Décisions | Chambre civile
ACJC/621/2025 du 13.05.2025 sur ORTPI/1459/2024 ( SCC ) , JUGE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/15733/2022 ACJC/621/2025 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU MARDI 13 MAI 2025 |
Entre
Madame A______, domiciliée ______ [GE], recourante contre une ordonnance rendue par la 19ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 25 novembre 2024, représentée par Me Mattia DEBERTI, avocat, avenue de la Roseraie 76A, case postale, 1211 Genève 12,
et
Monsieur B______, domicilié ______ [GE], intimé, représenté par Me Nicolas WYSS, avocat, place Edouard-Claparède 5, case postale 292, 1211 Genève 12.
A. a. A______, née le ______ 1982, et B______, né le ______ 1969, se sont mariés le ______ 2009 à C______ (Vaud), sans conclure de contrat de mariage.
Les enfants D______ et E______, nés respectivement les ______ 2010 et ______ 2013, sont issus de cette union.
b. Les parties se sont séparées le 1er août 2020, A______ étant alors demeurée dans la villa conjugale sise à F______ [GE], copropriété des parties, et les parents assumant une garde alternée sur leurs enfants.
c. La vie séparée a été organisée par des mesures protectrices de l'union conjugale rendues par le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal) par jugement JTPI/5629/2021 du 30 avril 2021, par lequel il a notamment été statué sur l'entretien de la famille et la séparation de biens des époux a été prononcée avec effet au jour du dépôt de la requête, soit dès le 4 août 2020.
B. a. Par acte déposé le 16 août 2022 au Tribunal, B______ a formé une requête unilatérale en divorce à l'encontre de A______, motivée le 28 février 2023, concluant notamment à ce le divorce soit prononcé et à ce qu'il soit statué sur les effets accessoires du divorce.
b. Par requête de mesures provisionnelles déposée le 6 avril 2023, l'épouse a, notamment, sollicité la production de diverses pièces par B______ sur la base du devoir d'information entre époux (art. 170 CC), notamment :
- les relevés détaillés (et non caviardés) des comptes bancaires de l'époux auprès de G______ nos 1______, 2______ et 3______ depuis le 28 août 2009 à la date la plus récente,
- les relevés détaillés des cartes de crédit de celui-ci auprès de H______ nos 4______, 5______, 6______, 7______, des cartes de crédit auprès de I______, de J______ UK et de K______ GmbH, de la carte de crédit no 8______ auprès de L______, ainsi que de "celle ayant permis de s'acquitter de la facture no 57 de la pièce 87" (à savoir une facture concernant l'achat d'une étagère en métal) depuis le 28 août 2009 à la date la plus récente, et
- les déclarations fiscales pour les années 2020 à 2022.
c. Dans sa réponse sur mesures provisionnelles, B______ s'est opposé à la requête pour cause d'irrecevabilité.
d. Lors de l'audience tenue le 14 juin 2023 par le Tribunal, B______ a déclaré que ses comptes auprès de G______ avaient été fermés, car, en tant qu'employé de [la banque] M______ depuis mai 2019, il n'avait plus le droit de détenir des comptes dans d'autres banques depuis cette prise d'emploi.
A l'issue de cette audience, le Tribunal a rendu une ordonnance sur mesures provisionnelles protocolant l'accord des parties sur la production de certaines pièces, notamment un document attestant de la clôture des comptes auprès de G______ et les déclarations fiscales de l'époux pour les années 2020 à 2022.
A______ allègue que son époux s'est alors opposé à produire les autres pièces sollicitées.
e. Lors de l'audience tenue le 13 décembre 2023 par le premier juge, B______ a déclaré ne pas détenir "d'autres comptes que ceux à la procédure".
A______ a confirmé avoir reçu les pièces ayant fait l'objet de l'accord précité et a réitéré sa demande en production de pièces concernant, notamment, les relevés de comptes auprès de G______ et les relevés de cartes de crédit.
f. Dans sa réponse du 29 février 2024, l'épouse a à nouveau sollicité la production des relevés de comptes auprès de G______ et des relevés de cartes de crédit. Elle a en sus requis la production d'autres pièces, à savoir :
- les relevés détaillés du compte de son époux auprès de N______ depuis le 28 août 2009 à la date la plus récente,
- une attestation d'intégralité de N______, certifiant que B______ ne serait titulaire, bénéficiaire ou ayant droit économique d'aucun autre compte, et
- les déclarations fiscales pour les années 2019 à 2023.
Sur la base des pièces déjà produites par son époux, elle a relevé les éléments de faits suivants :
- entre juillet 2015 et mai 2016, des virements pour un total de 217'142 fr. depuis le compte joint des parties auprès de G______ sur des comptes dont il était le seul titulaire (15'000 fr., 20'000 fr., 52'000 fr., 30'142 fr. et 100'000 fr.), et
- le 9 juillet 2018, le virement de 300'000 fr. depuis le compte joint des parties auprès de M______ sur ledit compte N______, dont elle n'avait jusqu'alors pas connaissance.
g. Dans les écritures subséquentes, A______ a persisté dans ses conclusions.
De son côté, B______ a exposé – pièces à l'appui – que les virements de 15'000 fr., 20'000 fr. et 100'000 fr. avaient servi aux paiements des intérêts et de l'amortissement hypothécaires, que les autres virements avaient servi à l'achat de titres via le compte N______ et que tant le portefeuille (environ 280'000 fr.) que les liquidités (environ 12'000 fr.) auprès de N______ avaient été transférés à M______ en mai 2019 conformément à la politique interne de son employeur.
Il a produit, notamment, les pièces suivantes :
- un relevé de son compte auprès de N______ pour la période allant du 1er septembre 2011 au 18 mai 2019,
- un relevé de compte pour le mois de mars 2012 du compte no 1______ auprès de G______, comprenant également un aperçu des soldes "sans les valeurs en dépôt" du compte de prévoyance professionnelle 3A 2______ (15 fr. 20) et du compte d'épargne 3______ (0 fr.),
- les relevés de clôtures des comptes 1______ et 3______ intervenues en septembre 2018,
- un relevé de clôture à la date du 17 mai 2019 du compte auprès de N______, faisant état d'un solde de 12'922 fr. 24, et
- une déclaration d'intégralité au 3 août 2020 établie par G______ le 22 novembre 2023, dans laquelle la banque indique, notamment, que "conformément à la législation suisse, le délai de garde des documents [était] limité à dix ans".
B______ n'a pas produit les autres pièces sollicitées par son épouse.
h. Par ordonnance du 2 juillet 2024, le Tribunal a gardé la cause à juger sur ordonnance de preuve.
i. Par ordonnance ORTPI/1459/2024 rendue le 25 novembre 2024, remise pour notification à A______ le 27 novembre suivant, le Tribunal a, notamment, admis de part et d'autres des titres comme moyens de preuve; statuant en faveur de cette dernière, il a en particulier admis les titres suivants en mains de B______ : l'attestation d'intégralité de G______ au 4 août 2020 et la déclaration fiscale pour l'année 2022 (ch. 6.2 du dispositif); il a imparti aux parties un délai au 30 janvier 2025 pour produire lesdites pièces (ch. 8).
Le premier juge a considéré qu'il ressortait de la procédure qu'une partie des pièces sollicitées par l'épouse avaient été produites, que, pour le surplus, il appartenait encore à B______ de produire les pièces citées sous le chiffre 6.2 et que, s'agissant de la production des relevés de cartes de crédit détaillés, celle-ci n'apparaissait plus pertinente au vu de l'ensemble des pièces déjà produites.
C. a. Par acte expédié le 9 décembre 2024 à la Cour de justice (ci-après : la Cour), A______ a recouru contre l'ordonnance ORTPI/1459/2024, dont elle a sollicité l'annulation du chiffre 6.2 de son dispositif.
Cela fait, elle a conclu, avec suite de frais judiciaires et dépens, à ce que soient admis en tant que moyens de preuve les titres en mains de B______ suivants :
- les relevés des comptes G______ précités depuis le 28 août 2009 à la date la plus récente,
- le relevé du compte N______ depuis le 28 août 2009 à la date la plus récente,
- l'attestation d'intégralité de N______ précitée,
- les relevés de cartes de crédit précités (sans indication de période), et
- les déclarations fiscales pour les années 2019 à 2023.
Elle a, subsidiairement, conclu au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle ordonnance de preuve.
b. Par ordonnance ORTPI/1578/2024 rendue le 16 décembre 2024, le Tribunal a révoqué le délai fixé au chiffre 8 du dispositif de l'ordonnance ORTPI/1459/2024 et ordonné la suspension de la procédure jusqu'à droit jugé dans le présent recours.
c. Par réponse du 20 janvier 2025, B______ a conclu à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, avec suite de frais judiciaires et dépens.
d. Par répliques et dupliques des 3, 13 et 27 février, ainsi que des 13 et 20 mars 2025, les parties ont persisté dans leurs conclusions respectives.
Elles ont, à cette occasion, produit des pièces nouvelles, à savoir une ordonnance ORTPI/191/2025 de reprise de la procédure rendue par le Tribunal le 11 février 2025, ainsi que des documents relatifs à la dette hypothécaire grevant le domicile conjugal et établis en décembre 2024, janvier 2025 et mars 2025.
B______ ayant soulevé le fait que son épouse n'avait pas indiqué de période pour la production des relevés de cartes de crédit, cette dernière a relevé qu'elle n'avait fait que reprendre sa conclusion de première instance, laquelle mentionnait une période allant du 28 août 2009 à la date la plus récente.
e. Les parties ont été informées par la Cour de ce que la cause était gardée à juger par courriers du 10 avril 2025.
1. 1.1 L'ordonnance entreprise ayant été communiquée aux parties avant le 1er janvier 2025, la présente procédure d'appel demeure régie par l'ancien droit de procédure (art. 404 al. 1 et 405 al. 1 CPC), sous réserve des dispositions d'application immédiate énumérées à l'art. 407f CPC.
1.2 Le recours est recevable contre les décisions et ordonnances d'instruction de première instance, dans les cas prévus par la loi (art. 319 let. b ch. 1 CPC) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (art. 319 let. b ch. 2 CPC).
Par définition, les décisions visées à l'art. 319 let. b CPC ne sont ni finales, ni partielles, ni incidentes, ni provisionnelles. Il s'agit de décisions d'ordre procédural par lesquelles le tribunal détermine le déroulement formel et l'organisation matérielle de l'instance (JEANDIN, CR-CPC, 2019, n. 11 ad art. 319 CPC).
Les ordonnances d'instruction se rapportent à la préparation et à la conduite des débats. Elles statuent en particulier sur l'opportunité et les modalités de l'administration des preuves, ne déploient ni autorité ni force de chose jugée et peuvent en conséquence être modifiées ou complétées en tout temps (cf.
art. 154 CPC; JEANDIN, op. cit., n. 14 ad art. 319 CPC).
En l'espèce, il n'est à raison pas contesté que l'ordonnance entreprise est une ordonnance d'instruction, relevant notamment de l'administration des preuves, au sens de l'art. 319 let. b CPC.
1.3 Cette ordonnance peut faire l'objet d'un recours dans les dix jours à compter de sa notification (art. 321 al. 1 et 2 CPC), délai qui a été respecté in casu.
1.4 Il reste à déterminer si la décision querellée est susceptible de causer à la recourante un préjudice difficilement réparable au sens de l'art. 319 let. b
ch. 2 CPC.
2. Cette dernière fait grief au Tribunal d'avoir refusé comme moyens de preuve les titres sollicités et de n'avoir admis que deux titres, dont l'un (soit l'attestation d'intégralité établie par G______ au 4 août 2020) avait au demeurant déjà été produit par l'intimé.
Elle fait valoir que, selon l'attestation d'intégralité précitée, la banque ne conserverait ses documents que durant une période de dix ans, de sorte que certains relevés bancaires ne pourraient bientôt plus être obtenus. Il serait ainsi urgent d'accéder à sa requête "dans la mesure où certains transferts [avaient] été effectués durant l'été 2015 et ne ser[aient] plus accessibles" à partir de l'été 2025, date dès laquelle elle commencerait à être irrémédiablement empêchée d'obtenir - malgré son droit légitime à être renseignée - la preuve des faits qu'elle allègue, ce qui lui causerait un préjudice difficilement réparable, alors qu'elle aurait fait preuve de toute la diligence requise en sollicitant ces pièces depuis deux ans.
S'agissant des "relevés N______", le délai de garde des documents serait, selon elle, identique dans cet établissement, lequel est soumis aux mêmes exigences légales que G______, et elle ne serait pas en mesure en l'état de déterminer si des virements auraient été effectués depuis 2015.
En ce qui concerne les relevés des cartes de crédit, la recourante considère qu'elle risquerait également de ne plus pouvoir être renseignée, alors que l'intimé aurait "commencé à effectuer des versements mensuels très importants et réguliers à partir de 2015 et 2016".
Elle ne motive pas son recours s'agissant de l'attestation d'intégralité de N______ ni des déclarations fiscales.
L'intimé relève, pour sa part, qu'il a déjà fourni le relevé détaillé du compte N______, ainsi que des explications - justifiées par pièces - concernant les virements effectués en 2015 et 2016 précités.
2.1 La notion de préjudice difficilement réparable est plus large que celle de "préjudice irréparable" au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (ATF 138 III 378 consid. 6.3). Constitue un préjudice difficilement réparable toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, qui ne peut être que difficilement réparée dans le cours ultérieur de la procédure. L'instance supérieure doit se montrer exigeante, voire restrictive avant d'admettre l'accomplissement de cette condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu : il s'agit de se prémunir contre le risque d'un prolongement sans fin du procès (parmi plusieurs : ACJC/353/2019 du 1er mars 2019 consid. 3.1.1; JEANDIN, op. cit., n. 22 ad art. 319 CPC).
Le préjudice sera ainsi considéré comme difficilement réparable s'il ne peut pas être supprimé ou seulement partiellement, même dans l'hypothèse d'une décision finale favorable au recourant (ATF 134 III 188 consid. 2.1 et 2.2), ce qui surviendra par exemple lorsque des secrets d'affaires sont révélés ou qu'il y a atteinte à des droits absolus à l'instar de la réputation, de la propriété et du droit à la sphère privée. De même, le rejet d'une réquisition de preuve par le juge de première instance n'est en principe pas susceptible de générer un préjudice difficilement réparable, sauf dans des cas exceptionnels, par exemple lorsqu'un moyen de preuve risque de disparaître, à l'instar du refus d'entendre un témoin mourant (JEANDIN, op. cit., n. 22a et 22b ad art. 319 CPC et les réf. cit.).
En règle générale, la décision refusant ou admettant des moyens de preuve offerts par les parties ne cause pas de préjudice difficilement réparable puisqu'il est normalement possible, en recourant contre la décision finale, d'obtenir l'administration de la preuve refusée à tort ou, à l'inverse, d'obtenir que la preuve administrée à tort soit écartée du dossier (arrêts du Tribunal fédéral 4A_248/2014 du 27 juin 2014 consid. 1.2.3; 4A_339/2013 du 8 octobre 2013 consid. 2; 5A_315/2012 du 28 août 2012 consid. 1.2.1; COLOMBINI, Code de procédure civile, 2018, p. 1024).
Une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais de celle-ci ne constitue pas un préjudice difficilement réparable (SPÜHLER, Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2024, n. 7 ad art. 319 CPC). De même, le seul fait que la partie ne puisse se plaindre d'une administration des preuves contraire à la loi qu'à l'occasion d'un recours sur le fond n'est pas suffisant pour retenir que la décision attaquée est susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable (COLOMBINI, Condensé de la jurisprudence fédérale et vaudoise relative à l'appel et au recours en matière civile, in JT 2013 III 131 ss, 155). Retenir le contraire équivaudrait à permettre à un plaideur de contester immédiatement toute ordonnance d'instruction pouvant avoir un effet sur le sort de la cause, ce que le législateur a justement voulu éviter (parmi plusieurs : ACJC/220/2023 du 13 février 2023 consid. 2.1; ACJC/943/2015 du 28 août 2015 consid. 2.2; ACJC/35/2014 du 10 janvier 2014 consid. 1.2.1).
Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision attaquée lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (par analogie : ATF 134 III 426 consid. 1.2 et 133 III 629 consid. 2.3.1).
Si la condition du préjudice difficilement réparable n'est pas remplie, le recours est irrecevable et la partie doit attaquer la décision incidente avec la décision finale sur le fond (BRUNNER, Schweizerische Zivilprozessordnung, 2024, n. 13 ad art. 319 CPC).
2.2 Le recours est recevable pour violation du droit et constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC).
L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par le recourant (Hohl/De Poret/Bortolaso/Aguet, Procédure civile, Tome II,
2010, n. 2307).
2.3 En l'espèce, la recourante sollicite la production de relevés détaillés de trois comptes G______ pour la période allant du 28 août 2009 à la date la plus récente. Dès lors qu'il ressort de l'attestation établie le 22 novembre 2023 par cette banque que celle-ci ne conserve ses documents que pour une durée de dix ans, le délai de conservation est d'ores et déjà échu pour la période allant de 2009 à 2014. En revanche, pour les relevés dès l'année 2015, la recourante risque de ne plus pouvoir être renseignée en raison de la destruction à venir de ces documents, ce qui pourrait lui causer un préjudice difficilement réparable.
Il en va différemment des autres pièces sollicitées. En effet, l'intimé a déjà produit le relevé détaillé du compte N______ pour la période allant du 1er septembre 2011 à la date de sa clôture, soit au 18 mai 2019, et la période de conservation – pour autant que celle-ci soit également limitée à dix ans - est d'ores et déjà échue pour les documents antérieurs au 1er septembre 2011. S'agissant de l'attestation d'intégralité de N______ et des déclarations fiscales, la recourante n'a pas motivé son recours, de sorte qu'il ne sera pas entré en matière sur ces deux postes. En ce qui concerne enfin les relevés des cartes de crédit, la recourante ne formule aucun grief à l'égard de la considération du Tribunal selon laquelle leur production n'apparaîtrait plus pertinente au vu de l'ensemble des pièces déjà produites. A titre superfétatoire, il sera relevé que la recourante - qui justifie sa requête de production par des paiements mensuels importants en faveur de cartes de crédit que l'intimé aurait effectués depuis 2015 – semble solliciter ces documents en lien avec les dépenses courantes de la famille et ses prétentions en entretien, alors qu'à cet égard, est déterminant le train de vie des parties peu avant la séparation intervenue en 2020 et que, dès lors, elle pourra solliciter les relevés des cartes de crédit ultérieurement en appel le cas échéant.
Partant, le recours est recevable en tant qu'il porte sur les relevés des comptes de l'intimé auprès de G______, et est irrecevable pour le surplus.
3. Les pièces nouvelles et les allégués de fait nouveaux sont irrecevables en procédure de recours (art. 326 CPC).
4. La recourante soutient qu'en vertu de l'art. 170 CC, elle disposerait d'un droit de regard complet sur la situation financière de son époux et de la famille pendant le mariage pour autant qu'elle ait un intérêt digne de protection (tels que l'entretien ou le partage du patrimoine). Les relevés des comptes auprès de G______ – que l'intimé persiste à refuser de produire - étant liés à l'établissement du patrimoine acquis par les époux durant le mariage, ils seraient nécessaires pour la préservation de ses droits.
4.1 A teneur de l'art. 170 CC, chaque époux peut demander à son conjoint qu'il le renseigne sur ses revenus, ses biens et ses dettes (al. 1). Le juge peut astreindre le conjoint du requérant ou des tiers à fournir les renseignements utiles et à produire les pièces nécessaires (al. 2).
Le devoir de renseignement peut être imposé par le juge pour autant que le requérant rende vraisemblable l'existence d'un intérêt digne de protection
(ATF 132 III 291 consid. 4.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_566/2016 du 2 février 2017 consid. 4.2.3), notamment lorsque des considérations tenant à l'entretien ou au partage de patrimoine peuvent être invoquées (arrêt du Tribunal fédéral 5A_918/2014 précité consid. 4.2.2). Les demandes de renseignements chicanières ou manifestant une pure curiosité sont exclues (ATF 132 III 291 consid. 4.2).
Le droit de demander des renseignements sur la situation financière de son conjoint, au sens de l'art. 170 CC, n'est pas illimité. L'étendue de ce droit comprend tous les renseignements utiles et les pièces demandées nécessaires et adéquates pour permettre à l'époux requérant d'évaluer la situation et, le cas échéant, de faire valoir ses prétentions; elle s'apprécie selon les circonstances données et le but des informations requises (art. 170 al. 2 CC; ATF 118 II 27 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 5A_819/2017 du 20 mars 2019 consid. 5.3.2). Dans ce cadre, le juge procède à une pesée des intérêts, entre celui du requérant à obtenir les renseignements et celui de l'autre à ne pas les donner (ATF 136 I 178 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 5A_819/2017 précité). Le principe de la proportionnalité doit être respecté (ATF 132 III 291 consid. 4.2).
4.2 Le régime de la participation aux acquêts comprend les acquêts et les biens propres de chaque époux (art. 196 CC). Sont acquêts les biens acquis par un époux à titre onéreux pendant le régime (art. 197 al. 1 CC), dont notamment le produit du travail (art. 197 al. 2 ch. 1 CC) et les revenus de ses biens propres (art. 197 al. 2 ch. 5 CC). Les biens propres comprennent notamment les biens qui lui appartenaient au début du régime, qui lui échoient ensuite par succession ou à quelque autre titre gratuit et les biens acquis en remploi des biens propres (art. 198 ch. 1, 2 et 4 CC). Les acquêts et les biens propres sont disjoints dans leur composition au jour de la dissolution du régime (art. 207 al. 1 CC). Chaque époux a droit à la moitié du bénéfice de l'autre (art. 215 al. 1 CC).
Sont réunis aux acquêts, en valeur, les biens qui en faisaient partie et dont l'époux a disposé par libéralités entre vifs sans le consentement de son conjoint dans les cinq dernières années antérieures à la dissolution du régime, à l'exception des présents d'usage (art. 208 al. 1 ch. 1 CC) et les aliénations de biens d'acquêts qu'un époux a faites pendant le régime dans l'intention de compromettre la participation de son conjoint (ch. 2).
En vertu de l'art. 8 CC, l'époux qui réclame la réunion aux acquêts selon
l'art. 208 CC doit prouver que les conditions permettant une telle opération sont remplies (arrêts du Tribunal fédéral 5A_667/2019 du 7 avril 2020 consid. 4.1.2; 5C.66/2002 du 15 mai 2003 consid. 2.4.2, non publié aux ATF 129 III 481). Il doit prouver non seulement que le bien en cause a appartenu à l'autre époux à un moment donné, mais encore ce qu'il en est advenu (ATF 118 II 27 consid. 2 et 3b; arrêts du Tribunal fédéral 5A_667/2019 du 7 avril 2020 consid. 4.1.2; 5A_339/2015 du 18 novembre 2015 consid. 8.4; 5A_51/2014 du 14 juillet 2014 consid. 2.1, publié in FamPra.ch 2014 p. 1036; 5A_714/2009 du 16 décembre 2009 consid. 4.2, publié in FamPra.ch 2010 p. 430). S'il s'agit d'une libéralité au sens de l'art. 208al. 1 ch. 1 CC, il appartient ensuite à l'auteur de la libéralité qui conteste la réunion de prouver le consentement de son conjoint (arrêts du Tribunal fédéral 5A_667/2019 du 7 avril 2020 consid. 4.1.2; 5C.111/2002 du 26 août 2002 consid. 2.1.3, publié in FamPra.ch 2003 p. 386; 5C.66/2002 du 15 mai 2002 consid. 2.1.3 et les références citées).
4.3 En l'occurrence, dès lors que les époux sont soumis au régime matrimonial de la participation aux acquêts, la recourante - qui sollicite les informations litigieuses en relation avec ses prétentions en liquidation du régime matrimonial et qui reproche à son époux son manque de transparence et une éventuelle dissimulation de biens - dispose d'un intérêt juridiquement protégé à connaître les avoirs déposés sur les comptes litigieux pour la période allant de 2015 à leur clôture.
La cause étant en état d'être jugée (art. 327 al. 3 let. b CPC), le chiffre 6.2 du dispositif de l'ordonnance entreprise sera complété en ce sens que seront admis en tant que moyens de preuve en mains de l'intimé les relevés détaillés des comptes bancaires auprès de G______ nos 1______, 2______ et 3______ depuis l'année 2015 jusqu'à leur clôture.
Il reviendra au Tribunal d'impartir aux parties un délai à cet effet.
5. Les frais judiciaires du recours sont fixés à 800 fr. (art. 41 RTFMC), couverts par l'avance de frais opérée par la recourante, laquelle demeure entièrement acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 aCPC).
Au vu de l'issue du litige, ils seront répartis à parts égales entre les parties (art. 95, 104 al. 1, 105 et 106 al. 2 CPC).
L'intimé sera, par conséquent, condamné à verser la somme de 400 fr. à la recourante à titre de remboursement des frais judiciaires (art. 111 al. 2 aCPC).
Pour les mêmes motifs, chaque partie supportera ses propres dépens de recours (art. 107 al. 1 let. c. CPC).
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La Chambre civile :
A la forme :
Déclare partiellement recevable le recours interjeté le 9 décembre 2024 par A______ contre l'ordonnance ORTPI/1459/2024 rendue le 25 novembre 2024 par le Tribunal de première instance dans la cause C/15733/2022-19.
Au fond :
Complète le chiffre 6.2 du dispositif de l'ordonnance entreprise en ce sens que sont admis en tant que moyens de preuve en mains de B______ les relevés détaillés des comptes bancaires détenus par celui-ci auprès de G______ nos 1______, 2______ et 3______ depuis l'année 2015 jusqu'à leur clôture.
Déboute les parties de toutes autres conclusions de recours.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires du recours à 800 fr., mis à la charge des parties pour moitié chacune et compensés par l'avance de frais de 800 fr. fournie par A______, laquelle demeure entièrement acquise à l'Etat de Genève.
Condamne B______ à verser 400 fr. à A______ à titre de remboursement des frais judiciaires.
Dit que chaque partie supporte ses propres dépens.
Siégeant :
Monsieur Ivo BUETTI, président; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Jean REYMOND, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.
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Indication des voies de recours :
La présente décision, qui ne constitue pas une décision finale, peut être portée, dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile (art. 72 LTF), aux conditions de l'art. 93 LTF.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.
Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.