Skip to main content

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3449/2024

ATA/1303/2024 du 08.11.2024 ( FORMA ) , ACCORDE

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3449/2024-FORMA ATA/1303/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 8 novembre 2024

sur mesures provisionnelles

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Cécilia De MONTMOLLIN, avocate

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE intimé


Vu le recours interjeté le 18 octobre 2024 auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) par A______, née le ______ 2002, contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 27 septembre 2024 confirmant la décision de ne pas l’admettre dans la filière d’apprentissage d’ébénisterie ;

qu’à teneur de la décision, titulaire d’une maturité gymnasiale obtenue en juin 2021, la recourante avait intégré, en voie duale, la formation de charpentière à la rentrée 2022, obtenu d’excellents résultats justifiant l’autorisation à réduire sa formation de quatre à trois ans ; qu’au terme de sa 3ème année de formation, elle avait en juin 2024 une moyenne générale et des branches théoriques de 5.4 et une note de comportement de 6 ; qu’elle avait mis un terme à son contrat d’apprentissage avec effet au 31 août 2024 et sollicité le 9 septembre 2024 à pouvoir être admise en ébénisterie ;

qu’elle avait exposé que le secteur charpenterie ne reflétait plus la « véritable essence du métier », qu’elle était passionnée par le bois, qu’une formation en plein temps lui permettrait d’acquérir des compétences très variées et développer un savoir-faire artisanal authentique ; qu’en entreprise, les matériaux composites ou panneaux dérivées du bois étaient utilisés au détriment des méthodes traditionnelles en bois massif et qu’elle ne souhaitait plus revivre cela en apprentissage ; que dès lors que les places en dual dans des entreprises favorisant les techniques artisanales étaient rares, elle souhaitait suivre une formation à plein temps ; qu’elle ne devait pas être discriminée parce qu’elle était titulaire d’une maturité ; qu’à la sortie du cycle d’orientation, il était difficile de se projeter dans l’avenir ; qu’à terme, elle souhaitait créer sa propre entreprise ou s’associer à des artisans valorisant les techniques traditionnelles ; qu’elle s’était renseignée et savait que des places de formation à plein temps étaient disponibles ;

que la décision retient que, selon l’art. 12 al. 2 du règlement concernant les apprentis qui fréquentent à temps plein un établissement scolaire du 27 juin 1984 (RAES - J 3 20.09), la priorité pour la formation en voie plein temps était donnée aux élèves mineurs ; que l’art. 12 al. 1 RAES ne prévoyait pas de dérogation ; que la jeune femme pouvait s’orienter vers la formation duale d’ébéniste ;

que dans son recours, l’intéressée relève que le 26 septembre 2024, elle avait reçu par courriel une décision favorable, l’autorisant à intégrer en 2ème année la formation d’ébénisterie en voie plein temps ; que bien qu’elle ne remplisse pas les conditions de l’art. 12 al. 2 RAES, ses bons résultats, sa volonté de se former en ébénisterie en acquérant un savoir‑faire traditionnel, le préavis positif du CPF Construction et le fait que les effectifs en 2ème année étaient faibles, elle était exceptionnellement admise à intégrer la 2ème année d’apprentissage au centre de formation professionnelle (ci-après : CFPC) ; qu’elle avait reçu cette décision par courrier le 2 octobre 2024 ; que le lendemain, la décision négative lui était parvenue par courriel ; que le doyen « métiers du bois » au sein du CFPC lui avait indiqué que le CPFC-ébénisterie serait ravi de l’accueillir, compte tenu de sa motivation et de la disponibilité de places ; qu’il l’avait ainsi encouragée à former une demande d’admission ; qu’elle requerrait à pouvoir, à titre provisionnel, intégrer la filière souhaitée ; qu’elle était au chômage, ne pouvant plus trouver une place d’apprentissage en dual et qu’il restait des places pour la formation plein temps en 2ème année ;

que la recourante fait valoir la violation des art. 95 al. 1 à 3 LIP, 5 al. 2 et 12 RAES, du principe de la bonne foi et des règles sur la révocation de décisions ;

que le DIP a exposé que la « décision » du 26 septembre 2024 constituait un projet, non validé et non signé, dont la recourante ne pouvait se prévaloir ; qu’admettre son intégration dans la classe souhaitée revenait à lui attribuer ce qu’elle requerrait au fond, alors que les chances de succès de son recours n’étaient pas démontrées et que la recourante ne subissait pas de préjudice du fait d’attendre l’issue du recours ;

que la recourante a persisté dans sa requête de mesures provisionnelles ;

Considérant, en droit, l'art. 9 al. 1 du règlement interne de la chambre administrative de la Cour de justice du 26 mai 2020, à teneur duquel les décisions sur effet suspensif sont prises par le président de ladite chambre, respectivement par la vice-présidente, ou en cas d'empêchement de ceux-ci, par une juge ;

qu'aux termes de l'art. 66 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), sauf disposition légale contraire, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours (al. 1) ; que toutefois, lorsque aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l'effet suspensif (al. 3) ;

que selon la jurisprudence constante de la chambre administrative, des mesures provisionnelles ne sont légitimes que si elles s'avèrent indispensables au maintien d'un état de fait ou à la sauvegarde d'intérêts compromis (ATF 119 V 503 consid. 3 ; ATA/795/2021 du 4 août 2021 ; ATA/1043/2020 du 19 octobre 2020 ; ATA/303/2020 du 19 mars 2020) ;

qu'elles ne sauraient, en principe, anticiper le jugement définitif (Isabelle HÄNER, Vorsorgliche Massnahmen in Verwaltungsverfahren und Verwaltungsprozess in RDS 1997 II 253-420, 265) ; que, par ailleurs, l'octroi de mesures provisionnelles présuppose l'urgence, à savoir que le refus de les ordonner crée pour l'intéressé la menace d'un dommage difficile à réparer (ATF 130 II 149 consid. 2.2 ; 127 II 132 consid. 3) ;

que lors de l'octroi ou du retrait de mesures provisionnelles, l'autorité de recours dispose d'un large pouvoir d'appréciation qui varie selon la nature de l'affaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1161/2013 du 27 février 2014 consid. 5.5.1) ;

qu’en espèce, l’octroi des mesures provisionnelles sollicitées tend, comme le relève à juste titre le DIP, à préfigurer ce que la recourante demande au fond, ce qui, en principe, n’est pas admissible ;

que toutefois, il apparaît que les chances de succès du recours apparaissent, prima facie et sans préjudice du fond, bonnes au vu des décisions contradictoires rendues par le DIP, de la disponibilité alléguée par la recourante – non contestée par le DIP – de places en 2ème année de formation plein temps en ébénisterie et des très bons résultats de la recourante durant ses trois années d’apprentissage ;

que, par ailleurs, la recourante a également rendu vraisemblable qu’elle ne parvenait pas à trouver une place d’apprentissage en dual en ébénisterie et que l’attitude contradictoire du DIP l’avait atteinte dans sa santé psychique, subissant ainsi un préjudice ;

qu’au vu de ces éléments, singulièrement des chances de succès du recours, il sera fait droit à sa requête et la recourante sera autorisée, à titre provisionnel, à intégrer la 2ème année de la filière ébénisterie au CFPC en voie plein temps ;

qu’il sera statué ultérieurement sur les frais liés à la présente décision.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

autorise, à titre provisionnel, A______ à intégrer la 2ème année de la formation CFPC ébénisterie en voie plein temps ;

dit qu’il sera statué sur les frais de la procédure avec l’arrêt au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique la présente décision à Me Cécilia De MONTMOLLIN, avocate de la recourante, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

 

La juge :

 

F. KRAUSKOPF

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :