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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2592/2020

ATAS/1163/2021 du 16.11.2021 ( PC ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2592/2020 ATAS/1163/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt sur partie du 16 novembre 2021

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Depuis 2013, Madame A______ (ci-après : l’assurée, l’intéressée ou la recourante), née en 1963, a bénéficié de prestations complémentaires familiales, versées par le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC, le service ou l’intimé).

2.        Par décision du 20 décembre 2019 envoyée en courrier B, le SPC a, sur la base de plans de calcul, refusé tout montant de prestations complémentaires familiales et de subsides d’assurance-maladie du 1er novembre au 31 décembre 2019 ainsi que dès le 1er janvier 2020.

3.        Par décision du même jour (aussi par courrier B), il en a fait de même concernant l’aide sociale et les subsides d’assurance-maladie.

4.        Par écrit posté en recommandé le 25 janvier 2020, et réadressé par pli recommandé du 31 janvier 2020, l’intéressée a formé opposition contre la décision de refus de prestations complémentaires familiales du 20 décembre 2019, concluant à son annulation, implicitement à l’octroi de telles prestations, après enlèvement, du revenu déterminant, du gain hypothétique imputé par le service à son mari depuis le 27 juin 2018, Monsieur B______ (né en 1959).

5.        Par courrier B du 31 janvier 2020, le SPC s’est référé à ladite opposition et a fait savoir à l’assurée qu’il procédait actuellement à un nouvel examen de son dossier et qu’elle recevrait ultérieurement des nouvelles.

6.        Par décision sur opposition rendue le 17 juin 2020 et envoyée en recommandé le même jour à l’intéressée, le SPC a rejeté ladite opposition et a maintenu sa position de refus de prestations complémentaires familiales, du fait que le revenu déterminant demeurait supérieur aux dépenses reconnues.

Selon le suivi des envois de La Poste, l’assurée a été avisée le 18 juin 2020, pour retrait, de cet envoi, lequel, « non réclamé », a été retourné le 26 juin 2020 à l’expéditeur.

7.        Par acte expédié en recommandé le 28 août 2020 au greffe de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), l’assurée a formé recours contre ladite décision sur opposition.

Selon ses explications, elle l’avait reçue la veille, 27 août 2020, en mains propres. Pour des raisons liées certainement à une notification irrégulière, elle n’avait pas pu en prendre connaissance plus tôt, pour préparer son recours selon les exigences requises.

En parallèle, le 28 août 2020 également, elle adressait une demande de restitution de délai au SPC.

8.        Par pli du 2 septembre 2020, l’intimé a transmis à la chambre des assurances sociales, « pour objet de compétence », l’original de cette demande – motivée – de restitution de délai.

9.        Le 7 septembre 2020, il a fait savoir à la chambre de céans qu’il avait envoyé par pli recommandé – avec avis de retrait déposé le 18 juin 2020 – la décision sur opposition querellée, que celle-ci lui avait été retournée – le 26 juin 2020 – par la poste, à l’issue du délai de garde, avec la mention « non réclamé », et qu’à la demande de la recourante, il avait récemment remis en mains propres à cette dernière une copie de ladite décision sur opposition.

10.    Par lettre du 17 septembre 2020, la chambre des assurances sociales a indiqué à l’assurée que son recours semblait être tardif et l’a invitée à la renseigner dans un délai au 5 octobre 2020, le cas échéant pièces à l’appui, sur la date de réception de la décision et/ou sur d’éventuelles circonstances qui l’auraient empêchée d’agir dans le délai légal de trente jours, un éventuel empêchement sans sa faute pouvant justifier la restitution pour inobservation dudit délai.

11.    Le 1er octobre 2020, la recourante a formulé des observations.

Selon elle, une fois son opposition formée le 25 janvier 2020, elle-même et son époux avaient établi des contacts réguliers avec le service afin de s’enquérir de la progression de l’examen de son opposition ainsi que de l’éventuelle décision qui y ferait suite. Ainsi, les 2 et 12 mars 2020, son mari avait appelé le SPC, dont le répondant lui avait indiqué qu’en raison de la situation sanitaire, il serait préférable d’appeler après le semi-confinement. Le 26 mai 2020, l’intimé avait répondu à leur appel que le traitement de leur opposition pourrait prendre plus de temps (qu’initialement prévu). Le 18 août 2020, le SPC avait répondu, à la grande surprise de l’intéressée, que la décision sur opposition avait été rendue le 17 juin 2020 et que, faute pour elle d’avoir réclamé l’envoi recommandé, La Poste le lui avait retourné le 30 juin 2020. Elle avait alors expliqué au service qu’elle avait toujours, et tous les jours, relevé ses courriers de sa boîte aux lettres et qu’elle avait toujours retiré à l’office de poste les envois pour lesquels elle avait reçu un avis de retrait pendant la période concernée, sans jamais trouver dans sa boîte aux lettres un avis de retrait pour l’enveloppe contenant la décision sur opposition litigieuse. À la fin de cet échange téléphonique, le service lui avait promis de lui faire parvenir par courrier B la lettre contenant ladite décision sur opposition, pour une réception dans un délai de trois à quatre jours. Après une attente durant une semaine de ce courrier, son époux avait appelé l’intimé le 27 août 2020, et il lui avait été répondu que ladite décision sur opposition n’avait toujours pas été envoyée. Son mari, qui avait insisté pour se voir remettre en mains propres celle-ci, s’était rendu dans les locaux du SPC, où il l’avait reçue.

Après la prise de connaissance de cette décision sur opposition, l’époux de la recourante avait téléphoné au service, dont le répondant lui avait dit que, si recours il y avait, il devait être formé le plus rapidement possible et au plus tard le lendemain. C’était pourquoi elle avait adressé le recours le 28 août 2020 à la chambre des assurances sociales, et son mari avait porté le même jour une demande de restitution auprès du SPC, requérant, une fois sur place, un tampon portant la date de retrait de la copie de la décision sur opposition la veille, ce que le collaborateur du service avait refusé.

Le 22 septembre 2020, le responsable de l’office de poste avait dit à l’assurée et à son mari qu’il ne pouvait pas expliquer ce qui avait pu se passer concernant le fait que l’avis de retrait ne leur était jamais parvenu, n’étant pas le postier qui avait procédé à la distribution du courrier. Selon lui, il n’y avait en tout état de cause pas de garantie absolue que la distribution des courriers se fasse toujours de manière régulière, des erreurs humaines pouvant toujours intervenir.

La recourante avait, durant l’été 2020, reçu un courrier – daté du 30 juin 2020 – d’un autre service de l’État de Genève – le service de l’assurance-maladie
(ci-après : SAM) –, ainsi que, à la même période que le dépôt indiqué de l’avis de retrait en cause, une lettre recommandée de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM). Elle avait été présente chez elle, avec sa famille, pendant tout l’été. Elle avait pris toutes les dispositions pour recevoir ses courriers à cette époque, et elle avait toujours agi, avec l’appui de son époux, de manière raisonnable et diligente suivant les circonstances. Il serait de surcroît difficilement imaginable, alors qu’elle avait appelé plusieurs fois le SPC pour se renseigner sur le suivi de son opposition et qu’un avis de retrait aurait ensuite été déposé dans sa boîte aux lettres, qu’elle n’ait pas donné suite à cet avis. Il fallait donc considérer qu’il y avait eu une erreur dans la distribution de l’avis de retrait en cause et que la notification de la décision sur opposition attaquée n’avait pas été effectuée de manière régulière.

L’intéressée demandait que son recours ne soit pas déclaré tardif, ou que le délai de recours lui soit restitué.

Étaient produits des suivis d’appel depuis le numéro de téléphone portable d’une femme nommée C______, montrant deux appels au SPC le 12 mars 2020 (d’une durée de 1 minute et 36 secondes, respectivement 6 minutes et 47 secondes), un appel le 26 mai 2020 (d’une durée de 3 minutes et 31 secondes), deux appels le 18 août 2020 (d’une durée de 17 secondes, respectivement 4 minutes et 16 secondes), cinq appels le 27 août 2020 (d’une durée entre 3 et 10 minutes sauf un de 31 secondes seulement) et un appel le 28 août 2020 (d’une durée de 4 minutes et 30 secondes), ainsi que des courriers de l’autre service de l’État de Genève susmentionné, datés des 9 et 30 juin 2020.

12.    Le 9 octobre 2020, la recourante a été mise au bénéfice de l’assistance juridique avec effet au 31 août 2020.

13.    Dans sa réponse du 21 octobre 2020, l’intimé a conclu à l’irrecevabilité du recours, pour tardiveté.

Selon lui, la recourante n’évoquait aucune circonstance qui permettrait, au degré de la vraisemblance prépondérante requis par la jurisprudence, de renverser la présomption qu’un avis de retrait avait été déposé dans sa boîte aux lettres le 18 juin 2020, comme cela ressortait du suivi postal de l’envoi. La décision sur opposition litigieuse avait valablement été notifiée à l’échéance du délai de garde de sept jours, et le délai de recours était arrivé à échéance le 26 août 2020.

14.    Dans sa réplique du 9 novembre 2020, la recourante a persisté dans les termes de ses observations du 1er octobre 2020.

Renseignements pris auprès de l’office de poste du quartier, il n’y avait aucune garantie que le facteur ne se trompât pas dans la distribution des courriers ou avis de retrait.

Lors de son échange téléphonique du 18 août 2020 avec le SPC, l’intéressée avait clairement indiqué à la personne répondante qu’elle était en attente de la décision sur opposition et qu’il était urgent pour elle d’en prendre possession. Ladite personne l’avait rassurée en lui disant qu’elle allait recevoir cette décision par courrier B comme cela se faisait dans la pratique du service, la remise en mains propres n’étant pas une pratique de celui-ci. Cependant, cet envoi n’avait pas été effectué, contrairement à ce qui avait été promis. Si la recourante avait su qu’il n’était pas de la pratique de l’intimé de renvoyer les décisions par courrier B, elle se serait rendue dans ses locaux le 18 août 2020 afin de récupérer la décision sur opposition. Le principe de la bonne foi entre administration et administrés était invoqué.

15.    Une audience s’est tenue le 7 septembre 2021 devant la chambre des assurances sociales.

a. La recourante a confirmé la teneur de ses écritures adressées à la chambre de céans.

Elle recevait quelques fois des courriers qui n’étaient adressés ni à elle-même ni à son mari, et elle se rendait à l'office de poste qui n'était pas loin de chez eux. Il y avait environ dix boîtes aux lettres dans leur immeuble. Elle ne savait pas s'il y avait des problèmes de distribution des courriers au niveau de l'office de poste. Elle n’avait jamais parlé de cette problématique avec ses voisins.

b. Le juriste représentant le SPC a précisé que la décision sur opposition querellée avait été envoyée uniquement en courrier recommandé.

Les appels au service n’étaient ni enregistrés, ni ne faisaient l'objet de mains courantes ou de retranscriptions écrites.

c. Entendu à titre de renseignement, M. C______ a déclaré avoir lu les écritures de son épouse adressées à la chambre des assurances sociales concernant le présent litige et en a confirmé le contenu. Durant l’été 2020, c'était lui-même qui avait « effectué les correspondances (diligences) » avec le SPC.

S'agissant du suivi des appels téléphoniques produit en annexe de l'écriture de son épouse du 1er octobre 2020, c’était lui-même qui avait effectué ces appels. L'abonnement était au nom de sa fille C______ qui était née en 2002 et vivait en Afrique, et c'était le numéro de téléphone portable qu’il utilisait.

Il n’avait jamais reçu d'avis de retrait pour la décision sur opposition litigieuse. Le couple habitait au rez-de-chaussée et son épouse et lui-même regardaient attentivement le courrier qu’ils recevaient dans leur boîte aux lettres, ce d'autant plus qu'à cette époque (et déjà avant juin 2020), ils attendaient ladite décision sur opposition ainsi que des courriers du SAM et d'autres de l'OCPM. En juin 2020, les époux étaient à Genève tous les jours, et M. C______ était toujours à la maison lorsque le postier portait le courrier, et parfois il le voyait arriver, depuis la fenêtre de la cuisine qui donnait sur le chemin. Parfois, étant donné qu’il attendait le courrier du SPC, il venait à la boîte aux lettres lorsque le facteur distribuait le courrier et les autres fois il y allait juste après son départ. Il n'y avait donc pas de raisons qu’il n'ait pas vu l'avis de retrait au cas où il avait été déposé dans la boîte aux lettres.

D’une manière plus générale, il n’avait jamais eu de problèmes avec la réception de courriers recommandés à l’exception de celui présentement litigieux, étant précisé qu’il ne recevait pas beaucoup de courriers recommandés.

M. C______ avait téléphoné le 12 mars 2020 au SPC et on lui avait répondu qu'il fallait attendre la fin du semi-confinement. Il avait rappelé le 26 mai 2020, et la collaboratrice lui avait répondu que le traitement du dossier prendrait beaucoup plus de temps à cause de la pandémie. D'une manière générale, il ne connaissait pas les noms des collaboratrices et collaborateurs du SPC avec lesquels il avait parlé. Le 18 août 2020, il avait parlé avec une collaboratrice qui lui avait répondu que l’opposition avait déjà été traitée et qu'une décision sur opposition avait été envoyée à l’assurée, mais que les époux destinataires ne s’étaient pas déplacés pour la chercher, de sorte que La Poste l'avait retournée au SPC. Le mari de l’intéressée avait alors dit qu’ils n’avaient jamais eu cet avis de retrait, et il avait demandé s’il pouvait venir chercher cette décision sur opposition au guichet, mais la collaboratrice avait refusé et avait dit qu'elle la leur renvoyait par courrier B et qu’ils la recevraient dans les quatre à cinq jours. Le premier appel le 18 août 2020 de 17 secondes avait été coupé et ce qui avait été échangé oralement avait eu lieu lors du deuxième appel téléphonique. L’époux de l’assurée avait ensuite attendu, mais sans nouvelles du SPC, il avait rappelé celui-ci le 27 août 2020. La collaboratrice qui lui avait répondu n’était pas la même que celle du 18 août 2020. Elle lui avait dit que le courrier B n'avait pas été envoyé et qu'il était encore sur place (au SPC). M. C______ avait insisté pour venir chercher ce courrier car les époux ne pouvaient plus attendre, et elle avait accepté. Après avoir reçu au guichet la décision sur opposition en cause, il était sorti afin d’en prendre connaissance.

d. Après l’audition de M. C______, le représentant de l’intimé a indiqué que ce qui avait été dit par la recourant et son mari était une hypothèse crédible comme une autre, mais insuffisante, pour des motifs de sécurité du droit et d'égalité de traitement, pour remettre en cause la date de notification sept jours après le dépôt de l'avis de retrait dans la boîte aux lettres. L'avis de retrait aurait pu être égaré par l’intéressée et son époux, par exemple au milieu de journaux. Il était de notoriété publique que la majorité des facteurs ne sonnaient plus aux portes pour remettre les recommandés, et ils n'en étaient d'ailleurs pas obligés. Cela dit, ils étaient plus zélés pour remettre des recommandés que des courriers B, et il y avait le scannage des courriers. Il y avait aussi des clients qui avaient un compte en ligne à La Poste et étaient avisés à l'avance des envois recommandés. Il était arrivé une fois, dans un autre dossier, qu'un recommandé soit adressé à un homonyme qui vivait dans le même immeuble que son cousin destinataire du courrier recommandé.

Concernant les téléphones et venues au guichets de l'époux de la recourante, le contenu de ces appels et des discussions avec les collaborateurs ne pouvait pas être démontré et l’intimé ne pouvait donc pas en tenir compte. En outre, l'appel du 18 août 2020 avait été effectué plus de deux mois après le précédent et le contenu de cette conversation téléphonique n'était pas démontré.

e. L’assurée a précisé qu’elle regardait les pages des journaux que les époux recevaient et elle aurait donc vu un éventuel avis de retrait à l'intérieur. En juin 2020, à cause de la pandémie et pour des raisons financières, elle-même ou son mari prenait chaque jour le courrier et le posait sur une table de l'appartement, et chaque soir elle regardait attentivement ce courrier.

16.    Par écriture déposée le 24 septembre 2021, la recourante a persisté dans ses conclusions et explications.

17.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 3 let. a de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25) concernant les prestations complémentaires familiales au sens de l’art. 36A LPCC en vigueur dès le 1er novembre 2012.

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Selon l’art. 1A al. 2 LPCC, les prestations complémentaires familiales sont régies par les dispositions figurant aux titres IIA et III de la LPCC, les dispositions de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (loi sur les prestations complémentaires, LPC - RS 831.30) auxquelles la LPCC renvoie expressément, les dispositions d'exécution de la loi fédérale désignées par règlement du Conseil d'État ainsi que la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830).

3.        Pour ce qui est de l’objet du litige et des conclusions de la recourante, il ressort du recours et des autres écritures que celle-ci maintient, également contre la décision sur opposition rendue le 17 juin 2020, la position qu’elle a prise par les conclusions de son opposition de janvier 2020 formulées contre la décision initiale de l’intimé du 20 décembre 2020 qui lui refusait toutes prestations complémentaires familiales et tout subside d’assurance-maladie du 1er novembre au 31 décembre 2019 ainsi que dès le 1er janvier 2020, à savoir qu’elle s’oppose à ce refus et conclut à l’octroi de telles prestations.

Cela étant, doit au préalable être tranchée la question – litigieuse – de savoir si le recours interjeté contre la décision sur opposition querellée est ou non recevable sous l’angle en particulier du respect du délai de recours, voire, en cas de réponse négative, si ledit délai peut ou non être restitué.

4.        a. Selon l’art. 43 LPCC, les décisions sur opposition, et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n’est pas ouverte, peuvent faire l’objet d’un recours auprès de la chambre des assurances sociales, dans un délai de trente jours à partir de leur notification.

La LPC ne contient aucune disposition concernant le recours et le délai pour l’interjeter.

En revanche, le contenu de l’art. 43 LPCC correspond en substance à celui de l'art. 56 al. 1 LPGA, aux termes duquel les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours, de même qu’à celui de l'art. 60 al. 1 LPGA, à teneur duquel le recours doit être déposé dans les trente jours suivant la notification de la décision sujette à recours.

b. L'art. 38 al. 1 LPGA, applicable par analogie en vertu de l'art. 60 al. 2 LPGA, dispose que si le délai, compté par jours ou par mois, doit être communiqué aux parties, il commence à courir le lendemain de la communication.

Conformément à l’art. 38 al. 2bis LPGA – et aussi à l’art. 62 al. 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10 ; par renvoi de l’art. 89A LPA) –, la décision qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution.

Aux termes de l’art. 38 al. 4 let. b LPGA – comme de l’art. 63 al. 1 let. b LPA –, les délais en jours ou en mois fixés par la loi ou par l’autorité ne courent pas, notamment, du 15 juillet au 15 août inclusivement.

En vertu de l'art. 39 al. 1 LPGA, également applicable par analogie (art. 62 al. 2 LPGA), les écrits doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai à l'assureur ou, à son adresse, à La Poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (al. 1). Lorsqu’une partie s’adresse en temps utile à un assureur incompétent, le délai est réputé observé (al. 2).

c. À teneur de l’art. 61 let. b LPGA, l’acte de recours doit contenir un exposé succinct des faits et des motifs invoqués, ainsi que les conclusions ; si l’acte n’est pas conforme à ces règles, le tribunal impartit un délai convenable au recourant pour combler les lacunes, en l’avertissant qu’en cas d’inobservation le recours sera écarté.

Conformément à l’art. 89B LPA, la demande ou le recours est adressé en deux exemplaires à la chambre des assurances sociales soit par une lettre, soit par un mémoire signé, comportant : les nom, prénoms, domicile ou résidence des parties ou, s'il s'agit d'une personne morale, toute autre désignation précise (let. a) ; un exposé succinct des faits ou des motifs invoqués (let. b) ; des conclusions
(let. c al. 1). Le cas échéant, la décision attaquée et les pièces invoquées sont jointes (al. 2). Si la lettre ou le mémoire n'est pas conforme à ces règles, la chambre des assurances sociales impartit un délai convenable à son auteur pour le compléter en indiquant qu'en cas d'inobservation la demande ou le recours est écarté (al. 3).

d. La notification d’un acte soumis à réception, comme un jugement, une décision ou une communication de procédure, est réputée faite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, n. 2.2.8.3 p. 353 s). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 137 III 308 consid. 3.1.2 ; ATF 118 II 42 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, la preuve de la notification d’un acte et de la date de celle-ci incombe en principe à l’autorité qui entend en tirer une conséquence juridique. L’autorité qui veut contrer le risque d’un échec de la preuve de la notification peut communiquer ses décisions par pli recommandé. En tel cas, lorsque le destinataire de l’envoi n’est pas atteint et qu’un avis de retrait est déposé dans sa boîte aux lettres ou dans sa case postale, l’envoi est considéré comme notifié au moment où il est retiré. Si le retrait n’a pas eu lieu dans le délai de garde, il est réputé notifié le dernier jour de celui-ci, pour autant que le destinataire devait s’attendre à recevoir ledit pli (ATF 134 V 49 consid 4 ; ATF 130 III 396 consid. 1.2.3), ce qui est le cas de celui qui se sait partie à une procédure administrative ou judiciaire et qui doit dès lors s'attendre, selon une certaine vraisemblance, à recevoir des actes de l'autorité (ATF 141 II 429 consid. 3.1 ; ATF 139 IV 228 consid. 1.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_174/2016 du 24 août 2016 consid. 2.1).

e. La jurisprudence du Tribunal fédéral établit la présomption de fait réfragable que l'employé postal a correctement inséré l'avis de retrait dans la boîte aux lettres du destinataire et que la date de ce dépôt, telle qu'elle figure sur la liste des notifications, est exacte. Cette présomption entraîne un renversement du fardeau de la preuve au détriment du destinataire : si ce dernier ne parvient pas à établir l'absence de dépôt dans sa boîte ou sa case postale au jour attesté par le facteur, la remise est censée être intervenue en ces lieu et date. Le délai de garde de sept jours commence alors à courir et, à son terme, la notification est réputée avoir lieu avec les conséquences procédurales que cela implique. Le destinataire ne doit cependant pas apporter la preuve stricte de l'absence de remise, s'agissant d'un fait négatif ; il suffit d'établir qu'il existe une vraisemblance prépondérante que des erreurs se soient produites lors de la notification (ATF 142 IV 201 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_552/2018 du 24 octobre 2018 consid. 3.2).

Le Tribunal fédéral a – notamment – considéré que la présomption du dépôt régulier de l'avis de retrait était renversée dans un cas où des erreurs de distribution des avis de retrait dans les cases postales avaient eu lieu à plusieurs reprises au sein de l'office de poste en question (arrêts du Tribunal fédéral 1C_552/2018 précité consid. 3.2 et 5A 28/2015 du 22 mai 2015 consid. 3.1.2 et les références citées).

Le seul fait qu'avant le dépôt de l’avis de retrait en cause, l’administré aurait toujours retiré dans le délai les décisions qui lui étaient adressées ne saurait suffire à renverser la présomption de fait découlant des documents et supports de données postaux (arrêt du Tribunal fédéral 2A.339/2006 du 31 juillet 2006 consid. 4.2).

5.        À teneur de l’art. 41 LPGA, applicable par analogie (art. 62 al. 2 LPGA), si le requérant ou son mandataire a été empêché, sans sa faute, d’agir dans le délai fixé, celui-ci est restitué pour autant que, dans les trente jours à compter de celui où l’empêchement a cessé, le requérant ou son mandataire ait déposé une demande motivée de restitution et ait accompli l’acte omis.

D’après la jurisprudence, une restitution de délai ne peut être accordée qu’en l’absence claire de faute du requérant ou de son mandataire, ce qui n’est pas le cas même d’une légère négligence ou d’une erreur en raison d’une inattention (arrêt du Tribunal fédéral 9C_862/2018 du 10 janvier 2019 consid. 1.2 ; 9C_821/2016 du 2 février 2017 consid. 2.2). Par « empêchement non fautif », il faut entendre non seulement l'impossibilité objective, comme le cas de force majeure – par exemple un événement naturel imprévisible (Anne-Sylvie DUPONT, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 7 ad art. 41 LPGA) –, mais également l'impossibilité due à des circonstances personnelles ou à une erreur excusables (arrêts du Tribunal fédéral 8C_743/2019 du 20 décembre 2019 consid. 4.3 ; I 854/06 du 5 décembre 2006 consid. 2.1), à savoir lorsque, pour des motifs indépendants de leur volonté, il leur est impossible d’effectuer l’acte requis dans le délai initial ou d’instruire un tiers en ce sens (Anne-Sylvie DUPONT, op. cit., n. 7 ad art. 41 LPGA). Ces circonstances doivent toutefois être appréciées objectivement : est non fautive toute circonstance qui aurait empêché un plaideur - respectivement un mandataire - consciencieux d'agir dans le délai fixé (arrêt du Tribunal fédéral I 854/06 du 5 décembre 2006 consid. 2.1).

6.        Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
(Cst. - RS 101), exige que l'une et l'autre se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 129 I 161 consid. 4 ; ATF 129 II 361 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1013/2015 du 28 avril 2016 consid. 3.1 ; ATA/1847/2019 du 20 décembre 2019 consid. 2d ; ATA/1084/2019 du 25 juin 2019 consid. 2c ; ATA/393/2018 du 24 avril 2018 consid. 6b).

En outre, découlant directement de l'art. 9 Cst. et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_4/2017 du 26 avril 2018 consid. 5.5).

7.        a. En l’espèce, conformément à l’art. 38 al. 2bis LPGA, la première tentative infructueuse de distribution de la décision sur opposition attaquée a eu lieu, d’après le suivi des envois de La Poste suisse, par le dépôt de l’avis de retrait dans la boîte aux lettres de l’assurée le 18 juin 2020, et le dernier jour du délai de garde de sept jours a été le 25 juin 2020. Le délai légal de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA) aurait ainsi commencé à courir le lendemain 26 juin 2020 en application de l’art. 38 al. 1 LPGA, n’aurait pas couru durant les féries du 15 juillet au 15 août 2020 inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA), et le dernier jour du délai aurait été le 26 août 2020.

Le recours de l’intéressée, remis le 28 août 2020 à La Poste suisse (art. 39 al. 1 LPGA), serait donc tardif, à moins que la notification de ladite décision sur opposition doive être considérée comme ayant été effectuée à une date ultérieure ou que l’existence d’un empêchement non fautif justifie la restitution de délai au sens de l’art. 41 LPGA sollicitée par la recourante le 28 août 2020 également.

b. Cela étant, concernant la notification de la décision sur opposition contestée et les contacts téléphoniques et au guichet avec l’intimé durant l’été 2020 en rapport avec la question du respect du délai de recours, la recourante et son mari, tant en audience que dans leurs écritures, ont présenté des allégations de faits et des explications concordantes, constantes, précises et crédibles, qu’aucun élément ne remet en cause mais qui sont au contraire confirmées en partie par le suivi des appels téléphoniques produit le 1er octobre 2020.

Il convient en particulier de retenir que, tous les jours du mois de juin 2020, les époux étaient présents à leur domicile et ont relevé consciencieusement le courrier reçu, dans l’attente notamment de la décision sur opposition litigieuse, mais n’ont pas trouvé l’avis de retrait pour aller la chercher à l’office postal. Cela se déduit notamment de la diligence qu’ils ont mise en œuvre, depuis le 12 mars 2020, pour recevoir cette la décision sur opposition, par leurs appels téléphoniques au SPC, puis par leurs recours et demande de restitution de délai formés le lendemain de la réception effective au guichet de ladite décision sur opposition. La question de savoir si ces efforts et les quelques problèmes allégués en lien avec la réception de l’ensemble des courriers dans les boîtes aux lettres de leur immeuble suffiraient ou non à démontrer, au degré de preuve requis, que l’avis de retrait n’aurait pas été déposé dans leur boîte aux lettres le 18 juin 2020 peut demeurer indécise, au regard de ce qui suit.

L’intimé, par son représentant à l’audience, s’est contenté de mettre en doute de manière vague, sans apporter aucun indice précis et probant, les allégations de l’assurée et de son époux relativement aux appels téléphoniques et venues au guichet de celui-ci pendant le mois d’août 2020. Ces allégations doivent, comme exposé plus haut, être retenues. Ainsi, le 18 août 2020, une collaboratrice du service a dit audit conjoint que la décision sur opposition rendue le 17 juin 2020 serait en envoyée au couple par courrier B, avec réception prévue dans les quatre à cinq jours, mais, à la date de l’appel téléphonique du 27 août 2020, ce courrier n’avait toujours pas été expédié, et l’époux a reçu ladite décision sur opposition en mains propres ce même 27 août 2020 au guichet. Or, même dans l’hypothèse – laissée indécise – où l’avis de retrait avait bien été remis dans la boîte aux lettres le 18 juin 2020, si le SPC avait respecté son engagement d’envoyer par courrier B la décision sur opposition en cause après l’appel téléphonique du 18 août 2020, le délai légal de recours, qui arrivait à échéance le 26 août 2020, aurait pu être respecté par la recourante, laquelle a du reste formé son recours et sa demande de restitution de délai seulement le lendemain. Par ce comportement, l’intimé a, objectivement, empêché la remise effective de la décision sur opposition querellée à l’intéressée et la possibilité pour cette dernière de former recours dans le délai légal de trente jours, alors que celle-ci et son mari ont fait preuve de diligence et fait tout ce qu’ils pouvaient raisonnablement accomplir pour recevoir dès que possible ladite décision sur opposition, en appelant le service les 12 mars 2020, puis le 26 mai 2020 en obtenant la réponse que le traitement de leur dossier prendrait plus de temps que normalement, en rappelant le 18 août 2020 puis le 27 août 2020 et en cherchant la décision sur opposition au guichet ce jour-ci.

c. Vu ces circonstances particulières et l’empêchement non fautif au sens de l’art. 41 LPGA qui en découle, le principe de la bonne foi qui s’oppose à ce que la recourante subisse des conséquences dommageables en raison du comportement susdécrit de l’intimé, ainsi que le fait que l’intéressée a déposé une demande motivée de restitution et a accompli l’acte – de recours – omis un jour seulement après celui où l’empêchement a cessé, il y a lieu d’admettre la demande de restitution de délai, ce qui place en tout état de cause l’intéressée dans une position identique à celle dans laquelle son recours aurait été formé dans le délai légal de recours.

8.        En conséquence, le délai de recours contre la décision sur opposition litigieuse sera restitué, et, les autres conditions de recevabilité et en particulier de forme (art. 61 let. b LPGA et 89B LPA) étant remplies, le recours sera déclaré recevable par le présent arrêt sur partie.

Un délai sera par ailleurs imparti à la recourante pour compléter son recours par une clarification de ses conclusions de recours au fond (en particulier si elle demande des prestations complémentaires familiales seulement ou aussi le subside d’assurance-maladie, et pour quelles périodes précisément) ainsi que par des allégations et arguments portant également sur le fond du litige (pourquoi elle n’est pas d’accord avec la décision sur opposition querellée).

La suite de la procédure est réservée.


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant sur partie

1.        Restitue le délai de recours contre la décision sur opposition rendue le 17 juin 2020 par l’intimé.

2.        Déclare recevable le recours formé contre cette décision sur opposition.

3.        Impartit à la recourante un délai au 10 décembre 2021 pour compléter son recours au fond, au sens du considérant 8.

4.        Réserve la suite de la procédure.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Sylvie CARDINAUX

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le