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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1076/2022

ATAS/1126/2022 du 19.12.2022 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1076/2022 ATAS/1126/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 décembre 2022

1ère Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié c/o Mme B______, à Genève

 

 

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré) s’est inscrit en qualité de demandeur d’emploi auprès de l’office régional de placement (ci-après : l’ORP), le 25 mai 2021, avec ouverture d’un délai-cadre d’indemnisation au 1er août 2021.

b. L’ORP a transmis une assignation à l’assuré le 19 octobre 2021, pour un poste d’assistant administratif à un taux de 80% dès le 2 janvier 2021. L’intéressé devait postuler au plus tard le 21 octobre 2021.

c. Le même jour, l’ORP lui a transmis une seconde assignation, pour un poste de gestionnaire financier et administratif à un taux de 70% dès le 1er janvier 2022. L’intéressé devait également postuler au plus tard le 21 octobre 2022.

d. Le 29 octobre 2021, l’ORP lui a transmis une troisième assignation, pour un poste de collaborateur administratif – chargé de promotion, à un taux de 100% dès le 1er décembre 2021. L’intéressé devait postuler au plus tard le 2 novembre 2021.

e. Par courriel du 23 novembre 2021, la conseillère de l’assuré s’est déclarée navrée du mauvais état de santé de ce dernier et l’a encouragé dans ses démarches, tant pour mettre en place un suivi que pour poursuivre ses recherches d’emploi. Elle l’a invité à demander à s’ouvrir à son médecin de ses difficultés et à lui demander un certificat médical, rétroactif pour le mois d’octobre, puisque son mal-être ne datait pas de ce jour-là.

f. Par courriel du 24 novembre 2021, faisant suite à un second courriel envoyé la veille par sa conseillère en lien avec sa postulation, l’assuré a indiqué avoir postulé à la troisième assignation. Il s’est excusé de son état, qui s’empirait, et précisé qu’il cherchait à prendre rendez-vous avec un thérapeute pour un suivi dès que possible. Il avait rendez-vous chez son médecin la semaine suivante pour qu’il établisse un certificat médical dès la mi-octobre 2021.

g. Par courriel du 29 novembre 2021, la conseillère de l’assuré l’a invité à transmettre une copie de son certificat médical à sa caisse ainsi qu’à elle-même.

B. a. Par décision du service juridique de l’OCE du 26 octobre 2021, une suspension de 8 jours dans l’exercice du droit à l’indemnité de l’assuré a été prononcée, pour n’avoir effectué aucune recherche d’emploi en juin et juillet 2021, ses démarches pour le mois d’août 2021 étant en outre insuffisantes en quantité.

b. Cette décision a été annulée par décision sur opposition du 17 novembre 2021, à la suite de l’opposition formée par l’assuré le 29 octobre 2021, démontrant qu’il avait bien entrepris un nombre suffisant de démarches durant les mois concernés

C. a. Par courriel du 10 novembre 2021, l’OCE a informé l’assuré que son dossier lui avait été transmis pour refus d’un travail admissible s’agissant de la première assignation du 19 octobre 2021. Un délai lui était fixé pour faire valoir son droit d’être entendu.

L’assuré n’a pas formulé d’observations dans le délai qui lui a été imparti.

b.   Par décision du 29 novembre 2021, le service juridique de l’OCE a prononcé une suspension d’une durée de 31 jours dans l’exercice de son droit à l’indemnité dès le 20 octobre 2021 pour ne pas avoir postulé à la première assignation du 19 octobre 2021.

c. Par courrier 7 décembre 2021, l’assuré a formé opposition à la décision du 29 novembre 2021, il a expliqué s’être conformé avec enthousiasme et de bonne foi à ses obligations depuis le début du délai-cadre, mais que depuis le mois d’octobre 2021, il avait sombré dans la dépression, avec des idées noires, en lien avec sa vie professionnelle et sa vie privée. Il n’avait pu consulter son médecin que début décembre, faute de consultation possible plus tôt et allait débuter un suivi thérapeutique. Il avait été persuadé d’avoir posté son dossier pour l’assignation en question, mais avait dû oublier, en raison de son état de santé. Il avait tout de même effectué le nombre de recherches d’emploi requises durant la période.

D. a. Par courrier du 14 décembre 2021, l’OCE a informé l’assuré que son dossier lui avait été transmis pour refus d’un travail admissible s’agissant de la seconde assignation du 19 octobre 2021. Un délai lui était fixé pour faire valoir son droit d’être entendu.

L’assuré n’a pas formulé d’observations dans le délai qui lui a été imparti.

b. Par décision du 4 janvier 2022, le service juridique de l’OCE a prononcé une suspension d’une durée de 46 jours dans l’exercice de son droit à l’indemnité dès le 12 octobre 2021 pour ne pas avoir postulé à la seconde assignation du 19 octobre 2021.

c. Par courrier du 10 janvier 2022, l’assuré a formé opposition à cette décision. Il avait postulé à l’assignation en question, comme le démontrait le courriel de l’employeur qu’il joignait.

E. a. Par courriel du 1er décembre 2021, le service juridique de l’OCE a invité l’assuré à faire parvenir ses observations et justificatifs en lien avec son absence de postulation pour l’assignation du 29 octobre 2021.

b. Par courriel du 7 décembre 2021, l’assuré a expliqué avoir été en dépression depuis le mois d’octobre 2021 et avoir failli dans plusieurs de ses missions. Sa situation était grave mais il entendait se soumettre aux demandes qui lui seraient faites. Selon le certificat médical du 1er décembre 2021 dont il joignait copie, il était en incapacité de travail dès le 22 novembre 2021.

F. a. Par courrier du 1er février 2022, l’assuré a transmis à l’OCE une attestation médicale datée du 31 janvier 2022 cosignée par son psychiatre et son psychothérapeute, selon laquelle il était suivi depuis fin janvier 2022, sa demande datant toutefois de fin novembre 2021. Il ressortait de leur bilan un trouble dépressif qui paraissait être en place depuis plusieurs mois déjà, avec un repli autistique et une procrastination administrative préoccupante. C’était dans ce contexte médical qu’il avait manqué son rendez-vous à l’ORP et une révision de la décision éviterait de péjorer davantage son état de santé psychique.

G. a. Par décisions des 2 et 4 février 2022, l’OCE, statuant sur les oppositions formées les 13 décembre 2021 et 11 janvier 2022 par l’assuré contre ses décisions des 29 novembre 2021 et 4 janvier 2022, a annulé lesdites décisions, les trois manquements reprochés concernant les trois assignations résultant d’un comportement unique, de sorte qu’une seule et unique sanction devait être prononcée.

H. a. Par décision du 7 février 2022, l’OCE a rendu une décision de suspension du droit à l’indemnité de l’assuré pour une durée de 46 jours, à compter du 1er novembre 2021. Cette décision se fondait sur les trois défauts de postulation de l’assuré aux emplois qui lui avaient été assignés les 11, 19 et 29 octobre 2021.

Les explications qu’il avait données ne pouvaient pas être retenues pour justifier ces manquements dès lors qu’il n’avait pas été en incapacité de travail durant le mois d’octobre 2021.

b.   Par pli du 8 février 2022, l’assuré y a fait opposition, exposant que son état de santé au mois d’octobre 2021 – attestée par ses thérapeutes - ne lui avait pas permis de répondre à ses obligations comme il l’avait scrupuleusement fait avant et après cette période. Sa situation se compliquait en raison de la sanction prononcée car il était endetté à cause de sa maladie et de la suspension des indemnités.

c.    Par décision du 7 mars 2022, ladite opposition a été écartée et la décision du 7 février 2022 confirmée, l'OCE la considérant justifiée, conforme au barème des sanctions et respectueuse du principe de proportionnalité.

I. a. Par courrier posté le 5 avril 2022, l’assuré a recouru contre cette décision, concluant à son annulation, subsidiairement la diminution de la sanction.

Il avait toujours accompli ses devoirs depuis son inscription au chômage le 25 mai 2021, effectuant ses recherches d’emploi de manière sérieuse, acceptant toutes les formations, cours ou stages proposés par sa conseillère.

Il avait toutefois sombré dans une dépression depuis le mois d’octobre 2021, avec ce qu’il considérait être un repli autistique et une procrastination administrative préoccupante, ainsi que des idées suicidaires. Dès le début du mois de novembre 2021, il avait décidé de se faire suivre par un thérapeute, mais n’avait pu obtenir de rendez-vous que peu avant le dépôt de son recours, en lien avec la surcharge actuelle des cabinets de thérapie. Sa santé s’était depuis lors améliorée, jusqu’à la réception de la décision entreprise, qui l’avait fait sombrer à nouveau dans la dépression, car sans les jours d’indemnité dont il était sanctionné, il ne pourrait pas rembourser ses poursuites et aller de l’avant mentalement et financièrement.

b. Par réponse du 16 mai 2022, l’OCE a considéré qu’il n’y avait aucun élément nouveau permettant de revoir la décision précitée et a conclu au rejet du recours.

c. Le recourant n’a pas fait part d’observations dans le délai qui lui a ensuite été accordé.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension du droit du recourant à l'indemnité de chômage, durant 46 jours, en raison du fait qu’il n’avait pas donné suite aux assignations des 11, 19 et 29 octobre 2021.

3.             Il faut déterminer, en premier lieu, si l'on peut reprocher un manquement au recourant.

3.1.

3.1.1. En vertu de l'art. 17 LACI, l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit, avec l'assistance de l'office du travail compétent, entreprendre tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu'il a fournis (al. 1). Il est tenu d'accepter tout travail convenable qui lui est proposé (al. 3 1ère phr.).

3.1.2. La violation des obligations que l’art. 17 LACI impose à l’assuré expose ce dernier à une suspension de son droit à l’indemnité.

Aux termes de l’art. 30 al. 1 LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est notamment suspendu lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (let. c).

Est assimilé au cas de refus d’un travail convenable le fait de ne pas donner suite à une assignation à un travail réputé convenable (arrêt du Tribunal fédéral 8C_446/2020 précité consid. 3.1 ; ATAS/136/2021 du 22 février 2021 consid. 4b).

Tant qu’un assuré n’est pas certain d’obtenir un autre emploi, il a l’obligation d’accepter immédiatement l’emploi qui se présente (ATF 122 V 34 ; Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014 [ci-après : Commentaire] n. 64 ad art. 30 LACI). À teneur de l'art. 16 al. 1 LACI intitulé « travail convenable », en règle générale, l'assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage.

3.1.3. L’obligation d’accepter un emploi convenable assigné par l’office compétent constitue une obligation fondamentale pour qui demande l’indemnité de chômage (art. 17 al. 3 1ère phr. LACI). Son inobservation est considérée comme une faute grave à moins que l’assuré puisse se prévaloir de circonstances laissant apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère (art. 30 al. 1 let. d, 1ère partie de phr., LACI en lien avec l’art. 45 al. 3 OACI ; ATF 130 V 125 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_616/2010 du 28 mars 2011 consid. 3.2 et 8C_379/2009 précité consid. 3).

3.1.4. Selon la jurisprudence, la suspension du droit à l'indemnité est destinée à poser une limite à l'obligation de l'assurance-chômage d'allouer des prestations pour des dommages que l'assuré aurait pu éviter ou réduire. En tant que sanction administrative, elle a pour but de faire répondre l'assuré, d'une manière appropriée, au préjudice causé à l'assurance-chômage par son comportement fautif (ATF 133 V 89 consid. 6.2.2 ; ATF 125 V 197 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_316/2007 du 6 avril 2008 consid. 2.1.2), sans que soit requise la survenance d’un dommage effectif (arrêts du Tribunal fédéral C 30/06 du 8 janvier 2007 consid. 4.2 et C 152/01 du 21 février 2002 consid. 4). La suspension du droit à l'indemnité est soumise exclusivement aux dispositions de la LACI et de ses dispositions d'exécution (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in Ulrich MEYER [éd.], Soziale Sicherheit – Sécurité sociale, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, vol. XIV, 3ème éd., 2016, p. 2427 ss, n. 831).

Le motif de la suspension prévu par l’art. 30 LACI permet de sanctionner l’assuré non seulement en cas de faute grave, mais aussi en cas de négligence, même légère (ATAS/1057/2020 du 10 novembre 2020 consid. 3c ; ATAS/787/2020 du 9 septembre 2020 consid. 4 ; Boris RUBIN, Commentaire, n. 15 ad art. 30 LACI ; cf. aussi art. 45 al. 1 let. b OACI qui mentionne la négligence comme objet possible d’une décision de suspension).

3.2.       En l’espèce, l’intimé a suspendu le droit à l’indemnité de chômage du recourant au motif qu’en ne donnant pas suite aux assignations des 11, 19 et 21 octobre 2021, il avait fait échouer des possibilités d’emploi qui lui auraient permis de quitter l’assurance-chômage.

 

Aucun élément au dossier ne permet d’admettre que les postes faisant l’objet de l’assignation litigieuse n’étaient pas convenables au sens de l’art. 16 al. 2 LACI, ce que le recourant ne soutient d'ailleurs pas.

Le recourant explique avoir omis de postuler à ces emplois, en raison de son état de santé. Il n'a toutefois pas produit d'arrêt médical durant cette période, mais seulement à partir du 22 novembre 2021.

Il a ainsi adopté un comportement qui, de manière générale, est de nature à prolonger la durée de son chômage et a fait échouer plusieurs possibilités de conclure un contrat de travail, ce qui est assimilé à un refus d’accepter un emploi convenable. Dès lors, il a commis un manquement justifiant le prononcé d’une suspension de son droit à l’indemnité de chômage, selon l’art. 30 al. 1 LACI.

4.             Il reste à déterminer le degré de la faute et la quotité de la sanction qui en résulte.

4.1.

4.1.1. Selon l'art. 30 al. 3 LACI, la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute.

L’OACI, en son art. 45, distingue trois catégories de faute – à savoir les fautes légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est d’un à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (al. 3). Il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré, notamment, refuse un emploi réputé convenable (al. 4 let. b). Si l’assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l’indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence. L’antécédent à prendre en compte, au sens de l’art. 45 al. 5 OACI, doit avoir lui-même fait l’objet d’une sanction. Le fait que les sanctions prononcées portent sur des motifs différents n’est pas décisif. Pour pouvoir être pris en considération, l'antécédent ne doit pas remonter à plus de deux ans, et ce indépendamment du passage d'un délai-cadre à un autre (Boris RUBIN, Commentaire, n. 97 ad art. 30 LACI).

La jurisprudence considère que, lorsqu'un assuré peut se prévaloir d'un motif valable (art. 45 al. 4 let. b OACI), il n'y a pas forcément faute grave même si les conditions de cette disposition réglementaire sont réalisées. Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s'agir, dans le cas concret, d'un motif lié à la situation subjective de la personne concernée ou à des circonstances objectives (ATF 130 V 125 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.2).

4.1.2. Si l’assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l’indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence. Les suspensions subies pendant les deux dernières années sont prises en compte dans le calcul de la prolongation (al. 5). Que les antécédents aient été sanctionnés par la caisse, l'autorité cantonale ou l'ORP n'importe pas. Tous les antécédents doivent être pris en considération (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014 [ci-après : Commentaire], n. 98 ad art. 30 LACI).

En cas de succession de manquements pour des motifs différents, il convient d'appliquer au dernier manquement commis la fourchette donnée par l'échelle du SECO (comme s'il s'agissait du premier manquement) et d'ajouter quelques jours de suspension. Plus le premier manquement est grave et récent et plus le nombre de jours de suspension à ajouter pour la dernière faute commise doit être élevé (Boris RUBIN, Assurance-chômage et service public de l’emploi, 2019, n. 579).

4.1.3. Le Bulletin LACI IC (D63d) édité par le SECO (ci-après : bulletin LACI IC) rappelle que la durée de la prolongation doit tenir compte du comportement général de la personne assurée.

En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations (arrêts du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 5 et 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1). Elles pourront le cas échéant aller en dessous du minimum prévu par le barème indicatif (arrêt du Tribunal fédéral 8C 283/2021 du 25 août 2021).

Le Bulletin LACI IC (D79) édité par le SECO (ci-après : barème SECO), dans sa teneur valable en mars 2021, qualifie de grave la faute consistant en un refus d’un emploi convenable à durée déterminée de six mois assigné à l’assuré et fixe le nombre de jours de suspension de 34 à 41 jours.

4.1.4. La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation. Il y a abus de celui-ci lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.2 ; 8C_601/2012 consid. 4.2, non publié in ATF 139 V 164 et les références).

Contrairement au pouvoir d'examen du Tribunal fédéral, celui de l'autorité judiciaire de première instance n'est, concernant notamment la quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret, pas limité à la violation du droit (y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation), mais s'étend également à l'opportunité de la décision administrative (« Angemessenheitskontrolle »). En ce qui concerne l'opportunité de la décision en cause, l'examen du tribunal porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans un cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Le juge des assurances sociales ne peut, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l'administration. Il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_758/2017 précité consid. 4.3).

Dans un arrêt du 25 octobre 2021 (ATAS/1084/2021), la chambre de céans a également réduit une telle suspension de 34 à 19 jours, estimant que la faute de l'assuré était moyenne, dès lors qu’il était affecté dans sa santé psychique dans une mesure importante et que sa capacité à effectuer les démarches attendues était fortement diminuée.

4.1.5. En matière d'erreur ou d'inattention, le Tribunal fédéral retient que lorsqu'un assuré manque un entretien de conseil mais prouve néanmoins par son comportement en général qu'il prend ses obligations de chômeur et de bénéficiaire de prestations très au sérieux, il n'y a pas lieu de le suspendre dans son droit à l'indemnité (arrêts 8C_761/2016 du 6 juillet 2017 consid. 2.1; 8C_697/2012 du 18 février 2013 consid. 2; 8C_447/2008 du 16 octobre 2008 consid. 5.1, in DTA 2009 p. 271). Dans un arrêt récent traitant d'une absence de postulation à un emploi assigné, le Tribunal fédéral a retenu que si cette jurisprudence s'appliquait uniquement aux entretiens de conseil manqués, il en ressortait toutefois qu'une inadvertance ponctuelle ne saurait être traitée aussi sévèrement qu'un comportement désinvolte (arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 5.3.). Aussi, lorsque l'assuré oublie ou omet par erreur de donner suite à une assignation (au sens de l'art. 45 al. 4 let. b OACI) mais qu'un tel comportement négligent n'est pas caractéristique de l'intéressé et est contrebalancé par un effort particulier et des démarches concrètes démontrant qu'il a cherché activement à participer à la diminution du dommage, le juge des assurances est-il fondé à en tenir compte pour apprécier la gravité de la faute. Cela se justifie en particulier au regard de la large palette de comportements visés par l'art. 45 al. 4 let. b OACI, lequel concerne aussi bien le refus exprès d'un emploi convenable que le simple fait de laisser échapper une possibilité de retrouver un tel emploi (arrêts du Tribunal fédéral 8C_712/2020 précité et 8C_24/2021 du 10 juin 2021 consid. 3.1).

4.2. En l’espèce, le recourant a produit, outre un certificat médical de son médecin traitant, une attestation médicale de son psychiatre et de son psychologue certifiant qu’il souffrait d’un trouble dépressif qui paraissait être en place depuis plusieurs mois, avec repli autistique et procrastination administrative.

Postérieure aux faits, cette attestation ne permet certes pas d’établir, avec certitude, une incapacité de travail du recourant en octobre 2021.

Néanmoins, considérée conjointement au certificat médical du 2 décembre 2021 et à l’échange de courriels entre le recourant et sa conseillère durant le mois d’octobre 2021, elle démontre que l’intéressé était largement affecté dans son état de santé psychique et que sa capacité à effectuer les démarches attendues de l’intimé pouvait être fortement diminuée.

A cet égard, il sera rappelé que si la force probante d'un certificat médical – terme par lequel il faut entendre toute constatation écrite relevant de la science médicale et se rapportant à l’état de santé d’une personne, singulièrement à sa capacité de travail (arrêt du Tribunal fédéral 4C.156/2005 consid. 3.5.2) –, n’est pas absolue, la mise en doute de sa véracité suppose, néanmoins, des raisons sérieuses (arrêts du Tribunal fédéral 8C_841/2009 du 22 décembre 2009, consid. 5.1, C 220/03 du 29 juin 2004 consid. 3.3 et C 322/01 du 12 avril 2002).

Dans ces circonstances, les manquements du recourant ne paraissent pas dus, au degré de la vraisemblance prépondérante, à un comportement désinvolte de sa part, mais liés à son état de santé psychique. Il sera d’ailleurs relevé qu’il a, nonobstant les manquements qui lui sont reprochés, effectué régulièrement des recherches d’emploi, y compris durant le mois d’octobre 2021, et suivi des formations, ce que l’intimé ne conteste pas. Ces constats démontrent que le recourant a pris au sérieux ses obligations de chômeur et s’est employé, dans la mesure de ses capacités, à effectuer les démarches utiles en vue de sortir du chômage.

Ces circonstances particulières permettent d’admettre la présence d’un motif valable, lié à la situation subjective du recourant, propre à diminuer la sévérité de la faute commise et justifient de s’écarter de la présomption qu’un défaut de suite donnée à une assignation procède d’une faute grave, pour la qualifier de moyenne et justifier le prononcé d’une suspension de 20 jours du droit à l’indemnité de chômage.

Les trois manquements résultant de la même difficulté d’ordre psychique, sur une période de quelques jours, il ne se justifie pas de prolonger la sanction, étant rappelé qu’il s’agit de sa première sanction.

5.             Le recours est partiellement admis et la décision réformée dans ce sens.

Au surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA, en lien avec l'art. 1 al. 1 LACI).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Admet partiellement le recours et réforme la décision du 7 mars 2022 dans ce sens que la suspension du droit à l’indemnité du recourant est réduit de 46 à 20 jours.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Maryline GATTUSO

 

La présidente

 

 

 

 

Fabienne MICHON RIEBEN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le