5.5 L'intérêt moratoire de 6% convenu (ch. 2.3 let. f des conditions générales de la fondation) est dû.

Selon le ch. 2.3 let. f des conditions générales, indépendamment du moment de la facturation et sans rappel, un intérêt moratoire de 6% par an est prélevé à partir de la date d’échéance sur les créances (primes, frais d’administration etc.) qui n’ont pas été payées à échéance. Les paiements effectués avant échéance bénéficient d’une bonification d’intérêts jusqu’à la date d’échéance.

Comme cela ressort du décompte final du 8 septembre 2021 et de l'extrait de compte établi le 8 février 2022, la date de départ dudit intérêt moratoire au 1er octobre 2021 se rapporte au montant dû à cette date de CHF 5'494.70.

Le dies a quo de l'intérêt moratoire sera donc fixé ainsi : 6% l'an sur le montant de CHF 5'248.- (CHF 5'494.70 – l'intérêt débiteur de CHF 246.70) dès le 1er octobre 2021 puis sur le montant de CHF 5'598.- (CHF 5'844.70 – CHF 246.70) à compter du 13 décembre 2021 et enfin sur le montant de CHF 5'844.70 à partir du 1er janvier 2022.

5.6 Par ailleurs, le montant de CHF 1'250.-, prévu contractuellement entre les parties pour le cas d'une éventuelle procédure judiciaire, y compris de mainlevée d'opposition, est également dû, conformément au ch. 2.3 du règlement concernant les frais, avec intérêts à 6% l'an à partir du 1er décembre 2022, date du dépôt de la demande en paiement.

5.7 En revanche, on ignore à quoi correspond précisément le montant de "frais de poursuite" de CHF 73.30 réclamé dans les conclusions de la demande, de sorte que la défenderesse ne sera pas condamnée à payer ce montant.

5.8 Enfin, il y a lieu de prononcer la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer notifié le 12 janvier 2022 à la défenderesse, poursuite n° 1______, pour le montant de CHF 5'844.70, plus intérêts à 6% l'an sur le montant de CHF 5'248.- dès le 1er octobre 2021 puis sur le montant de CHF 5'598.- à compter du 13 décembre 2021 et enfin sur le montant de CHF 5'844.70 à partir du 1er janvier 2022.

6.              

6.1 La demanderesse a sollicité l'octroi de dépens.

6.2 Sous l'angle de l'art. 73 al. 2 LPP, les assureurs sociaux qui obtiennent gain de cause en procédure cantonale et sont représentés par un avocat ou, d'une autre manière, par une personne qualifiée, peuvent prétendre à des dépens lorsque l'adverse partie procède à la légère ou de manière téméraire. En l'absence d'une telle représentation, les autres conditions pour l'octroi de dépens à une partie non représentée doivent être données, en sus de celles liées à la témérité ou la légèreté (ATF 128 V 323 ; ATAS/384/2020 du 19 mai 2020 consid. 11 ; ATAS/474/2019 précité consid. 8b).

Dans le cadre de litiges portant sur des cotisations de la prévoyance professionnelle, le point de savoir si un procès est téméraire doit être tranché en examinant non seulement le comportement du débiteur des cotisations dans la procédure judiciaire, mais également son comportement avant le procès (ATF 124 V 285).

6.3 Dans le cas présent, la demanderesse, qui obtient presque entièrement gain de cause, est représentée par un avocat, et la défenderesse n'a jamais réagi à ses courriers et demandes, l'obligeant ainsi à entreprendre la présente procédure, violation de ses devoirs de collaboration qui constitue un comportement léger ou téméraire (dans ce sens, ATF 128 V 323 ; ATF 124 V 285).

Une indemnité de dépens de CHF 1'500.- sera donc allouée à la fondation, à la charge de la défenderesse.

7.             Pour le reste, la procédure est gratuite (art. 73 al. 2 LPP et 89H al. 1 LPA).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande du 1er décembre 2022 recevable.

Au fond :

2.        Condamne A______ SÀRL à payer à TELLCO PK la somme de CHF 5'844.70, plus intérêts à 6% l'an sur le montant de CHF 5'248.- dès le 1er octobre 2021 puis sur le montant de CHF 5'598.- à compter du 13 décembre 2021 et enfin sur le montant de CHF 5'844.70 à partir du 1er janvier 2022.

3.        Prononce la mainlevée définitive de l'opposition faite au commandement de payer dans la poursuite n° 1______, avec intérêts à 6% l'an sur le montant de CHF 5'248.- dès le 1er octobre 2021 puis sur le montant de CHF 5'598.- à compter du 13 décembre 2021 et enfin sur le montant de CHF 5'844.70 à partir du 1er janvier 2022.

4.        Condamne A______ SÀRL à verser à TELLCO PK la somme de CHF 1'500.- à titre de dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le