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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2218/2023

ATA/481/2025 du 29.04.2025 sur JTAPI/835/2024 ( LCI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2218/2023-LCI ATA/481/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 avril 2025

3ème section

 

dans la cause

A______ & CIE SA recourante
représentée par Me Jean-Daniel BORGEAUD, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

ÉTAT DE GENÈVE

et

B______,

C______, D______ et E______ F______

F______-G______ H______,

représentés par Me François BELLANGER, avocat intimés

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 août 2024 (JTAPI/835/2024)


EN FAIT

A. a. A______ & Cie SA (ci-après : A______), succursale d’une entreprise suisse, a pour but l’importation, l’exportation et le commerce de produits alimentaires et de consommation.

b. A______ est propriétaire des parcelles nos 901, 902, 905 à 908, ainsi que 3'679 non pertinente dans le présent litige, sur la commune de I______ (ci‑après : la commune), sises en zone de développement industriel et artisanal (ci‑après : ZDIA) sur une zone de fond villa.

Les six parcelles sont adjacentes et se présentent comme deux rectangles posés l’un sur l’autre, légèrement décalés vers l’est, pour celui du haut et vers l’ouest pour celui du bas. Le rectangle du nord est composé, d’ouest en est, des parcelles nos 906, 901 et 902 et celui du sud, des nos 905, 907 et 908.

Une parcelle, n° 909, se trouve dans l’espace à l’est de la parcelle n° 908, au sud de la n° 902.

Parmi les trois parcelles au nord, la n° 906 ne contient pas de construction. Les nos 901 et 902 sont aux adresses, respectivement, 29 et 25, chemin J______. À teneur du registre foncier, elles comprendraient chacune une habitation et ont un accès au chemin J______. Les parcelles au sud sont sises aux 8 et 6, chemin de K______, la parcelle n° 907, située entre elles est un chemin d’accès d’approximativement 2 m de large et 40 m de long.

Les six parcelles servent actuellement de parking, conformément aux considérants qui suivent.

c. Le chemin J______, de 2.5 m de largeur environ, longe cette zone au nord, bordant les parcelles nos 902, 901 et 906.

Le chemin de K______ longe ces parcelles à l’est, puis tourne au sud en direction de l’ouest. Il borde ainsi les parcelles nos 902, 909 dans le virage puis 908, 907, 905 et continue son tracé en direction de l’ouest, vers les adresses nos 10 et suivants du chemin de K______ puis le chemin L______. Il est large d’environ 4.5 m au sud du tracé litigieux et est bordé, de l’autre côté du chemin par des voies de chemins de fer. En face de la parcelle n° 909, dans le virage, se trouve l’adresse 21, chemin de K______.

Un giratoire est sis à l’intersection entre les chemins J______ et de K______.

d. Les six parcelles sont louées par A______ à des entreprises commerciales (M______ Sàrl, N______ SA notamment) qui déploient des activités de services de stationnement en lien avec les activités aéroportuaires (« valet parking »). Cette activité implique des déplacements quotidiens et fréquents de plusieurs dizaines de voitures. Les véhicules accèdent aux places de stationnement par le chemin de K______, à la hauteur de la parcelle n° 908.

e. Les parcelles sont sises dans le périmètre du plan directeur de la zone industrielle des O______ à I______, situé entre la route de P______ au nord et le chemin de K______ à l’est et au sud (ci-après : PDZIBAT-Nord), adopté par le Conseil d’État le 4 mai 2022 (plan n° 1______).

Il prévoit notamment l'aménagement d’une nouvelle voie de circulation industrielle longeant les parcelles de la propriétaire au nord, dans le chemin J______, et des liaisons de mobilité douce, notamment une « voie mixte piétons et cycles à créer », longeant les parcelles de la propriétaire, au sud, au chemin de K______.

B. a. Le 30 décembre 2020, A______ a déposé une demande d’autorisation de construire en procédure accélérée (APA 2______) au département du territoire (ci‑après : le département) aux fins d’entreposer provisoirement des véhicules et des matériaux de chantier sur ses six parcelles, sous l’intitulé « régularisation I‑3______, entreposage provisoire de véhicules et de matériaux de chantier (durée trois ans) – démolition de barrières – protections d’arbres – création de noues – abattage d’arbres ».

b. L’autorisation a été délivrée par le département le 3 février 2023.

Le plan visé ne varietur (ci-après : vnv) joint à la décision indique que les six parcelles sont réunies pour former une zone de parking de 314 places. Les grillages provisoires existant, délimitant les parcelles, sont à évacuer. Trois arbres doivent être abattus. Douze sont maintenus. L’entrée et la sortie des véhicules s’effectue sur le chemin de K______ aux nos 6 et 8.

Le maintien des aménagements autorisés à titre provisoire était limité à une durée de trois ans. À l’échéance du délai, les aménagements devaient être supprimés.

C. a. Le 21 décembre 2021, l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) a requis du département la délivrance d'une autorisation de construire portant sur l'aménagement de la Voie Verte d'Agglomération Rive Droite (ci‑après : VVA‑RD), secteur 2 ; mesure 333 – 11 concernant notamment les parcelles précitées. Cette requête a été enregistrée sous la référence DD 4______.

Le projet visait à réaliser le deuxième des trois secteurs que comprend la VVA-RD, se situant entre les gares de I______ et P______. Cette voie devait offrir un nouvel espace public continu de plus de 5 km entre le quartier de Concorde et la route de Satigny, à travers les communes de I______, P______ et Satigny. L'un des objectifs de ce projet était de favoriser la mobilité douce.

Il était notamment prévu que le chemin de K______, depuis le chemin J______, soit interdit à la circulation, hormis les poids lourds riverains, lesquels pourraient circuler en sens unique en destination des nos 10 à 20 du chemin de K______, sur une nouvelle route jouxtant la VVA-RD, avec une séparation des modes doux des transports individuels motorisés (ci-après : TIM).

Selon les plans d’aménagement (A04) et de mobilité (N01 et 06) du secteur concerné (7______), la voie de circulation projetée oscillerait entre 6.27 et 3.63 m de largeur dans le contour de la parcelle n° 909, aurait environ 5 m de large en longeant les parcelles nos 908, 907 et 905 (sous réserve d’aménagements prévus qui rétréciraient la chaussée jusqu’à 3.3 m) avant de s’élargir, après la parcelle n° 905, en direction de l’ouest, à près de 9 m.

b. Dans le cadre d’une enquête publique relative à la réglementation du trafic aux chemins de K______ et L______, A______ a souhaité que soit ajoutée une exception à l’interdiction de circuler pour les automobiles et motocycles afin que l’accès aux nos 6 et 8 chemin de K______ soit garanti tant qu’une autorisation de construire conforme au PDZIBAT-Nord n’avait pas été délivrée.

c. Dans sa réponse du 15 mai 2023, le département a refusé d’intégrer les modifications précitées. « La VVA d[evait] évoluer avec la disparition progressive des accès sud aux parcelles industrielles, telle que prévue à terme par les plans directeurs de zone industrielle ».

d. Dans le cadre de l’instruction, l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) a rendu, le 16 mai 2023, un préavis liant comportant un arrêté de circulation (n° 2023‑5______ EP 6______ du 16 mai 2023, réglementation de la circulation ; ci‑après : l’arrêté de circulation) relatif, notamment, aux chemins de K______ et L______.

Le rapport de mobilité de TRAFITEC du 30 novembre 2022 détaille sur 83 pages les problématiques des différentes mobilités concernées par le projet, soit les TIM, transports en commun, les modes doux (cyclistes [lents : « human power, e-bike 25km/h] et rapides [cyclomoteurs et e-bike 45 km/h], rollers, trottinettes, personnes à mobilité réduite, piétons, notamment) et le stationnement. Il précise que le tronçon au sud des parcelles de la recourante est « trop largement utilisé par un trafic de transit indésirable, ce qui a amené l’OCT à opter pour le mettre en sens unique ». Des comptages et enquêtes, concordants, avaient été effectués notamment au chemin de K______. Il en résultait qu’entre 534 et 664 véhicules légers et entre 95 et 102 poids lourds empruntaient quotidiennement le tronçon. Pour le dimensionnement futur de la structure routière et afin de faciliter les livraisons aux entreprises, seuls les poids lourds étaient retenus. Ainsi, selon l’annexe 1, avec la suppression du trafic de transit, cela représentait, aux heures de pointe du matin ou du soir, un véhicule poids lourd par heure, et, aux heures creuses de l’après-midi, quatre véhicules poids lourds par heure. Selon l’annexe 3, différentes variantes de signalisation avaient été testées, correspondant à autant de statuts de circulation possibles.

e. Le 1er juin 2023, le département a délivré l'autorisation de construire sollicitée, (DD 4______) laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour.

f. Le 1er juin 2023 également, l’arrêté de circulation n° 2023-5______ EP 6______ du département des infrastructures du 16 mai 2023 a été publié dans la FAO. Il est libellé comme suit :

« En regard de l'autorisation de construire DD 4______ :

1.             a) Au chemin de K______ sur son tronçon compris entre le giratoire aménagé à son intersection avec le chemin J______ et son n° 21 [ci‑après : tronçon 1], la circulation des voitures automobiles et des motocycles est interdite à l'exception de l'accès aux n° 23-25 chemin J______ et l'accès des poids lourds aux n° 10-20 chemin de K______.

b) Un signal "circulation interdite aux voitures automobiles et aux motocycles" (2.13 OSR) muni d'une plaque complémentaire "Accès aux n° 23-25 ch. J______ et accès poids lourds aux n° 10-20 ch. de K______ seul autorisés" indique cette prescription.

2.             a) Au chemin de K______ sur son tronçon compris entre le n° 21 et le n° 10 [ci-après : tronçon 2], la circulation des voitures automobiles et des motocycles est interdite à l'exception des poids lourds accédant aux n° 10-20 chemin de K______.

b) Un signal "circulation interdite aux voitures automobiles et aux motocycles" (2.13 OSR) muni d'une plaque complémentaire "Accès poids lourds aux n° 10-20 ch. de K______ seuls autorisés" indique cette prescription.

3.             a) le chemin de K______, sur son tronçon entre la hauteur du n° 21 et le n° 10, est décrété à sens unique, avec circulation des cycles en sens inverse, sens autorisé en direction du chemin L______.

b) Une signalisation "Sens unique avec circulation des cycles en sens inverse" (4.08.1 OSR), respectivement "Accès interdit" (2.02 OSR), munie d'une plaque complémentaire portant la mention "Cycles et cyclomoteurs exceptés" indique cette prescription.

(…) ».

D. a. Le 3 juillet 2023, A______ a formé recours devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre ces décisions, lequel a été enregistré sous le numéro de procédure A/2261/2023. Elle a conclu, à titre préalable, à la tenue d'un transport sur place, principalement, à l'annulation de la décision d'autorisation de construire et de l'arrêté de circulation du 1er juin 2023, subsidiairement à ce que cet acte soit modifié afin de prévoir une exception permettant l'accès aux véhicules aussi pour les nos 6 à 8, chemin de K______ et à inviter l'OCT à faire adapter le schéma de signalisation en ce sens.

Le projet querellé privait les parcelles nos 905, 907 et 908 de tout accès au domaine public et les enclavait. Il ne prévoyait aucune solution afin de remédier au problème posé par le changement du régime de circulation et péjorait ainsi l'activité des entreprises locataires. Cette décision supprimait l'équipement des parcelles lui appartenant au sens de l'art. 19 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700). Elle entrait aussi en contradiction avec l'APA 2______ qui lui avait été délivrée, entrée en force, dont les plans indiquaient que l'entrée de véhicules se faisait par le chemin de K______.

Le régime dérogatoire instauré pour les poids lourds se rendant aux nos 10 à 20, chemin de K______, sans qu'un tel régime ne soit accordé pour ses parcelles, était constitutif d'une inégalité de traitement et entravait de manière injustifiée sa liberté économique, dès lors que cette situation aurait pour effet de diminuer ses possibilités de rendement locatif des parcelles. En application du principe de la proportionnalité, il convenait de modifier l'arrêté de réglementation de la circulation afin de garantir l'accès à ses parcelles tant qu'une autorisation de construire conforme au plan directeur ZIBAT-Nord n'avait pas été délivrée.

L'art. 6 al. 1 de la loi sur les routes du 28 avril 1967 (LRoutes - L 1 10) était violé en raison de l'enclavement des parcelles causé par le projet litigieux.

Vu la configuration de la zone et la situation des parcelles nos 905, 907 et 908, en les privant de leur unique accès à la voie publique, l'autorisation de construire querellée causait des inconvénients graves pour les usagers de ces parcelles, soit les sociétés locataires Q______, M______ Sàrl, N______ SA ainsi que leurs employés, au sens de l'art. 14 LCI. Cette autorisation causait aussi une gêne durable pour la circulation des véhicules. De tels inconvénients pouvaient facilement être évités en autorisant un accès direct à la voie publique aux parcelles précitées par le chemin de K______.

b. Par décision du 6 octobre 2023 (DITAI/8______/2023), le TAPI a prononcé la jonction des causes A/2261/2023 avec deux autres recours, interjetés respectivement par B______ ainsi que par C______, D______, E______ F______ et F______-G______ H______, tous propriétaires de parcelles comprises dans le périmètre concerné, sous le numéro de cause A/2218/2023.

c. Le département a conclu à l'irrecevabilité des recours, subsidiairement à leur rejet. A______ disposait de deux accès motorisés aux parcelles nos 901 et 902, permettant d'accéder à ses parcelles nos 905, 907 et 908. Le projet n'affecterait donc pas l'accès à ses parcelles pour les véhicules motorisés et était proportionné, de sorte que la garantie de sa propriété n'était pas violée. Quoiqu'il en soit, l'atteinte ne pouvait être qualifiée de grave et le projet répondait à divers intérêts publics prépondérants, notamment la limitation des nuisances dues à la circulation, l'amélioration de l'attractivité des espaces publics et la sécurité, mais aussi de la biodiversité. Ses parcelles étaient destinées à l'entreposage provisoire de véhicules et de matériaux de chantier pour une durée de trois ans et non à une activité de « valet parking ». Ses mouvements quotidiens n'étaient donc pas pertinents, mais soulevaient uniquement la question de la conformité de l'activité à l'autorisation de construire. Les conséquences pécuniaires avancées n'entraient pas en ligne de compte.

d. Dans sa réplique, A______ a relevé que les plans vnv de l'APA 2______ ne faisaient état que d'une seule entrée et sortie de véhicules sur le chemin de K______. À l'issue du délai de validité de trois ans, l'unité des parcelles concernées par cette autorisation de construire cesserait et les parcelles ne seraient plus liées entre elles. Elles devraient toutes être équipées en voie d'accès. Ainsi, l'autorisation de construire priverait l'accès aux parcelles nos 905, 907 et 908. Les accès motorisés aux parcelles nos 901 et 902 ne permettraient plus l'accès aux parcelles, puisque les plans de l'APA 2______ indiquaient également que le périmètre des places de stationnement était délimité par une clôture, pour des raisons de sécurité, et pour éviter les intrusions. En outre, le tronçon du chemin J______ à partir du n° 29 jusqu'au giratoire était un chemin privé en copropriété, avec une servitude de passage à pied et à véhicules en faveur des parcelles nos 901 et 906 exclusivement, à l'exclusion des parcelles nos 905, 907 et 908.

L'activité déployée sur les parcelles était conforme à l'affectation de la zone. L'APA 2______ prévoyait la mise en place de plusieurs parkings pour un total de 314 places de stationnement. Une voie d'accès suffisante était donc nécessaire pour assurer les déplacements de véhicules engendrés par cette activité de « valet parking ». La décision querellée instaurait un régime de circulation dérogatoire pour le passage des poids lourds se rendant aux 10-20, chemin de K______, depuis le giratoire entre le chemin J______ et le chemin de K______, sans que ce régime ne profite aux parcelles nos 905, 907 et 908. En application du principe de proportionnalité, une dérogation pour l'accès aux parcelles précitées aurait dû aussi lui être accordée. La décision lui causait une perte de rentabilité des parcelles.

La situation des parcelles nos 905, 907 et 908 était identique à celles sises au niveau des nos 10 à 20, chemin de K______, à savoir qu'elles disposaient d'un unique accès à la voie publique. De plus, le chemin J______ n'était pas suffisant pour permettre le report du trafic en provenance ou en partance de ses parcelles depuis le chemin de K______. Il existait un accès motorisé aux parcelles au niveau du 19, chemin J______, mais celui-ci ne serait plus utilisé conformément à ce que prévoyait les plans de l'APA 2______, ce d'autant plus qu'il était trop exigu pour accueillir le trafic à destination de ses parcelles.

L'autorisation de construire litigieuse, en tant qu'elle supprimait les vois d'accès à ces parcelles, supprimait également leur équipement.

Le chemin J______ était un petit chemin privé exigu d'une largeur maximale de 2.5 m et composé d'une seule voie de circulation, ce qui rendait impossible le croisement de véhicules et la circulation simultanée dans les deux sens. Avec le régime imposé par l'autorisation de construire litigieuse, la circulation devrait se faire en alternance, sur un chemin ne disposant pas de la visibilité nécessaire ou adapté à un tel trafic, en violation des normes VSS applicables.

L'autorisation de construire litigieuse violait l'art. 14 LCI en raison de l'absence de possibilité d'accès aux parcelles nos 905, 907 et 908, dès lors que celles-ci n'étaient pas au bénéfice de la servitude de passage au niveau du chemin J______ dont bénéficiaient les parcelles nos 901 et 906.

L'usage du chemin de K______ était une condition indispensable pour que ses locataires puissent opérer leurs activités commerciales de stationnement. La privation de l'accès à ses parcelles constituait dès lors bien une violation grave injustifiée de sa liberté économique.

e. Par jugement du 27 août 2024, après que le département eut répliqué, le TAPI a rejeté le recours.

ea. La qualité pour recourir était admise. La demande d’un transport sur place, en soi non obligatoire, était rejetée.

eb. A______ se plaignait d'une violation de l'art. 19 LAT, dans la mesure où la décision querellée supprimerait tous ses accès au domaine public pour les parcelles nos 905, 907 et 908 depuis le chemin de K______. Il était indéniable que la mesure litigieuse avait pour effet d'empêcher tout accès aux parcelles nos 905, 907 et 908 par le biais du chemin de K______. Il ressortait toutefois du dossier que l'ensemble des parcelles de A______ disposait d'autres accès au domaine public. Se posait la question de savoir s’ils étaient suffisants sous l'angle de l'art. 19 LAT, notamment en lien avec l'APA 2______.

Selon les photographies aériennes du site d’information du territoire genevois (ci‑après : SITG), il apparaissait que la société disposait de plusieurs accès à ces différentes parcelles, notamment par le biais du chemin de K______ (parcelles nos 907 et 908), mais également au niveau des 25 et 29, chemin J______ (parcelle n° 902, respectivement n° 901).

À teneur du plan de l'APA 2______, l'évacuation des grillages qui séparaient les parcelles et la construction d'une nouvelle clôture autour de l'ensemble du périmètre était permise, supprimant ainsi les accès actuels au niveau de la parcelle n° 902 et de la parcelle n° 901. Il en ressortait également que seule une entrée de véhicules était prévue au niveau du chemin de K______.

Cela étant, si l'APA 2______ autorisait certes le parcage de véhicules et de matériel de chantier, celle-ci n'avait qu'une durée de validité de trois ans (échéance au 3 février 2025) [sic], de sorte que l'usage qu'en faisait actuellement A______, respectivement ses locataires, n'était que temporaire, contrairement au projet litigieux. Au demeurant, il apparaissait que les constructions édifiées sur les parcelles de la société et les clôtures qui les séparaient, avaient été démolies depuis plusieurs années, de sorte qu'elles formaient actuellement un tout. Ainsi, si la mesure litigieuse empêchait certes l'accès par le biais du chemin de K______, force était de constater qu'elle ne déployait aucun effet sur les autres accès aux parcelles de A______, notamment par le biais des accès existants au niveau des 25 et 29, chemin J______. Dans cette mesure, la perte des accès existants au niveau des parcelles nos 902 et 901 ne résultait pas du projet litigieux, mais uniquement de la volonté de la société d'ériger une clôture à cet endroit. Or, la simple volonté d'un propriétaire n'était pas suffisante pour admettre que les accès n’étaient techniquement ou juridiquement pas garantis, cette appréciation devant être conduite sur la base d'éléments objectifs.

Il lui était loisible de maintenir les accès existants, notamment au niveau du n° 25, chemin J______, étant rappelé qu'en tant que propriétaire, la société pouvait toujours renoncer à l'exécution d'une autorisation de construire délivrée, ou, cas échéant, en demander la modification par le biais d'une autorisation de construire complémentaire, notamment en vue de faire édifier un portail d'accès. Dans cette mesure, la question de savoir si la servitude d'accès existante était suffisante ou non pour accueillir le trafic lié à l'activité de « valet parking » pouvait souffrir de rester indécise, dès lors que la société pouvait facilement conserver un autre accès existant au domaine public et reliant l'ensemble de ses parcelles.

Ainsi, malgré la restriction d'accès au niveau du chemin de K______, l'accès à l'ensemble des parcelles de A______ était encore techniquement et juridiquement garanti au sens de l'art. 19 LAT.

ec. A______ se prévalait aussi d'une violation de l'art. 6 LRoutes, en raison de la perte d'accès aux parcelles nos 905, 907 et 908. Or, il ressortait du texte clair de l'art. 6 LRoutes que cette norme s'appliquait dans le cadre du processus de désaffectation du domaine public, ayant pour conséquence une perte d'accès pour les riverains. Il était manifeste que cela ne correspondait pas à la situation de la société.

ed. A______ prétendait que cette perte d'accès au niveau du chemin de K______ violerait la garantie de la propriété et l'égalité de traitement dès lors qu'elle ne bénéficierait pas d'une exception permettant l'accès à ses parcelles nos 905, 907 et 908, ainsi que de sa liberté économique, vu les pertes de rendement locatif qu'engendreraient les mesures litigieuses.

Les restrictions alléguées découlaient de l’arrêté de circulation du 1er juin 2023, dont le bien-fondé avait été examiné préalablement dans le jugement. L'argumentation de la société se fondait essentiellement sur les effets de la perte d'accès à ses parcelles depuis le chemin de K______, en lien avec l'activité de « valet parking » qui s'y déroulait. Elle ne faisait ainsi pas valoir que les exigences de base légale et d'intérêt public feraient défaut, de sorte que le grief se limitait à la question de la proportionnalité de la mesure litigieuse (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101). En tout état, il était évident que ces conditions étaient remplies, dès lors que le droit fédéral de la circulation routière permettait la modification de l'accessibilité d'une voie de circulation et d'en interdire l'accès (en particulier les art. 5 al. 1 LCR et 18 OSR). En outre, cette mesure répondait au critère de l'intérêt public dès lors qu'il visait notamment à permettre d'améliorer les conditions d'accès, de circulation et de circulation des modes de déplacement doux, conformément aux objectifs du plan directeur cantonal 2030 (ci-après : PDCn) et permettait de concrétiser une forte demande du public. Sous l'angle de la proportionnalité de cette suppression d'accès par le chemin de K______, si A______ avait certes obtenu l'autorisation de construire provisoire APA 2______, celle-ci n'autorisait pas formellement le déroulement de cette activité, mais se limitait à permettre l'entreposage temporaire de véhicules et de matériel de chantier pour une durée de trois ans. Il apparaissait donc douteux que la société puisse se prévaloir des effets des mesures litigieuses sur l'activité de « valet parking » pour s'opposer à celles-ci. Quoiqu'il en était, la restriction à son droit de propriété ne pouvait être qualifiée de grave, dès lors que même si la mesure litigieuse empêchait certes d'accéder à ses parcelles par le chemin de K______, il n'en demeurait pas moins qu’elle disposait encore d'autres accès à ses parcelles comme vu précédemment. La mesure ne limitait ainsi manifestement pas à l'excès l'accessibilité à ses parcelles.

Il en allait de même d'une éventuelle restriction à sa liberté économique, dès lors que la mesure litigieuse n'empêchait pas formellement l'activité de « valet parking » - dont la conformité à l'autorisation de construire APA 2______ pouvait être mise en doute - dans la mesure où il existait d'autres accès à ses parcelles et ce, pour une période provisoire de trois ans. Au demeurant, son argumentation se limitait à des déclarations générales sur de potentielles pertes de rendement locatif qu’elle n’avait pas démontrées.

A______ ne parvenait pas à démontrer une violation du principe de l'égalité de traitement, étant relevé que l'exception à l'interdiction d'utiliser le chemin de K______ pour les véhicules poids lourds en vue de desservir les nos 10 à 21 dudit chemin, visait notamment à permettre à ces véhicules imposants d'éviter des manœuvres complexes et difficiles. En tout état, l'activité de « valet parking » aéroportuaire n'impliquait à l'évidence pas de poids lourds ou des manœuvres difficiles de véhicules, de sorte que pour cette raison déjà, les situations n’étaient pas comparables, ce qui excluait une violation du principe d'égalité de traitement. Au demeurant, la société n'exposait pas en quoi sa situation serait identique à celle des autres sociétés bénéficiant du régime d'exception pour les poids lourds, mais dont les autres véhicules étaient également soumis au régime d'interdiction.

E. a. Par acte du 30 septembre 2024, A______ a interjeté recours contre ce jugement devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a conclu à l’annulation de la DD et de l’arrêté, subsidiairement à ce que les chiffres 1.a), 1.b), 2.a) et 2.b) de l’arrêté soient annulés, plus subsidiairement à ce qu’ils soient modifiés en rajoutant l’accès aux nos 6-8 chemin de K______ et l’OCT devait être invité à faire adapter le schéma de signalisation en fonction. Préalablement, un transport sur place devait être ordonné et les administrateurs des quatre sociétés locataires devaient être entendus en qualité de témoins.

Les faits avaient été constatés de façon inexacte. Les parcelles nos 905 et 908 n’étaient pas titulaires d’une servitude de passage sur la parcelle n° 900, soit le chemin J______. Il n’existait pas d’accès aux parcelles nos 905 et 908 sans utiliser le chemin de K______.

Le principe de la proportionnalité avait été violé. L’intérêt public à exclure l’accès aux parcelles nos 905 et 908 sur un bref tronçon du chemin pourtant utilisé pour l’accès des poids lourds ne présentait pas une consistance suffisante au regard de l’intérêt privé de la société d’éviter de perdre cet accès et la possibilité de continuer à obtenir un rendement locatif pour ces deux parcelles.

Les art. 19 et 22 LAT étaient violés, l’équipement des parcelles nos 905 et 908 étant supprimé. Ces dernières ne seraient plus desservies d’une manière adaptée à l’utilisation prévue par une voie d’accès suffisante.

Enfin, l’art. 6 al. 1 LRoutes qui excluait la privation d’accès au réseau des voies publiques pour un fond riverain n’était pas respecté.

b. Le département a conclu au rejet du recours.

c. B______, C______, D______ et E______ F______ ainsi que F______-G______ H______ s’en sont rapportés au jugement du TAPI.

d. Dans sa réplique, la société a invité la chambre de céans à tenter une conciliation et a persisté dans ses conclusions. Elle a relevé que si la largeur de la voie était parfois inférieure à 4 m le long de ses propres parcelles, il existait d’autres sections beaucoup plus étroites du tronçon. La réduction de la largeur était un choix d’aménagement. Les éléments prévus pourraient être légèrement ajustés si nécessaire. La largeur résiduelle ne paraissait pas incompatible avec un trafic automobile limité à l’accès aux parcelles nos 905 et 908 puisque des largeurs comparables avaient été prévues sur d’autres portions du chemin de K______ avec un trafic automobile bidirectionnel.

e. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger, y compris sur les mesures d’instruction sollicitée.

f. Le contenu des pièces, notamment des plans ou du rapport de mobilité du 30 novembre 2022 seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La recourante sollicite préalablement une audience de conciliation.

2.1 Selon l’art. 65 al. 1 LPA, les juridictions administratives peuvent en tout temps procéder à une tentative de conciliation.

2.2 La notice explicative de l’annexe A01 de février 2023 produite par la recourante fait mention, sans être contredite, de 40 séances de travail, entre 2020 et 2022, entre le département, les propriétaires et les entreprises dont les accès directs se trouvaient sur les chemins L______ et de K______, afin de trouver avec les intéressés des solutions d’aménagement de la VVA-RD compatibles avec leurs besoins. Dans ces conditions, une tentative de conciliation par la chambre de céans n’apparait pas nécessaire au vu de l’ampleur des négociations préalablement menées. Dans sa réplique devant la chambre de céans, la propriétaire précise avoir sollicité depuis près de deux ans, soit déjà dans ses observations du 30 mars 2023, la « modification très ciblée de l’arrêté de réglementation offrant une solution à cette affaire ». Or, depuis deux ans le département a, à plusieurs reprises, répondu aux divers arguments de l’intéressée et manifesté par là son désaccord avec toute conciliation. Cette position est d’ailleurs conforme à sa réponse, claire, du 15 mai 2023 à la requête de l’intéressée, dans laquelle il avait refusé d’intégrer les modifications précitées, « la VVA d[evant] évoluer avec la disparition progressive des accès sud aux parcelles industrielles, telle que prévue à terme par les plans directeurs de zone industrielle ». De surcroît, la recourante se plaint principalement d’une entrave aux activités de « valet parking » de ses locataires. Cet argument confirme qu’une conciliation entre le propriétaire et le département apparaît difficile, l’utilisation des parcelles concernées impliquant aussi plusieurs sociétés locataires et leurs clients, dont de nombreux absents, leur véhicule étant stationné sur les terrains concernés au motif de leur départ en avion. La propriétaire n’est d’ailleurs au bénéfice que d’une autorisation temporaire de trois années, arrivant bientôt à échéance. Enfin, l’art. 65 al. 1 LPA est potestatif.

Il ne sera en conséquence pas donné suite à la requête de tenue d’une audience de conciliation.

3.             La recourante sollicite un transport sur place et l’audition des administrateurs des sociétés locataires laquelle devrait permettre d’établir que les parcelles ne forment pas un tout, qu’il y a pas d’accès possible par le chemin J______ et que les entreprises locataires déploient chacune leur activité propre dans un espace parcellaire délimité.

3.1 Le droit d'être entendu garanti à l'art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l'administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1). L'autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1).

Le droit d'être entendu ne comprend pas le droit d'être entendu oralement (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_551/2015 du 22 mars 2016 consid. 2.2), ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1).

Par ailleurs, ce droit ne confère pas le droit à la tenue d’une inspection locale, en l’absence d’une disposition cantonale imposant une telle mesure d’instruction, ce qui n’est pas le cas à Genève (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 2b).

3.2 En l’espèce, le dossier comporte les éléments nécessaires permettant d'examiner les griefs soulevés et de statuer, notamment les nombreux plans, les préavis des instances consultatives concernées, les rapports d'expertise du 24 octobre 2022 et de mobilité du 30 novembre 2022, des photos ainsi que les nombreuses écritures. Un transport sur place n’apparait pas nécessaire.

De même, l’audition des administrateurs des sociétés locataires n’apparait pas utile. L’usage que fait actuellement la propriétaire de ses parcelles n’est pas contesté. Il n’est que peu déterminant compte tenu principalement de l’objet du litige, de la prochaine échéance de l’APA et des considérants qui suivent.

Il ne sera pas donné suite aux demandes d’acte d’instruction de la recourante.

4.             Dans un premier grief, la recourante se plaint que le TAPI n’ait pas constaté les faits de façon exacte à savoir qu’il n’existerait pas d’accès aux parcelles nos 905 et 908 sans utiliser le chemin de K______.

4.1 Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a) et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), hypothèse non réalisée en l’espèce.

La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA).

4.2 En l’espèce, le TAPI a retenu que « il était indéniable que la mesure litigieuse avait pour effet d'empêcher tout accès aux parcelles nos 905, 907 et 908 par le biais du chemin de K______. Il ressortait toutefois du dossier que l'ensemble des parcelles de la recourante disposait d'autres accès au domaine public. Se posait la question de savoir s’ils étaient suffisants sous l'angle de l'art. 19 LAT, notamment en lien avec l'APA 2______ ».

Le TAPI a en conséquence considéré comme établi qu’en l’état, il existait un accès aux parcelles nos 905, 907 et 908 par le biais du chemin de K______ et que le projet les en priverait. La phrase suivante évoque l’« ensemble des parcelles de la recourante ». Contrairement à ce que soutient la recourante, le TAPI n’a pas retenu qu’il existerait un accès aux parcelles nos 905 et 908, autre que le chemin de K______ sans utiliser les autres parcelles propriété de la société. Les faits ont donc été correctement établis.

Les questions de savoir s’il est juste de traiter les six parcelles comme une unité, d’une part, et celle de leur équipement au sens de l’art. 19 LAT, d’autre part, relèvent de l’application du droit.

Le grief est infondé.

5.             La recourante se plaint d’une violation des art. 22 al. 2 let. b et 19 al. 1 LAT : la décision litigieuse supprimerait l’équipement des parcelles nos 905, 907 et 908, lesquelles ne seraient plus desservies d’une manière adaptée à l’utilisation prévue par des voies d’accès suffisantes.

5.1 Aux termes de l’art. 22 LAT, aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l’autorité compétente, laquelle est délivrée notamment si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT). Tel est le cas selon l’art. 19 al. 1 LAT lorsque la parcelle est desservie d’une manière adaptée à l’utilisation prévue par des voies d’accès.

5.2 Le droit fédéral n’exige pas qu’une route carrossable mène directement jusqu’au terrain ou au bâtiment projeté pour que celui-ci soit considéré comme équipé. Il suffit qu’il existe une route à proximité, à partir de laquelle il est possible d’accéder à la construction par un chemin piéton, pour autant que des services publics puissent approcher à moins de 80 m et qu’une intervention efficace reste possible (Eloi JEANNERAT in : Heinz AEMISEGGER/Pierre MOOR/Alexander RUCH/Pierre TSCHANNEN [éd.], Commentaire pratique LAT : Autorisation de construire, protection juridique et procédure, 2020, p. 544 ss n. 22 à 26 ad art. 19 LAT).

5.3 En l’espèce, l’accès aux parcelles nos 905, 907 et 908 se fait par le chemin de K______. L’arrêté litigieux a divisé le tronçon litigieux en deux, soit celui compris entre le giratoire et le n° 21 du chemin de K______, situé dans le virage en face de la parcelle n° 909 (ch. 1.a ; tronçon 1), puis celui du n° 21 au n° 10 du chemin de K______ (ch. 2.a ; tronçon 2) qui a été mis en sens unique (ch. 3a de l’arrêté) en direction du chemin L______.

Selon l’arrêté, la circulation des voitures automobiles et des motocycles est ainsi interdite à l'exception, sur le tronçon 1 de l'accès aux nos 23-25, chemin J______, et sur les tronçons 1 et 2 de l'accès des poids lourds aux nos 10 à 20, chemin de K______, en sens unique en direction du chemin L______.

En conséquence, la circulation reste possible sur ledit chemin, mais son accès est limité, tant en ce qui concerne les véhicules qui peuvent l’emprunter que le sens de circulation.

La décision querellée porte en conséquence non sur une question d’équipement au sens de la LAT, le chemin n’étant pas supprimé, mais uniquement sur des problématiques de circulation routière empêchant la recourante d’utiliser cette voie d’accès.

Le grief de violation des art. 22 al. 2 let. b et 19 al. 1 LAT n’est pas fondé.

Subsidiairement, à considérer qu’il s’agisse d’une question d’équipement, il peut être renvoyé à l’argumentation détaillée et convaincante du TAPI rappelée ci‑dessus.

6.             La recourante se plaint d’une violation de l’art. 6 al. 1 LRoutes.

6.1 Les voies du domaine public ne peuvent être désaffectées que dans la mesure où les riverains ne sont pas privés de tout accès au réseau des voies publiques (art. 6 al. 1 LRoutes).

6.2 En l’espèce, le chemin de K______ ne va pas être désaffecté, conformément au considérant qui précède. En conséquence l’art. 6 al. 1 LRoutes ne s’applique pas.

7.             La recourante se plaint d’une violation du principe de la proportionnalité.

7.1 Les cantons sont compétents pour interdire, restreindre ou régler la circulation sur certaines routes (art. 3 al. 2 loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01). Le département est l’autorité compétente en matière de circulation routière (art. 2 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 [LaLCR - H 1 05]).

7.2 Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités et n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Selon une jurisprudence constante, chaque fois que l'autorité administrative suit les préavis des instances consultatives, l'autorité de recours observe une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/1205/2023 du 7 novembre 2023 consid. 4.3 et les arrêts cités).

7.3 Le principe de proportionnalité, garanti par l'art. 36 al. 3 Cst., se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé ‑, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 140 I 218 consid. 6.7.1 ; 136 IV 97 consid. 5.2.2).

7.4 En l’espèce, l’arrêté litigieux du 1er juin 2023 a pour effet d’interdire, au chemin de K______, la circulation des voitures automobiles et des motocycles sur le tronçon 1 à l'exception de l'accès aux n° 23-25 chemin J______ et de l'accès des poids lourds aux n° 10-20 chemin de K______ et sur le tronçon 2, décrété à sens unique en direction du chemin L______, avec circulation des cycles en sens inverse, à l'exception des poids lourds accédant aux n° 10‑20, chemin de K______.

7.4.1 Dans une première critique, la recourante conteste les intérêts publics tels que retenus par le TAPI. Elle soutient qu’ils doivent être nuancés, d’une part, par le fait qu’il s’agirait uniquement de savoir si on peut ajouter au trafic des poids lourds un accès en véhicule bidirectionnel pour les parcelles nos 905 et 908 et d’autre part, que la période concernée ne serait que temporaire, dans l’attente des travaux d’aménagement de la ZIBAT-Nord.

Les intérêts publics à la sécurité et la fluidité du trafic, garanties par l’art. 190 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst‑GE ‑ A 2 00), à l’instar de l’encouragement à la mobilité douce, prévu par l’al. 4 du même article, ne sont pas contestés.

L’autorisation DD 4______ a été délivrée le 1er juin 2023. Selon le rapport de mobilité du 30 novembre 2022, la mise en œuvre de la VVA-RD est prévue dès l’horizon 2025, totalement ou partiellement, en fonction de l’avancement des diverses études et dossiers y relatifs (p. 28). Dans sa réplique du 27 novembre 2024, la recourante ne conteste pas l’intérêt public à la rapide réalisation du projet.

Elle revendique toutefois, pour des véhicules légers, un accès bidirectionnel sur le tronçon entre les nos 21 et 10, de K______. Ce faisant, elle ne se limite pas à solliciter pour ses parcelles un usage similaire aux entreprises autorisées à laisser passer leurs poids lourds en sens unique, mais va au-delà, en contradiction avec le préavis liant de l’office spécialisé. Or, l’OTC souhaitait, d’une part, supprimer tout trafic de véhicules légers sur ce tronçon. À ce titre, il sera relevé que les autres entreprises, au bénéfice d’une autorisation pour leurs poids lourds, ne bénéficient d’aucune dérogation pour leurs véhicules légers. D’autre part, le préavis liant de l’OTC limite le sens de circulation.

Si, certes, les plans vnv font mention de plus de 300 places de parc, l’autorisation APA 2______ consiste en la régularisation d’une infraction. L’autorisation obtenue n’est que temporaire pour trois années. De surcroît, les parcelles concernées étaient destinées à l'entreposage provisoire de véhicules et de matériaux de chantier pour une durée de trois ans et non à une activité de « valet parking », activité impliquant, selon les dires de la recourante, de nombreux mouvements de véhicules.

Enfin, selon les plans, la chaussée devant les parcelles nos 905, 907 et 908 n’est que de 5 m. Une circulation bidirectionnelle, de plus de 300 véhicules en « valet parking », en mixité avec de la mobilité douce n’apparait pas compatible avec les buts d’intérêts publics précités. Les coupes dessinées en bas des plans d’aménagement A04 le confirment. Ainsi si une largeur de 18 m, à l’ouest du chemin de K______ permet de concevoir, à teneur des croquis, la circulation parallèle de voitures, piétons, vélos, avec l’installation de luminaires au centre des voies et que les 10.15 m permettent encore d’accueillir des poids lourds sur la parcelle voisine, à l’ouest, de la n° 905, les 4.35 m devant les parcelles nos 905 et 908 n’autorisent le passage que d’une voiture sans croisement possible.

En conséquence, ni l’ajout de trafic bidirectionnel, ni la « période temporaire dans l’attente des travaux d’aménagement de la ZIBAT-Nord » ne permettent de relativiser les intérêts publics précédemment définis. Ces intérêts publics priment l’intérêt privé, économique, de la propriétaire étant précisé que l’intérêt privé, des locataires, n’est qu’indirect et doit être fortement relativisé, les sociétés pouvant exercer leurs activités sur d’autres terrains.

La comparaison avec la parcelle n° 909 n’est pas pertinente. Ses propriétaires ne sollicitent pas l’accès à la route pour un usage commercial et ne sont concernés que par le tronçon 1.

7.4.2 La recourante conteste le respect de la règle de la nécessité relevant qu’il n’aurait pas été démontré que le trafic bidirectionnel de véhicules le long de la parcelle n° 908 compromettrait un intérêt public consistant.

Cette argumentation fait fi du fait que la recourante ne respecte actuellement pas l’autorisation qui lui a été délivrée. Elle ne tient pas compte du fait que la chaussée, devant la parcelle n° 908 est inférieure à 5 m, comme rappelé ci-dessus, et bordée, au sud, par les voies de chemin de fer. Elle omet aussi le préavis, liant, de l’OCT et nie les intérêts publics à la sécurité et la fluidité, à l’instar de l’encouragement à la mobilité douce précité.

Les choix opérés par le département se fondent sur une étude approfondie de différentes solutions pour la réalisation de la VVA-RD. La délivrance de l’autorisation a impliqué de nombreux spécialistes du département, ce dont les différents rapports témoignent, à l’instar du soin mis à évaluer plusieurs solutions aux fins de tenir compte, de la façon la plus fine possible, de tous les intérêts publics concernés, couvrant, comme précédemment vu, de nombreux utilisateurs aux besoins spécifiques.

La règle de la nécessité est respectée, un trafic bidirectionnel de véhicules, le long de la parelle n° 908, compromet plusieurs intérêts publics primant l’intérêt de la recourante.

7.4.3 La recourante considère que ses intérêts privés n’ont pas été pris en compte dans un rapport raisonnable. Souhaitant développer un projet d’envergure dans la ZIBAT-Nord, elle devrait pouvoir obtenir un rendement des fonds immobilisés le temps nécessaire pour acquérir d’autres parcelles en vue d’une maîtrise foncière cohérente. Or, peu d’activités seraient compatibles avec l’affectation de la zone sans impliquer des constructions ou des investissements significatifs pendant la phase provisoire. La location à des fins de dépôt de véhicules, de parking relais ou de stockage permettrait non seulement de stimuler des investisseurs qui mobilisent des fonds mais aussi de libérer d’autres parcelles susceptibles d’être construites à court plutôt qu’à moyen terme. À ce titre, les intérêts privés de la recourante rejoindraient un certain intérêt public. Il serait ainsi erroné de considérer les parcelles comme un tout et disproportionné de créer artificiellement cette unité en supprimant l’accès au domaine public. Trouver un unique locataire pour l’ensemble du périmètre serait compliqué. La décision risquerait d’entraîner la cessation d’activité d’entreprises unipersonnelles, une friche industrielle délaissée faute d’accès et une perte importante pour la recourante.

Dans ses écritures devant le TAPI, la recourante ne conteste pas que « l’unité parcellaire » bénéficie d’accès par les parcelles nos 901 et 902. Elle y oppose toutefois l’existence actuelle d’un grillage, le fait qu’une servitude de passage à pied et à véhicules sur le chemin J______ ne bénéficierait qu’aux parcelles nos 901 et 906 et que « l’unité parcellaire » ne serait que temporaire. Elle se prévaut toutefois de vouloir développer un projet d’envergure ce qui va dans le même sens que « l’unité parcellaire » évoquée par le département. Les intérêts de la recourante sont économiques. Or, la mesure querellée ne la prive pas de la propriété de ses parcelles ni ne l’empêche de les exploiter. Libre à elle de les organiser comme elle le souhaite, y compris en supprimant toute éventuelle barrière et en repensant les sorties des véhicules. Outre l’accès par la parcelle n° 901, les photographies du SITG témoignent d’un accès de la parcelle n° 902 directement aux alentours du giratoire.

L’arrêté querellé et l’autorisation de construire n’empêchent ainsi pas la recourante d’exploiter ses six parcelles, étant rappelé que son activité actuelle n’est pas conforme à l’APA, que cette dernière arrive en tous les cas prochainement à échéance et que le développement futur de la zone se fera notamment par la « desserte industrielle » de la PDZIBAT-Nord, située précisément au nord des parcelles de la recourante, sur le chemin J______.

Les intérêts privés de la recourante ont ainsi été correctement pris en compte par le TAPI et, précédemment, par les instances de préavis et le département.

Les différents arrêts du Tribunal fédéral invoqués sont sans pertinence compte tenu des particularités du cas d’espèce, singulièrement du fait que le PDZIBAT-Nord est déjà adopté et que les lieux sont voués à se modifier à brève échéance. De même, la recourante ne peut se prévaloir du passage des camions se rendant au chemin de K______ nos 10 à 20. Les entreprises concernées ne contestent pas le sens unique qui leur est imposé sur le tronçon 2 et n’ont pas les mêmes activités commerciales que la recourante notamment en termes de fréquentation de la chaussée concernée.

Même sous l’angle de la garantie de la propriété privée, l’atteinte portée à la recourante repose sur une base légale, ce qu’elle ne conteste pas, répond à plusieurs intérêts publics, déjà cités, nombreux et importants, et respecte le principe de la proportionnalité, lesdits intérêts primant les intérêts économiques de la propriétaire.

En tous points infondés, le recours sera rejeté.

8.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d’indemnité (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 septembre 2024 par A______ & CIE SA contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 août 2024 ;

 

au fond :

le rejette ;

mt à la charge de A______ & CIE SA un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de la recourante, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jean-Daniel BORGEAUD, avocat de la recourante, au département du territoire - OAC ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Catherine TAPPONNIER, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :