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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3908/2021

ATA/1155/2022 du 15.11.2022 sur JTAPI/645/2022 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3908/2021-PE ATA/1155/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 novembre 2022

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, agissant pour eux et leur fille C______

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 juin 2022 (JTAPI/645/2022)


EN FAIT

1) Monsieur B______, né le ______ 1988, son épouse Madame A______, née le ______ 1992, et leur fille C______, née le ______ 2018, sont ressortissants du Nicaragua.

2) Par courrier de l’D______ (D______) du 1er septembre 2020, les époux ont déposé une demande de régularisation de leur séjour en Suisse. Ils ont indiqué être arrivés à Genève respectivement en octobre 2012 et en décembre 2013.

Ils ont joint notamment le contrat de travail de M. B______ d’aide de cuisine à temps partiel depuis octobre 2019 et le contrat de travail de son épouse attestant de son emploi de garde d’enfants depuis le 1er novembre 2018.

3) Par la suite, ils ont remis des justificatifs prouvant leur séjour en Suisse depuis respectivement 2012 et 2013.

4) Par courrier du 21 janvier 2021, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) les a informés de son intention de refuser leur demande de régularisation de leur séjour et de prononcer leur renvoi de Suisse.

5) Dans le délai imparti, les époux ont exercé leur droit d’être entendu.

6) Le 14 août 2021, M. B______ a été interpellé par la police pour avoir conduit un véhicule automobile en état d’ébriété « qualifié », en étant titulaire d’un permis d’élève conducteur, et provoqué un accident de la circulation avec dégâts matériels en emboutissant la voiture qui le précédait.

7) Le 2 septembre 2021, il a été interpellé une nouvelle fois par la police, alors qu’il conduisait un motocycle, nonobstant le retrait de son permis de conduire consécutif à l’accident de voiture du 14 août 2021.

8) Par ordonnance pénale du 2 septembre 2021, le Ministère public l’a déclaré coupable de conduite sous retrait, refus ou interdiction d’utilisation du permis de conduire et l’a condamné à une peine pécuniaire de quarante jours-amende à CHF 30.- avec sursis et délai d’épreuve de trois ans.

9) Par décision du 14 octobre 2021, l’OCPM a refusé d’accéder à la requête des intéressés et prononcé leur renvoi de Suisse.

M. B______ et Mme A______ n’avaient démontré ni une très longue durée de séjour en Suisse (moins de dix ans), ni une intégration socio-culturelle particulièrement remarquable. Aucun d’eux n’avait acquis le niveau A1 oral en langue française. La condamnation pénale ne démontrait pas non plus un comportement irréprochable attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Leur fille, âgée de 3 ans, n’étant pas encore scolarisée, son intégration au Nicaragua ne devrait pas lui poser de problèmes insurmontables. Il n’était pas démontré qu’une réintégration dans le pays d’origine aurait de graves conséquences sur leur situation personnelle, indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place.

10) Par acte du 15 novembre 2021, M. B______ et Mme A______ ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant implicitement à son annulation et à ce que le dossier soit retourné à l’OCPM pour nouvelle décision. Ils ont sollicité l’octroi d’un délai supplémentaire de trois semaines pour produire des pièces justificatives complémentaires (attestation de niveau de français, recommandations de la crèche concernant leur fille, ainsi que de leurs employeurs respectifs).

Lors de l’accident du 14 août 2021, M. B______ présentait un taux d’alcoolémie extrêmement bas qui lui avait permis de conduire normalement la voiture. Il reconnaissait cependant ne pas avoir maintenu la distance légale avec le véhicule qui le précédait. Toutefois, il n’y avait eu aucune intention de sa part et l’ordonnance pénale du 2 septembre 2021 s’était soldée par un sursis.

Il était apprécié dans les restaurants où il avait travaillé et travaillait. Ses connaissances de la langue française étaient remarquables, ce d’autant plus qu’il devait répondre à la clientèle. Son épouse avait un emploi stable depuis plusieurs années, de sorte qu’ils n’avaient jamais fait appel à l’aide sociale. Leur fille, particulièrement vive et intelligente, ne connaissait que la Suisse et y était pleinement intégrée socialement, à l’instar de ses parents.

Selon les déclarations du chef du Département de la sécurité, de l’emploi et de la santé (ci-après : DSES), l’« opération Papyrus » était certes terminée, mais les conditions pour les candidats à un permis de séjour restaient les mêmes, soit dix ans de travail à Genève ou cinq ans avec des enfants en bas âge. C’était sur la base de ces déclarations qu’ils avaient déposé leur demande de régularisation. La décision de l’autorité intimée était contraire à la Convention relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989 (CDE – RS 0.107). Elle contrevenait de façon flagrante au principe d’égalité, dès lors que des centaines de travailleurs beaucoup moins qualifiés qu’eux avaient pu obtenir un permis de séjour.

11) Par courrier du 8 décembre 2021, les époux ont complété leur recours en soulignant leurs efforts d’intégration et en produisant diverses pièces justificatives, à savoir de nombreuses lettres de recommandation de leurs employeurs anciens et actuels et de personnes proches, ainsi que des attestations de présence à des cours de langue française.

12) L’OCPM a conclu au rejet du recours. Les administrés étaient certes indépendants financièrement, n’avaient pas de dettes et avaient produit de nombreuses lettres de soutien. Toutefois, leur séjour en Suisse était inférieur à dix ans et s’était déroulé sans titre de séjour. Ces années devaient être de surcroît relativisées par rapport à celles passées dans leur pays natal. Ils ne pouvaient pas justifier d’une forte intégration en Suisse et rien ne permettait de retenir que leur renvoi au Nicaragua comporterait pour eux des conséquences plus graves que celles d’autres ressortissants devant retourner vivre dans ce pays. Par conséquent, les conditions légales et jurisprudentielles strictes justifiant l’octroi d’un permis humanitaire n’étaient pas satisfaites.

13) Dans leur réplique, les époux ont relevé que les nombreuses lettres de recommandation qu’ils avaient versées au dossier tendaient à démontrer leur ferme volonté de s’intégrer dans leur pays d’accueil. Ils se demandaient ce qu’ils devaient faire de plus pour pouvoir prétendre légitimement à la régularisation de leur séjour à Genève. Ils ont également fait valoir l’intérêt supérieur de leur fille, âgée de bientôt 4 ans, à rester en Suisse pour pouvoir y suivre une scolarité dès la prochaine rentrée en août 2022.

Ils ont annexé leurs « passeports des langues » attestant du niveau de langue orale B1 pour le mari et A2 pour l’épouse, un passeport de formation musicale (guitare) auprès du E______ concernant le mari et une attestation de sa qualité de membre du club de football F______ depuis 2014.

14) Dans sa duplique, l’OCPM a informé le TAPI que la réplique n’était pas de nature à modifier sa position.

Il a joint une ordonnance pénale du Ministère public genevois du 13 décembre 2021, relative à l’infraction du 14 août 2021, déclarant le recourant coupable de violation simple des règles de la circulation, de conduite en état d’ébriété avec un taux d’alcool non qualifié (0.35 mg/l) et de non observation des restrictions et autres conditions du permis de conduire. Il l’a condamné à une amende de CHF 1'580.-, qui tenait compte d’un jour de détention avant jugement, et prononcé une peine privative de liberté de substitution de quinze jours, si l’amende ne devait pas être payée.

15) Par jugement du 16 juin 2022, le TAPI a rejeté le recours,

Les intéressés ne pouvaient pas se prévaloir d’une longue durée de séjour en Suisse, ni d’une intégration socio-professionnelle remarquable. Par ailleurs, leur retour dans leur pays d’origine n’était pas gravement compromis.

16) Par acte expédié le 15 août 2022 à la chambre administrative de la Cour de justice, M. B______ et Mme A______ ont recouru contre ce jugement, dont ils ont demandé l’annulation.

Ils ont insisté sur leurs efforts d’intégration, qui leur avaient permis une indépendance financière, et à laquelle ils continuaient de travailler en suivant des cours de français. L’intérêt supérieur de la fille commandait qu’elle puisse rester en Suisse, où elle était née et qui constituait le seul environnement socioculturel qu’elle connaissait. Ils venaient de former une demande en reconsidération auprès de l’OCPM, de sorte qu’il était peut-être opportun de ne pas statuer sur le recours avant que l’OCPM ne se prononce.

Ils ont produit, notamment, un courrier adressé au TAPI à la suite du jugement, reprenant leurs arguments, en particulier ceux relatifs à l’intégration de la famille. Ils exposent avoir demandé la reconsidération de la décision auprès de l’OCPM.

17) Ce dernier a conclu au rejet du recours.

Le recourant était arrivé en Suisse en octobre 2012 et y avait depuis lors séjourné illégalement. Au moment du dépôt de la demande d’autorisation de séjour, il ne résidait en Suisse que depuis sept ans, ce qui ne constituait pas une longue durée au sens de la jurisprudence. De toute manière, la seule durée du séjour ne fondait pas l’admission d’un cas de rigueur, celui-ci s’appréciant à la lumière de l’ensemble des circonstances. Celles du cas d’espèce ne faisaient pas apparaître d’éléments justifiant de déroger aux conditions de séjour ordinaires.

18) Les recourants n’ont pas répliqué dans le délai imparti à cet effet.

19) Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Les recourants exposent avoir demandé à l’OCPM de reconsidérer la décision querellée et s’interrogent sur l’opportunité de suspendre la présente procédure jusqu’à droit jugé sur leur demande de reconsidération.

Dans la mesure où la chambre administrative dispose d’un plein pouvoir d’examen en fait et en droit, elle peut revoir l’ensemble des faits de la cause et tenir compte d’éventuels éléments nouveaux survenus depuis le prononcé de la décision de l’OCPM. Il n’y a donc pas lieu d’attendre l’issue de la demande de reconsidération que les recourants allèguent avoir formée.

3) Est litigieux le refus de l’OCPM d’accorder aux recourants une autorisation de séjour et le prononcé de leur renvoi de Suisse.

a. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS142.20) et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA – RS 142.201). Conformément à l'art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées, comme en l'espèce, après le 1er janvier 2019 sont régies par le nouveau droit.

b. L'art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d'admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l'intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2).

c. La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l'intéressé, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1).

d. Les enfants mineurs au bénéfice d'autorisations d'établissement ou de séjour partagent, du point de vue du droit des étrangers, le sort des parents qui en ont la garde (arrêts du Tribunal fédéral 2C_529/2020 du 6 octobre 2020 consid. 5.3 ; 2C_257/2020 du 18 mai 2020 consid. 6.1). Afin de tenir compte de la situation spécifique des familles, une présence de cinq ans en Suisse doit être retenue comme valeur indicative (Directive LEI, ch. 5.6.10.4). Comme pour les adultes, il y a lieu de tenir compte des effets qu'entraînerait pour les enfants un retour forcé dans leur pays d'origine. Il faut prendre en considération qu'un tel renvoi pourrait selon les circonstances équivaloir à un véritable déracinement, constitutif d'un cas personnel d'extrême gravité. Pour déterminer si tel serait le cas, il faut examiner plusieurs critères. La situation des membres de la famille ne doit pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global (ATF 123 II 125 consid. 4a ; ATA/434/2020 du 30 avril 2020 consid. 10a).

D'une manière générale, lorsqu'un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d'origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêts du TAF F-3493/2017 du 12 septembre 2019 consid. 7.7.1 ; F-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l'état d'avancement de la formation professionnelle ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L'adolescence, une période comprise entre 12 et 16 ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 précité consid. 9a).

e. Lorsque l'étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l'idée que les liens sociaux qu'il y a développés sont suffisamment étroits pour qu'il bénéficie d'un droit au respect de sa vie privée au sens de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l'étranger fait preuve d'une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l'autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266). Les années passées en Suisse dans l'illégalité ou au bénéfice d'une simple tolérance ne sont pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3 ; 134 II 10 consid. 4.3).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2).

f. Aux termes de l'art. 9 § 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 (CDE - RS 0.107), « les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant (...) ». Aucune prétention directe à l'octroi d'une autorisation de droit des étrangers ne peut toutefois être déduite des dispositions de la CDE (ATF 126 II 377 consid. 5 ; 124 II 361 consid. 3b).

g. Selon l'art. 96 al. 1 LEI, les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger ainsi que de son intégration.

4) En l’espèce, le recourant est arrivée en Suisse, selon ses indications, en octobre 2012 et son épouse en décembre 2013. La durée de leur séjour de désormais dix et onze ans est relativement longue. Elle doit cependant être relativisée dès lors qu’elle a été intégralement effectuée dans l’illégalité et que les recourants ne sauraient tirer profit du fait d’avoir mis les autorités devant le fait accompli.

Les recourants sont, certes, indépendants financièrement, n’ont pas émargé à l’assistance publique, ni fait l’objet de poursuites pour dettes et ont fourni des efforts d’apprentissage de la langue française, comme en témoigne les attestations de niveau A2 à l’oral de la recourante et de niveau B1 de son mari. La recourante ne peut, pour autant, se prévaloir d’une intégration exceptionnelle au sens de la jurisprudence. Son activité professionnelle dans le domaine de l’économie domestique ne dénote pas une ascension professionnelle remarquable, quand bien même ses employeurs sont très satisfaits de sa prestation. En outre, elle n’a pas acquis en Suisse des connaissances ou des qualifications si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre à profit Nicaragua. Elle n’allègue pas non plus s’être engagée dans la vie associative, culturelle ou sportive à Genève. L’association G______ dont elle est membre un centre d’accueil, de formation et d’insertion professionnelle et elle n’allègue pas qu’elle aurait eu une part active dans l’organisation des activités de cette association, qui vient en aide aux personnes qui en sont membres. Son intégration socio-professionnelle ne présente donc pas de caractère exceptionnel.

Il en va de même du recourant. Celui-ci exerce comme aide-cuisinier. Il est, comme son épouse, très apprécié de son employeur. Son intégration professionnelle n’atteint toutefois pas le caractère remarquable exigé par la jurisprudence. Il n’apparaît pas non plus que l’activité professionnelle du recourant ni d’ailleurs celle de son épouse seraient à tel point spécifiques qu’ils ne pourraient l’exercer dans leur pays d’origine. Le recourant participe aux activités sportives du club de football de la communauté religieuse dont sont membres les recourants. Cela étant, malgré leur relative longue durée de séjour en Suisse, les recourants ne font pas état de liens affectifs ou amicaux particulièrement forts, les attestations produites portant sur l’appréciation des prestations professionnelles des intéressés ou leur intégration, en des termes généraux.

C______ vient de commencer sa scolarité. Compte tenu de son âge, elle reste cependant fortement attachée à ses parents, de sorte que son sort ne peut être dissocié de celui de ses parents.

Le recourant est arrivé en Suisse à l’âge de 24 ans, son épouse à l’âge de 21 ans. Ils ont ainsi passé leur enfance, leur adolescence et le début de leur vie d’adulte dans leur pays d'origine, dont ils parlent la langue et connaissent les us et coutumes. Vu le temps passé dans leur pays, leur relatif jeune âge, leur bon état de santé ainsi que l’expérience professionnelle acquise en Suisse, y compris leurs connaissances de la langue française, leur réintégration ne paraît pas gravement compromise. Certes, ils traverseront une nécessaire phase d’adaptation après plusieurs années d’absence. Les recourants ne rendant toutefois pas vraisemblable qu’ils seraient davantage exposés à la situation économique et sociale que leurs compatriotes restés au pays. C______ découvrira son pays d’origine, ce qui cependant au vu de son jeune âge ne devrait pas susciter de difficultés particulières, l’enfant restant entourée de ses parents.

Par ailleurs, contrairement aux allégations des recourants, aucun élément au dossier ne permet de retenir que l’autorité intimée aurait octroyé, de manière générale, à des personnes dans la même situation qu’eux des autorisations de séjour ; ils ne citent d’ailleurs aucun exemple de personnes se trouvant dans les mêmes circonstances qu’eux à qui une autorisation de séjour aurait été accordée.

Enfin, les recourants en venant vivre en Suisse et en y fondant une famille alors qu’ils étaient démunis d’un titre de séjour ne pouvaient ignorer qu’ils pourraient être amenés à devoir quitter la Suisse, avec les conséquences susceptibles d’en découler pour eux et leur fille.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, l’OCPM n’a pas violé la loi ni abusé de son pouvoir d’appréciation en retenant que les recourants ne remplissaient pas les conditions restrictives permettant l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

5) a. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation (ATA/1798/2019 du 10 décembre 2019 consid. 6). Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

b. En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé l’octroi d’une autorisation de séjour aux recourants, l'intimé devait prononcer leur renvoi. Pour le surplus, aucun motif ne permet de retenir que l’exécution de leur renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

6) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge des recourants, qui ne peuvent se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 août 2022 par Madame A______ et Monsieur B______, agissant pour eux et leur fille C______, contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 16 juin 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge solidaire de Madame A______ et Monsieur B______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ et Monsieur B______, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mme Krauskopf, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Michel

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.