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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2704/2022

ATAS/241/2023 du 04.04.2023 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2704/2022 ATAS/241/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 4 avril 2023

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, GENEVE

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. À la suite d'une demande déposée le 20 novembre 2020, Madame A______ (ci-après: l'assurée, l'intéressée ou la recourante), divorcée depuis septembre 2020 et mère d'une fille – mineure – née en 2014, a, par décision du 23 juin 2021 du service des prestations complémentaires (ci-après: le SPC, le service ou l'intimé), été mise au bénéfice de prestations complémentaires familiales (ci-après: PCFam) et de subsides d'assurance-maladie, mais pas de l'aide sociale, à compter du 1er juin 2021.

b. L'intéressée n'ayant pas remis au service l'intégralité des pièces qu'il lui avait récemment réclamées, celui-ci a, par décision du 2 juin 2022, décidé de supprimer le versement de ses prestations et subsides d'assurance-maladie dès le 30 juin 2022.

c. Toutefois, par un "2ème rappel" du 13 juin 2022, le SPC a demandé à l'assurée de lui fournir les renseignements et documents requis, ce à quoi elle a donné suite en présentant plusieurs pièces (en grande partie des relevés de comptes bancaires, ainsi que des documents relatifs à la profession d'accueillante familiale) le 16 juin 2022.

d. Par six décisions – séparées – du 23 juin 2022, le service a alloué à l'assurée des prestations d'aide sociale rétroactivement du 1er avril au 30 juin 2022, au total CHF 3'782.-, a retenu l'absence de droit à des PCFam à partir du 1er avril 2022, y compris dès le 1er juillet 2022, en raison d'une activité lucrative en qualité d'indépendante (comme accueillante familiale) depuis le 1er avril 2022, et lui a réclamé en restitution les PCFam versées à hauteur de CHF 6'518.- (PCFam initialement prévues de CHF 9'777.- – celles effectivement versées à hauteur de CHF 3'259.-), somme réclamée en restitution que le SPC compensait avec le montant d'aide sociale dû pour la période du 1er avril au 30 juin 2022 à concurrence de CHF 3'782.-, ce qui donnait une somme finalement réclamée de CHF 2'736.-, pour laquelle était transmis à l'intéressée un bulletin de versement. Le droit aux subsides d'assurance-maladie était supprimé avec effet au 30 juin 2022, une des décisions mentionnant toutefois un "subside versé indûment par le service de l'assurance-maladie (ci-après: SAM)" à hauteur de CHF 1'200.-.

e. En parallèle, l'intéressée a, le 23 juin 2022 également, formé opposition contre la décision du SPC du 2 juin 2022, aux motifs que son activité de "maman de jour" ne générait pas un revenu suffisant et que la décision de suppression de prestations était très injuste et non motivée ("puisqu'elle se fonde sur un défaut de réponse et de fourniture documentaire qui n'est pas vrai, et à aucun moment je n'ai répondu hors délai").

f. Le 28 juin 2022, le service a reçu un pli de l'intéressée à son attention daté du 7 juin 2022 ainsi que des documents (afférents notamment au compte bancaire et à l'activité d'accueillante familiale).

g. Par courrier du 5 juillet 2022, le service a informé l'assurée qu'à la suite de l'opposition de cette dernière à sa décision du 2 juin 2022, il procédait actuellement à un nouvel examen de son dossier et lui annonçait qu'elle recevrait prochainement des nouvelles.

h. Par décision sur opposition rendue le 22 juillet 2022, le SPC a constaté que l'opposition formée par l'intéressée contre sa décision du 2 juin 2022 était devenue sans objet, dans la mesure où avait été rendue une nouvelle décision, à savoir celle du 23 juin 2022, laquelle reprenait le calcul de son droit aux PCFam, "suite aux documents reçus". "En effet, suite à l'ultime demande de pièces, le SPC [avait] obtenu les documents permettant de calculer [ses] prestations complémentaires, de sorte que [son] droit à celles-ci [avait] été rouvert. Cette nouvelle décision [annulait] et [remplaçait] la décision précédente".

i. Le 27 août 2022, l'intéressée s'est plainte auprès du service de ce que le montant qu'il lui réclamait n'était pas clair, puisque le "1er rappel" de celui-ci daté du 15 août 2022 contenait un bulletin de versement pour le montant de CHF 3'136.-, au lieu de la somme de CHF 2'736.- réclamée le 23 juin 2022.

B. a. Parallèlement, par acte daté du 23 août 2022 et expédié le 27 août suivant, l'assurée a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans) contre cette décision sur opposition du 21 (recte: 22) juillet 2022 précitée. Selon elle, l'attitude de l'intimé était contradictoire, car il lui demandait un remboursement et en même temps lui octroyait de nouvelles allocations; elle n'avait pas de ressources, ne recevait pas de pension alimentaire, et son activité, irrégulière, de "maman de jour" ne lui permettait pas de générer un revenu suffisant pour assumer ses charges et celles de sa fille de 7 ans; elle espérait que la chambre des assurances sociales reconnaisse sa bonne foi en demandant au service de renoncer à ses prétentions, "car [elle n'était] de toute façon pas en mesure de payer".

Était produite une lettre – non signée – adressée le 13 juillet 2022 par la recourante au SPC – mais qui ne figure pas dans le dossier de ce dernier –, s'opposant aux décisions du service du 23 juin 2022. L'assurée estimait au préalable anormal qu'autant de courriers lui soient envoyés en une fois, ce qui était source de confusion et était incompréhensible et contradictoire. Au fond, elle alléguait notamment qu'elle n'allait pas être en mesure de poursuivre son activité de "maman de jour", car elle n'avait pas reçu d'autorisation renouvelée depuis février 2022.

b. Par réponse du 26 septembre 2022, l'intimé a confirmé sa position déjà exprimée dans ladite décision sur opposition et a dès lors conclu au rejet du recours.

c. La recourante ne s'est pas manifestée dans le délai au 20 octobre 2022 octroyé par pli de la chambre de céans pour présenter ses observations, notamment quant à savoir si son recours avait réellement un objet au vu des explications du service du 26 septembre 2022.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 3 let. a de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25) concernant les PCFam au sens de l’art. 36A LPCC en vigueur dès le 1er novembre 2012.

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Selon l’art. 1A al. 2 LPCC, les PCFam sont régies par les dispositions figurant aux titres IIA et III de la LPCC, les dispositions de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (loi sur les prestations complémentaires; LPC - RS 831.30) auxquelles la LPCC renvoie expressément, les dispositions d'exécution de la loi fédérale désignées par règlement du Conseil d'État et la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830).

3.             Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA ; art. 43 LPCC).

4.              

4.1 Le canton de Genève prévoit deux types de prestations sociales, en complément ou en marge des prestations complémentaires prévues par la LPC, ciblant deux catégories distinctes de bénéficiaires, à savoir d'une part les personnes âgées, les conjoints ou partenaires enregistrés survivants, les orphelins et les invalides - bénéficiaires pouvant prétendre le cas échéant au versement de PCC (art. 1 al. 1 et 2 à 36 LPCC) - et d'autre part, les familles avec enfant(s) - bénéficiaires pouvant le cas échéant prétendre au versement de PCFam (art. 1 al. 2, 36A à 36I LPCC ; ATAS/1195/2020 du 3 décembre 2020 consid. 5b; ATAS/802/2019 du 9 septembre 2019 consid. 5).

Les PCFam ont été introduites à Genève depuis le 1er novembre 2012 (PL 10600 modifiant la LPCC du 11 février 2011). Elles visent une catégorie de bénéficiaires qui ne sont pas des rentiers AVS/AI, mais des familles pauvres dont les parents travaillent (Mémorial du Grand Conseil du 17 décembre 2009 et rapport de commission du 15 novembre 2010).

4.2 Selon l'art. 36A al. 1 LPCC, ont droit aux PCFam les personnes qui, cumulativement : ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève depuis 5 ans au moins au moment du dépôt de la demande de prestations (let. a) ; vivent en ménage commun avec des enfants de moins de 18 ans, respectivement 25 ans si l'enfant poursuit une formation donnant droit à une allocation de formation professionnelle (let. b) ; exercent une activité lucrative salariée (let. c) ; ne font pas l'objet d'une taxation d'office par l'administration fiscale cantonale, avec des exceptions possibles (let. d) ; et répondent aux autres conditions prévues par la loi (let. e).

Pour bénéficier des prestations, le taux de l'activité lucrative mentionnée à l'art. 36A al. 1 let. c LPCC, doit être, par année, au minimum de 40% lorsque le groupe familial comprend une personne adulte (art. 36A al. 4 let. a LPCC). En outre, aux fins de ladite loi, les personnes qui touchent des indemnités en application de la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0) sont assimilées aux personnes exerçant une activité lucrative (art. 36A al. 5 LPCC).

5.              

5.1 Prévu par l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. – RS 101), le principe de la bonne foi exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. L'administration doit en particulier s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part. À certaines conditions, le citoyen peut ainsi exiger de l'autorité qu'elle se conforme aux promesses ou assurances qu'elle lui a faites et ne trompe pas la confiance qu'il a légitimement placée dans celles-ci (cf. ATF 141 V 530 consid. 6.2; ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 et les références). De la même façon, le droit à la protection de la bonne foi peut aussi être invoqué en présence d'un simple comportement de l'administration susceptible d'éveiller chez l'administré une attente ou une espérance légitime. Entre autres conditions, l'autorité doit être intervenue à l'égard du citoyen dans une situation concrète et celui-ci doit avoir pris, en se fondant sur les promesses ou le comportement de l'administration, des dispositions qu'il ne saurait modifier sans subir de préjudice (cf. ATF 129 II 361 consid. 7.1 et les références).

5.2 En outre, conformément à l'art. 42 LPGA, les parties ont le droit d’être entendues. Il n’est pas nécessaire de les entendre avant une décision sujette à opposition. Aux termes de l'art. 49 al. 3 LPGA, les décisions indiquent les voies de droit. Elles doivent être motivées si elles ne font pas entièrement droit aux demandes des parties. La notification irrégulière d’une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l’intéressé. En vertu de l'art. 52 al. 2 LPGA, les décisions sur opposition doivent être rendues dans un délai approprié. Elles sont motivées et indiquent les voies de recours.

Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., implique notamment pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision. La motivation d'une décision est suffisante, au regard du droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., lorsque l'autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 142 II 154 consid. 4.2; ATF 139 IV 179 consid. 2.2; ATF 138 I 232 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 2C_333/2019 du 3 juin 2019 consid. 5.1). L'autorité n'a toutefois pas l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à l'examen des questions décisives pour l'issue du litige (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; ATF 134 I 83 consid. 4.1 et les arrêts cités). La motivation peut d'ailleurs être implicite et résulter des différents considérants de la décision. En revanche, une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (arrêt du Tribunal fédéral 9C_877/2014 du 5 mai 2015 consid. 3.3 et les références; ATAS/421/2021 du 4 mai 2021 consid. 5).

S'agissant plus particulièrement de l'art. 49 al. 3 LPGA, qui découle de la garantie constitutionnelle de l'art. 29 al. 2 Cst., l’assureur doit mentionner, au moins brièvement, les éléments de fait pertinents, les dispositions légales applicables et les motifs qui le conduisent à rendre sa décision. Un renvoi général aux pièces du dossier et à la loi ne satisfait pas à l’obligation de motiver. La densité de l’exigence de motiver est fonction des circonstances. En principe, le devoir de motiver est d’autant plus élevé que la décision a des effets importants sur les droits de l’assuré. Le devoir de motiver est moindre lorsque la voie de l’opposition est ouverte, puisque cette procédure a justement pour fonction de compléter l’exercice du droit d’être entendu de l’assuré (également art. 42 LPGA; Valérie DÉFAGO GAUDIN, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 35 s. ad art. 49 LPGA et les référence citées).

5.3 En procédure d'opposition, l'assureur reste compétent et il n'y a pas d'effet dévolutif (pas de transfert de compétence pour statuer sur l'opposition). La procédure d'opposition se termine par la décision sur opposition qui remplace la décision initiale (ATF 131 V 407 consid. 2.1.2.1). Elle permet à l'autorité administrative d'examiner sa décision initiale et cas échéant de l'annuler ou de la modifier.

L'autorité valablement saisie d'une opposition devra se prononcer une seconde fois sur tous les aspects du rapport juridique ayant fait l'objet de sa décision initiale, quand bien même la motivation de la nouvelle décision portera principalement sur les points critiqués par l'opposant. La décision sur opposition remplace la décision initiale et devient, en cas de recours à un juge, l'objet de la contestation de la procédure judiciaire (arrêt du Tribunal fédéral 9C_777/2013 consid. 5.2.1).

5.4 La violation du droit d'être entendu, de caractère formel, doit entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recourant sur le fond (ATF 127 V 431 consid. 3d/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_120/2009 du 3 février 2010 consid. 2.2.1).

Pour autant qu'elle ne soit pas d'une gravité particulière, cette violation est réparée lorsque la partie lésée a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de recours jouissant d'un plein pouvoir d'examen. Au demeurant, la réparation d'un vice éventuel ne doit avoir lieu qu'exceptionnellement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_181/2013 du 20 août 2013 consid. 3.3).

6.              

6.1 Concernant l'objet du présent litige, il est vrai que, comme le fait valoir la recourante, le prononcé le 23 juin 2022 par l'intimé de plusieurs décisions, qui ont en partie des objets identiques (notamment la suppression rétroactive du droit aux PCFam à compter du 1er avril 2022), rend la situation juridique particulièrement confuse.

N'est pas non plus compréhensible, comme s'en plaint l'intéressée, que le "1er rappel" du service daté du 15 août 2022 contient un bulletin de versement pour le montant de CHF 3'136.-, alors que la somme réclamée dans une des décisions du 23 juin 2022 se montait à CHF 2'736.-. Ce point ne saurait néanmoins, en l'état, faire partie du litige, puisque ce rappel ne constitue par une décision, qui seule serait sujette à recours (cf. notamment art. 57 let. a et 59 let. b loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10], par renvoi de l'art. 89A LPA).

6.2 Par ailleurs, il est incompréhensible que le SPC indique que sa "nouvelle décision" du 23 juin 2022 aurait rendu sans objet sa décision du 2 juin 2022 qui a supprimé le versement des PCFam et subsides d'assurance-maladie dès le 30 juin 2022. En effet, il ne précise pas à laquelle de ses six décisions du 23 juin 2022 il fait allusion. En outre, contrairement à ce qui est exposé dans la décision sur opposition rendue le 22 juillet 2022, on ne voit aucunement en quoi une ou des décisions du 23 juin 2022 rouvriraient le droit de l'assurée à l'octroi de PCFam dès le 30 juin / 1er juillet 2022. Au contraire, une de ces décisions du 23 juin 2022 "[interrompt] le droit aux [PCFam] dès le 30 juin 2022, et les autres décisions du même jour vont dans le même sens et élargissent l'interruption de ce droit en le supprimant avec effet rétroactif au 1er avril 2022. Au surplus, l'assurée s'est opposée le même 23 juin 2022 à la décision du 2 juin 2022 et le SPC n'a donc pas pu prendre en considération les allégations et griefs qu'elle avait formulés dans cette opposition, laquelle a été formée dans le délai légal (art. 52 al. 1 LPGA).

La suppression du droit aux PCFam semble, à lire la décision du 23 juin 2022 interrompant ledit droit à partir du 30 juin 2022, reposer sur le fait pour le service d'avoir appris que l'assurée exerçait dès le 1er avril 2022 une activité lucrative en qualité d'indépendante, sans motivation si ce n'est que dans les plans de calcul annexé à une autre décision du même jour est écrit "Gain activité lucrative: le gain d'activité lucrative de [l'intéressée] correspond à un gain de CHF 9'792.-" pour avril 2022, respectivement "de CHF 22'992.-" pour mai et juin 2022, "et est pris en compte à 100 %". Or, on ignore d'où proviennent ces deux montants et sur quelle base ils ont été calculés, et le gain pris en compte par l'intimé pour la période commençant le 30 juin / 1er juillet 2022 ne ressort pas du dossier, ce alors que la décision sur opposition du 22 juillet 2022 indique que "suite à l'ultime demande de pièces, le SPC a obtenu les documents permettant de calculer [les PCFam de l'assurée], de sorte que [son] droit à celles-ci [avait] été rouvert".

On ne voit donc aucun indice d'examen par l'intimé des nouvelles pièces transmises le 16 juin 2022 – et aussi le 7 juin 2022 – par la recourante en réponse au "2ème rappel" du 13 juin 2022, étant sur ce point relevé que l'intéressée fait aussi, notamment dans son opposition du 23 juin 2022, grief au service de ne pas lui avoir octroyé suffisamment de temps pour présenter les documents demandés.

6.3 Il découle de ce qui précède une grande confusion dans les décisions et prises de position de l'intimé qui n'est pas compatible avec le principe de la bonne foi dont le contenu a été rappelé plus haut, même si le service n'apparaît pas avoir créé chez l'assurée des attentes infondées qui l'auraient amenée à adopter un comportement qui se serait avéré préjudiciable pour elle. En particulier, le service a fait entendre dans sa décision sur opposition querellée qu'il aurait tenu compte des nouvelles pièces transmises par l'intéressée et rouvert son droit aux PCFam dès le 30 juin / 1er juillet 2022, alors que cela n'est manifestement pas le cas.

Plus problématique et grave encore apparaît le fait que l'intimé n'a pas motivé dans quelle mesure il tenait compte des pièces produites par la recourante les 7 et 16 juin 2022, n'a pas motivé de manière suffisante la suppression de son droit à compter non seulement du 1er juillet 2022 mais aussi à titre rétroactif du 1er avril 2022, et ne s'est pas prononcé sur son opposition du 23 juin 2022. L'autorité valablement saisie d'une opposition devant se prononcer une seconde fois sur tous les aspects du rapport juridique ayant fait l'objet de sa décision initiale, ni la décision du 2 juin 2022 ni celles du 23 juin 2022 n'ont été remplacées par la décision sur opposition rendue le 22 juin 2022.

De tels manquements, qui rendent incompréhensibles la décision sur opposition et les décisions – initiales – du 2 juin et 23 juin 2022, ne peuvent pas être guéris dans le cadre de la présente procédure de recours, ce d'autant moins qu'on peut douter que la situation financière et professionnelle de l'intéressée ait été suffisamment instruite.

Dans le cadre du renvoi de la cause, le SPC devra également statuer sur l'opposition formée le 13 juillet 2022 par l'assurée contre l'ensemble de ses décisions du 23 juin 2022, le cas échéant après avoir, vu défaut de signature valable, imparti un délai convenable à l'intéressée pour réparer ce vice (ATF 120 V 413; arrêt du Tribunal fédéral 1C_39/2013 du 11 mars 2013 consid. 2).

Le service devra examiner l'ensemble des arguments et documents présentés par l'assurée, y compris quant à la question de son activité lucrative, notamment sous l'angle de l'art. 36A al. 1 let. c LPCC, et ce pour la période commençant le 1er avril 2022 déjà.

Il est par ailleurs précisé que la recourante n'a pas expressément restreint sa contestation des décisions de suppression de prestations rendues les 2 et 23 juin 2022 par l'intimé à la question de son droit à des PCFam, de sorte que la nouvelle décision à rendre par le service devra aussi se prononcer sur la suppression ou non du droit aux subsides d'assurance-maladie, et avec effet à partir de quelle date. À cet égard, les décisions du 23 juin 202 apparaissant aussi confuses sur ce point, puisqu'elles semblent supprimer le droit auxdits subsides dès le 30 juin 2022 tout en mentionnant un "subside versé indûment par le SAM" à hauteur de CHF 1'200.-.

Enfin, les décisions du 23 juin 2022 de restitution pour la période du 1er avril au 30 juin 2022 paraissent incompatibles avec l’interdiction de compenser des PCFam et des prestations d’aide sociale dans une décision relative à la fois à l’obligation de restituer des montants et à la fois à la fixation des prestations dues à titre rétroactif (cf. ATAS/751/2020 du 8 septembre 2020).

7.             En définitive, le recours sera partiellement admis (partiellement le présent arrêt ne se prononce pas sur le droit en tant que tel de la recourante à des PCFam et des subsides d'assurance-maladie dès le 1er avril 2022), la décision sur opposition querellée sera annulée et la cause sera renvoyée à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision, dans le sens des considérants.

8.             La recourante, qui obtient partiellement gain de cause, n'est pas représentée par un mandataire et n’a pas allégué des frais particulièrement importants pour défendre ses droits dans le cadre de la présente procédure, de sorte qu'aucune indemnité ne lui sera accordée à titre de participation à des frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA et vu l'art. 61 let. fbis LPGA).

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition rendue le 22 juillet 2022 par l'intimé.

4.        Renvoie la cause à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision, dans le sens des considérants.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties par le greffe le