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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3769/2017

ATAS/721/2018 du 22.08.2018 ( LPP ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3769/2017 ATAS/721/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 août 2018

4ème Chambre

En la cause

HELVETIA FONDATION COLLECTIVE DE PRÉVOYANCE DU PERSONNEL, sise St. Alban-Anlage 26, BÂle

 

 

demanderesse

 

contre

CENTRE A_____, sise aux Acacias

 

 

défenderesse

 


EN FAIT

1.        Centre A______ (ci-après : la société ou la défenderesse), sise dans le canton de Genève, a été affiliée en tant qu’employeur auprès de Helvetia fondation collective de prévoyance du personnel (ci-après : Helvetia ou la demanderesse) afin d’assurer son personnel pour la prévoyance professionnelle à compter du 1er juillet 2014.

2.        La société ne s’acquittant pas des cotisations dues, Helvetia lui a adressé une sommation de payer le 9 avril 2015.

3.        Après avoir communiqué à l’office des poursuites du canton de Genève une réquisition de poursuite contre la société, par pli du 10 septembre 2015, Helvetia lui a rappelé que, conformément à la convention d’affiliation (n°1______), elle était en droit de résilier le contrat avec effet immédiat en cas de cotisations impayées. Elle a ajouté qu’en cas d’opposition au commandement de payer, elle ferait usage de ce droit et résilierait la convention d’affiliation à la fin du mois suivant. En outre, des frais de gestion supplémentaires de CHF 500.-, occasionnés par la procédure de poursuite, seraient facturés.

4.        Par courrier du 14 janvier 2016, Helvetia a résilié la convention d’affiliation avec effet au 29 février 2016.

5.        Le 18 juillet 2017, Helvetia a requis l’office des poursuites du canton de Genève de notifier à la société un commandement de payer (i) CHF 11'049.50, correspondant aux cotisations découlant du contrat de prévoyance n°1______, avec intérêts à 5% dès le 29 juin 2017, ainsi que (ii) CHF 273.45, représentant les intérêts du 1er janvier au 28 juin 2017.

Cette réquisition de poursuite n° 2______ annulait et remplaçait la précédente.

6.        Le commandement de payer a été notifié le 9 août 2017. Madame B______, employée de la société, y a formé opposition totale le même jour.

7.        Le 7 septembre 2017, Helvetia a adressé à la société un extrait de compte portant sur la période du 1er juillet 2014 au 6 septembre 2017 relatif à l’encaissement des cotisations.

Après comptabilisation des frais administratifs (sommation et poursuite), des intérêts créditeurs, des intérêts débiteurs de 5% (prélevés au 31 décembre de chaque année) et en tenant compte des paiements effectués, il subsistait au 23 février 2016 un solde en faveur de Helvetia à hauteur de CHF 15'919.05, chiffré à CHF 10'984.50 au 13 décembre 2016 après comptabilisation des versements opérés par la société dans l’intervalle. Au 31 décembre 2016, le solde débiteur ascendait à CHF 11'699.50, Helvetia ayant intégré les intérêts débiteurs de CHF 715.- courus jusqu’alors. Le solde était ramené à CHF 11'049.50 au 3 janvier 2017, suite au paiement effectué ce jour-là par la société.

L’extrait de compte spécifiait que, sans nouvelles de la société dans un délai de quatre semaines, ce document serait considéré comme approuvé.

8.        Par demande expédiée au greffe de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice le 15 septembre 2017, Helvetia a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que la société défenderesse soit condamnée à lui payer une créance en capital de CHF 11'049.50, plus intérêts à 5% dès le 29 juin 2017, les intérêts du 1er janvier au 28 juin 2017 de CHF 273.45, une « indemnité des procédés » de CHF 500.- ainsi que les frais du commandement de payer. De plus, elle a requis le prononcé de la mainlevée définitive dans la poursuite n° 2______ à concurrence de la créance précitée (hormis les frais du commandement de payer qui pouvaient être décomptés préalablement des paiements de la défenderesse selon l’art. 68 al. 2 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 [LP - RS 281.1]).

À l’appui de sa demande, elle a fait valoir que la défenderesse n’avait contesté ni le rapport d’affiliation ni les extraits de compte envoyés. Elle avait attiré à maintes reprises l’attention de celle-ci sur son obligation de payer les cotisations et l’avait sommée formellement avant d’entamer une poursuite. La défenderesse avait formé opposition au commandement de payer, sans indication des motifs. En ce qui concernait le montant des intérêts dus, la demanderesse se fondait sur le ch. 5.4 du contrat d’affiliation. Les taux d’intérêts futurs étaient communiqués lors de chaque envoi d’un extrait de compte. Enfin, conformément au ch. 2.1 du règlement pour les frais de gestion, lequel faisait partie intégrante du contrat d’affiliation, la somme de CHF 500.- était due en cas de poursuite.

La demanderesse a produit notamment, en italien, la convention d’affiliation, le règlement pour frais de gestion, la lettre de résiliation du 14 janvier 2016 et l’extrait de compte du 7 septembre 2017.

9.        Invitée à se déterminer, dans sa réponse du 12 octobre 2017, la défenderesse a proposé de payer le montant de CHF 11'049.50 en douze mensualités de CHF 920.80.-, majoré des intérêts, à compter du 31 octobre 2017.

10.    Dans ses observations du 24 octobre 2017, la demanderesse a refusé d’accepter cette proposition, au motif qu’elle avait déjà convenu avec la défenderesse d’un paiement fractionné avant le dépôt de la demande, que celle-ci n’avait toutefois plus honoré ses engagements depuis le 3 janvier 2017, date à compter de laquelle il n’avait plus été possible de la joindre.

11.    À la requête de la chambre de céans, le 6 mars 2018, la demanderesse a fait parvenir les documents précités, annexés à la demande, traduits en français.

12.    Par pli du 8 mars 2018, la chambre de céans a informé la défenderesse que ces pièces étaient à sa disposition au greffe pour consultation.

13.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1.        a. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO, Code des obligations - RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40] et art. 142 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 [CC - RS 210]).

b. En l’espèce, la présente cause oppose un employeur à une institution de prévoyance professionnelle en lien avec les cotisations dues par le premier à la seconde. La compétence de la chambre de céans ratione materiae pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

Elle l’est aussi ratione loci, étant relevé que, pour les contestations visées par l’art. 73 LPP, le for de l’action est au siège ou au domicile suisse du défendeur ou au lieu de l’exploitation dans laquelle l’assuré a été engagé (art. 73 al. 3 LPP) et qu’en l’occurrence la défenderesse a son siège dans le canton de Genève.

c. L'ouverture de l'action prévue à l'art. 73 al. 1 LPP n'est soumise, comme telle, à l'observation d'aucun délai (ATAS/929/2017 du 18 octobre 2017 consid. 2 et les références citées).

La demande respecte en outre la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

d. Partant, elle est recevable.

2.        Le litige comporte une demande en condamnation au paiement des cotisations échues (CHF 11'049.50 avec intérêts à 5% à compter du 29 juin 2017), des intérêts du 1er janvier au 28 juin 2017 (CHF 273.45), d’une indemnité de gestion de CHF 500.-, des frais du commandement de payer ainsi qu'une demande en mainlevée de l'opposition faite au commandement de payer.

3.        La LPP institue un régime d'assurance obligatoire des salariés (art. 2 al. 1 LPP).

Selon l'art. 11 al. 1 LPP, tout employeur occupant des salariés soumis à l'assurance obligatoire doit être affilié à une institution de prévoyance inscrite dans le registre de la prévoyance professionnelle.

La convention dite d’affiliation (« Anschlussvertrag ») d’un employeur à une fondation collective ou à une fondation commune est un contrat sui generis fondé sur l’art. 11 LPP (ATF 120 V 299 consid. 4a et les références). L’employeur affilié à une institution de prévoyance par un tel contrat est tenu de verser à celle-ci les cotisations qu’elle fixe dans ses dispositions réglementaires (cf. art. 66 al. 1, 1ère phrase LPP).

4.        Conformément à l'art. 66 al. 2 LPP, l'employeur est le débiteur de la totalité des cotisations envers l'institution de prévoyance. Celle-ci peut majorer d'un intérêt moratoire les cotisations payées tardivement.

Le taux d'intérêt se détermine en premier lieu selon la convention conclue par les parties dans le contrat de prévoyance et, à défaut, selon les dispositions légales sur les intérêts moratoires des art. 102 ss. CO (SVR 1994 BVG n. 2 p. 5 consid. 3b/aa; RSAS 1990 p. 161 consid. 4b).

Aux termes de l’art. 102 al. 1 CO, le débiteur d’une obligation exigible est mis en demeure par l’interpellation du créancier. Lorsque le jour de l’exécution a été déterminé d’un commun accord, ou fixé par l’une des parties en vertu d’un droit à elle réservé et au moyen d’un avertissement régulier, le débiteur est mis en demeure par la seule expiration de ce jour (art. 102 al. 2 CO). Le débiteur qui est en demeure pour le paiement d’une somme d’argent doit un intérêt moratoire à 5%, dans la mesure où un taux d’intérêt plus élevé n’a pas été convenu par contrat (art. 104 al. 1 et 2 CO; ATF 130 V 414 consid. 5; ATF 127 V 377 consid. 5e/bb et les références). Selon l’art. 105 al. 3 CO, des intérêts ne peuvent être portés en compte pour cause de retard dans les intérêts moratoires (RSAS 2003 p. 500 consid. 6.1).

5.        En matière de prévoyance professionnelle, le juge saisi d’une action doit se prononcer sur l’existence ou l’étendue d’un droit ou d’une obligation dont une partie prétend être titulaire contre l’autre partie (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B.91/05 du 17 janvier 2007 consid. 2.1).

L’objet du litige devant la juridiction cantonale est déterminé par les conclusions de la demande introduite par l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B.72/04 du 31 janvier 2006 consid. 1.1). C’est ainsi la partie qui déclenche l’ouverture de la procédure et détermine l’objet du litige (maxime de disposition). L’état de fait doit être établi d’office selon l’art. 73 al. 2 LPP seulement dans le cadre de l’objet du litige déterminé par la partie demanderesse. La maxime inquisitoire ne permet pas d’étendre l’objet du litige à des questions qui ne sont pas invoquées (ATF 129 V 450 consid. 3.2).

Le juge n’est toutefois pas lié par les conclusions des parties; il peut ainsi adjuger plus ou moins que demandé à condition de respecter leur droit d’être entendu (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B.59/03 du 30 décembre 2003 consid. 4.1).

6.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités ne revêtent une importance significative ou n'entrent raisonnablement en considération (ATF 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 360 consid. 5b ; 125 V 195 consid. 2 et les références; cf. ATF 130 III 324 consid. 3.2 et 3.3). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 322 consid. 5a).

7.        a. En l'espèce, la chambre de céans tient pour établi qu'en sa qualité d'employeur occupant des salariés, la défenderesse devait obligatoirement être affiliée à une caisse de prévoyance professionnelle, ce qui du reste n'est pas contesté.

Le personnel de l’entreprise de la défenderesse a été assuré auprès de la demanderesse avec effet au 1er juillet 2014, conformément au contrat d’affiliation n° 1______. Ce contrat n’est pas remis en cause, pas plus que le devoir de la défenderesse de verser les cotisations dues en vertu de l’art. 66 al. 2 LPP.

b. Aux termes des ch. 5.1 et 5.2 de la convention d'affiliation liant les parties, l’employeur s’engage à verser les contributions facturées à la Fondation (c’est-à-dire la demanderesse). Le jour d’effet est le 1er janvier. Les adaptations du salaire, des prestations et des contributions sont effectuées en règle générale au jour d’effet. L'employeur s'engage à retenir les contributions réglementaires sur les salaires des employés et à les verser régulièrement (au moins chaque trimestre).

Un crédit d’intérêts est accordé pour les paiements effectués avant l’échéance, tandis que des intérêts débiteurs sont facturés pour des paiements effectués avec retard, même sans procédure de recouvrement. La Fondation a le droit de fixer des taux d'intérêts conformes aux conditions du marché. Les taux d'intérêts peuvent être adaptés en tout temps aux nouvelles conditions (ch. 5.4 al. 1 de la convention d'affiliation).

Tout solde en faveur de la Fondation à la fin d’une année, ainsi que les intérêts débiteurs, sont reportés à l’année civile suivante à titre de créance en capital. Tout solde en faveur de l’entreprise affiliée, y compris les intérêts créditeurs, sont comptabilisés à titre de paiement d’acompte pour les contributions de l’année suivante (ch. 5.4 al. 3 de la convention d’affiliation).

Pour la fin de l’année civile, la Fondation établit un relevé du compte d’encaissement. Le solde indiqué sur ce relevé sera considéré comme approuvé dans la mesure où l’entreprise affiliée ne le conteste pas par écrit dans un délai de quatre semaines après réception du relevé (ch. 5.4 al. 4 de la convention d’affiliation).

Le règlement pour frais de gestion, faisant partie intégrante de la convention d’affiliation (ch. 2.2 de la convention d’affiliation) prévoit expressément le montant des frais relatifs aux procédures de sommation et de poursuite, dont un montant forfaitaire de CHF 300.- pour une sommation et de CHF 500.- pour la réquisition de poursuite.

b/aa. Le contrat de compte courant comporte un accord de compensation selon lequel toutes les prétentions nées de part et d'autre, comprises dans le rapport de compte courant, seront compensées automatiquement, sans déclaration de compensation, soit pendant que le compte courant est ouvert, soit à la fin d'une période comptable (ATF 129 III 118 consid. 2.3). Dans un compte courant, les prétentions et contre-prétentions portées en compte s'éteignent par compensation, si bien qu'une nouvelle créance prend naissance à concurrence du solde. Il y a novation lorsque le solde du compte a été arrêté et reconnu (art. 117 al. 2 CO). Les parties peuvent convenir d'une reconnaissance tacite (ATF 130 III 694 consid. 2.2.2 et les références citées).

b/bb. Il découle de ce qui précède que le ch. 5.4 de la convention d’affiliation contient des règles relatives à un compte courant (cf. dans ce sens : ATAS/292/2014 du 12 mars 2014 consid. 5 et 6). En effet, la demanderesse tient le compte et inscrit les opérations au débit et au crédit qui sont périodiquement récapitulées et compensées ; le solde en faveur de celle-ci à la fin d’une année, y compris les intérêts débiteurs, sont reportés à l’année suivante à titre de créance en capital, tandis que le solde en faveur de la défenderesse, y compris les intérêts créditeurs, sont reportés à titre de paiement d’acompte pour les contributions de l’année suivante. Cette opération arithmétique comporte donc un mécanisme de compensation réciproque qui s’inscrit dans la durée. À cela s’ajoute qu’à défaut de contestation dans le délai contractuel, le solde indiqué sur le relevé émis pour la fin de l’année civile est réputé accepté. La reconnaissance du solde provoque donc la novation de la dette antérieure.

c. Cela étant établi, il convient de déterminer si la demanderesse peut réclamer la somme de CHF 11'049.50 (montant comportant notamment le capital et les intérêts débiteurs courus jusqu’à fin décembre 2016), avec intérêts à 5% à compter du 29 juin 2017, ainsi que les intérêts débiteurs du 1er janvier au 28 juin 2017 de CHF 273.45.

c/aa. L'interdiction de l'anatocisme n'est pas applicable aux contrats de compte courant (art. 314 al. 3 CO). Le Tribunal fédéral a toutefois précisé que les intérêts ne sont susceptibles de rapporter eux-mêmes des intérêts que si, par novation, ils sont devenus des éléments du capital. À défaut de reconnaissance du solde, les intérêts ne peuvent donc pas porter intérêts. La fin du contrat de compte courant transforme en solde la position du compte existant à ce moment-là.

La doctrine considère, au sujet de l'art. 105 al. 3 CO (interdiction de l'anatocisme en matière d'intérêts moratoires), que les parties peuvent convenir que les paiements partiels effectués par le débiteur éteignent tout d'abord la créance principale avant d'éteindre la dette en intérêts moratoires; dans ce cas, une fois la dette principale éteinte, l'intérêt moratoire échu se transforme par novation en un montant en capital, sur lequel l'intérêt moratoire convenu est dû. Il doit toutefois y avoir entente des parties à cet égard; une simple comptabilisation en compte courant n'est pas suffisante (ATF 130 III 694 consid. 2.2.3 et les références citées).

c/bb. En l’espèce, suite à la lettre de résiliation de la demanderesse du 14 janvier 2016, le rapport d’affiliation a pris fin au 29 février 2016. Le solde débiteur à ce moment-là comportant le capital, les frais administratifs et les intérêts débiteurs courus jusqu’alors se montait à CHF 15'919.05.

Aucune clause contractuelle ne stipule que les paiements effectués par la défenderesse après la fin du contrat doivent d'abord être imputés sur le capital, ni qu'une fois celui-ci remboursé, les intérêts courus jusqu'alors forment un capital sur lequel des intérêts moratoires seraient dus. Partant, une fois le contrat résilié, les intérêts ne pouvaient plus devenir capital par novation et porter eux-mêmes des intérêts. C'est ainsi à tort que la demanderesse a ajouté au capital, arrêté à CHF 10’984.50 le 13 décembre 2016 (suite aux versements partiels opérés depuis février 2016), les intérêts de CHF 715.- courus au 31 décembre 2016. Ce faisant, à cette date-ci, le capital a été fixé à CHF 11'699.50, puis à CHF 11'049.50 une fois le dernier versement opéré par la défenderesse le 3 janvier 2017.

La créance due s’élevait toutefois à CHF 10'334.50 (11'049.50 - 715).

Cela étant, il ne ressort d’aucun document au dossier que la défenderesse aurait formulé une contestation auprès de la demanderesse quant à l’exactitude de l’extrait de compte du 7 septembre 2017 récapitulant les paiements encaissés du 1er juillet 2014 au 6 septembre 2017. Au demeurant, dans sa réponse, la défenderesse admet devoir la somme de CHF 11'049.50. Par conséquent, l’extrait de compte est tenu pour approuvé tacitement.

c/cc. Cela dit, il y a lieu d’examiner si le solde arrêté et reconnu au 3 janvier 2017, qui inclut une erreur, peut être corrigé.

Selon la doctrine, le solde reconnu du compte courant étant une créance nouvelle issue de la novation, convenue par avance, il est le fruit d’une convention qui ne peut être anéantie ou modifiée qu’aux conditions des art. 21 (lésion) et 23 ss CO (vices du consentement), la novation étant elle-même réputée être causale, sauf disposition contraire voulue par les parties (Denis PIOTET, Commentaire romand Code des obligations I, 2012, n. 18 ad art. 117 CO). À teneur de la jurisprudence fédérale, dans des relations contractuelles complexes, il est possible de revenir sur un article comptabilisé à tort lors du bouclement du compte, en cas de vice du consentement (ATF 127 III 147 consid. 2d et e; ATF 135 V 113 consid. 3.6 ; ATAS/292/2014 du 12 mars 2014 consid. 6).

L’erreur essentielle n’oblige pas la partie dans l’erreur (art. 23 CO ; Bruno SCHMIDLIN, Commentaire romand Code des obligations I, 2012, n. 4 ad art. 23,24 CO). Une erreur causée par une ignorance dont on aurait pu et dû se rendre compte ne peut être considérée comme essentielle, étant donné l’attitude négligente et indifférente de l’errans à son égard (SCHMIDLIN, op cit., n. 2 ad art. 23, 24 CO).

In casu, la défenderesse ne pouvait ignorer les droits et les devoirs respectifs des parties découlant de la convention d’affiliation, puisqu’elle disposait d’une copie de ce document. Elle n’a pas contesté l’extrait de compte du 7 septembre 2017 faisant état d’un solde de CHF 11'049.50 au 3 janvier 2017, alors même qu’elle aurait pu se rendre compte qu’après la fin du contrat, les intérêts débiteurs ne pouvaient courir et s’ajouter au capital. En effet, si le ch. 5.4 de la convention d’affiliation prévoit que des intérêts débiteurs sont facturés pour des paiements effectués avec retard et que tout solde à la fin d’une année, y compris lesdits intérêts, sont reportés à l’année civile suivante à titre de créance en capital, il n’en demeure pas moins qu’une fois le contrat résilié, cette clause - qui n’est plus en vigueur - n’est plus applicable. L’erreur ne saurait donc être considérée comme essentielle.

Par conséquent, la défenderesse est demeurée débitrice de la somme de CHF 11'049.50, correspondant aux cotisations des employés restées impayées au 3 janvier 2017, intérêts débiteurs et frais administratifs compris (sommation et poursuite).

c/dd. En revanche, les intérêts débiteurs, calculés à CHF 273.45 pour la période du 1er janvier au 28 juin 2017, lesquels ne sont pas comptabilisés dans l’extrait de compte précité tenu pour approuvé, ne sont pas dus, dans la mesure où le contrat a été résilié au 29 février 2016.

8.        a. La demanderesse conclut à l’octroi d’intérêts moratoires à 5% dès le 29 juin 2017 sur le montant de la créance de CHF 11'049.50.

b. À défaut de disposition réglementaire topique, le taux d’intérêt moratoire est effectivement de 5% (cf. consid. 4 ci-dessus).

c. L'intérêt moratoire ne court en principe que dès la mise en demeure du débiteur par l'interpellation (art. 102 al. 1 et 104 al. 1 CO). L'interpellation est une déclaration de volonté que le créancier adresse au débiteur pour lui faire savoir qu'il exige la prestation sans délai. L'interpellation doit désigner la prestation à effectuer d'une manière suffisamment exacte pour que le débiteur comprenne ce que le créancier entend réclamer. S'il s'agit d'une créance d'argent, il faut en règle générale préciser son montant (ATF 129 III 535, JdT 2003 I 590 consid. 3.2.2). L’interpellation est sujette à réception et déploie, en principe, ses effets dès que le débiteur la reçoit, par exemple lors de la notification d’un commandement de payer. L’interpellation est reçue lorsqu’elle entre dans la sphère de puissance du débiteur, qui supporte donc le risque de ne pas en avoir pris effectivement connaissance (Luc ThÉvenoz, Commentaire romand Code des obligations I, 2012, n. 19 ad art. 102 CO).

In casu, le solde réclamé a un caractère évolutif, car il comprend notamment, outre les cotisations dues à l’expiration du terme prévu, les intérêts débiteurs et créditeurs. Dans ces circonstances, une interpellation était nécessaire. Il ressort toutefois de l’extrait de compte du 7 septembre 2017 que la demanderesse n’a pas formellement interpellé la défenderesse entre le 3 janvier 2017, date à laquelle la créance réclamée a été arrêtée, et le 18 juillet 2017, date de la réquisition de poursuite. Partant, il y a lieu de considérer que le solde de la créance, qui n’a pas fait l’objet d’une sommation, portera intérêt à partir du lendemain de la notification du commandement de payer, soit dès le 10 août 2017.

9.        Quant à l’indemnité de gestion de CHF 500.-, exigée par la demanderesse, il y a lieu de l’admettre, dès lors qu’elle est prévue par le règlement pour frais de gestion, lequel fait partie intégrante de la convention d’affiliation. On relèvera que les frais de gestion supplémentaires de CHF 500.-, intégrés dans l’extrait de compte précité, se rapportent à la précédente réquisition de poursuite (cf. courrier de la demanderesse du 10 septembre 2015), laquelle a ensuite été annulée par la poursuite n° 2______ (ici en cause), de sorte que lesdits frais ne sont pas doublement comptabilisés.

10.    a. Reste à examiner la conclusion de la demanderesse tendant à obtenir la mainlevée définitive de l’opposition formée au commandement de payer dans la poursuite n°2______ .

b. Les décisions des autorités administratives fédérales portant condamnation à payer une somme d'argent sont exécutées par la voie de la poursuite pour dettes et sont, une fois passées en force, assimilées à des jugements exécutoires au sens de l'art. 80 al. 2 ch. 2 LP (Pierre-Robert GILLIÉRON, Commentaire de la LP, 1999 p. 1226 ch. 45).

Il en est de même des décisions passées en force des autorités administratives cantonales de dernière instance qui statuent, dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération, en application du droit fédéral, mais qui ne statuent pas définitivement en vertu du droit fédéral – autrement dit, dont les décisions sont susceptibles d'un recours administratif auprès d'une autorité fédérale ou d'un recours de droit administratif (GILLIÉRON, op. cit., p. 1227; Carl JEAGER, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 1999 p. 621). Par autorités administratives fédérales, et par extension autorités administratives cantonales de dernière instance, il faut entendre les tribunaux fédéraux et les autres autorités ou organisations indépendantes de l'administration fédérale en tant qu'elles statuent dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération (art. 1 al. 2 let. b et e de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968; PA - RS 172.021).

La chambre des assurances sociales statuant en dernière instance cantonale et dans l'accomplissement de tâches de droit public peut, selon ce qui précède, prononcer la mainlevée définitive d'une opposition à un commandement de payer puisque, statuant au fond, la condamnation au paiement est assimilée à un jugement exécutoire. Cette solution est d'ailleurs la conséquence du fait que, dans les matières qui sont de son ressort, le juge des assurances est effectivement le juge ordinaire selon l'art. 79 LP et qu'il a qualité pour lever une opposition à la poursuite en statuant sur le fond (ATF 109 V 51).

c. À teneur de l’art. 88 al. 2 LP, le droit du créancier de requérir la continuation de la poursuite se périme par un an à compter de la notification du commandement de payer (première phrase); si opposition a été formée, ce délai ne court pas entre l'introduction de la procédure judiciaire ou administrative et le jugement définitif (seconde phrase).

11.    a. En l’occurrence, comme exposé ci-dessus, la chambre de céans est compétente pour prononcer la mainlevée définitive d’une opposition à un commandement de payer.

In casu, le commandement de payer a été notifié à la défenderesse le 9 août 2017, date à laquelle le délai de péremption d’un an a commencé à courir (ATF 125 III 45 consid. 3b). Par conséquent, la poursuite n'était pas périmée lorsque la demanderesse a saisi la chambre de céans le 15 septembre 2017 (étant au demeurant relevé qu’en vertu de l’art. 65 al. 2 LP, Mme B______, employée de la défenderesse [entreprise exploitée sous forme de Sàrl], était bel et bien subsidiairement habilitée à recevoir le commandement de payer).

b. En outre, la défenderesse ne soulève aucune exception énumérée à l’art. 81 LP (extinction de la dette, obtention d’un sursis ou de la prescription).

c. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler qu’en vertu de l’art. 79 LP, le créancier agit par la voie de la procédure civile ou administrative pour faire reconnaître son droit. Il ne peut requérir la continuation de la poursuite qu'en se fondant sur une décision exécutoire qui écarte expressément l'opposition.

c/aa. La décision doit à la fois condamner le débiteur au paiement d’une somme d’argent et, accessoirement, lever à due concurrence la mainlevée. La raison de cette double exigence est d’assurer l’indispensable identité entre la prétention déduite en poursuite et la créance qui fait l’objet d’un jugement (André SCHMIDT, Poursuite et faillite : commentaire de la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite ainsi que des articles 166 à 175 de la Loi fédérale sur le droit international privé, 2005, n. 25 ad art. 79 LP).

c/bb. En l’espèce, le commandement de payer dans la poursuite en cause énonce uniquement, à titre de prétendues créances, les cotisations découlant du contrat de prévoyance n° 1______ et les intérêts du 1er janvier au 28 juin 2017. La créance de CHF 500.- relative aux frais de gestion supplémentaires doit donc faire l’objet d’une poursuite distincte, dès lors que la poursuite pendante n° 2______ ne pourra être continuée que pour les créances reconnues par le juge et figurant dans le commandement de payer.

d. Enfin, en ce qui concerne les frais de poursuite, ils sont d'office supportés par le débiteur lorsque la poursuite aboutit (JdT 1974 III 32). Il n'y a donc pas lieu de prononcer la mainlevée définitive pour les frais du commandement de payer, dont le sort suit celui de la poursuite (art. 68 LP) (arrêt du Tribunal fédéral 5A_8/2008 du 11 avril 2008 consid. 4).

12.    Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu d’admettre partiellement les conclusions de la demanderesse, en ce sens que la défenderesse sera condamnée à lui payer la somme de CHF 11'049.50, avec intérêts à 5% dès le 10 août 2017, ainsi qu’une indemnité de gestion de CHF 500.-.

En outre, la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer (poursuite n° 2______ ) doit être prononcée à concurrence de CHF 11'049.50, avec intérêts à 5% dès le 10 août 2017.

13.    a. La demanderesse conclut à ce que la défenderesse soit condamnée aux frais et dépens de la procédure.

b. L'art. 73 al. 2 LPP précise que les cantons doivent prévoir une procédure simple, rapide et, en principe, gratuite. L'art. 89H al. 1 LPA prévoit quant à lui que la procédure est gratuite pour les parties, sous réserve de l'al. 4 (relatif à l’assurance-invalidité). Toutefois, les débours et un émolument peuvent être mis à la charge de la partie qui agit de manière téméraire ou témoigne de légèreté.

Une indemnité est allouée au recourant qui obtient gain de cause (art. 89H al. 3 LPA).

c. En l’espèce, la demanderesse, non assistée par un avocat indépendant, qui agit en qualité d'organisme chargé de tâches de droit public, n’a pas droit à des dépens (arrêt du Tribunal fédéral 9C_927/2010 du 4 août 2011 consid. 6 et les références citées). En outre, une témérité de la part de la défenderesse ne sera pas retenue, de sorte que celle-ci ne sera pas condamnée au paiement d’un émolument.

 

 

 

 

 


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        Condamne Centre médical A______ Sàrl à payer à Helvetia fondation collective de prévoyance du personnel la somme de CHF 11'049.50, majoré d’un intérêt de 5% dès le 10 août 2017, ainsi que CHF 500.- de frais de gestion supplémentaires.

3.        Prononce la mainlevée définitive de l'opposition faite au commandement de payer (poursuite n° 2______ ) à concurrence de CHF 11'049.50, avec intérêts à 5% dès le 10 août 2017.

4.        Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente :

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le