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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2703/2021

ATA/124/2022 du 03.02.2022 ( EXPLOI ) , SANS OBJET

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2703/2021-EXPLOI ATA/124/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 3 février 2022

 

dans la cause

 

A______
représentée par Mes Samir Djaziri et Bernard Nuzzo, avocats

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



 

Vu en fait la décision du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN) du 6 juillet 2021 retenant que A______ (ci-après : l'association) ne disposait ni d'un droit à l'ouverture d'une procédure, ni à ce qu'une décision en application de l'art. 4A de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) soit prise en lien avec les doléances objet de son courrier du 31 mai 2021, considéré comme une dénonciation ;

que l'association demandait dans ledit courrier que la PCTN prenne des mesures, en application de l'art. 63 al. 2 let. b et al. 3 de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22), à savoir restreigne les horaires d'ouverture des établissements publics situés à la rue B______ et au boulevard C______ pour limiter les immissions de bruit provenant desdits établissements dont, en tant que riverains, ils souffraient ;

vu le recours, tenant sur plus de cinquante pages, dûment détaillé en fait et motivé en droit, étayé d'un bordereau de quarante-huit pièces contenues dans deux classeurs fédéraux, interjeté le 18 août 2021 par l'association devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) au terme duquel elle a conclu à l'annulation de la décision de la PCTN du 6 juillet 2021, au renvoi du dossier à la PCTN pour complément d'instruction et nouvelle décision formelle sujette à recours ;

vu la transmission par la chambre administrative dudit recours à la PCTN le 20 août 2021, l'invitant à faire parvenir ses observations ;

vu les observations de la PCTN du 21 octobre 2021 au terme desquelles elle a conclu au rejet du recours, dans la mesure de sa recevabilité ;

vu la réplique de l'association du 19 novembre 2021, tenant sur quatorze pages et demi, y compris la page de garde, à laquelle elle a joint la liste de ses soixante-sept membres, avec les demandes d'adhésion signées, sollicitant toutefois leur soustraction à la consultation de la PCTN pour des motifs d'intérêts privés de tiers ;

vu la lettre de la PCTN du 9 décembre 2021 selon laquelle elle prenait note que la chambre de céans avait pris connaissance de ladite liste et partait du principe que le domicile des membres de l'association avait été vérifié. Dans ces circonstances, elle avait annulé sa décision du 6 juillet 2021, de sorte que ledit recours était devenu sans objet et que la cause devait être rayée du rôle ;

vu le courrier de l'association du 21 décembre 2021, faisant suite à une demande de la chambre administrative du 13 décembre précédent, relevant que la cause paraissait en effet avoir perdu son objet et devait être rayée du rôle. Dans la mesure toutefois où le recours avait été utile, puisqu'il avait décidé la PCTN à rendre la décision attendue, les dépens devaient être mis à la charge de l'État, comprenant une indemnité de procédure équitable de CHF 3'000.- ;

vu les observations de la PCTN du 13 janvier 2022, lequel ne s'opposait pas à l'octroi d'une indemnité à l'association, mais considérait qu'elle doit être réduite à CHF 1'000.- ;

qu'en effet, d'une part, si l'association avait produit la liste de ses membres dès le dépôt de son recours, des écritures supplémentaires, telle que sa réplique du 21 octobre 2021, n'auraient pas été nécessaires. D'autre part, le travail décrit pour justifier l'indemnité sollicitée, à savoir les écritures et recherches juridiques, avait déjà été effectué dans le cadre de la procédure A/2700/2021 ayant donné lieu par la chambre de céans à l'octroi d'une indemnité de procédure de CHF 2'000.- ;

vu les observations de l'association du 26 janvier 2022, laquelle a relevé que la production de la liste de ses membres n'était en définitive pas nécessaire vu la formulation précise de ses statuts, limitant un périmètre restreint et impliquant nécessairement que ses membres soient exposés à des nuisances sonores. De plus, dans la mesure où la PCTN avait contesté dans sa réplique du 21 octobre 2021 un intérêt digne de protection à titre individuel de ses membres, l'association avait dû répliquer sur ce point. Ce n'était pas l'association qui s'était vu accorder une indemnité de procédure dans la cause A/2700/2021, mais certains de ses membres. S'il était vrai que des faits et questions juridiques étaient identiques dans les procédures A/2700/2021 et A/2703/2021, un travail important, factuel et juridique, avait néanmoins été effectué s'agissant de l'examen de la question du recours corporatif. De nouvelles pièces avaient aussi été découvertes et produites, tel que le rapport du service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (SABRA) du 31 mai 2011, au demeurant destiné à la PCTN et qu'il aurait dû produire, étant relevé que dix ans plus tôt, les valeurs limites de bruit étaient déjà clairement dépassées. Il était navrant que l'association ait dû mandater des avocats, impliquant des frais importants, et saisir la justice pour que la PCTN revienne sur sa position, alors qu'elle disposait déjà de tous les éléments pour intervenir et prendre une décision permettant d'améliorer la qualité de vie des riverains. Ce n'était que lorsque la juge déléguée avait proposé à la PCTN le 1er décembre 2021 de déposer des contre - preuves que, sans doute acculée, elle avait décidé, le 9 décembre suivant, d'annuler sa décision. Enfin, l'association avait retiré son recours dans la cause A/2704/2021 contre la décision de la PCTN refusant de lui transmettre l'autorisation d'exploiter délivrée à l'enseigne « La Distillerie » ce, sans solliciter d'indemnité de procédure, laquelle devrait être dévolue dans la présente procédure ;

vu l'information donnée aux parties le 27 janvier 2022 selon laquelle la cause était gardée à juger sur la question des frais et de l'indemnité de procédure ;

Considérant en droit l'art. 131 al. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) selon lequel un juge délégué conduit la procédure et peut prendre seul les décisions incidentes y relatives ;

attendu que le recours est devenu sans objet, dès lors que la nouvelle décision fait pleinement droit aux conclusions de la recourante (art. 67 al. 3 LPA) ;

que la cause devra ainsi être rayée du rôle ;

que la juridiction administrative qui rend la décision statue sur les frais de procédure et émoluments (art. 87 al. 1 LPA) ;

que la chambre administrative peut, sur requête, allouer à la partie ayant eu entièrement ou partiellement gain de cause, une indemnité pour les frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA) ;

que la juridiction administrative statue sur les frais de procédure, indemnités et émoluments dans les limites établies par règlement du Conseil d'État et conformément au principe de la proportionnalité (art. 87 al. 1 et 3 LPA ; ATA/581/2009 du 10 novembre 2009 et les références citées) ;

que selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, les décisions des tribunaux en matière de frais et dépens n'ont pas à être motivées, l'autorité restant néanmoins liée par le principe général de l'interdiction de l'arbitraire (ATF 114 Ia 332 consid. 2b ; 111 Ia 1) ;

que la présente décision sera rendue sans frais ;

que l'art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), intitulé « indemnité », prévoit que la juridiction peut allouer à une partie, pour les frais indispensables occasionnés par la procédure, y compris les honoraires éventuels d'un mandataire, une indemnité de CHF 200.- à CHF 10'000.- ;

que la juridiction saisie dispose d'un large pouvoir d'appréciation également quant à la quotité de l'indemnité allouée et, de jurisprudence constante, celle-ci ne constitue qu'une participation aux honoraires d'avocat (ATA/334/2018 du 10 avril 2018 ; ATA/1484/2017 du 14 novembre 2017), ce qui résulte aussi, implicitement, de l'art. 6 RFPA dès lors que ce dernier plafonne l'indemnité à CHF 10'000.- ;

que la garantie de la propriété (art. 26 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101) n'impose nullement une pleine compensation du coût de la défense de la partie victorieuse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_152/2010 du 24 août 2010) ;

que la fixation des dépens implique une appréciation consciencieuse des critères qui découlent de l'esprit et du but de la réglementation légale (ATF 107 Ia 202 consid. 3 ; arrêts 1C_435/2015 du 17 septembre 2015 consid. 3 ; 1P.63/2005 du 22 mars 2005 consid. 3). Elle s'effectue en fonction des circonstances particulières de chaque cas d'espèce, tenant compte notamment de la nature et de l'importance de la cause, du temps utile que l'avocat lui a consacré, de la qualité de son travail, du nombre d'audiences auxquelles il a pris part, des opérations effectuées et du résultat obtenu (ATF 122 I 1 consid. 3a ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_35/2016 du 21 avril 2017 consid. 6.2 ; 2C_825/2016 du 6 février 2017 consid. 3.1) ;

qu'en l'espèce, la recourante obtient gain de cause dans la présente procédure, dans la mesure où la PCTN a annulé la décision litigieuse après avoir été informée du dépôt de la liste des membres de l'association en annexe à sa réplique et que la chambre de céans lui avait imparti un délai pour se prononcer sur cette pièce et cas échéant proposer des contre - preuves ;

qu'il sera alloué à la recourante une indemnité de procédure d'un montant tenant compte en particulier de l'acte de recours, de ses développements en fait et en droit, dans un dossier parfaitement maîtrisé par son conseil, qui n'a certes nécessité nulle audience, mais des recherches juridiques et la compilation de nombreuses pièces. La procédure s'est déroulée devant la chambre de céans sur quelques mois seulement, mais l'activité la plus conséquente de l'avocat a été déployée en amont, en lien avec la rédaction du recours. La problématique de la qualité pour recourir de l'association, propre à la présente procédure, est traitée sur moins d'une page dans la partie en fait et une page en droit dans l'acte de recours, et sur six pages dans la réplique. Cette procédure s'inscrit dans le contexte de trois autres procédures concernant la même problématique au fond, des nuisances sonores déplorées par les riverains de la rue B______ - boulevard C______, de sorte que la plupart des arguments au fond du recours ont été développés notamment dans la cause A/2700/2021, ayant donné lieu à l'octroi d'une indemnité de CHF 2'000.- aux mêmes conseils que ceux représentant l'association ;

qu'au rang des suppositions, cette procédure aurait peut-être pu être évitée si la PCTN avait exigé, avant de rendre la décision litigieuse, la liste des membres de l'association, moyennant cas échéant la garantie de sa non consultation, conformément à l'art. 45 LPA ;

qu'il peut tout aussi être supposé que la procédure aurait pu prendre fin au stade du dépôt du recours, si l'association avait d'emblée produit cette liste ;

qu'il est par contre certain que la décision litigieuse n'a été annulée qu'après le dépôt par l'association d'une réplique et la production de ladite liste, qui ont commandé une activité supplémentaire de ses conseils ;

qu'ainsi, tout bien pesé, et compte tenu de l'important pouvoir d'appréciation qui est le sien, la chambre de céans allouera à l'association une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à la charge de la PCTN.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

dit que le recours de A ______ du 18 août 2021 est devenu sans objet ;

raye la cause du rôle ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à A______, à la charge de la PCTN ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique la présente décision à Mes Bernard Nuzzo et Samir Djaziri, avocats de la recourante, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

 

Carole Meyer

 

la juge déléguée :

 

 

 

Valérie Lauber

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :