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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2674/2020

ATA/1311/2021 du 30.11.2021 sur JTAPI/529/2021 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : LOYER;LOYER CONTRÔLÉ;SURVEILLANCE ÉTATIQUE;BAIL À LOYER
Normes : LGZD.5; CO.253b.al3; LGL.42; LGL.43; LGL.44; LGL.45; LGL.46; LGL.47; LGL.48
Résumé : Immeuble soumis au contrôle des loyers pendant une période de dix ans en application de la LGZD. Clauses complémentaires d'un bail prévoyant un loyer échelonné dont le premier échelon est couvert par la période de contrôle. Le loyer imposé par le département étant respecté par les clauses du contrat, il n'appartient pas au département de contrôler l'échelon qui prend effet après la période de contrôle, cette question relève du droit privé et non du droit public.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2674/2020-LCI ATA/1311/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 30 novembre 2021

3ème section

 

dans la cause

 

Mme et M. A______
représentés par Me Maurice Utz, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE - OCLPF

M. B______
représenté par Me Serge Patek, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 mai 2021 (JTAPI/529/2021)


EN FAIT

1) MM. C______, B______, D______ et E______ sont propriétaires de la parcelle no 1______, comprenant une habitation à plusieurs logements, située à l'adresse ______, chemin de F______ au G______ en zone de développement 3.

2) Par décision du 14 novembre 2018 concernant un accord définitif de vente, adressée aux consorts H______, le département du territoire, soit pour lui l’office cantonal du logement et de la planification foncière (ci-après : OCLPF), a approuvé le plan financier annoté et l’état locatif nominatif détaillé relatifs à l’immeuble précité.

Les prix de vente et les loyers maximums, applicables dès le 1er janvier 2019, étaient soumis au contrôle de l’État jusqu’au 30 avril 2020, correspondant à la date de fin de la période de dix ans dès la date d’entrée moyenne dans les logements. Toute demande ultérieure de modification des loyers autorisés devrait être établie sur la base d’un état locatif global et adressée à la direction immobilière. Durant toute la période de contrôle et avant la conclusion de tout bail, les consorts H______ étaient tenus de requérir le loyer maximum applicable auprès de l’OCLPF. L’usage du bail type édicté par le Conseil d’État était obligatoire durant la période de contrôle.

3) Le 17 mai 2019, M. B______, représenté par la régie I______ SA, a conclu avec Mme et M. A______ un contrat de bail à loyer pour appartements portant la mention « Immeuble LGZD », pour un appartement en duplex de six pièces au rez-de-chaussée situé dans l’immeuble sis chemin de F______ ______.

Le contrat de bail, d’une durée de trois ans à terme fixe, soit du 1er juin 2019 au 31 mai 2022 (chiffre 1.1 du contrat de bail), indiquait notamment que :

- le loyer mensuel maximum autorisé à la conclusion du bail était de CHF 3'325.- mensuel) plus provisions chauffage/eau chaude de CHF 330.- mensuel (chiffre.1.2) ;

- l’immeuble concerné était soumis à la loi générale sur les zones de développement du 29 juin 1957 (LGZD - L 1 35), au règlement d'application de la loi générale sur les zones de développement du 20 décembre 1978 (RGZD -
L 1 35.01), ainsi qu’au chapitre VI de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 4 décembre 1977 (LGL - I 4 05 ; chiffre 2) ;

- en contrepartie de la mise de l’immeuble au bénéfice des normes particulières de la LGZD, l’État exerçait sur ce dernier un contrôle d’une durée de dix ans (chiffre 3) ;

- les principales dispositions applicables à l’immeuble étaient les art. 5
al. 2 LGZD et 42 et 44 LGL (chiffre 4) ;

- les règles et usages locatifs du canton de Genève, applicable aux immeubles soumis à la LGZD notamment, édition 2010 (Annexe 1 du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 - RGL - I 4 05.01 ; ci-après : règles et usages 2010) faisaient partie intégrante du contrat de bail, sous réserve des dérogations impératives citées dans ledit contrat, soit les art. 4 (Hausse du loyer ou modification du contrat), 11 (Fixation du loyer) et 16 (compte annuel et répartition) (chiffre 5) ;

- les clauses particulières et les avenants ou tout autre document ayant pour but de compléter ou de modifier le bail à la suite d’un accord entre le bailleur et le locataire ne devaient en aucun cas être contraires aux dispositions légales et réglementaires ni aux conditions générales énoncées ci-dessus, qui étaient impératives (chiffre 6).

Les chiffres 1.2 à 6 précités n’étaient applicables que pendant la durée de l’aide et du contrôle de l’État.

4) Le 17 mai 2019 également, les locataires ont également signé un document intitulé « Clauses complémentaires faisant partie intégrante du bail », contenant notamment les précisions suivantes :

- le présent contrat de bail étant conclu pour une durée déterminée, il prendrait fin à l’issue de celle-ci automatiquement et sans congé. Les art. 2, 3 al. 1, 5 a) et 7 c) des conditions générales et règles et usages 2010 n’étaient pas applicables et étaient donc supprimés (art. 1) ;

- le loyer mensuel, charges non comprises, de CHF 3'325.- était bloqué en application de la LGL, selon le loyer maximum LGL autorisé, soit du 1er juin 2019 au 31 mai 2020 (art. 2) ;

- dès le 1er juin 2020, le loyer mensuel passerait à CHF 5'650.- soit CHF 67'800.- annuel, correspondant aux loyers usuels du quartier (art. 269a let. a de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse - CO, Code des obligations - RS 220).

5) Le 17 mai 2019, le bailleur et les locataires de l'appartement ont également signé un contrat de bail à loyer pour garage ou emplacement de parc portant la mention « Immeubles HBM, HLM, HCM, HM, LGZD », concernant une place de parc située au sous-sol de l’immeuble sis chemin de F______ ______, pour une durée de trois ans à terme fixe, soit du 1er juin 2019 au 31 mai 2022, reprenant en substance le même type de mentions que celles figurant dans le contrat de bail à loyer pour appartement mentionné ci-dessus. Le loyer maximum autorisé à la conclusion du bail était fixé à CHF 141.- le mois.

À teneur des « clauses complémentaires faisant partie intégrante du bail » également signées le 17 mai 2019 par les précités, le loyer mensuel était bloqué, en application de la LGL, selon le loyer maximum LGL autorisé, soit du 1er juin 2019 au 31 mai 2020 (art. 2). Dès le 1er juin 2020, le loyer mensuel passerait à CHF 210.-, correspondant aux loyers usuels du quartier (art. 269 let. a CO) (art. 3). Les parties déclaraient avoir reçu en annexe, connaître et accepter les conditions générales et les règles et usages 2010.

6) Le 3 avril 2020, les locataires ont requis de la régie I______ la confirmation que l’échelon prévu dès le 1er juin 2020 ainsi que toutes les « Clauses complémentaires faisant partie intégrante du bail » étaient annulés et que le bail était de durée indéterminée, les préavis et échéances de résiliation étaient ceux prévus par la LGL.

7) Le 6 avril 2020, la régie I______ a informé les locataires qu’elle refusait la suppression de l’échelonnement et la modification de l’échéance contractuelle, le bail concerné respectant la LGL et le CO.

Suite à un échange de correspondance entre les locataires, l'OCLPF et la régie, cette dernière a encore confirmé le 9 juin 2020, que l’échelon prévu à l’art. 3 des clauses complémentaires du contrat de bail était parfaitement licite, dès lors que la demande de suppression de l’échelon aurait pour effet de prolonger le contrôle étatique et d’empêcher la majoration de loyer après la fin de la période de contrôle.

8) Par décision du 2 juillet 2020, l’OCLPF a ordonné à M. H______ de supprimer les clauses complémentaires illicites portant sur l’introduction d’un échelon de loyer dans les baux conclus le 17 mai 2019 avec les époux A______.

Le fait que l’art. 3 des clauses complémentaires des baux conclus prévoyait un loyer échelonné était manifestement contraire aux dispositions qui régissaient le logement lors de la conclusion de ces baux. Ni les formules officielles pertinentes ni les art. 42 et ss LGL ne prévoyaient la faculté d’introduire des échelons de loyer. Seul l’OCLPF était compétent en matière de loyer durant la période de contrôle, conformément à l’art. 253b al. 3 CO. Il n’était ainsi pas concevable que la juridiction des baux et loyers soit saisie d’une contestation du loyer initial de l’appartement concerné, quand bien même l’échelon litigieux prendrait effet après ladite période. La régularisation de la situation n’était pas de nature à prolonger le contrôle étatique sur l’immeuble considéré, la modification du loyer selon les règles civiles demeurant possible à l’issue de ce dernier.

9) Par acte du 3 septembre 2020, M. B______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision de l'OCLPF, concluant à son annulation.

La décision violait le principe de la légalité. Par analogie avec le système prévalant en application de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi du 25 janvier 1996 - LDTR - L 5 20), le propriétaire d’un immeuble soumis à la LGZD était habilité à conclure un bail échelonné prévoyant comme 1er échelon le loyer fixé par le département pendant la durée de contrôle retenue par ce dernier et un 2ème échelon de loyer supérieur entrant en vigueur à l’issue de la période de contrôle. Le contrôle des loyers devait se limiter au but recherché et prendre fin au bout d’un certain temps.

10) En parallèle, par décision du 3 septembre 2020, l’OCPLF s'est déclaré incompétent pour statuer sur la licéité de la durée d’un bail portant sur un logement soumis à la LGZD, précisant que toute prétention portant sur la durée du bail d’un tel logement devait être portée devant le Tribunal des baux et loyers.

Le recours interjeté par les époux A______ auprès du TAPI contre cette décision a fait l’objet d’une procédure séparée A/3174/2020. Par jugement du 27 mai 2021, le TAPI a rejeté le recours (JTAPI/528/22021). C'était à juste titre que l'OCLPF s'était déclaré incompétent pour statuer sur la licéité de la durée déterminée d'un bail portant sur un logement soumis à la LGZD.

Un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice
(ci-après : la chambre administrative) a été déposé par les locataires contre le jugement du TAPI.

11) Le 12 octobre 2020, l’OCLPF a conclu à l’appel en cause des époux A______ ainsi qu'au rejet du recours.

12) Le 18 novembre 2020, l’OCLPF a persisté dans ses conclusions.

Les mécanismes de fixation et de modification du loyer excluaient la possibilité de prévoir un plan des loyers.

13) Le 20 novembre 2020, le TAPI a interpellé l'OCLPF pour vérifier si son opinion signifiait que, même lorsque l’échelon de loyer supérieur coïncidait avec la fin de la période de contrôle, il contrevenait aux dispositions légales invoquées dès lors que le contrat de bail prévoyant cet échelon était conclu pendant la période de contrôle.

14) Le 25 novembre 2020, l’OCLPF a confirmé ce point de vue. La décision d'accord définitif de vente du 14 novembre 2018 rappelait que toute modification ultérieure des loyers autorisés devait faire l’objet d’une demande auprès du service compétent, excluant ainsi toute possibilité d’introduire des échelons jusqu’au 30 avril 2020.

15) Le 14 décembre 2020, le recourant a persisté dans ses conclusions, tout en indiquant qu’il s’opposait à l’appel en cause des locataires.

Le propriétaire était autorisé à fixer le montant du loyer à l’issue de l’assujettissement aux normes de la LGZD ou de la LGL, un loyer échelonné dont le second échelon entrait en vigueur à la sortie du contrôle n’était pas en contradiction avec les dispositions de droit public applicables.

16) Par décision incidente du 14 janvier 2021 (DITAI/24/2021) le TAPI a prononcé l’appel en cause des époux A______.

17) Par duplique du 11 mars 2021, l’OCLPF a persisté dans ses conclusions.

18) Par jugement du 27 mai 2021, le TAPI a admis le recours, annulant la décision de l'OCLPF du 2 juillet 2020.

L'art. 253b de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220) avait pour but d'empêcher un double contrôle des loyers s'agissant des immeubles bénéficiant de mesures d'encouragement. Un tel risque n'existait pas dès lors que les loyers prévus contractuellement applicables depuis le 1er juin 2020, n'avaient pas d'incidence sur les loyers bloqués sur la base de la LGZD ou la LGL puisqu'ils portaient sur des périodes ultérieures. Rien n'empêchait les juridictions civiles compétentes de se saisir à la signature du contrat de bail d'une contestation du loyer initial pour ce qui concernait le montant de loyer fixé pour la période débutant après le contrôle du loyer par l'État.

C'était sans base légale suffisante et en violation de la garantie de la propriété et de la liberté économique que l'OCLPF avait ordonné la suppression des clauses prévoyant à compter du 1er juin 2020, une modification des loyers relatifs au logement et à la place de stationnement.

19) Le 28 juin 2021, les époux A______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative contre le jugement du TAPI en concluant à son annulation et à la confirmation de la décision de l'OCLPF du 2 juillet 2020.

Le contrat de bail était rédigé au moyen de la formule officielle prévue pour les immeubles soumis à la LGZD et mentionnant au point 1.1 un loyer mensuel de CHF 3'325.-, pour une durée fixe du 1er juin 2019 au 31 mai 2022. Il était faux de retenir, comme l'avait fait le TAPI que le loyer autorisé lors de la conclusion était de CHF 3'655.- par mois. Ce contrat-type contenait également sous chiffre 6 la précision que les clauses particulières et avenants ne devaient pas être contraires aux dispositions légales et réglementaires ni aux conditions générales impératives.

Pourtant des clauses particulières avaient été ajoutée sur des pages supplémentaires, prévoyant une durée déterminée et un loyer de CHF 5'650.- mensuel dès le 1er juin 2020.

Le contrat rédigé par le bailleur était incompréhensible, prévoyant deux loyers différents pour les mêmes périodes. Les clauses complémentaires n'avaient pas été adressées à l'autorité dans un premier temps.

Il était donc manifeste que l'OCLPF avait la compétence d'ordonner au bailleur de produire un contrat qui soit intelligible et dont les clauses complémentaires ne soient pas en complète contradiction avec celles mentionnées en page un du contrat-type.

20) Le 28 juillet 2021, M. B______ a répondu au recours, concluant à son rejet ainsi qu'au versement d'une indemnité de procédure.

Les CHF 3'655.- correspondaient à la somme du montant du loyer et des frais accessoires mensuels de CHF 330.-.

Il ressortait déjà des clauses principales du contrat de bail, notamment de l'art. 6, des références à leur durée d'application qui ne pouvait dépasser la durée du contrôle de l'État. Les clauses complémentaires permettaient de spécifier et détailler ce dernier point.

Au-delà du 30 avril 2020, le contrôle étatique des loyers était illicite, ne reposant sur aucune base légale, en violation pure et simple du principe de primauté du droit fédéral. L'OCLPF n'était dès lors pas compétent.

Les clauses complémentaires n'étaient pas en contradiction avec les clauses principales du contrat de bail, elles les complétaient.

21) Le 29 juillet 2021, l'OCLPF a déposé des observations.

La mesure d'encouragement étatique accordée correspondait au déclassement en zone de développement du terrain.

La liberté contractuelle d'introduire des loyers échelonnés était exclue durant la période de contrôle. Pendant cette période, la fixation et la modification des loyers des logements soumis à la LGZD procédaient systématiquement d'une décision administrative et non pas d'un plan des loyers fixé à l'avance.

22) Le 10 août 2021, le bailleur a déposé des observations.

L'OCLPF ne pouvait instituer un contrôle des loyers au-delà de la durée de dix ans prévue par l'art. 5 al. 3 LGZD.

23) Les recourants n'ayant pas répliqué dans le délai imparti, le 1er octobre 2021, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige concerne une décision de l'OCLPF imposant au bailleur la suppression de clauses complémentaires du bail signé le 17 mai 2019. Le TAPI a jugé que l'OCLPF n'était pas compétent pour rendre la décision et les recourants, locataires, estiment qu'il l'est et que la décision est conforme au droit.

3) Il est patent que l'immeuble concerné a été construit en zone de développement 3, suite à un déclassement. Il est soumis de ce fait à la LGZD (art. 5 al. 1 let. a LGZD).

En zone de développement, les mesures de contrôle de l'État sur les prix de vente ou les loyers ou les autres conditions posées à l'acquisition d'un appartement apparaissent comme une contrepartie à l'intervention étatique : celle-ci a en effet permis, par le déclassement et l'application de règles spécifiques à ce type de zone, une plus-value foncière, une densification des surfaces et une construction à un coût modéré. Dans ce cas, l'État peut dès lors poser certaines conditions propres à la réalisation d'un intérêt public déterminé (arrêts du Tribunal fédéral 1C_529/2015 du 5 avril 2016 ; 1C_223/2014 du 15 janvier 2015 consid. 4.4.1)

L'autorisation de construire en zone de développement est subordonnée à la condition que les bâtiments d'habitation locatifs répondent par le nombre, le type et les loyers des logements à un besoin prépondérant d'intérêt général (art. 5 al. 1 let. a LGZD). Ces prix et loyers sont soumis au contrôle de l'État pendant une durée de dix ans dès la date d'entrée moyenne dans les logements ou locaux selon les modalités prévues au chapitre VI (art. 42 à 48) de la LGL (art. 5 al. 3 LGZD).

Aussi longtemps que les logements sont au bénéfice de la LGL, le propriétaire ne peut les louer à un loyer supérieur à celui autorisé et le service compétent, soit l'OCLPF statue sur les demandes de modification de l'état locatif agréé présentées par le propriétaire et autorise ou refuse la demande (art. 42 al. 1, 2 et 3 LGL).

Le propriétaire notifie au locataire le loyer autorisé par le service compétent en utilisant, à cette fin et sous peine de nullité, une formule officielle mentionnant notamment les motifs de la modification du loyer ainsi que la voie et le délai de réclamation prévus par la loi. Une copie conforme de la décision relative au nouveau loyer doit y être jointe. La formule avise en outre le locataire qu'il est autorisé à consulter, auprès du service compétent, les pièces du dossier sur la base desquelles le loyer a été fixé (art. 42 al. 7 et 8 LGL). Le Conseil d'État, après consultation des milieux intéressés, a établi un bail type obligatoire pour les logements et les locaux soumis au contrôle des loyers (ci-après : bail LGZD ; art. 47 LGL – annexe 6 du règlement d'exécution de la loi générale sur le logement et la protection des locataires du 24 août 1992 - RGL - I 4 05.01).

Le bail LGZD prévoit que les modifications de loyer fixées par le service compétent en application de l'art. 42 LGL doivent être notifiées au locataire sur formulaire officiel, moyennant un préavis minimum de 30 jours (art. 4.1 bail LGZD). Les règles et usages 2010 font partie intégrante du bail, sous réserve des dérogations impératives aux art. 4, 11 et 16 des règles et usages 2010. Les modifications de loyer peuvent notamment être notifiées au locataire en tout temps sans tenir compte des échéances contractuelles prévues par le bail (art. 5 règles et usages 2010).

C'est sur ces bases que l'OCLPF estime être compétent pour ordonner la suppression de clauses complémentaires qu'il juge illicites dans le contrat de bail conclu le 18 mai 2019.

4) S'agissant de la contestation des loyers, le CO prévoit à son art. 253b al. 3 que les dispositions relatives à la contestation des loyers abusifs (art. 269 et ss CO) ne s’appliquent pas aux locaux d’habitation en faveur desquels des mesures d’encouragement ont été prises par les pouvoirs publics et dont le loyer est soumis au contrôle d’une autorité.

L'art. 2 al. 2 de l'ordonnance sur le bail à loyer et le bail à ferme d'habitation et de locaux commerciaux du 9 mai 1990 (OBLF - RS 221.213.11) précise que seuls les art. 253 à 268b, 269, 269d, al. 3, 270e et 271 à 273c CO ainsi que les art. 3 à 10 et 20 à 23 de cette ordonnance sont applicables aux appartements en faveur desquels des mesures d’encouragement ont été prises par les pouvoirs publics et dont le loyer est soumis au contrôle d’une autorité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_500/2013 du 25 septembre 2014 consid. 2.2).

Ainsi, la fixation et l'examen des loyers des logements subventionnés obéissent à des règles particulières découlant de la législation fédérale ou cantonale. En contrepartie d'aides prodiguées par la collectivité, ces lois instaurent un contrôle des loyers des immeubles concernés. Dès lors, pour éviter un double contrôle, l'art. 253b al. 3 CO, norme de compétence, exclut la cognition des autorités de conciliation tous les litiges relatifs aux loyers de logements subventionnés (David LACHAT in Luc THÉVENOZ/Franz WERRO, Code des obligations I, Commentaire romand, 2012, p. 1714 n. 6 ad art. 253b CO).

5) Les recourants reprochent au bail d'être incompréhensible et contradictoire, prévoyant deux loyers différents pour les mêmes périodes.

Il convient en premier lieu de préciser que la contradiction relevée par les recourants concerne uniquement le loyer prévu après la période de contrôle.

Il faut donc établir si la compétence de l'autorité intimée concerne également cette période, en raison du fait que les clauses litigieuses ont été conclues pendant la période de contrôle.

La chambre de céans a déjà eu l'occasion de trancher cette question s'agissant d'un logement soumis à la LDTR et pour lequel un loyer avait été fixé par l'autorité administrative pour une période de trois ans. Le loyer de cette période constituait le premier échelon d'un loyer échelonné, le second débutant après la période de contrôle. Il a été retenu par la chambre administrative, que l'autorité ne pouvait, sans outrepasser ses compétences, intervenir sur le montant du loyer dû au-delà de la période de contrôle, cette question relevant des règles du droit civil et non du droit public cantonal (ATA/512/2010 du 3 août 2010).

Dans une seconde espèce, la chambre administrative a confirmé cette décision de principe (ATA/835/2012 du 18 décembre 2012) et le Tribunal fédéral a confirmé que les dispositions de la LDTR instaurant le contrôle des loyers fondaient la compétence du département s'agissant de contrôler celui pendant la durée du contrôle mais qu'en revanche, elles ne lui permettaient pas d'intervenir sur le loyer postérieur à la période de contrôle en imposant aux parties la conclusion d'un nouveau bail qui tiendrait compte du loyer fixé dans l'autorisation de rénover en application de la LDTR. Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral indique également que les recourants invoquent en vain que l'art. 253b al. 3 CO prévoyant que le loyer fixé pour la période de contrôle ne peut être contesté devant les juridictions civiles, ne faisait pas obstacle à un éventuel recours fondé sur l'art. 270 CO contre le contrat de bail initial tendant à l'annulation de la clause d'échelonnement, précisant encore que la question de l'échelon qui devait prendre effet après la période de contrôle relevait non plus du droit public cantonal mais du droit privé fédéral, échappant ainsi à la compétence des autorités administratives (arrêt du Tribunal fédéral 1C_184/2013 du 8 janvier 2014 consid. 2.1 et 2.2 et la référence citée).

En l'espèce, les clauses complémentaires litigieuses concernent le loyer postérieur à la période pour laquelle le logement est subventionné, au sens vu
ci-dessus. Il n'est ainsi pas contesté que ces clauses complémentaires n'ont aucune incidence sur les loyers de la période de contrôle étatique. De même, la contradiction relevée par les recourants (soit deux loyers différents) concerne uniquement la période après le 31 mai 2020 (du 1er juin 2020 au 31 mai 2022).

Les recourants contestent toutefois l'application de la jurisprudence développée en matière de LDTR en l'espèce. Cependant, ils ne rendent pas vraisemblable qu'aucune contestation civile des clauses complémentaires – fondée sur les art. 270, 270d et 269c CO régissant la contestation du loyer initial et les conditions à la stipulation de loyers échelonnés – ne serait possible en raison de l'art. 253b al. 3 CO, alors que le Tribunal fédéral a retenu que cette disposition n'empêchait pas l'action civile, lorsque le contrôle des loyers intervenait sur la base de la LDTR (arrêt du Tribunal fédéral1C_184/2013 précité consid. 2.2). Ils ne démontrent pas non plus que la contestation de l'échelon postérieur, prévue par le droit fédéral, serait inopérante en raison de la durée de la période de contrôle – cette dernière étant, en l'occurrence, plus courte que celles examinées dans les deux causes ayant donné lieu aux jurisprudences susmentionnées.

Finalement, il faut constater, comme l'a retenu à juste titre le TAPI, que ni la LGZD ni la LGL ne prévoient la compétence de l'autorité administrative pour le contrôle du loyer pour une période ultérieure à celle de dix ans fixée par l'art. 5 al. 3 LGZD et qu’il n'existe aucune autre base légale qui le prévoit.

En conséquence, c'est à juste titre que le TAPI a annulé la décision de l'OCLPF qui entendait intervenir sur les clauses du bail applicables uniquement après la période du contrôle étatique.

6) Compte tenu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge conjointe de Mme et M. A______ (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à M. B______ (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 28 juin 2021 par Mme et M. A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 mai 2021 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge conjointe de Mme et M. A______ ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à M. B______, à la charge conjointe de Mme et M. A______ ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Maurice Utz, avocat des recourants, à Me Serge Patek, avocat de M. B______, au département du territoire - OCLPF ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Chenaux et Mascotto, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :