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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/50/2020

ATA/835/2020 du 01.09.2020 ( FPUBL ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/50/2020-FPUBL ATA/835/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 1er septembre 2020

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Robert Assael, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE

 



EN FAIT

1) Monsieur A______, né le ______ 1956, a été engagé au sein de la Ville de Genève (ci-après : la ville) le 1er octobre 1999 en qualité d'employé temporaire comme chargé de mission auprès du B______ (ci-après B______). Il a occupé cette fonction jusqu'au 30 septembre 2000.

2) Le 27 septembre 2000, le Conseil administratif de la ville (ci-après : CA) l'a nommé fonctionnaire en tant que conservateur du B______. Il a occupé cette fonction jusqu'au 31 janvier 2003.

3) L'intéressé a été nommé directeur suppléant du 1er février au 30 mai 2003, puis directeur du C______ du 1er juin 2003 au 31 juillet 2005.

4) Du 1er août 2005 au 31 août 2009, il a occupé la fonction de conservateur aux D______.

5) Le 9 juin 2008, M. A______ a formé auprès de sa hiérarchie une demande de réduction de son temps de travail, de 100 % à 80 %, à compter du 1er septembre 2008.

6) La direction des ressources humaines de la ville (ci-après : DRH) a informé l'intéressé le 24 juin 2008 que cette demande avait été acceptée.

7) Du 1er septembre 2009 au 31 mars 2012, M. A______ a occupé le poste de collaborateur scientifique puis, du 1er avril 2012 au 30 avril 2017, de chargé de projet diversité socioculturelle au service « E______ » de la ville.

8) Par courrier du 20 décembre 2010, la DRH a informé M. A______ de l'entrée en vigueur, le 31 décembre 2010, du statut du personnel de la ville du 29 juin 2010 (ci-après : le statut - LC 21 151). Ce dernier prévoyait notamment que l'intéressé ne serait plus fonctionnaire, mais employé de droit public. Il en résultait également une possibilité réservée au CA d'accorder une réduction de la durée du travail des employés jusqu'à un jour par semaine dès l'âge de 57 ans, moyennant une réduction de traitement jusqu'à 10 % pour une réduction d'activité de 20 % (art. 74 al. 2 et 3 du statut).

9) Lors de sa séance du 2 septembre 2015, le CA a rendu une décision d'interprétation relative à la réduction du temps de travail et du traitement au sens de l'art. 74 du statut :

« 1) L'art. 74 al. 2 et 3 du statut ne s'applique qu'aux membres du personnel dont le taux d'activité se situe entre 50 % et 100 % ;

2) la réduction de la durée du travail doit être calculée proportionnellement au taux d'activité de la ou du membre du personnel au moment de la demande ;

3) la réduction proportionnelle du traitement représente 50 % de la réduction du temps de travail.

La décision entre en vigueur avec effet immédiat ».

10) Le 1er mai 2017, M. A______ a été transféré au sein du F______ (ci-après : le F______) afin d'y travailler en qualité de chargé de projet à 80 %.

11) Le 1er juillet 2017, le statut du personnel de la ville et son règlement d'application du 14 octobre 2009 (LC 21 152.0 ; ci-après : REGAP) ont été modifiés en ce sens que les employés de l'administration de la ville avaient désormais un droit inconditionnel à prolonger leur activité au-delà de l'âge de la retraite statutaire, afin de continuer leur activité jusqu'à l'âge d'obtention d'une rente AVS.

12) Par courrier du 30 janvier 2018 adressé au directeur du F______,
M. A______ a sollicité une réduction de son temps de travail de 20 %, soit 6 heures 24 minutes par semaine, avec pour corollaire une diminution de son salaire de 10 %.

13) Par courrier du 21 février 2018, le CA a informé M. A______ qu'il acceptait sa demande de poursuivre son activité au-delà de l'âge statutaire de la retraite. Il était ainsi autorisé à prolonger ses rapports de service en qualité de chargé de projet « expositions et événements » à 80 % au F______, jusqu'à l'âge donnant droit à une rente de vieillesse. Cette mesure déployait ses effets du 1er décembre 2018 au 30 novembre 2021.

14) Par décision du 27 février 2018, le CA a refusé d'accorder à M. A______ une diminution de son temps de travail en application de l'art. 74 al. 2 du statut, vu le rapport de la DRH y relatif.

15) Par acte du 16 avril 2018, M. A______ a interjeté recours contre la décision précitée auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), en concluant principalement à son annulation et à ce que la ville réduise de 20 % son temps de travail, « sous suite de frais et dépens ».

À défaut de contenir une motivation, la décision querellée violait son droit d'être entendu. Vu la teneur de l'art. 74 du statut, sa demande de réduction devait être accordée, d'autant plus qu'il était âgé de 61 ans et que la direction du F______ avait favorablement préavisé sa requête.

16) Dans son mémoire réponse du 25 mai 2018, la ville a conclu au rejet du recours.

L'absence de motivation de la décision querellée ne portait pas à conséquence dans la mesure où les droits de M. A______ avaient été préservés.

Son large pouvoir d'appréciation lui permettait de refuser cette demande, quand bien même le préavis de sa hiérarchie était favorable, pour des motifs d'opportunité résultant de l'organisation du service et les répercussions financières de la mise en oeuvre de l'art. 74 al. 2 du statut, la diminution du traitement étant limitée à la moitié de la réduction de la durée de travail. Dans la mesure où le Conseil municipal refusait depuis plusieurs années le budget présenté, elle se devait de continuer de gérer avec diligence les deniers de ses contribuables.

17) Le 3 août 2018, M. A______ a persisté dans ses conclusions et ses précédents développements.

18) Par arrêt du 19 mars 2019, la chambre administrative a admis le recours, annulé la décision de la ville du 27 février 2018 et lui a renvoyé le dossier pour nouvelle décision.

La décision litigieuse ne contenait aucune mention des éléments invoqués par la ville dans le cadre de la procédure. Aucun des documents auxquels il était fait référence pour la justifier n'y était joint ni n'avait été produit avec le dossier. Aucun élément ne permettait en réalité de comprendre ce qui avait motivé le refus de l'intimée de faire droit à la demande de l'intéressé.

Faute d'avoir motivé sa décision, la ville n'avait pas respecté le droit d'être entendu de l'intéressé. Cette violation n'avait pas pu être réparée devant la chambre administrative.

19) Le 19 juin 2019, le directeur du F______ a transmis à la direction du département de la culture et du sport de la ville (ci-après : département) un préavis favorable à la demande de réduction de temps de travail de M. A______.

La réduction du temps de travail de 20 % était un élément très favorable pour le bien-être de l'intéressé. Dans le cadre général de l'organisation du travail de l'unité « K______ », cette réduction du temps de travail était compatible avec leurs objectifs. Ils avaient toujours soutenu les demandes des collaboratrices ou collaborateurs de leur institution, qui avaient obtenu une réduction suite à leur demande, à l'exception de M. A______ et d'un autre collaborateur, dont les requêtes avaient été refusées par le CA. La perte liée à la difficulté d'obtenir des ressources humaines supplémentaires (perte de disponible budgétaire temporaire) était compatible avec l'organisation de l'unité « K______ ». Il allait de soi que lors du départ à la retraite de l'intéressé, le retour de ce disponible budgétaire serait affecté à un usage efficient.

20) Par décision du 20 novembre 2019, le CA a refusé la demande de diminution du temps de travail de 20 % formée par M. A______ le 30 janvier 2018.

Cette décision était justifiée par les ressources à disposition du F______, par la programmation des festivités du bicentenaire 2020 du F______, par les projets confiés à l'intéressé et par l'égalité de traitement.

L'année 2020 marquerait le 200ème anniversaire de la naissance du F______ et plusieurs manifestations prendraient place à cette occasion tout au long de l'année. Afin de mener à bien les festivités, les collaborateurs du F______ seraient fortement mobilisés ; il en allait notamment de l'image de l'institution. Une baisse de l'activité de l'intéressé n'était pas compatible avec les besoins induits par les manifestations à venir.

Par ailleurs, l'intéressé s'était vu confié seul ou avec d'autres collègues plusieurs projets d'envergure, tels que, notamment, la méditation et la coordination de l'exposition « G______ » (2020), la mise en oeuvre de l'espace « H______ » (septembre 2020) ou encore l'exposition temporaire « I______ » (2021). S'y ajoutait le démontage de l'exposition « G______ ». Une réduction de son temps de travail risquait de mettre en péril la réalisation de ces projets.

Le F______ était en outre confronté à un manque de ressources humaines internes et à des contraintes budgétaires croissantes, lesquelles allaient encore à l'avenir s'accentuer à l'égard de l'ensemble des services de la ville. Une diminution du taux d'activité de l'un ou l'autre des employés du F______ sans libération des montants disponibles budgétaires équivalents compromettrait le fonctionnement et les missions de cette institution.

Finalement, dans la mesure où la situation de l'intéressé ne différait pas de celle d'autres employés de la ville s'étant déjà vu refuser une baisse de leur taux d'activité pour des motifs similaires, la ville avait décidé d'adopter la même position à son égard, par mesure d'équité.

21) Par acte du 6 janvier 2020, M. A______ a interjeté recours contre la décision précitée par-devant la chambre administrative, en concluant, préalablement, à ce qu'il soit ordonné à la ville de produire le premier préavis positif datant de 2017 ou 2018 du F______ quant à la réduction de 20 % de son temps de travail, le(s) rapport(s) de la DRH relatif(s) à sa demande de réduction du taux d'activité, l'intégralité des documents et échanges de correspondance en relation avec ladite demande, le rapport de J______ SA, ainsi que, principalement, à ce que la décision du 20 novembre 2019 soit annulée et à ce qu'une indemnité pour les frais indispensables au présent recours lui soit allouée.

Si la ville n'était pas obligée d'accepter une requête en réduction du temps de travail, sa marge d'appréciation et sa faculté de trancher pour des motifs d'opportunité étaient limitées par l'obligation statutaire de faciliter les démarches de son personnel. Une autre limite à ce pouvoir d'appréciation était constituée par le préavis de l'institution ou du supérieur hiérarchique de la personne concernée, lesquels étaient mieux à même d'évaluer si la diminution du temps de travail entraînerait des difficultés d'organisation ou de gestion.

Dans la décision querellée, la ville avançait une autre motivation que celle développée dans sa décision du 27 février 2018, éclairée par son mémoire de réponse du 25 mai 2018 ; elle invoquait des éléments actuels. Or, pour juger du bien-fondé de sa requête, il fallait se replacer à l'époque de celle-ci. Il n'était pas admissible que des motifs postérieurs soient retenus, alors que le temps anormalement long pris pour traiter sa requête était dû à la ville. Une autre approche violerait le principe de la bonne foi et de l'interdiction de l'arbitraire.

Les motifs avancés à l'époque par la ville pour justifier son refus, à savoir les difficultés d'organisation du service en son absence et les répercussions financières, étaient infondés et arbitraires. Les trois projets sur lesquels il collaborait étaient soit terminés, soit ne représentaient que quelques jours de travail par mois. Il avait formulé d'autres propositions de projets, mais aucune n'avait été retenue par la direction. Ainsi, une diminution de son taux d'activité n'aurait aucune conséquence sur la charge de travail des autres collaborateurs du F______. Les répercussions financières représentaient des sommes très modiques, à savoir une réduction de salaire de 8 %. En donnant un préavis favorable, le F______ avait estimé que la réduction requise ne posait pas de problème. L'argument de la ville sur la nécessité de veiller aux deniers publics revenait à vider l'art. 74 du statut de sa substance. Il était d'ailleurs étonnant que la ville n'est pas fait mention dans sa décision du 27 février 2018 ou son mémoire réponse du 25 mai 2018 des manifestations prévues pour le 200ème anniversaire du F______, lesquelles devaient selon toute vraisemblance déjà être ébauchées.

Si par impossible la chambre de céans considérait que la ville pouvait invoquer des éléments actuels, il convenait de constater qu'elle avait également violé l'art. 74 du statut ainsi que les principes de la bonne foi et de l'interdiction de l'arbitraire. Les projets relatifs au 200ème anniversaire du F______ s'achèveraient au début du mois de janvier 2020. Il ne travaillait pas seul sur ceux-ci et/ou il n'y travaillait pas plus de trois jours par semaine en tout. Le F______ n'était pas confronté à un manque de ressources humaines internes, mais souffrait plutôt d'un problème de management et de gouvernance. Le directeur du F______ avait par ailleurs préavisé favorablement sa requête à deux reprises, la dernière fois le
19 juin 2019. Le motif de l'équité avancé par la ville était enfin erroné, dès lors qu'il revenait à refuser toutes les demandes.

22) Dans son mémoire réponse du 28 février 2020, la ville a conclu au rejet du recours et à ce que le recourant soit condamné en tous les « frais et dépens » de l'instance.

Au vu de la formule potestative de l'art. 74 du statut, la ville n'était absolument pas contrainte d'accorder au recourant une réduction de sa durée de travail, ce d'autant plus que le préavis formulé par la direction du département était défavorable à une telle réduction, compte tenu des enjeux actuels du F______ liés aux festivités du bicentenaire de l'institution et l'absence de son directeur. Une diminution d'activité à l'aube de l'année 2020 était problématique sous l'angle de l'organisation du service, dans la mesure où plusieurs manifestations devaient prendre place à l'occasion du 200ème anniversaire du F______. Les collaborateurs du F______ étaient et seraient plus fortement mobilisés, de sorte qu'une réduction d'activité du recourant de 80 % à 64 % risquait de mettre en péril la bonne marche du service ainsi que la réalisation de plusieurs projets. Par ailleurs, la réduction d'activité sollicitée ne permettrait pas de libérer des montants budgétaires équivalents. Or, les contraintes budgétaires croissantes auxquels le F______ était confronté, et qui allaient encore s'accentuer à l'avenir au vu des perspectives financières défavorables pour la ville, ne permettaient pas de rétablir la perte de main d'oeuvre induite grâce l'augmentation d'activité d'une ou d'un collègue occupant un poste similaire ou l'ouverture d'un nouveau poste. Un autre membre du personnel exerçant la fonction de chargé de projet d'expositions au sein du F______ avait également déposé une demande de réduction d'activité. Une hypothétique acceptation de ces deux demandes était encore plus à même de causer des problèmes organisationnels. Le F______ n'employait que quatre chargés de projets d'expositions. L'application du principe « premier arrivé, premier servi » pouvait s'avérer peu pertinent sous l'angle de l'opportunité, voire problématique sous celui de l'égalité de traitement. S'agissant de l'autre collaborateur ayant formé une demande similaire, des circonstances personnelles étaient susceptibles d'influer sur le sort de la demande. Le recourant n'avait pour sa part pas invoqué de telles circonstances. Si par impossible la chambre administrative devait constater qu'une demande de réduction d'activité pouvait être accordée sans entraver la bonne marche du service, il appartiendrait alors au CA de décider à quel dossier accorder la priorité, s'agissant en premier lieu d'une problématique d'opportunité.

L'art. 74 du statut ne prévoyait nullement l'obligation pour le CA d'obtenir un préavis du service dans lequel le collaborateur travaillait, ni de la direction du département au sein duquel le service était lié. Il s'agissait uniquement d'une pratique établie par la DRH. Dans la mesure où ce préavis n'était pas imposé par la réglementation, le CA pouvait s'en écarter et n'était pas obligé d'en motiver les raisons. En l'occurrence, la direction du département avait rendu un préavis négatif motivé. Le CA n'avait en revanche pas connaissance d'un préavis positif semble-t-il émis par le directeur du F______ le 19 juin 2019. Un éventuel préavis positif n'était de toute manière plus d'actualité au vu de la charge de travail supplémentaire liée à l'absence du directeur du F______ depuis septembre 2019, des projets qui balisaient le jubilé du F______ et du « diagnostic managérial au MHN » selon lequel il convenait de déléguer vers le bas les tâches, compétences et responsabilités qui étaient précédemment assumées par le directeur lui-même.

Depuis l'absence du directeur, le recourant avait par ailleurs été amené à s'insérer « dans le moule » d'une nouvelle équipe impliquant une période d'adaptation incompatible avec une réduction d'activité.

Enfin, la décision litigieuse ne violait ni le principe de la bonne foi ni celui de l'interdiction de l'arbitraire.

23) Par courrier du 9 mars 2020, la chambre de céans a fixé aux parties un délai au 3 avril 2020 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger, délai qui a été automatiquement prorogé au 15 mai 2020 en raison de la crise sanitaire.

24) Le 15 mai 2020, le mandataire du recourant a sollicité une prolongation du délai imparti pour fournir des observations complémentaires au 16 juin 2020, compte tenu des difficultés d'organisation liées au coronavirus et à la reprise.

25) Le 18 mai 2020, la chambre administrative a refusé la prolongation sollicitée au motif que le délai avait déjà été prolongé et que la raison évoquée n'apparaissait pas suffisante à la demande de prolongation d'un mois supplémentaire.

26) Par communiqué de presse du 11 juin 2020, la ville a annoncé que le directeur du F______ avait démissionné de ses fonctions et qu'une procédure de recrutement serait engagée dans les meilleurs délais afin de désigner le nouveau directeur ou la nouvelle directrice de l'institution.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant sollicite, à titre préalable, la production de différents documents par la ville, à savoir le premier préavis positif datant de 2017 ou 2018 du F______ quant à la réduction de 20 % de son temps de travail, le(s) rapport(s) de la DRH relatif(s) à son demande de réduction du taux d'activité, l'intégralité des documents et échanges de correspondance en relation avec ladite demande et le rapport de J______ SA.

a. Selon la jurisprudence développée par le Tribunal fédéral et reprise par la chambre de céans (ATA/1809/2019 du 17 décembre 2019 consid. 2a et les références citées), tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), repris par
l'art. 41 LPA, le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (arrêts du Tribunal fédéral 2C_545/2014 du 9 janvier 2015 consid. 3.1 ; 2D_5/2012 du 19 avril 2012 consid. 2.3), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 138 V 125 consid. 2.1 ; 137 II 266 consid. 3.2).

Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3).

b. En l'espèce, s'agissant en particulier du rapport de J______ SA, il n'apparaît pas pertinent dans le cadre du présent litige, dès lors qu'il est sans rapport direct avec la demande de diminution du taux de travail formulée par le recourant. Pour le surplus, les pièces sollicitées ne sont pas déterminantes compte tenu de ce qui suit.

Il ne sera ainsi pas fait droit aux réquisitions de pièces formulées par le recourant.

3) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision du 20 novembre 2019 de la ville refusant de réduire le temps de travail du recourant de 20 % selon les modalités de l'art. 74 du statut.

4) a. Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61
al. 2 LPA).

b. Au cours de la procédure de recours, il n'est tenu compte des faits nouveaux que si la juridiction y est en général autorisée, si la décision ne sortit ses effets que dès la date de la décision sur recours et si l'économie de procédure l'impose (Blaise KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd., 1991, p. 434 n. 2105). Le rôle de l'autorité de recours consiste non seulement à contrôler la solution qui a été adoptée, mais aussi à imposer celle qui est propre à mettre fin à la contestation (ATF 98 Ib 178 ; 92 I 327 ; 89 I 337). Or, en faisant abstraction des faits survenus après la décision attaquée, l'autorité de recours ouvrirait la porte à de nouvelles procédures et risquerait donc de laisser subsister le litige, sans contribuer toujours utilement à le trancher (André GRISEL, Traité de droit administratif, vol. II, 1984, p. 932).

L'art. 68 LPA autorise le recourant, sauf exception prévue par la loi, à invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuve nouveaux qui ne l'ont pas été dans les précédentes procédures. À plusieurs reprises, la chambre de céans a tenu compte, d'office ou sur requête, de faits qui s'étaient produits après que la décision de première instance eut été rendue (ATA/216/2020 du 25 février 2020 consid. 6c ; ATA/1091/2018 du 16 octobre 2018 consid. 2b ; ATA/286/2017 du 14 mars 2017 consid. 3b ; ATA/10/2017 du 10 janvier 2017 consid. 3b).

5) En tant qu'employé communal, le recourant est soumis au statut, ce que les parties ne contestent pas.

6) a. Selon l'art. 74 du statut, les demandes des membres du personnel souhaitant travailler à temps partiel sont facilitées par l'employeur (al. 1). L'employeur peut accorder aux membres du personnel qui en font la demande une réduction de leur durée de travail jusqu'à un jour par semaine dès l'âge de 57 ans (al. 2). Le traitement des personnes intéressées est réduit proportionnellement jusqu'à 10 % pour une réduction du temps de travail de 20 % (al. 3).

b. Constitue un excès négatif du pouvoir d'appréciation le fait que l'autorité se considère comme liée, alors que la loi l'autorise à statuer selon son appréciation, ou encore qu'elle renonce d'emblée en tout ou partie à exercer son pouvoir d'appréciation (ATF 137 V 71 consid. 5.1).

L'autorité commet un abus de son pouvoir d'appréciation lorsque, tout en respectant les conditions et les limites légales, elle ne se fonde pas sur des motifs sérieux et objectifs, se laisse guider par des éléments non pertinents ou étrangers au but des règles ou viole des principes généraux tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATA/189/2018 du 27 février 2018 consid. 3 ; ATA/38/2018 du 16 janvier 2018 consid. 6a et les références citées).

7) Dans des arrêts récents, la chambre administrative a considéré que des raisons budgétaires ne sauraient justifier le refus d'une requête fondée sur l'art. 74 du statut. Une diminution du taux de travail entraînait automatiquement une diminution du traitement du fonctionnaire qui la sollicitait, quand bien même cette diminution n'était pas proportionnelle à celle du temps de travail. Par conséquent, la ville ne supportait pas une perte mais une diminution de ses dépenses. De plus, le fait que la diminution de salaire ne soit pas proportionnelle à celle du taux d'activité ne s'opposait pas à une diminution du taux d'activité : cette règle était prévue par le statut que le pouvoir exécutif était tenu d'appliquer. Par conséquent, seules les difficultés d'organisation que pourrait rencontrer le service pourraient être pertinentes pour refuser une demande de diminuer le taux d'activité fondée sur l'art. 74 du statut (ATA/356/2020 du 16 avril 2020 consid. 4b ; ATA/138/2020 du 11 février 2020 consid. 5b).

Dans un autre arrêt récent, la chambre de céans a rappelé que la jurisprudence a reconnu à de nombreuses reprises l'existence d'un droit découlant de la législation fédérale, alors que le texte légal employait le mot « peut »
(« Kann-Vorschrift ») qui implique, a priori, une liberté d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C_229/2015 du 31 mars 2016 consid. 1.2.2 et les arrêts cités). L'art. 74 al. 2 du statut avait été introduit pour favoriser les temps partiels, ce qui devait pousser l'autorité, sinon à ériger en véritable droit le passage à un taux d'activité inférieur, du moins à répondre favorablement aux demandes lorsqu'elle le pouvait (ATA/182/2020 du 18 février 2020 consid. 5c).

8) L'autorité intimée justifie le refus de la diminution de 20 % du taux d'activité du recourant et de 10 % de son traitement par le fait que sa baisse d'activité serait incompatible avec les besoins induits par le 200ème anniversaire du F______ et la réalisation de plusieurs projets qu'il s'était vu confier, que le F______ était confronté à un manque de ressources humaines internes et à des contraintes budgétaires croissantes ainsi que par un soucis d'équité, d'autres employés de la ville s'étant vu refuser une baisse de leur taux pour les motifs similaires.

a. À titre préalable, le recourant reproche à l'intimée de fonder sa décision de refus sur une autre motivation que celle développée dans sa décision du 27 février 2018, éclairée par son mémoire de réponse du 25 mai 2018, soit sur des éléments actualisés. Or, à teneur de la décision litigieuse, la motivation n'est en substance pas différente que celle invoquée précédemment à l'exception de celle relative à l'équité à savoir les difficultés d'organisation au sein du F______ en cas de réduction du taux d'activité du recourant et les répercussions financières de sa mise en oeuvre. Il ne peut en particulier être reproché à l'autorité intimée d'avoir mentionné le bicentenaire du F______ ainsi que les projets sur lesquels le recourant travaille durant l'année 2020 dans le cadre de la décision querellée, en lieu et place des projets dont il s'est occupé en 2018, ceux-ci n'ayant plus aucune incidence.

b. Comme cela ressort de la jurisprudence susmentionnée, les raisons budgétaires ne sauraient justifier la décision querellée. En effet, une diminution du taux de travail entraîne automatiquement une diminution du traitement du fonctionnaire qui la sollicite, quand bien même cette diminution n'est en l'espèce, pas proportionnelle à celle du temps de travail. Par conséquent, la ville ne supporte pas une perte mais une diminution de ses dépenses. De plus, l'intimée ne saurait refuser la demande au motif que la diminution de salaire n'est pas proportionnelle à celle du taux d'activité. Cette règle est prévue par le statut, et le pouvoir exécutif est tenu d'appliquer la loi et ne peut simplement refuser de l'appliquer.

Par conséquent, seules les difficultés d'organisation que pourrait rencontrer le service pourraient être pertinentes pour refuser de donner une suite favorable à la requête de la recourante.

Les événements liés au bicentenaire du F______ pour l'année 2020 ont, au vu de l'écoulement du temps, probablement déjà eu lieu, ont déjà été organisés ou sont en passe de l'être, voire ont dû être annulés en raison de la pandémie. Par ailleurs, le recourant expose que la diminution de son temps de travail n'affecterait pas son travail pour les différents projets qu'il s'est vu confier, lesquels ne l'occupent pas plus de trois jours par semaine. Cette argumentation est confirmée par le préavis du 19 juin 2019 de l'ancien directeur du F______, lequel a notamment relevé que la réduction du temps de travail sollicitée par le recourant était compatible avec les objectifs d'organisation du travail de l'unité « K______», tout comme la perte de disponible budgétaire temporaire qui en découlerait. S'il ressort certes des pièces produites par l'intimée que le département aurait établi un préavis négatif, ledit préavis ne figure pas au dossier, pas plus que la motivation ayant entouré celui-ci. Bien que les préavis précités ne soient pas contraignants, dès lors qu'ils ne sont pas imposés par le statut, ils ne sauraient être dénués de tout fondement. Il ne peut qu'être convenu qu'en qualité de responsable hiérarchique direct du recourant ainsi qu'en sa qualité de directeur de l'institution lorsqu'il a formulé son préavis, l'ancien directeur du F______ était le mieux à même de déterminer si la réduction du taux d'activité de l'intéressé était compatible avec la bonne continuité des activités du F______, ce qu'il a confirmé. Ainsi, à teneur du dossier, et plus particulièrement du préavis de l'ancien directeur du F______, les difficultés d'organisation invoquées par l'intimée n'apparaissent pas fondées.

Par ailleurs, il sied de relever que le recourant fêtera ses 64 ans le
8 novembre 2020, de sorte qu'en admettant sa demande, et dans la mesure où son souhait de prolonger son activité professionnelle jusqu'à l'âge de la retraite AVS a été accepté par la ville, la période durant laquelle il restera en poste s'achèvera au plus tard le 30 novembre 2021. La mesure ne portera des effets que tout au plus pendant quinze mois. Ainsi, l'absence de disponible budgétaire pour remplacer le taux d'activité diminué n'aura d'effet que durant un temps limité, à savoir quinze mois tout au plus.

L'argument relatif à la charge de travail supplémentaire liée à l'absence du directeur évoqué par la ville dans son mémoire de réponse est par ailleurs sans incidence sur ce qui précède. Il sera en effet relevé que depuis les dernières écritures des parties, le directeur du F______, en arrêt de travail depuis plusieurs mois, a démissionné de ses fonctions, ce que la ville a annoncé dans son communiqué de presse du 11 juin 2020. Cette dernière a par ailleurs précisé à cette occasion qu'une procédure de recrutement serait engagée dans les meilleurs délais afin de désigner le nouveau directeur ou la nouvelle directrice de l'institution.

Certes, la ville ne pourra probablement pas accepter toutes les demandes qui seront formulées. Celle-ci allègue en particulier que l'unité « public et
exposition » du F______ comprend onze collaboratrices et collaborateurs, parmi lesquels six ont plus de 55 ans. Cette dernière allègue par ailleurs qu'un autre collaborateur occupant la même fonction que le recourant au sein du F______ aurait formulé une demande similaire, en invoquant des circonstances personnelles susceptibles d'influer sur le sort de la demande. Le recourant n'aurait pour sa part pas invoqué de telles circonstances. Toutefois, la ville ne donne aucune précision supplémentaire sur les circonstances invoquées, ni sur l'étendue et le dies a quo de la diminution sollicitée par cet autre collaborateur. Il lui appartiendra ainsi d'examiner, dans chaque situation précise, les intérêts en jeu afin d'exercer le pouvoir d'appréciation que le statut lui a conféré et d'éviter de commettre un excès de celui-ci en renonçant d'emblée, en tout ou partie, à l'exercer. Dans le cas d'espèce, le refus n'est pas justifié.

La décision querellée sera ainsi annulée et la diminution du taux de travail du recourant de 80 % à 64 % admise, avec une diminution du taux de son traitement faisant passer celui-ci de 80 % à 72 % d'un plein traitement.

Le dossier sera renvoyé à la ville de Genève pour définir les modalités de la diminution, soit principalement les horaires et le dies a quo de celle-ci.

9) Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA), et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée au recourant, qui obtient gain de cause et a exposé des frais pour assurer sa défense (art. 87 al. 2 LPA).

 

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PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 janvier 2020 par Monsieur A______ contre la décision de la Ville de Genève du 20 novembre 2019 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision de la Ville de Genève du 20 novembre 2019 ;

renvoie le dossier à la Ville de Genève au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Monsieur A______, à la charge de la Ville de Genève ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Robert Assael, avocat du recourant, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mmes Galeazzi et Krauskopf,
M. Verniory, Mme Lauber, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. Poinsot

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :