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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/252/2019

ATA/543/2021 du 25.05.2021 sur JTAPI/407/2019 ( PE ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/252/2019-PE ATA/543/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 mai 2021

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Samir Djaziri, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 mai 2019 (JTAPI/407/2019)


EN FAIT

1) Madame A______, née le ______2000, est une ressortissante moldave.

2) Elle est issue de l'union de Madame Mme B______et Monsieur C______, tous deux de nationalité moldave.

3) Le 8 octobre 2010, Mme B______ a épousé à Genève Monsieur B______, ressortissant italo-suisse, né le ______1960 (cf. extrait du registre informatisé CALVIN, « historique des nationalités », consulté le 20 avril 2021). Elle a ainsi obtenu une autorisation de séjour au titre du regroupement familial, laissant à l'étranger ses trois enfants mineurs - soit la prénommée, sa soeur jumelle, D______, et son frère Monsieur E______, né le ______1995, de nationalité russe.

4) Le 6 décembre 2011, Mme B______ a déposé une demande de regroupement familial en faveur de son fils E______.

5) À compter du 30 octobre 2012, M. E______ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour, au titre du regroupement familial avec sa mère.

6) Le 18 novembre 2015, Mme B______ a obtenu une autorisation d'établissement.

7) Le 23 août 2016, Mme B______ a déposé une demande de regroupement familial en faveur de ses deux filles auprès de l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après OCPM).

8) Par décision du 24 novembre 2017, l'OCPM a refusé la demande de regroupement familial déposée par Mme B______ en faveur de D______ et A______, et leur a imparti un délai pour quitter la Suisse.

9) Le 26 décembre 2017, Mme B______ a interjeté recours contre cette décision, en son nom personnel et en qualité de représentante de ses filles mineures, auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant principalement à son annulation, respectivement à l'octroi de l'autorisation de séjour requise.

Elle a en particulier fait valoir que l'intérêt de ses filles, qui étaient scolarisées à l'école de culture générale (ci-après : ECG), était de vivre en Suisse avec elle.

10) Par jugement du 29 mars 2018 (JTAPI/290/2018), le TAPI a rejeté ce recours, au motif qu'il n'y avait pas de raisons familiales majeures justifiant un regroupement familial différé, ni de preuves que D______ et A______, désormais majeures, ne pourraient pas continuer à être prise en charge en Moldavie comme ce fut le cas durant seize ans jusqu'à leur arrivée - sans autorisation - en Suisse.

Par ailleurs, rien n'indiquait que l'exécution du renvoi des intéressées en Moldavie serait impossible, illicite ou non raisonnablement exigible au sens de l'art. 83 de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20).

11) Le 7 mai 2018, Mme B______ et ses filles ont interjeté un recours contre ce jugement auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), en concluant, principalement, à son annulation, respectivement à l'octroi d'une autorisation de séjour en faveur de D______ et A______ (cause n° A/5064/2017).

12) Le 20 juillet 2018, D______ et A______ ont demandé à l'OCPM de leur délivrer une autorisation de séjour pour études.

Elles étaient scolarisées auprès de l'ECG, respectivement du Centre de Formation Professionnelle Arts (ci-après : CFPA), pour l'année scolaire 2018-2019.

Domiciliées chez leur mère, elles disposaient d'un logement approprié.

S'agissant des moyens financiers, Monsieur F______ était disposé à les prendre en charge financièrement.

À l'appui de leur demande, elles ont produit :

-       les attestations de leurs inscriptions à l'ECG, respectivement le CFPA (pour une formation de « Céramiste CFC ») ;

-       deux attestations de prise en charge financière signées par M. F______, le 9 mai 2018, qui garantissait, pour une durée de cinq ans, pouvoir verser à chacune CHF 2'540.- par mois ;

-       les bilans de l'activité indépendante de ce dernier au 31 décembre 2015 et 2016 faisant notamment état de capitaux propres de CHF 192'407.-, respectivement CHF 361'389.-.

13) Par courrier du même jour, Mme B______ et Mmes D______ et A______ ont demandé à la chambre administrative de suspendre l'instruction de la cause A/5064/2017, jusqu'à droit connu dans la procédure de demande d'autorisation de séjour pour études, ce que cette juridiction a fait par décision du 14 août 2018, après avoir obtenu l'accord de l'OCPM.

14) Le 19 septembre 2018, l'OCPM a informé Mme A______ de son intention de refuser de lui délivrer l'autorisation requise et de prononcer son renvoi de Suisse.

La nécessité de suivre un CFC de céramiste au CFPA n'était pas démontrée à satisfaction. En effet, le besoin absolu de suivre une formation secondaire en Suisse, plutôt qu'en Moldavie où l'intéressée avait été scolarisée jusqu'à l'âge de 16 ans, n'était pas démontré et ne pouvait pas être considéré comme un cas d'exception. En outre, les diplômes obtenus en Suisse ne seraient vraisemblablement pas reconnus en Moldavie. La pertinence d'obtenir de tels diplômes pour la suite de sa scolarité dans ce pays ou de son avenir professionnel n'était pas non plus établie.

Aucun élément ne permettait de retenir que la précitée ne pouvait pas terminer sa formation secondaire en Moldavie. Ses motivations relevaient davantage de la convenance personnelle que d'une réelle nécessité de suivre une formation à Genève.

Aussi, les qualifications personnelles de l'intéressée n'étaient pas suffisantes. En particulier, la présence de sa mère à Genève conduisait à penser que sa demande pourrait viser en premier lieu à éluder les prescriptions sur les conditions d'admission en Suisse afin de pouvoir y séjourner durablement, étant relevé que la demande de regroupement familial avec sa mère avait été refusée le 24 novembre 2017. Ainsi, sa sortie de Suisse au terme de sa formation n'était pas suffisamment garantie.

Enfin, il convenait de tenir compte des questions liées à l'évolution sociodémographique auxquelles la Suisse devait faire face, tout en ne perdant pas de vue que l'admission d'un étranger était une décision autonome appartenant à tout État souverain, sous réserve des obligations de droit international public.

Un délai de trente jours était imparti à l'intéressée pour faire valoir par écrit son droit d'être entendue.

15) Le 22 octobre 2018, Mme A______ a déposé ses observations. Ces observations ne figurent toutefois pas au dossier, ce que la juridiction intimée a constaté dans son jugement du 2 mai 2019.

16) Par décisions séparées du 6 décembre 2018, l'OCPM a refusé de délivrer l'autorisation de séjour sollicitée et prononcé le renvoi de Suisse de A______ et D______.

Reprenant les motifs formulés dans son courrier du 19 septembre 2018, il a en particulier relevé que Mme A______ n'avait pas démontré en quoi l'obtention d'un CFC suisse de céramiste lui serait plus utile en Moldavie qu'un diplôme équivalent obtenu dans ce pays. La pertinence d'obtenir un tel diplôme pour la suite de sa scolarité en Moldavie ou de son avenir professionnel n'était ainsi pas établie.

Elle n'avait pas fait valoir que l'exécution de son renvoi serait impossible, illicite ou inexigible au sens de l'art. 83 LEtr.

17) Par actes séparés du 21 janvier 2019, sous la plume de leur conseil, A______ et D______ ont déféré ces décisions devant le TAPI, concluant à leur annulation et à l'octroi des autorisations de séjour requises (causes A/252/2019 et A/251/2019).

A______ résidait en Suisse depuis le 30 juillet 2016 et avait débuté sa formation auprès du CFPA le 27 août 2018. Habitant chez sa mère, avec sa soeur jumelle, elle disposait d'un logement convenable. Elle disposait également des moyens financiers suffisants dans la mesure où M. F______ était disposé à la prendre en charge. Elle avait par ailleurs le niveau de formation et les qualifications personnelles requis pour poursuivre la formation auprès du CFPA, laquelle paraissait tout à fait adéquate au vu de son parcours et de son âge. Au surplus, la formation envisagée ne visait aucunement à éluder les prescriptions sur le séjour des étrangers. Les conditions légales d'octroi d'une autorisation de séjour pour études étant ainsi remplies, la décision contestée devait être annulée.

À titre subsidiaire, cette décision paraissait disproportionnée, dès lors qu'elle était déjà inscrite auprès du CFPA et que sa formation était d'ores et déjà entamée. Pour ce motif également, cette décision devait être annulée.

18) Dans ses observations du 20 mars 2019, l'OCPM a conclu au rejet du recours.

La recourante était arrivée en Suisse en 2016 dans le but de vivre durablement auprès de sa mère, Mme B______. La demande de regroupement familial déposée par cette dernière avait été rejetée. Bien que cette décision ne fût pas encore exécutoire, la demande de la recourante déposée pendant la procédure A/5064/2017 apparaissait, dans ces circonstances, davantage motivée par son désir de s'installer en Suisse que par celui d'y accomplir une formation de céramiste. Il était par ailleurs peu vraisemblable qu'elle ne pût acquérir une formation analogue dans son pays d'origine où la céramique faisait partie du patrimoine culturel.

19) Par jugement du 2 mai 2019, reçu le 6 mai suivant, le TAPI a rejeté le recours formé par Mme A______.

La recourante n'avait pas établi en quoi consistait la pertinence pour elle d'obtenir le diplôme requis pour la suite de sa scolarité dans son pays ou de son avenir professionnel. Elle n'avait joint à sa demande aucune lettre de motivation, ni précisé la durée des études souhaitées. Elle ne s'était de surcroît pas engagée à quitter la Suisse au terme de ses études, terme qu'elle ne précisait d'ailleurs pas. Le fait qu'elle eût déposé sa demande parallèlement à celle de sa mère, tendant au regroupement avec elle en Suisse, ne la dispensait pas de cet engagement dans le cadre d'une demande d'autorisation pour études, étant rappelé que le TAPI avait confirmé le refus de cette dernière demande. Il était douteux que la recourante remplît la condition des qualifications personnelles au sens de l'art. 27 al. 1 let. d de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), dès lors que sa demande avait été déposée postérieurement au jugement du TAPI du 29 mars 2018 niant le droit de sa mère de la faire venir en Suisse par le biais d'un regroupement familial, ce qui laissait penser que sa propre requête visait plutôt à obtenir ce qui avait été refusé à sa mère dans le cadre de la procédure A/5064/2017. Au cours de cette procédure, sa mère avait elle-même affirmé que l'intérêt de ses deux filles était de vivre en Suisse avec elle.

La recourante n'avait manifestement pas respecté les règles de procédure posées aux art. 10 al. 2 et 17 al. 1 LEI, à savoir qu'elle n'avait pas formulé sa demande depuis son pays d'origine, ni n'avait attendu à l'étranger la décision de l'OCPM, respectivement le jugement du TAPI.

Certes, un renvoi de Suisse à ce stade aurait des conséquences difficiles pour la recourante. Néanmoins, celle-ci avait entrepris une formation alors qu'elle ne bénéficiait d'aucune autorisation de séjour à Genève, mettant ainsi l'OCPM devant le fait accompli. Aussi, et quand bien même elle avait déjà effectué une partie du programme du diplôme qu'elle convoitait, elle ne pouvait tirer de ce seul élément un argument utile et suffisant à l'admission de son recours. En effet, celui qui plaçait l'autorité devant le fait accompli devait s'attendre à ce que celle-ci se préoccupât davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlaient pour lui.

20) Dans son recours interjeté le 5 juin 2019 devant la chambre administrative, A______ a conclu à l'annulation du jugement entrepris, respectivement à la délivrance d'une autorisation de séjour pour études.

Elle a repris textuellement la même argumentation que celle développées devant le TAPI.

21) Le 11 juin 2019, le TAPI a informé la chambre de céans qu'il n'avait pas d'observations à formuler.

22) Dans ses observations du 2 juillet 2019, l'OCPM a indiqué qu'en l'absence d'élément nouveau pertinent et afin d'éviter d'éventuelles redites, il se référait au jugement du TAPI, ainsi qu'à ses observations du 20 mars 2019.

23) Par courrier du 5 juillet 2019, la chambre de céans a informé les parties que la cause était gardée à juger.

24) Le 18 septembre 2020, dans le cadre de la cause parallèle A/5064/20017, la chambre de céans a tenu une audience de comparution personnelles, tout en procédant à une instruction complémentaire conjointe des causes A/251/2019 et A/252/2019.

À cette occasion, A______ et D______ ont en particulier déclaré qu'elles souhaitaient rester durablement avec leur mère et leur frère à Genève, où elles étaient bien intégrées et y avaient tous leurs amis. Elles n'avaient « plus de contacts avec (leur) vie d'avant ». Si elles devaient interrompre leur formation actuelle, elles devraient tout recommencer en Moldavie, faute d'équivalences. Les perspectives de formations artistiques en Moldavie étaient pratiquement inexistantes. Elles ne s'imaginaient pas vivre ailleurs qu'en Suisse. En Moldavie, il ne leur restait que leurs grands-parents maternels. Depuis 2016, elles n'étaient retournées ni en Moldavie, ni en Ukraine.

25) Sur quoi, la cause a derechef été gardée à juger.

26) Par arrêt rendu ce jour, la chambre de céans a admis le recours interjeté par Mme B______ et ses filles contre le jugement du TAPI du 29 mars 2018, annulé la décision de l'OCPM du 24 novembre 2017 et invité cet office à préaviser auprès du Secrétariat d'État aux migrations l'octroi d'une autorisation de séjour au titre du regroupement familial en faveur de D______ et A______ (cause n° A/5064/2017- ATA/541/2021).

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, la chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité d'une décision prise en matière de police des étrangers lorsqu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 a contrario de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; ATA/114/2015 du 27 janvier 2015 consid. 5c).

3) a. Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), qui a alors été renommée LEI et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à l'art. 126 LEI et aux arrêts du Tribunal fédéral 2C_841/2019 du 11 octobre 2019 consid. 3 ; 2C_737/2019 du 27 septembre 2019 consid. 4.1, les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit.

b. En l'espèce, la demande d'autorisation pour poursuivre ses études a été formée le 20 juillet 2018 par la recourante, de sorte que l'ancien droit est applicable, étant néanmoins relevé que la plupart des dispositions sont restées identiques.

c. La LEI et ses ordonnances, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l'espèce.

4) À teneur de l'art. 23 al. 1 OASA, l'étranger peut prouver qu'il dispose des moyens financiers nécessaires à une formation ou à un perfectionnement en présentant notamment : a) une déclaration d'engagement ainsi qu'une attestation de revenu ou de fortune d'une personne solvable domiciliée en Suisse, b) la confirmation d'une banque reconnue en Suisse permettant d'attester l'existence de valeurs patrimoniales suffisantes ou c) une garantie fe1me d'octroi de bourses ou de prêts de formation suffisants; d'autres garanties financières peuvent, au cas par cas, être fournies (par ex. : garantie financière d'une haute école dans les cas de rigueur ; cf. Directives et commentaires du SEM, Domaine des étrangers, état au 26 janvier 2018, ci-après: Directives LEI, ch. 5.1:2).

5) Les qualifications personnelles (art. 27 al. 1 let. d LEI) sont suffisantes notamment lorsqu'aucun séjour antérieur, aucune procédure de demande antérieure ni aucun autre élément n'indiquent que la formation ou la formation continue invoquée vise uniquement à éluder les prescriptions générales sur l'admission et le séjour des étrangers (art. 23 al. 2 OASA).

Lors de l'examen des qualifications personnelles, aucun indice ne doit par conséquent porter à croire que la demande poursuivrait pour objectif non pas un séjour temporaire en vue de suivre la formation, mais en premier lieu d'éluder les prescriptions sur les conditions d'admission en Suisse afin d'y séjourner durablement. Aussi convient-il de tenir notamment compte, lors de l'examen de chaque cas, des circonstances suivantes : situation personnelle du requérant (âge, situation familiale, formation scolaire préalable, environnement social), séjours ou demandes antérieurs, région de provenance (situation économique et politique, marché du travail indigène pour les diplômés des hautes écoles) (cf. directives LEI, ch. 5.1.1.1).

6) La question de la nécessité du perfectionnement souhaité doit être examinée sous l'angle du pouvoir d'appréciation conféré à l'autorité par l'art. 96 al. 1 LEI (arrêts du Tribunal administratif fédéral (TAF) C-6568/2013 du 29 juin 2015 consid. 6.2; C-219/2011 du 8 août 2013 consid. 7.2.2 ; C-5909/2012 du 12 juillet 2013 consid. 7.2.2), lequel stipule que les autorités compétentes tiennent notamment compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics et de la situation personnelle de l'étranger.

7) Les conditions posées par l'art. 27 al. 1 LEI étant cumulatives, une autorisation de séjour pour l'accomplissement d'une formation ne saurait être délivrée que si l'étudiant étranger satisfait à chacune d'elles (arrêt du TAF C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 5.3; ATA/709/ 2016 du 23 août 2016 consid. 5a).

Cela étant, même dans l'hypothèse où toutes ces conditions sont réunies, l'étranger n'a pas un droit à la délivrance d'une autorisation de séjour, à moins qu'il ne puisse se prévaloir d'une disposition particulière du droit fédéral ou d'un traité lui conférant un tel droit (ATF 135 II 1 consid. 1.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_167/2015 du 23 février 2015 consid. 3 ; 2C_1032/2014 du 15 novembre 2014 consid. 3 ; 2D_28/2009 du 12 mai 2009), ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Autrement dit, l'autorisation doit être refusée lorsque ces conditions ne sont pas remplies, mais lorsqu'elles le sont, l'autorité n'en dispose pas moins d'un large pouvoir d'appréciation pour statuer sur la requête, dont elle est tenue de faire le meilleur exercice en respectant les droits procéduraux des parties (arrêts du TAF C-7279/2014 du 6 mai 2015 consid. 7.1 ; C-6582/2013 du 12 août 2014 consid. 7.1 ; C-5485/2013 du 23 juillet 2013 consid. 5.3 ; C-1359/2010 du ler septembre 2010 consid. 5.3).

Conformément à l'art. 96 LEI, il convient de procéder à une pondération globale de tous les éléments en présence afin de décider de l'octroi ou non de l'autorisation de séjour pour études (arrêts du TAF C- 517/2015 du 20 janvier 2016 consid. 7.2 ; C-5718/2013 du 10 avril 2014 ; C- 3139/2013 du 10 mai 2014 consid. 7.2 ; C-2291/2013 du 31 décembre 2013 consid. 7.2 ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 8).

Dans cette perspective, selon la jurisprudence du TAF, le bénéfice d'une formation complète antérieure (arrêts C-5718/2013 du 10 avril 2014 ; C-3143/2013 du 9 avril 2014 ; C-2291/2013 du 31 décembre 2013), l'âge de la personne demanderesse (arrêts C-5718/2013 du 10 avril 2014 et C-3139/2013 du 10 mars 2014), les échecs ou problèmes pendant la formation (arrêt C-3170/2012 du 16 janvier 2014), la position professionnelle occupée au moment de la demande (arrêt C-5871/2012 du 21 octobre 2013), les changements fréquents d'orientation (arrêt C-6253/2011 du 2 octobre 2013), la longueur exceptionnelle du séjour à fin d'études (arrêt C-219/2011 du 8 août 2013) sont des éléments importants à prendre en compte en défaveur d'une personne souhaitant obtenir une autorisation de séjour pour études (ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 8).

8) Suite à la modification de l'art. 27 LEI, entrée en vigueur le 1er janvier 2011 (RO 2010 5957 ; FF 2010 373, notamment p. 391), l'absence d'assurance de départ de Suisse de l'intéressé au terme de sa formation ne constitue plus un motif justifiant à lui seul le refus de délivrance d'une autorisation de séjour pour études (arrêts du TAF C-4647/2011 du 16 novembre 2012 consid. 5.4 ; C- 7924/2010 du 7 mars 2012 consid. 6.3.1). Néanmoins, cette exigence subsiste en vertu de l'art. 5 al. 2 LEI, à teneur duquel tout étranger qui effectue un séjour temporaire en Suisse, tel un séjour pour études, doit apporter la garantie qu'il quittera la Suisse à l'échéance de celui-là (ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 6). L'autorité la prend en considération dans l'examen des qualifications personnelles requises au sens des art. 27 al. 1 let. d LEI et 23 al. 2 OASA (arrêts du TAF C- 2333/2013 et C-2339/2013 du 28 octobre 2014 consid. 7.2.2 ; C-2291/2013 du 31 décembre 2013 consid 6.2.1; ATA/269/2014 du 15 avril 2014).

9) Lors de l'admission d'étrangers, l'évolution socio-démographique de la Suisse est prise en considération (art. 3 al. 3 LEtr). La Suisse ne peut accueillir tous les étrangers qui désirent y séjourner, que ce soit pour des séjours de courte ou de longue durée, raison pour laquelle la jurisprudence considère qu'il est légitime d'appliquer une politique restrictive d'admission (ATF 122 II 1 consid. 3a ; Alain WURZBURGER, « La jurisprudence récente du Tribunal fédéral en matière de police des étrangers », in RDAF I 1997 p. 287 ; arrêt du TAF C-1359/2010 du 1er septembre 2010 consid. 6.1 ; ATA/677/2015 du 23 juin 2015 consid. 6a ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

Compte tenu du grand nombre d'étrangers qui demandent à être admis en Suisse en vue d'une formation ou d'un perfectionnement, les conditions d'admission fixées à l'art. 27 LEI, de même que les exigences en matière de qualifications personnelles et envers les écoles (art. 23 et 24 OASA), doivent être respectées de manière rigoureuse. Il y a lieu de tout mettre en oeuvre pour empêcher que les séjours autorisés au motif d'une formation ou d'un perfectionnement ne soient exploités de manière abusive afin d'éluder des conditions d'admission plus sévères (Directives LEI, ch. 5.1; cf. aussi ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

L'expérience démontre que les étudiants étrangers admis à séjourner sur sol helvétique ne saisissent souvent pas l'aspect temporaire de leur séjour en Suisse et cherchent, une fois le but de leur séjour atteint, à s'établir à demeure dans le pays. Confrontées de façon récurrente à ce phénomène et afin de prévenir les abus, compte tenu aussi de l'encombrement des établissements (écoles, universités, etc.) et de la nécessité de sauvegarder la possibilité d'accueillir aussi largement que possible de nouveaux étudiants sur le territoire de la Confédération, les autorités sont tenues de faire preuve de rigueur dans ce domaine (arrêts du TAF C-5497/2009 du 30 mars 2010 consid. 6.1 ; C-1794/2006 du 17 juillet 2009 consid. 5.2; C-4419/2007 du 28 avril 2009 consid. 5.2 ; ATA/303/2014 du 29 avril 2014 consid. 7).

10) La situation ne saurait être jugée par les autorités à l'aune du fait accompli, ce qui, de plus, reviendrait à défavoriser les personnes qui, agissent conformément au droit (ATF 129 II 249 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1025/2017 du 22 mai 2018 consid. 6 ; 2C_473/2017 du 2 novembre 2017 consid. 3).

11) En l'espèce, l'OCPM n'a pas retenu que les conditions légales posées par l'art. 27 let. a à c LEI n'étaient pas réalisées en tant que telles. Faisant usage de son pouvoir d'appréciation, il a toutefois douté de la nécessité pour A______ de suivre la formation envisagée en Suisse et retenu la possibilité que la demande ne servait qu'à éluder les prescriptions générales sur l'admission et le séjour des étrangers.

12) Le TAPI a confirmé cette position. Il a en particulier estimé qu'il était douteux que la recourante remplît la condition des qualifications personnelles au sens de l'art. 27 al. 1 let. d LEI, dès lors que sa demande avait été déposée postérieurement au jugement du TAPI du 29 mars 2018 niant le droit de sa mère de la faire venir en Suisse par le biais d'un regroupement familial, ce qui laissait penser que sa propre requête visait plutôt à obtenir ce qui avait été refusé à sa mère dans le cadre de la procédure A/5064/2017. Au cours de cette procédure, sa mère avait elle-même affirmé que l'intérêt de ses deux filles était de vivre en Suisse avec elle.

Lors de l'audience du 18 septembre 2020, Mme A______ et sa soeur ont déclaré qu'elles souhaitaient rester durablement avec leur mère et leur frère à Genève, où elles étaient bien intégrées et y avaient tous leurs amis. Elles n'avaient « plus de contacts avec (leur) vie d'avant ». Si elles devaient interrompre leur formation actuelle, elles devraient tout recommencer en Moldavie, faute d'équivalences. Les perspectives de formations artistiques en Moldavie étaient pratiquement inexistantes. Elles ne s'imaginaient pas vivre ailleurs qu'en Suisse. En Moldavie, il ne leur restait que leurs grands-parents maternels. Depuis 2016, elles n'étaient retournées ni en Moldavie, ni en Ukraine.

Ces déclarations scellent le sort du recours, puisque la recourante a clairement manifesté devant la chambre de céans qu'elle n'avait pas l'intention de quitter la Suisse à l'échéance de son séjour temporaire en qualité d'étudiante (art. 5 al. 2 LEI a contrario).

13) a. Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

b. Elles ne disposent à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande d'autorisation (arrêts du TAF C-5268/2008 du 1er juin 2011 consid. 10 ; C-406/2006 du 2 septembre 2008 consid. 8 ; ATA/467/2017 du 25 avril 2017 consid. 9b).

c. Le renvoi d'un étranger ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

14) En l'espèce, la recourante s'est vu, à juste titre, refuser l'octroi d'une autorisation de séjour pour études. L'OCPM était alors tenu de prononcer son renvoi. Par ailleurs, dans son recours, l'intéressée n'a fait valoir aucun motif permettant de penser que l'exécution de son renvoi en Moldavie serait impossible, illicite ou inexigible. De son côté, le TAPI ne s'est pas non plus expressément prononcé sur la question de l'exécution du renvoi de la recourante. Au paragraphe 13 de la partie « en fait » de son jugement, le TAPI s'est néanmoins référé à son jugement du 29 mars 2018 (JTAPI/290/2018), par lequel il avait en particulier confirmé l'exécution du renvoi de Mmes A______ et D______ dans leur patrie. Il a également considéré que « certes, un renvoi de Suisse à ce stade aurait des conséquences difficiles pour la recourante. Néanmoins, celle-ci avait entrepris une formation alors qu'elle ne bénéficiait d'aucune autorisation de séjour, mettant ainsi l'OCPM devant le fait accompli. Aussi, et quand bien même elle avait déjà effectué une partie du programme du diplôme qu'elle convoitait, elle ne pouvait tirer de ce seul élément un argument utile et suffisant à l'admission de son recours » (jugement entrepris, p. 13, consid. 17). Cela étant, on pourrait ainsi a priori admettre que la TAPI a implicitement confirmé l'exécution de la mesure de renvoi. Cette question peut toutefois rester indécise en l'espèce, dans la mesure où, par arrêt de ce jour (cause A/5064/2017 - ATA/541/2021), la chambre de céans a annulé le jugement du 29 mars 2018 précité et jugé que Mmes A______ et D______ pouvaient rester en Suisse au titre du regroupement familial avec leur mère. Dans ce cas de figure, l'exécution du renvoi de l'intéressée doit être provisoirement suspendue jusqu'à droit définitivement jugé dans la cause A/5064/2017 (cf. mutatis mutandis, arrêt du TAF C-1706/2014 du 26 avril 2016 consid. 10.2).

15) Partant, le recours sera partiellement admis. Le jugement du TAPI du 2 mai 2019 et la décision de l'OCPM du 6 décembre 2018 seront annulés, en tant qu'ils prononcent l'exécution du renvoi de la recourante.

16) Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge de la recourante (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 500.- lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 juin 2019 par Madame A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 mai 2019 ;

au fond :

l'admet partiellement ;

annule le jugement précité et la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 6 décembre 2018 en tant qu'ils confirment l'exécution du renvoi de Suisse de la recourante ;

dit que l'exécution de la décision de renvoi est suspendue jusqu'à droit définitivement jugé dans la cause A/5064/2017 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Mme A______, une indemnité de procédure, de CHF 500.-, à la charge de l'État de Genève ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Samir Djaziri, avocat de la recourante, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Lauber, juge, M. Berardi, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

...

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

...

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l'entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l'admission provisoire,

4. l'expulsion fondée sur l'art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d'admission,

6. la prolongation d'une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d'emploi du titulaire d'une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d'asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l'objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

...

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

...

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l'objet d'aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.