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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/944/2020

ATAS/852/2021 du 23.08.2021 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/944/2020 ATAS/852/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 août 2021

10ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Christophe ZERMATTEN

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : le bénéficiaire ou le recourant), né le ______ 1954, d'origine espagnole, naturalisé suisse le ______ 2005, marié (le ______ 2001) à B______ (ci-après : l'épouse ou l'intéressée), née le ______ 1970, ressortissante brésilienne, titulaire d'un permis C, a déposé une demande de prestations complémentaires auprès du service des prestations complémentaires à l'AVS (ci-après : le SPC, le service ou l'intimé) le 2 mai 2019. Il bénéficiait d'une rente AVS de CHF 1'991.- dès le 1er mai 2019.

2.        Par décision du 23 juillet 2019, le SPC a reconnu le droit du bénéficiaire aux prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) et aux prestations complémentaires cantonales (ci-après : PCC), dès le 1er mai 2019. Toutefois, les plans de calcul annexés déterminant des dépenses reconnues inférieures au revenu déterminant, tant pour les PCF que pour les PCC, compte tenu de la prise en considération d'un gain potentiel du conjoint de CHF 51'114.10, comptabilisé tant sur le plan fédéral que sur le plan cantonal, à hauteur de CHF 33'076.25 compte tenu des réductions pour couples, le montant respectif des PCF et des PCC était de CHF 0.-. Cette décision avait été annulée et remplacée par une décision rigoureusement identique du 31 juillet 2019, consécutive à la confirmation de l'inscription de l'épouse à l'office régional de placement (ci-après : l'ORP); mais cette dernière ne pouvant justifier de douze mois de cotisation dans les douze derniers mois, ni de motifs de libération, elle ne pouvait être prise en charge par le chômage.

3.        Par courrier du 16 août 2019, le bénéficiaire, représenté par son conseil (ASSUAS) a formé opposition contre la décision du 31 juillet 2019. Il reprochait au SPC d'avoir pris en compte un gain hypothétique de l'épouse, laquelle se trouvait toutefois actuellement en incapacité de travail totale en raison d'une dépression, suivie dans un établissement psychiatrique (ndr. : en réalité la Permanence Médico-Chirurgicale Rond-Point Plainpalais) comme attesté par son médecin traitant, la doctoresse C______, « médecin psychiatre » selon son timbre humide : ainsi la décision contestée imputait un gain hypothétique sans tenir compte ni de son âge ni de son incapacité de travail attestée par ses médecins traitants, ni de la prise en compte d'une période d'adaptation après une longue absence de la vie professionnelle, ni de son absence de formation. Le SPC n'indiquait pas les motifs plaidant en faveur d'un renversement de la présomption de l'inéligibilité de la reprise de l'activité lucrative; ainsi l'instruction du SPC était incomplète, ne tenant pas compte de tous les facteurs énumérés. Il invitait dès lors le SPC à reprendre l'instruction du dossier en tenant compte de la situation réelle de la famille A______, sans retenir un quelconque revenu hypothétique de l'épouse, et à rendre une décision octroyant des prestations d'aide sociale au bénéficiaire.

4.        Par courrier du 11 octobre 2019 (reçu le 14), Pro Senectute a indiqué au SPC qu'il s'occupait de la mise à jour de la situation du couple, en particulier par rapport au gain potentiel de l'épouse, pris en compte par le service : il adressait au SPC un certificat médical (fichet d'arrêt de travail) selon lequel la Dresse C______ attestait que l'épouse était en traitement chez elle depuis 2019 pour maladie, et que sa capacité de travail (ci-après : CT) était nulle dès le 9 septembre 2019 pour une durée indéterminée, copie du courrier de l'ORP annulant le dossier de l'assurée à dater du 12 septembre 2019, copie de la demande de prestation AI par l'intéressée, à laquelle était jointe une attestation à qui de droit de la psychiatre susmentionnée, au terme de laquelle la patiente était suivie en psychiatrie depuis des années, par la Permanence Médico-Chirurgicale de Plainpalais (où ce médecin travaillait), souffrant d'une dépression récurrente chronique et actuellement en thérapie de soutien et traitement médicamenteux.

5.        Compte tenu des documents complémentaires produits, notamment par Pro Senectute, le SPC a rendu une décision de prestations d'aide sociale le 19 décembre 2019 : dès le 1er janvier 2020, un montant mensuel de CHF 1'193.- était alloué à ce titre au bénéficiaire.

6.        Par décision sur opposition du 11 février 2020, le SPC a partiellement admis l'opposition formée le 16 août 2019 par le bénéficiaire, contre la décision de PC à l'AVS du 31 juillet 2019, qui rétroagissait au 1er mai 2019 : selon la législation applicable, seule la fortune et les revenus effectifs étaient pris en compte pour le calcul des PC à l'AVS/AI; cependant, aux termes de l'art. 11 al. 1 let. g de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI du 6 octobre 2006 (loi sur les prestations complémentaires, LPC - RS 831.30), le revenu déterminant comprenait également les ressources et parts de fortune dont l'ayant droit s'était dessaisi. Selon la jurisprudence, lorsque l'épouse d'un bénéficiaire de PC s'abstenait de mettre en valeur sa capacité de gain alors qu'elle pourrait se voir obligée d'exercer une activité lucrative en vertu de l'art. 163 CC, l'art. 3c al.1 let. g aLPC (actuellement art. 11 al. 1 let. g LPC) était également applicable. La capacité de gain de l'époux ou de l'épouse devait être utilisée dans la mesure où le conjoint était tenu (art. 160 al. 2 CC) de contribuer à l'entretien convenable de la famille. Il fallait examiner si et dans quelle mesure on pouvait exiger de l'époux/l'épouse qu'il/elle exerce une activité, compte tenu notamment de son âge, de son état de santé, de sa formation et, le cas échéant, du temps plus ou moins long pendant lequel il/elle aurait été éloigné(e) de la vie professionnelle. Dans le calcul des PC, les revenus provenant de l'exercice d'une activité lucrative étaient pris en compte de manière privilégiée. En effet, pour les couples, un montant de CHF 1'500.- était déduit du revenu annuel net, le solde étant pris en compte à raison des deux tiers (art. 11 al. 1 let. a LPC). Par ailleurs, l'Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS) était un document pertinent pour le calcul des gains potentiels. Enfin, selon le ch. 3482.06 des Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (ci-après : DPC), si la prestation complémentaire en cours devait être réduite en raison de la prise en compte d'un revenu hypothétique pour le conjoint non invalide, le délai d'adaptation accordé devait être adéquat. Au vu de ce qui précède, en l'espèce, le gain potentiel de l'épouse avait été fixé à un montant de CHF 51'114.10 compte tenu de son âge. Tout assuré et son conjoint avaient l'obligation de réduire le dommage, et l'âge légal de la retraite pour une femme était de 64 ans. Le SPC n'avait reçu aucune preuve de recherche d'emploi pour la période litigieuse; il ne pouvait considérer que l'inactivité de l'épouse durant la période concernée était due à des motifs conjoncturels. Toutefois, compte tenu des circonstances du cas d'espèce, un temps d'adaptation de six mois à compter du 1er mai 2019 paraissait justifié et pouvait lui être accordé. Dès lors, le SPC a supprimé le gain potentiel imputé à l'épouse du 1er mai au 31 octobre 2019. Il ressortait des nouveaux plans de calcul des arriérés de PC s'élevant à CHF 15'211.- en faveur du bénéficiaire (période du 1er mai au 31 octobre 2019), dont à déduire CHF 1'192.- (sic !) correspondant à l'aide sociale versée pour le mois d'octobre 2019. Dès lors, un montant de CHF 14'019.- lui serait versé au cours du mois suivant la décision.

7.        Agissant par la plume d'un nouveau conseil, le bénéficiaire a interjeté recours contre la décision susmentionnée par mémoire du 13 mars 2020. Il a principalement conclu à l'annulation de la décision sur opposition du SPC du 11 février 2020; qu'il soit constaté que le bénéficiaire était en droit de recevoir le versement des PCF et PCC dès le 1er mai 2019; subsidiairement, au renvoi de la cause à l'intimé pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il rappelait succinctement sa situation depuis le 1er mai 2019 et les étapes de la procédure administrative ayant abouti à la décision attaquée (ci-dessus ch. 1 à 6). Il faisait valoir que son épouse était, depuis 2012, suivie médicalement en raison d'une dépression chronique. Dès mars 2018, cet état avait engendré une incapacité de travail totale. Elle avait entrepris une demande de prestations auprès de l'office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI) dans le but de d'obtenir une rente d'invalidité. En outre, elle s'était faite opérer de la main gauche en novembre 2018 et n'avait à ce jour pas totalement retrouvé toutes ses facultés motrices. Au vu de cette situation, il lui était impossible de rechercher un emploi et il ne pouvait être considéré qu'elle serait en mesure de travailler. La prise en compte d'un revenu hypothétique était dès lors injustifiée. Au vu des exigences du SPC dans le cadre de la demande de PC du recourant, l'épouse s'était tout de même inscrite auprès du chômage. Au vu de son incapacité de travail, l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) l'avait toutefois dispensée d'effectuer des recherches d'emploi et de participer aux entretiens de conseil, allant jusqu'à annuler son dossier en septembre 2019. L'épouse était actuellement dans l'attente d'une décision de l'OAI, suite à sa demande déposée le 13 septembre 2019. Il reprochait au SPC d'avoir considéré que son épouse se serait dessaisie de ressources, partant de l'idée qu'elle serait en mesure de travailler et/ou qu'il était exigible de sa part qu'elle effectue des recherches d'emploi. Selon la jurisprudence, il était admissible de s'écarter de la capacité financière de l'un des époux et de retenir en lieu et place un revenu hypothétique, dans la mesure où il pourrait gagner plus que son revenu effectif, pour autant qu'il fasse preuve de bonne volonté et accomplisse un effort exigible. Cependant, lorsqu'une possibilité réelle d'obtenir un revenu supérieur n'existait pas, aucun revenu hypothétique ne pouvait être retenu. L'incapacité de travail totale de l'épouse depuis le 10 mars 2018 au moins, tant pour des raisons psychiques que somatiques, comme en attestaient ses nombreux certificats médicaux, justifiait à elle seule l'exclusion de la prise en compte d'un revenu hypothétique. Le SPC n'indiquait nullement pourquoi il considérait que son épouse serait en mesure de travailler malgré les nombreux documents attestant du contraire, ni pour quelles raisons il attendait même un effort supplémentaire. Le SPC se contentait d'indiquer que l'inactivité de l'épouse pendant la période litigieuse ne saurait être expliquée par des motifs conjoncturels; il était pourtant évident que son inactivité s'expliquait précisément par son incapacité de travail qui l'empêchait de même de rechercher des emplois. L'OCE avait lui-même constaté qu'il ne pouvait être exigé de l'épouse qu'elle effectue des recherches d'emploi au vu de sa situation, ceci au point d'annuler son dossier. En rendant sa décision, dans le sens rappelé, l'intimé s'était substitué à l'appréciation de plusieurs médecins quant à la CT, ainsi qu'à l'appréciation de l'OCE. Il était évident que l'octroi d'une rente d'assurance-invalidité serait, le cas échéant, annoncée au SPC et que les montants reçus devraient être pris en compte dans les revenus du couple dans le calcul des PC. Pour l'instant toutefois, l'épouse ne touchait aucun montant à ce titre et se trouvait dans l'incapacité effective de subvenir à ses besoins et encore moins aux besoins du couple. C'est ainsi sur la base d'un motif incorrect que l'autorité intimée avait octroyé au recourant un montant de six mois d'indemnité. En réalité, c'était bien parce que ce dernier avait droit à l'octroi de PC dès le 1er mai 2019 qu'il devrait être payé, et non pas parce qu'une période d'adaptation avait été accordée à son épouse.

8.        Le SPC a conclu au rejet du recours par courrier du 14 mai 2020. Le recourant n'apportait aucun élément susceptible de conduire à une appréciation différente du cas d'espèce; l'intimé formulait les remarques suivantes : le recours portait uniquement sur la prise en compte d'un gain potentiel imputé à l'épouse du recourant dès le 1er novembre 2019; l'épouse avait produit des certificats médicaux attestant de son incapacité de travail pour des raisons médicales depuis le 10 mars 2018 à ce jour; il ressortait également des pièces produites qu'elle avait déposé une demande de prestations auprès de l'OAI en date du 13 septembre 2019, l'OAI n'ayant pas statué à ce jour. Selon la jurisprudence, le SPC était lié par l'appréciation de l'OAI, pour ce qui concerne le degré d'invalidité; néanmoins, l'autorité devait examiner si l'assuré pouvait exercer une activité lucrative et si l'on était en droit d'attendre de lui qu'il le fasse. Pour ce faire, elle devait tenir compte de toutes les circonstances objectives et subjectives entravant ou compliquant la réalisation d'un tel revenu, telles que la santé, l'âge, la formation, les connaissances linguistiques, l'activité antérieure, l'absence de la vie professionnelle, le caractère admissible d'une activité, les circonstances personnelles et le marché du travail. Il n'appartenait toutefois pas à l'autorité compétente pour le versement des PC de procéder aux investigations y relatives, même si l'état de santé s'était aggravé. Seuls les éléments étrangers à l'invalidité devaient être instruits par le SPC. En l'espèce, l'épouse du recourant n'alléguait pas être empêchée de travailler en raison de tels éléments, dès lors qu'elle invoquait uniquement des raisons de santé. Ainsi, le SPC confirmait la prise en compte d'un gain potentiel imputé à l'épouse dans les calculs des PC au 1er novembre 2019, jusqu'à ce que l'OAI se prononce sur la demande de prestations visant l'obtention d'une rente en faveur de l'épouse, et au motif qu'aucun facteur personnel ou social n'entravait ou compliquait la réalisation d'un revenu d'activité lucrative. Le SPC apporterait les ajustements nécessaires aux PC du recourant dès que l'AI se prononcerait.

9.        Le recourant a répliqué par courrier du 24 juin 2020. Il persistait intégralement dans ses conclusions. En premier lieu, l'intimé invoquait aujourd'hui l'attente d'une décision de l'OAI, et prétendait que les seuls problèmes de santé ne péjoreraient pas l'épouse dans la réalisation d'une activité lucrative, faute d'entraves supplémentaires telles que les facteurs personnels ou sociaux. Le recourant y voyait une contradiction par rapport à la décision entreprise, puisque dans cette dernière, les problèmes de santé de l'épouse étaient tout simplement ignorés, alors qu'ils étaient aujourd'hui considérés comme insuffisants à eux seuls pour fonder une incapacité de travail. En second lieu, la jurisprudence invoquée par l'intimé ne permettait pas d'admettre que ce dernier puisse se passer d'analyser de manière concrète la capacité de gain de l'épouse : en substance, l'organisme d'indemnisation (en l'occurrence, le SPC) était tenu par les constatations de l'assurance-invalidité, mais devait procéder à une analyse de la capacité de gain d'une personne, lorsque celle-ci indiquait ne pas être en mesure d'exercer une activité lucrative. Ces investigations devaient porter sur toutes les circonstances qui empêchaient ou compliquaient la réalisation d'un revenu (notamment l'âge, la santé, la formation, l'absence de la vie professionnelle, les circonstances personnelles et les conditions du marché du travail). Dans cette mesure, le SPC ne saurait attendre une décision de l'assurance-invalidité, dès lors qu'il lui avait clairement été signifié, preuves à l'appui, que l'épouse était dans l'impossibilité d'exercer une activité lucrative. En l'espèce, l'épouse souffrait de problèmes dépressifs depuis 2012 déjà, et de tels troubles avaient forcément affecté sa vie professionnelle lorsqu'une activité était encore possible. Du reste, elle n'avait pas pu travailler depuis le mois de mars 2018; une telle absence était, dans tous les cas, un handicap sur le marché du travail. De plus, elle était âgée de bientôt 50 ans, ce qui constituait également un désavantage sur ce marché.

10.    Le SPC a dupliqué par courrier du 18 août 2020. Il persistait dans ses conclusions. Rappelant qu'il était lié, pour ce qui concerne le degré d'invalidité, par l'appréciation de l'assurance-invalidité, et qu'il devait certes examiner si un assuré pouvait exercer une activité lucrative, et si l'on était en droit d'en attendre qu'il le fasse en tenant compte de toutes les circonstances objectives et subjectives entravant ou compliquant la réalisation d'un tel revenu, force était de constater en l'espèce que les documents médicaux produits ne contenaient aucun élément permettant d'apprécier la CT de l'épouse. En particulier, ces documents n'indiquaient pas les raisons pour lesquelles une activité adaptée aux limitations de l'assurée ne pourrait pas être envisagée. Ainsi n'avait-il pas été démontré, du moins rendu hautement vraisemblable, que l'épouse n'était pas en mesure d'exercer une activité lucrative à plein temps, le cas échéant dans une activité adaptée à son état de santé. S'agissant de l'argument de l'âge et de l'éloignement du marché du travail, selon la jurisprudence, si les chances de trouver un emploi avaient tendance à diminuer avec l'âge et l'absence du monde du travail, le marché du travail était en constante évolution, et trouver un emploi adapté même trois ans après des recherches infructueuses ne paraissait pas d'emblée exclu. La chambre de céans avait déjà jugé que l'exercice d'une activité lucrative pour les personnes âgées de 54 à 57 ans n'était pas illusoire, dès lors qu'il s'agissait d'un âge éloigné de celui à partir duquel la jurisprudence fédérale considérait généralement qu'il n'existe plus de possibilités réalistes d'exploiter la CT résiduelle sur un marché supposé équilibré (ATAS/312/2018 consid.10b). En l'espèce, l'épouse, âgée de 49 ans, n'avait plus exercé d'activité lucrative depuis mars 2018, soit depuis un peu plus de deux ans. Au vu de ces principes de jurisprudence, il y avait lieu d'admettre que l'éloignement du marché du travail ainsi que l'âge de l'intéressée ne permettaient pas d'exclure la prise en compte d'un gain potentiel. Enfin, s'agissant des recherches d'emploi, le recourant invoquait le changement de circonstances lié à la pandémie Covid-19, survenu postérieurement à la décision litigieuse. À cet égard, le SPC relevait que même si cette crise avait un impact majeur sur le marché de l'emploi, elle ne saurait justifier en tout état de cause à elle seule l'inactivité de l'épouse.

11.    La chambre de céans a entendu le recourant - le SPC ne s'étant pas présenté - ainsi que Madame B______, à titre de renseignement, le 28 septembre 2020.

Le recourant a déclaré : « Pour répondre à une question de mon conseil, je dois dire que mon épouse est dépressive depuis plusieurs années et la tendance ne va pas vers une amélioration. Son état de santé s'est détérioré, d'après ce que j'ai pu constater, et après plusieurs décès successifs parmi ses proches : d'abord sa mère, puis un frère, suivi de l'accident d'un autre frère, et le décès de son père. Dans un premier temps, elle a pu continuer à travailler, mais la situation s'est détériorée lorsqu'elle a une première fois été inscrite au chômage.

S'agissant de la procédure AI en cours, nous n'avons pas encore de décision de l'OAI. Il y a environ un mois elle a reçu une demande de rapport médical. Elle l'a donc transmise à son médecin traitant ».

Mme B______, épouse du recourant, a déclaré : « Je confirme avoir des problèmes de santé. J'ai travaillé jusqu'en 2018, dans l'horlogerie. Mes problèmes ont véritablement commencé quand j'ai perdu mon emploi. Auparavant j'avais déjà eu des périodes où je me sentais stressée, où il m'arrivait de pleurer. Le fait que je ne sois pas parvenue à retrouver un emploi m'a beaucoup affectée aussi. C'est à cette époque que j'ai demandé de l'aide. Je suis actuellement toujours en traitement chez la Dresse C______, psychiatre. Je vais à sa consultation en principe une fois par mois, mais il arrive que je lui téléphone pour fixer un rendez-vous lorsque je me sens particulièrement mal. Je suis sous traitement médicamenteux, soit d'Efexor, (et de) Seroqual. Par ailleurs je suis également traitée dans le cadre d'une psychothérapie, directement par ce médecin. Je parle avec elle pour tenter de m'en sortir. Je suis souvent angoissée, et je prends également du Lexotanil, notamment.

L'an dernier, à l'incitation de ma psychiatre, j'ai déposé une demande de prestations auprès de l'assurance-invalidité. Pour ce qui est de cette procédure, l'OAI n'a pas encore rendu sa décision. Il m'a écrit à plusieurs reprises pour connaître l'évolution de ma maladie, soit en demandant des rapports médicaux à ma thérapeute. Nous en sommes là pour l'instant. Je n'ai pas été convoquée par un médecin de l'AI ou par un médecin indépendant. Pour répondre à votre question, j'autorise bien-sûr l'assurance-invalidité à vous communiquer la copie de l'intégralité de mon dossier en cours. Je tiens à vous dire que j'aspire profondément à retrouver un emploi. Je ne me suis jamais retrouvée dans une situation pareille. Je veux travailler, j'ai d'ailleurs essayé de retrouver un emploi malgré mon incapacité de travail lorsque j'étais au chômage. Tout est arrivé en même temps : auparavant je n'étais pas malade et petit à petit des problèmes physiques sont venus s'ajouter à ma tristesse et à mes problèmes psychiques, soit aux mains, d'abord la main gauche, pour laquelle j'ai été opérée, puis les deux mains, le dos, et en plus la ménopause. Je suis découragée. Spontanément, je voudrais vous dire combien je souhaiterais retrouver ma vie d'avant, un travail, cesser ces médicaments ».

12.    Sur quoi, la chambre de céans a informé les parties de ce qu'elle ordonnerait l'apport du dossier AI de l'épouse, la suite de la procédure étant réservée.

13.    Par ordonnance du 29 septembre 2020, la chambre de céans a requis de l'OAI de produire le dossier de l'épouse, et d'indiquer à la CJCAS dans quel délai prévisible il serait en mesure de statuer sur la demande de prestations, en l'invitant à adresser à cette juridiction, pour information, copie du projet de décision et, le moment venu, copie de sa décision.

14.    Par pli du 5 novembre 2020, l'OAI a produit son dossier, avec la précision qu'il était toujours en cours d'instruction, et que par conséquent, il n'était pas possible à l'office de communiquer une date de clôture, même dans un délai prévisible. L'OAI ne manquerait toutefois pas de transmettre à la chambre de céans les projets de décision, et décision requis, le moment venu.

15.    Le recourant s'est prononcé au sujet du dossier AI de son épouse et au sujet de l'instruction orale. Il persistait intégralement dans ses conclusions. Au vu des arguments successifs avancés par le SPC dans ses écritures, il peinait à comprendre les éléments sur lesquels le SPC fondait aujourd'hui sa décision. Considérait-t-il que l'épouse était en mesure de travailler, que sa capacité à exercer une activité lucrative ne devait pas être analysée ou que les éléments au dossier ne permettaient pas de procéder à une telle analyse ? Il était erroné de prétendre que le SPC ne disposerait pas des éléments nécessaires à l'analyse de la situation de l'épouse, au vu des nombreuses pièces produites à cet effet. L'intimé avait d'ailleurs procédé à une telle analyse dans la décision attaquée, puisqu'il considérait précisément que l'épouse serait en mesure de travailler. En outre, si les éléments nécessaires faisaient effectivement défaut, il suffirait au SPC de les requérir auprès du recourant ou de son épouse. Il aurait tout aussi bien pu simplement assister à l'audition de l'épouse. Il fallait encore rappeler que c'était le SPC lui-même qui, dans un premier temps, avait mis en avant la question de la capacité de gain de l'épouse. Il refusait pourtant aujourd'hui de prendre position à cet égard, ce qui n'était pas acceptable. La procédure en cours auprès de l'OAI, bien loin d'être terminée, ne saurait être invoquée comme excuse. Cette situation était d'autant plus défavorable au recourant que ce dernier aurait dû toucher les PC auxquelles il avait droit depuis le mois de novembre 2019.

16.    L'intimé s'est prononcé par courrier du 22 octobre 2020. Il ressortait du dossier de l'OAI qu'à teneur du rapport établi par la Dresse C______ (29 avril 2020, pièce 12 dossier OAI), la CT de l'assurée serait nulle dans son activité habituelle, notamment en raison du coronavirus; cela étant, ce médecin n'excluait pas la possibilité d'une réadaptation professionnelle à 50 % en fonction de l'évolution de la situation; à teneur du rapport établi par le docteur « D______ » [recte : docteur E______], médecin généraliste (25 septembre 2019, pièce 6 dossier OAI), on pouvait raisonnablement attendre de sa patiente qu'elle effectue quatre heures de travail par jour dans une activité tenant compte de son atteinte à la santé. Au vu de ces éléments et compte tenu du fait que le dossier OAI était toujours en cours d'instruction, le SPC considérait que l'on ne saurait exclure à ce stade la possibilité pour l'épouse d'exercer une activité lucrative adaptée à son état de santé, à plein temps, respectivement de renoncer à la prise en compte d'un gain potentiel. Le SPC relevait enfin que malgré ses difficultés, l'épouse expliquait avoir la volonté ferme de retrouver un emploi (déclaration du 28 septembre 2020).

17.    Le 13 novembre 2020, le recourant a formulé des observations par rapport au dernier courrier de l'intimé : le SPC prétendait que selon son rapport du 25 septembre 2019, le Dr E______ indiquerait que l'épouse du recourant serait en mesure d'effectuer « quatre heures de travail par jour dans une activité qui tienne compte de l'atteinte à sa santé »; ceci était parfaitement faux : il ressortait en effet, au contraire, que ce médecin, de façon parfaitement claire en réponse à la question 4.1, indiquait que le nombre d'heures de travail que l'on pouvait raisonnablement attendre de la patiente dans l'activité qu'elle avait exercée à ce jour était nul; à la question 4.2, il précisait que l'on ne pouvait pas non plus attendre une activité dans un domaine qui tiendrait compte de l'atteinte à la santé. Il renvoyait pour le reste à la Dresse C______ qui, à maintes reprises, avait constaté l'incapacité de travail de l'épouse. Il ressortait clairement de ces éléments que l'épouse du recourant n'était pas en mesure d'exercer une activité lucrative. On comprenait dès lors mal l'acharnement du SPC à vouloir prétendre le contraire, en dépit de tous les documents lui donnant tort. La volonté de l'épouse de reprendre une activité et de retrouver une vie normale, selon ses dires, ne saurait être retenue à sa charge. Au contraire, cet élément démontrait parfaitement la bonne foi de l'intéressée, laquelle avait tenté de trouver un travail par tous les moyens, malgré sa condition. Le fait que l'OCE ait lui-même constaté que les recherches d'emploi ne sauraient être possibles démontrait que le SPC n'était pas en droit d'exiger de l'épouse qu'elle exerce une activité lucrative.

18.    Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Toutefois, dans la mesure où le recours était, au 1er janvier 2021, pendant devant la chambre de céans, il reste soumis à l'ancien droit (cf. art. 82a LPGA; RO 2020 5137; FF 2018 1597; erratum de la CdR de l’Ass. féd. du 19 mai 2021, publié le 18 juin 2021 in RO 2021 358).

Par ailleurs, eu égard à leurs dispositions transitoires respectives, les modifications, aussi entrées en vigueur le 1er janvier 2021, qui ont été apportées à la LPC par la réforme des prestations complémentaires du 22 mars 2019 (RO 2020 585; FF 2016 7249), de même que par le ch. I.5 de la loi fédérale sur l’amélioration de la conciliation entre activité professionnelle et prise en charge de proches du 20 décembre 2019 (RO 2020 4525; FF 2019 3941), ne s’appliquent pas non plus en l’espèce.

3.        Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 et 60 LPGA; art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

4.        Le litige porte sur le calcul des prestations complémentaires dues au recourant à partir du 1er novembre 2019, principalement sur la prise en compte d’un gain potentiel de son épouse.

5.        a. Pour l’établissement des faits pertinents, il y a lieu d’appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d’assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l’appréciation des preuves et le degré de la preuve.

b. La maxime inquisitoire signifie que l’assureur social et, en cas de litige, le juge, établissent d’office les faits déterminants, avec la collaboration des parties, sans être liés par les faits allégués et les preuves offertes par les parties, en s’attachant à le faire de manière correcte, complète et objective afin de découvrir la réalité matérielle (art. 43 LPGA; art. 19 s., 22 ss, 76 et 89A LPA; Ghislaine FRÉSARD-FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, p. 499 s.). Les parties ont l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués; à défaut, elles s’exposent à devoir supporter les conséquences de l’absence de preuve (art. 28 LPGA; ATF 125 V 193 consid. 2; 122 V 157 consid. 1a; 117 V 261 consid. 3b et les références).

c. Comme l’administration, le juge apprécie librement les preuves administrées, sans être lié par des règles formelles (art. 61 let. c LPGA). Il lui faut examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les pièces du dossier et autres preuves recueillies permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Il lui est loisible, sur la base d’une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, de refuser l’administration d’une preuve supplémentaire au motif qu’il la tient pour impropre à modifier sa conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3; ATF 129 III 18 consid. 2.6; arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 3.1).

d. Une preuve absolue n’est pas requise en matière d’assurances sociales. L’administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a; Ghislaine FRÉSARD- FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, op. cit., p. 517 s.). Reste réservé le degré de preuve requis pour la notification de décisions, l’exercice d’un moyen de droit, le contenu d’une communication dont la notification est établie (ATF 124 V 400; 121 V 5 consid. 3b; 119 V 7 consid. 3c/bb; ATAS/286/2018 du 3 avril 2018 consid. 3; ATAS/763/2016 du 27 septembre 2016 consid. 4 et 5c).

e. Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b et les références). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’objet du litige et de nature à influencer l’appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102 et les arrêts cités; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 321/04 du 18 juillet 2005 consid. 5).

6.        Pour les personnes susceptibles de percevoir des prestations complémentaires (comme des bénéficiaires d’une rente AVS, à l’instar du recourant [cf. art. 4 à 6 LPC]), les PCF sont destinées à couvrir la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants (art. 9 al. 1 LPC), et les PCC sont allouées auxdites personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Pour les PCF, tant les dépenses reconnues que les revenus déterminants sont définis par la LPC. Pour les PCC, les dépenses reconnues sont celles énumérées par la LPC et ses dispositions d'exécution, à l'exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'art. 3 LPCC (art. 6 LPCC), et le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la LPC et ses dispositions d'exécution, moyennant quelques adaptations, dont l’ajout des PCF (art. 5 LPCC).

7.        a. Selon l'art. 11 al. 1 let. g LPC, les revenus déterminants comprennent les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s'est dessaisi. Il n'est pas contesté et en tout état pas contestable qu'il y a dessaisissement en cas de renonciation entière ou partielle à des éléments de revenus ou de fortune faite sans obligation juridique ou sans contre-prestation équivalente, et en particulier que tel est en principe le cas lorsque le conjoint du bénéficiaire renonce à l'exercice d'une activité lucrative qu'on peut raisonnablement exiger de lui (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, 2015, n. 94 s. et 132 ss ad art. 11).

En effet, le conjoint d'une personne assurée ne saurait s'abstenir de mettre en valeur sa capacité de gain alors qu'il pourrait se voir obligé d'exercer une activité lucrative en vertu de l'art. 163 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) sur le devoir des époux de contribuer, chacun selon ses facultés, à l’entretien convenable de la famille, de même que de l’art. 159 al. 3 CC sur le devoir d’assistance que se doivent les époux (ATF 134 V 53 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 8C_258/2008 du 12 décembre 2008 consid. 4). En vertu du devoir de solidarité qu'énoncent ces dispositions, les conjoints sont responsables l'un envers l'autre non seulement des effets que le partage des tâches adopté durant le mariage peut avoir sur la capacité de gain de l'un des époux, mais également des autres motifs qui empêcheraient l'un ou l'autre de pourvoir lui-même à son entretien (arrêt du Tribunal fédéral 9C_240/2010 du 3 septembre 2010 consid. 4.1; ATAS/910/2017 du 17 octobre 2017 consid. 3; ATAS/246/2016 du 24 mars 2016 consid. 2b; Michel VALTERIO, op. cit., n. 132 ss ad art. 11).

Par dessaisissement, il faut entendre, en particulier, la renonciation à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique ni contre-prestation équivalente (ATF 123 V 35 consid. 1; ATF 121 V 204 consid. 4a). Il y a également dessaisissement lorsque l'assuré a droit à certains éléments de revenu ou de fortune mais n'en fait pas usage ou s'abstient de faire valoir ses prétentions, ou encore lorsqu'il renonce à exercer une activité lucrative possible pour des raisons dont il est seul responsable (ATF 123 V 35 consid. 1).

b. Il appartient à l'administration ou, en cas de recours, au juge d'examiner si l'on peut exiger d'un conjoint d'un assuré qu'il exerce une activité lucrative et, le cas échéant, de fixer le salaire qu'il pourrait en retirer en faisant preuve de bonne volonté, compte tenu des circonstances du cas d'espèce, en appliquant à titre préalable les principes du droit de la famille, compte tenu des circonstances du cas d'espèce (ATF 117 V 287 consid. 3c).

Les critères décisifs auront notamment trait à l'âge de la personne, à son état de santé, à ses connaissances linguistiques, à sa formation professionnelle, à l'activité exercée jusque-là, au marché de l'emploi, et le cas échéant, au temps plus ou moins long pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 134 V 53 consid. 4.1; arrêt du Tribunal fédéral 8C_440/2008 du 6 février 2009 consid. 3).

En ce qui concerne en particulier le critère de la mise en valeur de la capacité de gain sur le marché de l'emploi, le Tribunal fédéral a considéré qu'il importait de savoir si et à quelles conditions l'intéressé serait en mesure de trouver un travail et qu'à cet égard, il fallait prendre en considération, d'une part, l'offre des emplois vacants appropriés et, d'autre part, le nombre de personnes recherchant un travail. Il y a donc lieu d'examiner concrètement la situation du marché du travail (ATF non publié 9C_30/2009 du 6 octobre 2009 consid. 4.2; ATFA non publié P 88/01 du 8 octobre 2002).

Lorsqu'il s'avère que c'est pour des motifs conjoncturels que l'assuré n'a pas été en mesure de mettre en valeur sa capacité de gain dans l'activité correspondant à sa formation et son expérience professionnelles, on ne saurait prendre en compte de gain potentiel car son inactivité ne constitue pas une renonciation à des ressources au sens de l'art. 11 al. 1 let. g LPC.

Il résulte clairement de la jurisprudence fédérale que, pour déterminer si une activité professionnelle est exigible dans le cadre de l'examen du droit aux prestations complémentaires, les critères sont différents de ceux ouvrant le droit aux prestations de l'assurance-invalidité. En effet, pour cette dernière, seule est pertinente l'atteinte à la santé à caractère invalidant, à l'exclusion de facteurs psychosociaux ou socio-culturels (âge de la personne, connaissances linguistiques ou état de santé non objectivé sur le plan médical; ATF 127 V 294 consid. 5a).

Les revenus hypothétiques, provenant d'une activité lucrative, constituent une présomption juridique que l'assuré peut renverser en apportant la preuve qu'il ne lui est pas possible de réaliser de tels revenus ou qu'on ne peut l'exiger de lui.

Cependant, l'autorité compétente est liée, pour ce qui concerne le degré d'invalidité, par l'appréciation de l'assurance-invalidité (ATF 117 V 202 consid. 2 b p. 205). Néanmoins, l'autorité doit examiner si l'assuré peut exercer une activité lucrative et si on est en droit d'attendre de lui qu'il le fasse. Pour ce faire, elle doit tenir compte de toutes les circonstances objectives et subjectives qui entravent ou compliquent la réalisation d'un tel revenu, telles que la santé, l'âge, la formation, les connaissances linguistiques, l'activité antérieure, l'absence de la vie professionnelle, le caractère admissible d'une activité, les circonstances personnelles et le marché du travail (ATF 117 V 153 consid. 2 c p. 156).

Le n° 3424.07 DPC prévoit qu'aucun revenu hypothétique n'est pris en compte chez le bénéficiaire de PC à l'une ou l'autre des conditions suivantes :

- si, malgré tous ses efforts, sa bonne volonté et les démarches entreprises, l'assuré ne trouve aucun emploi. Cette hypothèse peut être considérée comme réalisée lorsqu'il s'est adressé à un ORP et prouve que ses recherches d'emploi sont suffisantes qualitativement et quantitativement;

- lorsqu'il touche des allocations de chômage;

- s'il est établi que sans la présence continue de l'assuré à ses côtés, l'autre conjoint devrait être placé dans un home ou un établissement hospitalier;

- si l'assuré a atteint sa 60ème année.

Le n° 3424.09 DPC précise que :

si l'assuré fait valoir dans la demande de PC qu'il ne peut exercer d'activité lucrative ou atteindre le montant-limite déterminant, l'organe PC doit procéder à la vérification de ces dires avant de rendre sa décision. L'assuré peut être invité à préciser ses allégations et à les étayer. S'il ne fait rien valoir de semblable, la décision peut être rendue sans autre (art. 42 phrase 2 LPGA).

Pour déterminer le revenu hypothétique à prendre en compte, il est admis que, sans préjudice d'appliquer les critères précités, les organes des prestations complémentaires s'inspirent des tables de l’ESS sinon les appliquent, sous déduction, dès lors que ces tables définissent des salaires bruts, des cotisations obligatoires dues aux assurances sociales de la Confédération et le cas échéant des frais de garde des enfants (ch. 3482.04 DPC).

c. Suivant les circonstances, un temps d’adaptation approprié et réaliste doit être accordé au conjoint de l’assuré, pour lui permettre de s’adapter à la nouvelle situation et reprendre ou étendre une activité lucrative, et ce aussi bien lorsque des prestations complémentaires sont en cours que lors d’une demande initiale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_630/2013 du 29 septembre 2014 consid. 5.1 et 5.2; arrêt du Tribunal fédéral des assurances P 49/04 du 6 février 2006 consid. 4.1).

8.        En l'espèce, l'intimé a retenu, dans la décision initiale du 23 juillet 2019, un revenu potentiel de l'épouse de CHF 51'114.10, dès le 1er mai 2019, soit dès le début du droit du recourant à des PC fédérales et cantonales, en se fondant sur l'ESS, admettant ainsi implicitement que cette dernière était pleinement capable de travailler. Sur opposition, le bénéficiaire a contesté la prise en compte par le SPC d'un revenu hypothétique de son épouse, alléguant que cette dernière se trouvait en incapacité de travail totale en raison d'une dépression, suivie dans un établissement psychiatrique. Il découlait, selon lui, de cette situation que la décision contestée imputait un gain hypothétique sans tenir compte ni de l'âge de son épouse, ni de son incapacité de travail attestée par sa psychiatre traitante, ni de la prise en compte d'une période d'adaptation après une longue absence de la vie professionnelle, ni de son absence de formation. Il reprochait à l'administration de ne pas avoir indiqué les motifs plaidant en faveur d'un renversement de la présomption de l'inéligibilité de la reprise de l'activité lucrative, et partant reprochait au SPC une instruction incomplète, ne tenant pas compte de tous les facteurs énumérés.

Dans sa décision sur opposition, le SPC a pour l'essentiel confirmé son appréciation initiale - considérant implicitement que les éléments apportés par le bénéficiaire étaient insuffisants pour renverser la présomption juridique de capacité de travail et d'exigibilité du conjoint, à la base de la prise en compte d'un revenu hypothétique dans le calcul du droit aux PC; le SPC a toutefois partiellement admis l'opposition, en supprimant la prise en compte d'un revenu hypothétique de l'épouse pendant les six premiers mois de la période litigieuse. En revanche, insistant sur l'effort de volonté raisonnablement exigible de la part du conjoint de bénéficiaire de PC quant à la mise à profit de sa capacité de gain, le SPC a relevé qu'il n'avait reçu aucune preuve de recherche d'emploi par l'épouse pour la période litigieuse, et qu'il ne pouvait ainsi considérer que l'inactivité de cette dernière durant la période concernée serait due à des motifs conjoncturels au sens des principes rappelés ci-dessus (sinon en invoquant la pandémie due au Covid-19, circonstance toutefois postérieure à la période litigieuse et à la décision entreprise). Il s'agit donc de déterminer si, ce faisant, le SPC a correctement apprécié la situation, en prenant en compte toutes les circonstances objectives et subjectives qui entravent ou compliquent la réalisation d'un tel revenu, telles que la santé, l'âge, la formation, les connaissances linguistiques, l'activité antérieure, l'absence de la vie professionnelle, le caractère admissible d'une activité, les circonstances personnelles et le marché du travail (ATF 117 V 153 consid. 2 c p. 156); ce que conteste le recourant.

9.        a. S'agissant de l'âge de l'épouse, le recourant fait valoir que cette dernière, âgée de bientôt 50 ans, subit ainsi un désavantage sur le marché du travail. L'âge constituerait en somme une circonstance que l'intimé aurait dû retenir dans son appréciation : on observera à cet égard que l'intimé a précisément relevé, dans la décision entreprise, que le montant de salaire hypothétique qu'il a retenu, en se fondant sur le salaire statistique de l'ESS choisi, tenait aussi compte de l'âge de l'intéressée. Cela dit, la jurisprudence du Tribunal fédéral considère la prise en compte de l'âge en tant que facteur défavorable en regard des perspectives de trouver un emploi comme pertinente, lorsque la personne concernée approche de l'âge légal de la retraite; et dans le cas particulier, l'épouse du recourant en est encore très loin. À ce stade, on remarquera également que le recourant ne conteste pas en soi le recours aux ESS par l'intimé, conforme à la jurisprudence, ni le choix du salaire pris pour référence par le SPC pour l'évaluation du salaire hypothétique exigible.

b. S'agissant de la formation et de l'activité antérieure de l'épouse, si apparemment l'intéressée n'a pas suivi, dans son pays d'origine ou en Suisse, une formation certifiante, elle n'a pas moins acquis des compétences professionnelles indéniables, tout au long des nombreuses années où elle a travaillé dans des firmes d'horlogerie, de joaillerie ou de bijouterie prestigieuses, en tant que contrôleuse qualité, comme cela ressort de son CV; sans compter qu'elle dispose de connaissances spécifiques dans le domaine des outils informatiques, avec la maîtrise de divers logiciels professionnels (SAP, Artemis, Pro-concept, Qualigest) ou plus courants (Word, Excel et PowerPoint); ses connaissances linguistiques orales et écrites sont également un atout : le portugais, langue maternelle, le français couramment, et l'anglais (notions de base); la chambre de céans a du reste pu constater qu'elle n'éprouvait pas de difficultés en français. Il ressort en outre du formulaire de confirmation de son inscription à l'ORP qu'elle parle et écrit très bien l'espagnol. Elle se définit d'ailleurs comme polyvalente, flexible et autonome. Le salaire statistique retenu par l'intimé recouvre un éventail important de postes accessibles sans qualification particulière.

c. Quant à l'éloignement de la vie professionnelle, le recourant fait valoir que son épouse n'avait pas pu travailler depuis le mois de mars 2018; selon lui, une telle absence était, dans tous les cas, un handicap sur le marché du travail; le recourant ne saurait être suivi sur ce point : au moment où la décision litigieuse a été rendue (février 2020), cela faisait moins de deux ans qu'elle n'avait pas travaillé. Or, comme l'a d'ailleurs relevé l'intimé dans sa duplique, le Tribunal fédéral a rappelé que si les chances de trouver un emploi ont tendance à diminuer avec l'âge et l'absence du monde du travail, le marché du travail est en constante évolution, et trouver un emploi adapté même trois ans après des recherches infructueuses ne paraît pas d'emblée exclu (arrêt du Tribunal fédéral 9C_120/2012 du 2 mars 2012 consid. 4.5 § 2).

d. Il est constant que le recourant n'a jamais produit la moindre preuve de recherches d'emploi que son épouse aurait entrepris, avant ou après la décision initiale du SPC (31 juillet 2019), lui refusant toute PCF ou PCC en raison de la prise en compte dans les plans de calcul d'un revenu hypothétique de cette dernière.

Certes le recourant a-t-il produit en annexe à son courrier du 31 juillet 2019 au SPC des documents en relation avec son inscription à l'ORP, soit le formulaire de confirmation de son inscription à l'ORP, le 30 juillet 2019, l'intéressée déclarant rechercher dès ce jour-là un emploi à plein temps (100 %) en tant que contrôleuse de qualité, fonction spécialisée dans le cadre de laquelle elle faisait valoir une expérience de plus de trois années. Il a également produit un formulaire d'avis de passage à l'ORP le 26 juin 2019 : il ressortait de la rubrique « remarques » de ce document qu'elle était suivie par l'Hospice général (ci-après : l'hospice), et qu'elle n'avait pas douze mois de cotisation dans les douze derniers mois, ni de motif de libération à faire valoir. Pas de prise en charge dans ces conditions. Il a produit par la suite, en annexe à un courrier de Pro Senectute Genève au SPC du 11 octobre 2019, la copie d'un courrier du 20 septembre 2019 de l'ORP à l'épouse, indiquant à la destinataire que son dossier était annulé au 12 septembre 2019. Le courrier d'accompagnement de Pro Senectute désignait cette pièce comme « annulation de son dossier auprès de l'Office cantonal de l'emploi suite à son état de santé ». Rien ne permettait toutefois d'être certain de ce motif, au vu du précédent document décrit, dont il ressortait que l'intéressée ne disposait pas de douze mois de cotisation dans les douze mois précédant son inscription à l'ORP.

Certes, le recourant a produit à l'appui de son recours un courrier complémentaire de l'ORP du 20 août 2019 à l'épouse, se référant au certificat d'incapacité totale de travail du 14 août 2019, pour une durée indéterminée, que cette dernière avait produit. Il indiquait à la destinataire les conséquences de cette annonce d'incapacité totale de travail, et notamment le fait que pendant toute la durée de cette incapacité, elle était dispensée d'effectuer des recherches d'emploi et de participer aux entretiens de conseil. Il décrivait en outre les obligations de la personne au chômage dès le moment où elle serait à nouveau apte à travailler, ne serait-ce que partiellement, ou si l'incapacité de travail se prolongeait. Il indiquait encore que le dossier serait annulé au plus tard après un mois; ce qui en effet était intervenu selon le courrier précité du 20 septembre 2019 (avec effet au 12 septembre 2019).

Toutefois, si au regard de la législation sur l'assurance-chômage, l'épouse du recourant n'était pas tenue d'effectuer des recherches d'emploi pendant la durée de l'incapacité, ni de participer à des entretiens de conseil pendant cette période, ces circonstances ne justifiaient pas à elles seules l'absence d'initiatives de l'intéressée en regard des principes applicables en matière de PC, dans le cas d'espèce; d'autant qu'apparemment, les organes d'exécution de la loi sur le chômage semblent s'être contentés d'un simple certificat médical d'arrêt de travail non motivé attestant une CT nulle pour une durée indéterminée. Il est d'ailleurs étonnant que l'OCE n'ait notamment pas cherché à savoir si, au vu de la cause présumée de l'atteinte à la santé, (psychique, si l'on considère que ce certificat médical émanait d'un médecin « psychiatre ») (ndr. : la consultation du site de la FMH [https://www.doctorfmh.ch/fr/details-result] mentionne toutefois que ce médecin ne dispose, en matière de formation postgraduée reconnue, que du titre de Médecin praticien, obtenu en 2011) et de la date très récente de l'inscription de l'intéressée à l'ORP, l'incapacité de travail ne remontait pas à une période antérieure à l'inscription au chômage. Peut-être cela était-il dû au fait que de toute manière, l'intéressée ne réunissait, semble-t-il, pas toutes les conditions nécessaires à l'octroi d'indemnités de chômage. Quoi qu'il en soit, malgré les explications que l'intéressée a fournies à la chambre de céans lors de son audition, indiquant qu'elle voulait travailler et qu'elle avait d'ailleurs essayé de retrouver un emploi malgré son incapacité de travail lorsqu'elle était au chômage, elle n'a jamais pu justifier concrètement de telles recherches, et l'argumentation du recourant s'appuyant sur le « jugement » de l'OCE pour considérer que l'appréciation des autorités de chômage confirmerait l'incapacité totale de travailler et de rechercher un emploi, attestée par la psychiatre traitante, ne saurait être suivie pour les raisons qui viennent d'être exposées.

e. S’agissant plus particulièrement du critère ayant trait à l'état de santé de l’assuré (dans le cas d'espèce, de l'épouse du recourant), il faut rappeler que les organes d'exécution en matière de prestations complémentaires ne disposent pas des connaissances spécialisées pour évaluer l'invalidité d'une personne. C'est notamment pour ce motif qu'ils sont liés par les évaluations de l'invalidité effectuées par les organes de l'assurance-invalidité lorsqu'ils fixent le revenu exigible des assurés partiellement invalides au sens de l'art. 14a de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301) (ATF 117 V 202 consid. 2b). Il n'en demeure pas moins que cette jurisprudence sur la force obligatoire de l'évaluation de l'invalidité par les organes de l'assurance-invalidité ne s'applique qu'à la condition que ceux-ci aient eu à se prononcer sur le cas et que l'intéressé ait été qualifié de personne partiellement invalide par une décision entrée en force. Mais même dans ce cas, les organes d'exécution en matière de prestations complémentaires doivent se prononcer de manière autonome sur l'état de santé de l'intéressé lorsqu'est invoquée une modification intervenue depuis l'entrée en force du prononcé de l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_68/2007 du 14 mars 2008 consid. 5.3; ATAS/312/2018 consid. 6b).

En l'espèce, l'OAI a été saisi d'une demande de prestation de la part de l'épouse du recourant, le 13 septembre 2019, soit le lendemain du jour où son dossier de chômage a été annulé. Au jour de la décision entreprise, et plus tard encore dans le courant de la présente procédure, l'OAI ne s'était pas prononcé quant au degré d'invalidité de l'assurée, et la procédure en était à un stade peu avancé, de sorte que l'OAI avait indiqué, sur demande de la chambre de céans, n'être pas même en mesure d'évaluer le délai dans lequel il pourrait envisager de clore son instruction administrative.

En l'occurrence, au moment où la décision entreprise a été rendue (11 février 2020), force est de constater que l'OAI n'avait pas encore statué sur la demande de prestation de l'épouse, de sorte que le SPC n'était pas en mesure de se fonder sur un degré d'invalidité dûment établi par une décision en force de l'autorité d'exécution de l'assurance-invalidité. Ainsi, à teneur de la jurisprudence rappelée ci-dessus, il devait se prononcer de manière autonome, au vu des éléments figurant au dossier. À cet égard, les documents médicaux dont disposait l'intimé au moment où il a statué ne permettaient guère de retenir, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l'épouse du recourant était dans l'incapacité, qui plus est totale, de reprendre un emploi, ou d'en rechercher un. Lorsqu'elle s'est inscrite à l'ORP le 30 juillet 2019, elle déclarait rechercher un emploi à 100 %. Elle n'a toutefois jamais justifié avoir recherché le moindre emploi, et ce n'est que le 21 août 2019 que le recourant, représenté par ASSUAS et par Pro Senectute, dans le cadre de l'instruction de l'opposition formée à l'encontre de la décision du 23 juillet 2019, a communiqué à l'intimé les premiers éléments médicaux relatifs à l'état de santé de son épouse, soit une attestation de la Dresse C______ du 7 août 2019, aux termes de laquelle la patiente était suivie (à la Permanence Médico-Chirurgicale de Plainpalais) en psychiatrie « depuis des années », souffrant d'une dépression récurrente chronique et actuellement en thérapie de soutien et médicamenteux. Le 14 octobre, le recourant, par le truchement de Pro Senectute, a notamment informé le SPC de l'annulation du dossier de son épouse auprès de l'OCE, et du dépôt par cette dernière d'une demande de prestations (rente) auprès de l'OAI pour dépression, demande à laquelle était jointe l'attestation de la psychiatre susmentionnée du 7 août 2019. Quelques jours plus tard, l'hospice a communiqué au SPC la copie d'un certificat médical « fichet d'arrêt de travail » faisant état d'une CT nulle de l'épouse dès le 9 septembre 2019, pour une durée indéterminée.

Force est de constater qu'indépendamment des moyens limités du SPC pour se prononcer sur l'état de santé d'un administré, ici de l'épouse du bénéficiaire des PC, les documents médicaux produits jusqu'à la décision sur opposition étaient largement insuffisants pour reconnaître, au degré de la vraisemblance prépondérante, l'épouse affectée dans sa santé au point d'être totalement incapable de travailler et/ou de rechercher un emploi. L'attestation de la Dresse C______ ne peut se voir reconnaître une pleine valeur probante, selon les exigences de la jurisprudence : elle est fondée sur des éléments anamnestiques quasiment inexistants, et à tout le moins vagues; le diagnostic de dépression chronique ne vise aucune position de nomenclature d'une classification statistique reconnue (CIM-10, DSM, ), ce qui a une incidence notable sur le caractère incapacitant d'une atteinte à la santé; le degré d'intensité de la dépression évoquée n'est pas précisé par la Dresse C______. À cela s'ajoute encore le fait qu'en ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). La question de savoir si la valeur probante de ces documents médicaux doit encore être écartée au motif que le diagnostic psychiatrique n'aurait pas été posé par un spécialiste reconnu peut rester ouverte.

À cela s'ajoutent encore des éléments, certes apportés sur recours, soit après qu'ait été rendue la décision entreprise, qui montrent a priori que l'état de santé de l'épouse du recourant n'était pas tel, lorsqu'a été rendue la décision entreprise, que l'on puisse reprocher à l'intimé, dans le cadre de son devoir de se prononcer de manière autonome sur l'état de santé de l'intéressée, d'avoir implicitement, mais de façon compréhensible, nié que l'état de santé allégué de l'épouse du recourant l'empêcherait de retrouver un emploi, en tout état après la période d'adaptation de six mois retenue par l'intimé, sur opposition. En effet, les nombreux certificats d'incapacité de travail (mensuels et sous la forme de fichets, eux aussi non motivés) portant sur des périodes antérieures à la décision entreprise ne permettent pas d'aboutir à une conclusion différente. Au contraire, l'attestation du 3 mars 2020 de la Dresse C______, rapprochée d'autres éléments apportés au dossier dans le cadre de l'instruction du recours, permet au contraire de conforter le fait que, n'en déplaise au recourant, on ne saurait considérer que l'état de santé de son épouse ne lui permettait pas de reprendre une activité professionnelle, dans le cadre de l'obligation des époux de réduire le dommage; selon cette attestation, la Dresse C______ indique que la patiente est suivie par la permanence depuis 2012 (c'est le soussigné qui souligne), suite à un trouble dépressif chronique l'empêchant de travailler de façon stable; qu'actuellement son état psychique était en diminution progressive avec des rechutes fréquentes; qu'elle présentait des troubles de concentration, fatigue, insomnies et angoisse persistante. Elle prenait des psychotropes, des anxiolytiques et son état actuel ne lui permettait pas de travailler. La thérapeute était ainsi plus précise que lors de l'établissement son attestation du 7 août 2019 au sujet du début du suivi psychiatrique (« 2012 » versus « des années ») : on constate toutefois, en consultant l'extrait du compte individuel (doc 5 dossier AI) qu'en 2012, travaillant chez F______ SA, l'épouse avait travaillé toute l'année pour un revenu déclaré de CHF 84'371.-; qu'en 2013, toujours chez le même employeur, pendant toute l'année, elle avait réalisé un revenu de CHF 77'117.-; qu'en 2014, toujours chez le même employeur, de janvier à novembre, elle avait réalisé un salaire de CHF 79'350.- et en décembre (pas d'inscription) un revenu de CHF 4'419.- (indemnités de chômage identifiées par le code « affilié 1______ »); de janvier à juin 2015 (indemnités de chômage) pour un montant de CHF 26'519.- et du 2 juin à décembre 2015 chez Accès Personnel SA, un revenu déclaré de CHF 41'262.-; de janvier à juin 2016, toujours chez Accès Personnel SA, un revenu de CHF 24'709.-; puis, de juin 2016 à février 2017 (indemnités de chômage) pour un total de CHF 34'155.-; en 2017, de février à avril chez Accès Personnel SA pour CHF 15'314.-, et d'avril à décembre 2017 (indemnités de chômage) pour CHF 29'948.-; de janvier à mars 2018 (indemnités de chômage) pour CHF 7'571.-; enfin, en août 2018, chez G______ pour CHF 457.-. En d'autres termes, entre 2012 et 2017, l'épouse a réalisé malgré la dépression chronique alléguée par sa psychiatre traitante des revenus annuels (salaires et indemnités de chômage) pratiquement tous supérieurs au salaire hypothétique retenu par le SPC, avec des salaires allant de CHF 84'371.- en 2012 à un revenu légèrement inférieur au salaire hypothétique retenu (CHF 49'468.-) en 2017. En 2018, elle était au chômage mais a tout de même pu travailler occasionnellement (août 2018), alors que son médecin traitant attestait de son incapacité totale de travail depuis mars 2018.

Quant au généraliste traitant, le Dr E______, en ce qui concerne les aspects somatiques pour lesquels il suivait l'intéressée depuis 1998, il situait le début de la maladie en 2016 mais reconnaissait une CT exigible dans l'activité habituelle de 100 % (doc 6 dossier AI), renvoyant l'OAI à la psychiatre pour ce qui était de l'incapacité de travail. Tous les diagnostics somatiques qu'il a retenus étaient selon lui sans incidence sur la CT.

Au vu de ce qui précède, l'OAI n'ayant apparemment à ce jour pas encore pris de décision au sujet de la demande de prestations de l'épouse, son invalidité alléguée, n'est à tout le moins pas évidente; si tel avait été le cas, l'OAI aurait pu d'ores et déjà statuer.

Ainsi, la décision entreprise n'apparaît pas critiquable, le SPC ayant, du point de vue de la chambre de céans, suffisamment instruit le dossier, en particulier sur opposition, en tout état en examinant les critères qui lui sont propres, soit les circonstances et éléments n'entrant pas en ligne de compte dans le domaine de l'assurance-invalidité. C'est aussi à juste titre qu'il a considéré que l'inactivité de l'épouse durant la période concernée n'était pas due à des motifs conjoncturels, d'autant que l'intéressée elle-même attribue exclusivement cette inactivité, y compris l'absence de recherches d'emploi, à son état de santé (quand bien même elle prétend en avoir effectuées pendant la période où elle était au chômage, sans le démontrer). Ainsi c'est à bon droit que le SPC, après avoir admis sur opposition de ne pas tenir compte d'un revenu hypothétique pendant la période de mai à octobre 2019, a maintenu dès le 1er novembre 2019 la prise en compte d'un tel revenu, dont le montant n'est au demeurant pas contesté par le recourant, pas plus d'ailleurs que n'est remise en question la période d'adaptation de six mois qui parait adéquate, dans le cas d'espèce. Le recourant ne conteste en effet cet aspect de la décision que dans la mesure où il estime que dès le début de son droit aux PC, l'intimé n'aurait tout simplement pas dû retenir de revenu hypothétique, en raison de l'état de santé de l'épouse l'empêchant déjà à cette époque d'exercer la moindre activité lucrative, et même d'en rechercher une.

Le recourant ne peut dès lors prétendre qu'aux prestations d'aide sociale en cours et à l'aide de l'hospice. La question pourrait toutefois être revue, en fonction de la décision à rendre par l'OAI, mais en l'état, la décision entreprise ne peut qu'être confirmée.

10.    Ainsi, le recours sera rejeté. Pour le surplus, la procédure est gratuite.

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le