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Décisions | Sommaires

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C/11500/2022

ACJC/467/2023 du 03.04.2023 sur JTPI/13271/2022 ( SML ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 19.05.2023, rendu le 02.04.2024, CONFIRME, 5A_377/2023, 4A_630/2023
Normes : LP.80.al2.ch2
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11500/2022 ACJC/467/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du LUNDI 3 AVRIL 2023

 

Entre

FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT (FIE), sis c/o Association des communes genevoises, Boulevard des Promenades 20, 1227 Carouge, recourant contre un jugement rendu par la 20ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 10 novembre 2022, comparant par Me Alain MAUNOIR, avocat, Mentha Avocats, Rue de l'Athénée 4, Case postale 330, 1211 Genève 12, en l'Étude duquel il fait élection de domicile,

et

A______ SA, sise ______ [GE], intimée, comparant par Me François BELLANGER, avocat, Poncet Turrettini, Rue de Hesse 8, Case postale, 1211 Genève 4, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile.

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/13271/2022 du 10 novembre 2022, expédié pour notification aux parties le 14 novembre 2022 et reçu par celles-ci le lendemain, le Tribunal de première instance (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure sommaire, a débouté le FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT de ses conclusions en mainlevée définitive (ch. 1 du dispositif), arrêté les frais judiciaires à 750 fr., compensés avec l'avance versée (ch. 2) et laissés à la charge du FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT (ch. 3) et condamné celui-ci à verser à
A______ SA 750 fr. TTC à titre de dépens (ch. 4).

Le Tribunal a retenu que le titre dont se prévalait le FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT désignait "B______ et D______" comme débiteurs et non A______ SA, d'une part, et que le créancier désigné était l'Office de l'urbanisme et non le FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT, d'autre part, de sorte que les pièces produites ne valaient pas titre de mainlevée définitive.

B. a. Par acte déposé le 25 novembre 2022 au greffe de la Cour de justice, le FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT a formé recours contre ce jugement, concluant à son annulation, sous suite de frais et dépens. Cela fait, il a conclu, principalement, au prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer, poursuite n° 1______, "en tant que cette opposition porte sur la créance de 313'893 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2008 [et] les frais de poursuite de 190 fr.", et, subsidiairement, au renvoi de la cause au Tribunal pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

b. Dans sa réponse du 19 décembre 2022, A______ SA a conclu au rejet du recours et à la confirmation du jugement entrepris, sous suite de frais et dépens.

c. Les parties ont répliqué et dupliqué, persistant dans leurs conclusions respectives.

d. La cause a été gardée à juger le 15 février 2023, ce dont les parties ont été avisées le jour même.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure de première instance :

a. Le FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT (ci-après : le FIE) est une fondation de droit public instituée par l'art. 3B de la loi générale sur les zones de développement (LGZD; RSG L 1 35) entré en vigueur le 1er janvier 2017.

Doté de la personnalité juridique (art. 3B al. 1 LGZD), il a pour but de prélever et gérer les taxes d'équipement - prévues à l'art. 3A LGZD - et d'en attribuer le produit (art. 1 des statuts du FIE).

b. A______ SA est une société inscrite au Registre du commerce de Genève depuis le ______ 1995, qui a pour but social "conseils, pilotage et promotion immobilière ainsi que réalisation, détention mobilière et immobilière; acquisition, vente, courtage, réalisation, mise en valeur et financement de projets immobiliers".

E______ est l'administrateur unique de la société depuis sa création.

c. Le 28 octobre 2004, B______, C______ et D______, née [D______] (ci-après : les consorts B______/C______/D______), ont signé une promesse de vente et d'achat avec E______, F______, G______ et H______ portant sur un terrain d'environ 7'326 m2 "à détacher" de la parcelle n° 2______ de la commune de Genève, section 3______, sise rue 4______ 73 à 87.

Cette parcelle était incluse dans le périmètre du Plan localisé de quartier (PLQ) n° 5______ adopté par le Conseil d'Etat le ______ 1998.

d.a Le 28 février 2005, A______ SA - en tant que requérante - a déposé une demande d'autorisation de construire (dossier DD 6______) auprès du Département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (devenu ensuite le Département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, actuellement le Département du territoire; ci-après : le Département) portant sur la construction de cinq immeubles d'habitation et de commerces, ainsi qu'un bâtiment commercial avec un garage souterrain et des aménagements extérieurs, sur la parcelle n° 2______ susvisée, dont les consorts B______/C______/D______ étaient alors propriétaires.

d.b Dans le cadre de l'instruction de cette demande d'autorisation, en application de la LGZD et de son règlement d'application (RGZD; RSG L 1 35.01), le Département a fixé, par formulaire du 20 mai 2005, les conditions financières liées à ce projet, en indiquant ce qui suit :

"CONDITIONS FINANCIERES :

1.      Taxe d'équipement public

11'771 m2 de SBP [surface brute de plancher] à Fr. 40 = Fr. 470'840 ( )

AUTRES CONDITIONS :

Conditions relatives découlant des art. 18 et 22 de la L 1 35.01 ( )

LES CONDITIONS ENONCEES CI-DESSUS DOIVENT ETRE REMPLIES OU LEUR REALISATION GARANTIE DE MANIERE APPROPRIEE AVANT LA DELIVRANCE DE L'AUTORISATION DE CONSTRUIRE.

Un exemplaire de cette formule doit être retourné à la Division de l'aménagement local, daté et signé par le propriétaire de l'ouvrage pour accord".

A______ SA, soit pour elle E______, a signé ce formulaire le 14 juin 2005, en tant que requérante de l'autorisation.

d.c Par arrêté du 23 novembre 2005, le Conseil d'Etat a approuvé les "conditions définitives" fixées dans le "rapport du 20 mai 2005" et autorisé l'application des normes de la zone de développement aux bâtiments à construire dans le cadre de la demande d'autorisation DD 6______.

d.d Le 12 décembre février 2005, le Département a délivré l'autorisation de construire DD 6______.

Le chantier a débuté le 12 juin 2006 et s'est terminé le 30 juin 2008.

e. Dans l'intervalle, par acte notarié du 25 avril 2006, les consorts B______/C______/D______ ont vendu à A______ SA (qui s'est substituée à E______), F______, G______ et H______, la parcelle n° 7______ de la commune de Genève, section 3______, issue du morcellement de l'ancienne parcelle n° 2______, d'une surface de 7'298 m2 sur laquelle ont été réalisées les constructions visées par l'autorisation DD 6______.

f.a Le 3 juillet 2006, le Département a adressé à A______ SA une facture n° 8______ de 470'840 fr. correspondant à la taxe d'équipement due en relation avec l'autorisation DD 6______. Dans son libellé, cette facture indiquait ce qui suit :

"Condition de paiement : 30 jours nets à compter du 03-JUL-06.

Dossier DD 6______ ( )
Concerne : Taxe d'équipement public
Contact : M. I______ - Mme J______
Nom du requérant :
A______ SA
Nom du mandataire :
MM. F______ G______ & H______, Architectes pour F______/G______/H______ [acronyme]
Description de l'objet : 5 immeubles d'habitation et commerces - bâtiment commercial - garage souterrain, aménagements extérieurs
Adresse de l'objet : Rue 4______ 73 à 73G
Commune : Genève

Description QT Unité PU HT Montant HT TVA

Surface brute de plancher 11771 m2 40.00 470'840.00"


 

f.b Dans le courrier accompagnateur daté du 6 juillet 2006, le Département a indiqué ce qui suit :

"Concerne : DD 6______ ( ) Taxe d'équipement pour la réalisation de 5 immeubles d'habitation et commerces - un bâtiment commercial - garage souterrain, sis rue 4______ 73 à 73G à Genève 3______

Messieurs,

Nous faisons suite à l'autorisation de construire qui vous a été délivrée en date du 16 décembre 2005, relative à la requête mentionnée en référence. A cet effet, nous vous prions de bien vouloir trouver, en annexe, conformément à l'art. 11 [RGZD] et à nos conditions financières du 20 mai 2005, la facture de la taxe d'équipement. Nous vous remercions d'avance pour votre prompt règlement ( )".

g. Le 4 octobre 2006, le Département a adressé à A______ SA un bulletin de versement pour lui permettre de "régler l'échéance suivante", s'agissant de l'autorisation DD 6______ :

"Facture : 8______ du 03-JUL-06
Montant facture : 470'840.00 CHF
Solde dû facture : 470'840.00 CHF
N° d'échéance : 1 / 3
Net à payer à l'échéance : 156'947.00 CHF
A payer avant le : 31-OCT-06
"

h. Le 23 octobre 2006, A______ SA a donné un ordre de paiement en faveur du Département à hauteur de 156'947 fr. Cette somme a été créditée sur le compte de ce dernier le 1er novembre 2006.

i. En novembre et décembre 2007, A______ SA a échangé des courriers avec le Département au sujet de la facture du 3 juillet 2006, dont elle contestait le bien-fondé, au motif que, selon elle, la Ville de Genève n'avait procédé à aucuns travaux d'équipement routier dans le périmètre du PLQ n° 5______.

Dans l'un de ces courriers, daté du 21 novembre 2007, A______ SA a indiqué : "Avant d'envisager le règlement de la taxe, nous souhaiterions connaitre le détail des équipements réalisés par la commune dans le plan de quartier [n°5______]".

j. Le 1er janvier 2008, le Département, soit pour lui l'Office de l'urbanisme, a adressé à A______ SA une facture n° 9______ concernant l'autorisation DD 6______, pour un montant de 313'893 fr., soit le solde impayé de la facture du 3 juillet 2006 (470'840 fr. - 156'947 fr.). Le libellé de cette facture était identique à celui de la facture du 3 juillet 2006, avec - en sus - la mention suivante : "Annule et remplace solde fact. 8______ du 03.07.06".

A______ SA allègue que cette facture ne lui a jamais été notifiée (cf. infra let. q).

k. Par pli du 26 novembre 2009, le Département a informé A______ SA que la taxe d'équipement fixée à 470'840 fr. dans le cadre du dossier DD 6______ se "justifiait pleinement", de sorte qu'elle était priée de bien vouloir s'acquitter "de la facture qui [lui] a[vait]été adressée".

l. Le 14 janvier 2010, A______ SA a demandé au Département de lui transmettre le détail des frais d'équipement relatifs au PLQ n° 5______.

m. Par courriel du 3 juillet 2013, faisant référence à "différentes lettres de rappel", A______ SA a informé le Département qu'elle avait des questions s'agissant de l'exigibilité de la taxe d'équipement dans le dossier DD 6______. Elle devait rencontrer un collaborateur de l'Office de l'urbanisme le 23 juillet 2013 pour en discuter. Dans l'intervalle, A______ SA priait le Département de bien vouloir suspendre la procédure en recouvrement de cette taxe.

n.a Par pli simple du 14 février 2014, le Département, soit pour lui l'Office de l'urbanisme, a adressé aux consorts B______/C______/D______ ("B______ & C______ – D______, Route 10______ no. ______, [code postal] K______/VD") une facture n° 11______ datée du 31 décembre 2013 d'un montant de 313'893 fr. en lien avec l'autorisation DD 6______.

La facture contenait l'indication suivante : "En cas de contestation, le présent bordereau, valant décision administrative, peut faire l'objet d'un recours adressé dans les 30 jours à compter de sa notification au Tribunal administratif de première instance (art. 7 de la LGZD et art. 23 de son règlement d'application). L'art. 59 LPA est réservé. Une fois définitif, il est assimilé à un jugement exécutoire au sens de l'art. 80 de la loi sur la poursuite pour dettes et faillite".

Le nom de A______ SA ne figurait pas sur cette facture, ni sur le bulletin de versement annexé, lequel était libellé au nom des consorts B______/C______/D______. Il ne figurait pas non plus sur le courrier d'accompagnement du 13 février 2014, dans lequel l'Office de l'urbanisme précisait ce qui suit : "Conformément à la nouvelle pratique administrative en matière de taxe d'équipement, entrée en vigueur le 1er août 2013, nous vous adressons ci-joint une facture à payer qui remplace le bordereau de l'invitation à payer que vous avez précédemment reçue".

n.b Le 24 mars 2014, B______ a transmis cette facture à A______ SA, en précisant que le courrier de l'Office de l'urbanisme avait été envoyé à l'adresse de sa sœur à K______, où la facture était "restée 1 mois dans la boîte aux lettres".


 

n.c Par courrier du 25 mars 2014, A______ SA, soit pour elle E______, s'est adressée en ces termes à l'Office de l'urbanisme :

"Monsieur B______ nous a transmis, ce jour, la facture [datée du 31 décembre 2013] qu'il a reçue à son adresse de K______/VD. Nous profitons de la présente pour vous préciser que ces taxes ne concernent pas la famille B______/C______/D______ mais notre société, en qualité de promoteur ayant réalisé l'opération objet de la DD 6______. Cela étant, lors de la réunion du 23 juillet 2013 avec Monsieur I______, nous avons soulevé plusieurs questions relatives à l'exigibilité de cette taxe ainsi qu'à sa répartition entre les différents intervenants du plan de quartier. A ce jour, nous restons sans nouvelle malgré notre relance du 6 novembre 2013 (voir copies des courriels en annexe)".

Par pli du 20 juin 2014, A______ SA a relancé l'Office de l'urbanisme, relevant que son courrier du 25 mars 2014 était resté sans réponse.

o. Par pli de son conseil du 19 novembre 2019, le FIE a informé A______ SA qu'il était chargé du suivi des décisions de taxes d'équipement prévues par la LGZD et de leur encaissement. S'agissant de la taxe relative à l'autorisation DD 6______, les "mandants" de A______ SA, à savoir les consorts B______/C______/D______, s'étaient vu notifier une facture datée du 31 décembre 2013 pour un montant de 313'893 fr. Cette facture, qui valait décision administrative, était désormais entrée en force, aucun recours n'ayant été formé devant le Tribunal administratif de première instance (TAPI). Dans la mesure où la facture demeurait impayée, les consorts B______/C______/D______ étaient sommés de verser la somme due, soit 313'893 fr., dans un délai de 20 jours.

Par plis des 8 et 14 janvier 2020, A______ SA a répondu à l'attention du FIE qu'elle contestait "depuis des années" le bien-fondé des montants réclamés au titre de la taxe d'équipement pour l'autorisation DD 6______ (les "collectivités publiques concernées n'ayant pas effectué les travaux, respectivement ne les ayant pas remboursés au promoteur constructeur") et que l'Office de l'urbanisme n'avait pas été en mesure de répondre à ses questions y relatives. Elle rappelait en outre que les consorts B______/C______/D______ n'étaient pas concernés par cette facture.

Par courriel du 19 février 2020 et courrier du 29 avril 2020, A______ SA a indiqué au FIE qu'elle contestait tant l'exigibilité que la quotité de la taxe d'équipement réclamée en lien avec l'autorisation DD 6______.

Par pli du 20 mai 2020, le FIE a persisté dans sa position, soulignant que, selon la loi, les débiteurs des taxes d'équipement étaient les propriétaires des parcelles visées par les autorisations de construire.

p. Le 9 octobre 2020, le conseil du FIE a mis les consorts B______/C______/D______ (i.e. C______, D______ et les héritières de feu B______) en demeure d'acquitter sous 30 jours la facture du 31 décembre 2013 en 313'893 fr.

q. Par pli de son conseil du 12 juillet 2021, A______ SA a informé le FIE qu'elle n'avait jamais reçu la facture n° 9______ datée du 1er janvier 2008, laquelle mentionnait annuler et remplacer la facture n° 8______ du 3 juillet 2006 (cf. supra let. j). Elle n'avait appris l'existence de cette facture que récemment, celle-ci ayant été annexée à un courrier daté du 25 juin 2021 que le FIE avait envoyé à H______. A______ SA a rappelé qu'elle contestait le montant réclamé dans cette facture, les autorités genevoises compétentes n'ayant pas été en mesure de justifier le coût effectif des travaux devant être couverts par la taxe d'équipement, en dépit des explications requises à ce sujet. De surcroît, la créance en recouvrement de la taxe d'équipement était désormais prescrite.

Au surplus, la facture n° 11______ du 31 décembre 2013 - qui, contrairement aux précédentes, avait été envoyée sous la forme d'une décision sujette à recours - était frappée de nullité, "dans la mesure où les destinataires n'étaient pas les débiteurs prévus par la loi". En l'absence de notification valable, elle n'était pas non plus opposable à A______ SA.

r. Par réquisition de poursuite du 23 août 2021, le FIE a initié une poursuite ordinaire à l'encontre de A______ SA, en recouvrement de la somme de 313'893 fr. avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2008, réclamée sur la base des titres de créance suivants : "Factures n° 9______ du 01.01.2008 et n° 11______ du 31.12.2013 adressées par le Département de l'Aménagement, du Logement et de l'Energie (taxe d'équipement selon dossier d'autorisation de construire DD 6______)".

Le 1er septembre 2021, sur la base de cette réquisition, A______ SA s'est vu notifier le commandement de payer, poursuite n° 1______, auquel elle a formé opposition.

s. Par requête déposée devant le Tribunal le 15 juin 2022, le FIE a requis le prononcé de la mainlevée définitive de l'opposition formée audit commandement de payer - "en tant que cette opposition porte sur la créance de 313'893 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2008 [et] les frais de poursuite de 190 fr." -, avec suite de frais et dépens.

A l'appui de sa requête, le FIE a produit les factures des 3 juillet 2006, 1er janvier 2008 et 31 décembre 2013, munies d'un tampon humide du TAPI avec la mention "pas de recours", faisant valoir qu'il s'agissait de "bordereaux exécutoires". La créance poursuivie correspondait au solde de la taxe d'équipement fixée dans le dossier 6______ - après versement par A______ SA d'un premier acompte correspondant à un tiers de ladite taxe -, soit la somme de 313'893 fr., qui faisait l'objet des bordereaux exécutoires des 1er janvier 2008 et 31 décembre 2013.

t. Le 30 août 2022, le Tribunal a cité les parties à comparaître à une audience qu'il a fixée le 10 octobre 2022.

A______ SA ayant sollicité le renvoi de cette audience, au motif que E______ serait absent de Genève le 10 octobre 2022, le Tribunal a annulé l'audience et, par ordonnance du 13 septembre 2022, imparti un délai à A______ SA pour déposer une réponse écrite à la requête et produire toutes pièces utiles.

u. Dans sa réponse du 31 octobre 2022, A______ SA a conclu au rejet de la requête sous suite de frais et dépens.

Elle s'est prévalue de la prescription de la créance déduite en poursuite, faisant valoir qu'aucun acte interruptif de prescription n'était intervenu entre le 3 juillet 2006 (date d'émission de la seule facture reçue par A______ SA) et le 3 juillet 2016. Elle n'avait jamais reçu la facture du 1er janvier 2008, dont elle n'avait eu connaissance que le 26 juin 2021. Le FIE ne pouvait pas se prévaloir de la facture du 31 décembre 2013, puisque celle-ci n'était pas adressée à A______ SA mais aux consorts B______/C______/D______. Au surplus, le Département n'avait pas été en mesure de justifier le solde réclamé de 313'893 fr., aucune réponse n'ayant été apportée aux interrogations de A______ SA quant à la quotité et à l'exigibilité de la taxe d'équipement.

v. Par avis du 1er novembre 2022, reçu le lendemain par les parties, le Tribunal a transmis la réponse de A______ SA au FIE et précisé que la cause serait "retenue à juger à l'issue d'un délai de 15 jours à dater de la notification de la présente".

EN DROIT

1. 1.1 S'agissant d'une procédure de mainlevée, seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. b et 309 let. b ch. 3 CPC). La procédure sommaire s'applique (art. 251 let. a CPC).

Aux termes de l'art. 321 al. 1 et 2 CPC, le recours, écrit et motivé, doit être introduit auprès de l'instance de recours dans les dix jours à compter de la notification de la décision motivée, pour les décisions prises en procédure sommaire.

Interjeté dans le délai légal et selon la forme prescrite, le recours est recevable en l'espèce.

1.2.1 Dans le cadre d'un recours, le pouvoir d'examen de la Cour est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC). L'autorité de recours a un plein pouvoir d'examen en droit, mais un pouvoir limité à l'arbitraire en fait, n'examinant par ailleurs que les griefs formulés et motivés par la partie recourante (HOHL, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, n. 2307).

Les maximes des débats et de disposition s'appliquent (art. 55 al. 1, 255 lit. a a contrario et 58 al. 1 CPC).

S'agissant d'une procédure de mainlevée définitive, la Cour doit vérifier d'office si la requête est fondée sur un titre de mainlevée valable (arrêt du Tribunal fédéral 5P.174/2005 du 7 octobre 2005 consid. 2.1).

1.2.2 En l'espèce, les éléments de fait que le recourant considère comme établis de façon manifestement inexacte par le Tribunal ont été intégrés dans l'état de fait dressé ci-avant, sur la base des actes et pièces de la procédure.

2. Le recourant invoque une violation de son droit d'être entendu, au motif que le Tribunal a rendu son jugement avant que le délai de 15 jours - mentionné dans l'avis du 1er novembre 2022 - ne soit arrivé à échéance.

2.1 Compris comme l'un des aspects de la notion générale de procès équitable au sens de l'art. 29 Cst., le droit d'être entendu garantit notamment au justiciable le droit de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, d'avoir accès au dossier, de prendre connaissance de toute argumentation présentée au tribunal et de se déterminer à son propos, dans la mesure où il l'estime nécessaire, que celle-ci contienne ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit, et qu'elle soit ou non concrètement susceptible d'influer sur le jugement à rendre (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1; 142 III 48 consid. 4.1.1). Il appartient aux parties, et non au juge, de décider si une prise de position ou une pièce nouvellement versée au dossier contient des éléments déterminants qui appellent des observations de leur part; toute prise de position ou pièce nouvelle versée au dossier doit dès lors être communiquée aux parties pour leur permettre de décider si elles veulent ou non faire usage de leur faculté de se déterminer (ATF 146 III 97 consid. 3.4.1; 139 I 189 consid. 3.2).

Si une partie considère qu'il est nécessaire de répliquer à une prise de position qui lui est notifiée, elle doit sans retard soit requérir l'autorisation de se déterminer, soit adresser sa réplique au tribunal. Une autorité ne peut considérer, après un délai de moins de dix jours depuis la communication d'une détermination à une partie, que celle-ci a renoncé à répliquer. Le « délai raisonnable » sur lequel doit compter l'autorité avant de rendre sa décision ne saurait en tous les cas être supérieur à celui pour recourir (arrêt du Tribunal fédéral 5A_614/2015 du 16 octobre 2015 consid. 3.1 et les références citées). Si une partie veut s'assurer que sa réplique pourra être prise en compte, il lui appartiendra de veiller à ce que l'acte parvienne au tribunal au plus tard le dixième jour (arrêt du Tribunal fédéral 5D_81/2015 du 4 avril 2016 consid. 2.3.4).

Malgré son caractère formel, la garantie du droit d'être entendu n'est pas une fin en soi. Lorsqu'on ne voit pas quelle influence la violation du droit d'être entendu a pu avoir sur la procédure, il n'y a pas lieu d'annuler la décision attaquée (arrêts du Tribunal fédéral 4D_76/2020 du 2 juin 2021consid. 4.2; 4A_148/2020 du 20 mai 2020 consid. 3.2). En particulier, l'admission du grief de violation du droit d'être entendu suppose que, dans sa motivation, le recourant indique quels arguments il aurait fait valoir dans la procédure cantonale et en quoi ceux-ci auraient été pertinents. A défaut, le renvoi de la cause au juge précédent, en raison de la seule violation du droit d'être entendu, risquerait de conduire à une vaine formalité et de prolonger inutilement la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 4A_453/2016 du 16 février 2017 consid. 4.2.3 et 4.2.4).

La jurisprudence admet qu'un manquement au droit d'être entendu puisse être considéré comme réparé lorsque la partie lésée a bénéficié de la faculté de s'exprimer librement devant une autorité de recours, pour autant que celle-ci dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure et puisse ainsi contrôler librement l'état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 et les références citées).

2.2 En l'espèce, s'il est vrai que le Tribunal a statué sur la requête du 15 juin 2022 alors que le délai indiqué dans l'avis du 1er novembre 2022 n'était pas encore échu, le recourant - qui a reçu le jugement attaqué le 15 novembre 2022, soit plus de dix jours après avoir été avisé que la cause était en état d'être jugée - n'établit pas avoir requis l'autorisation de se déterminer ni adressé une réplique spontanée au Tribunal dans le « délai raisonnable » admis par la jurisprudence.

Le recourant se contente par ailleurs de dénoncer une violation de son droit d'être entendu, sans en tirer la moindre conséquence. En particulier, il ne précise pas quels éléments de fait et/ou moyens de droit il aurait fait valoir devant le premier juge s'il avait exercé son droit à la réplique. Dès lors que l'état de fait dressé supra a été rectifié au vu des critiques formulées par le recourant contre les faits retenus par le Tribunal et que la Cour dispose d'un plein pouvoir d'examen en droit, un renvoi de la cause au premier juge constituerait une vaine formalité qui allongerait inutilement la présente procédure - étant rappelé que la procédure sommaire se caractérise par son caractère simple et rapide.

3. Le recourant reproche au Tribunal d'avoir retenu que la facture du 31 décembre 2013 ne valait pas titre de mainlevée définitive, alors que sa requête de mainlevée se fondait également sur les factures des 3 juillet 2006 et 1er janvier 2008, soit sur deux décisions administratives exécutoires au sens de l'art. 80 LP.

3.1.1 Aux termes de l'art. 80 LP, le créancier qui est au bénéfice d'un jugement exécutoire peut requérir du juge la mainlevée définitive de l'opposition (al. 1). Les décisions des autorités administratives suisses sont assimilées à des jugements exécutoires (al. 2 ch. 2).

En vertu de l'art. 81 al. 1 LP, lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal ou une autorité administrative suisse, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription.

3.1.2 Pour qu'un acte administratif puisse être qualifié de décision, il doit revêtir un caractère obligatoire pour les administrés en créant ou constatant un rapport juridique concret de manière contraignante. Ce n'est pas la forme de l'acte qui est déterminante, mais son contenu et ses effets (ATA/1672/2019 du 12 novembre 2019 consid. 3b).

Selon le Tribunal fédéral, lorsqu'il s'agit de qualifier un acte, il importe peu que celui-ci soit intitulé "décision" ou qu'il en remplisse les conditions formelles posées par la loi; ce qui est déterminant, c'est qu'il revête les caractéristiques matérielles d'une décision, selon des critères objectifs et indépendamment de la volonté de l'autorité ou de l'administré. Il faut entendre par décision administrative, au sens de l'art. 80 al. 2 ch. 2 LP, tout acte administratif imposant de manière contraignante la prestation d'une somme d'argent à l'Etat ou à une autre corporation publique (ATF 143 III 162 consid. 2.2.1 et les références citées).

L'auteur de la décision est une autorité détentrice de la puissance publique qui fonde sa compétence sur une norme et qui agit ès qualité. La décision peut également émaner de sociétés ou organisations indépendantes de l'administration délégataires de tâches de droit public (cf. art. 178 al. 3 Cst.), dans la mesure où cette délégation inclut le transfert d'une compétence décisionnelle. Des délégations de la puissance publique, incluant le pouvoir de prononcer des décisions unilatérales, peuvent également résulter du droit cantonal ou communal (Abbet/Veuillet, La mainlevée de l'opposition, 2ème éd. 2022, n. 127 ad art. 80 LP et les références citées).

Une décision qui n'est pas désignée comme telle peut fonder la mainlevée définitive si son caractère décisionnel est reconnaissable, en particulier si le titre fait mention des voies de droit (opposition, réclamation ou recours) à disposition. Une simple facture ne peut servir de titre à la mainlevée définitive (Abbet/Veuillet, op. cit., n. 127a ad art. 80 LP et les références citées). Constitue en revanche une décision la « facture » établie pour une autorité ou un établissement de droit public compétent, astreignant le destinataire au paiement d'une contribution de droit public et faisant état des voies de droit (même au verso de la décision) (arrêt du Tribunal fédéral 5A_567/2019 du 23 janvier 2020 consid. 7.1.2; Abbet/Veuillet, op. cit., n. 127a ad art. 80 LP).

La décision administrative est exécutoire lorsqu'elle n'est plus attaquable par un moyen de droit (opposition, réclamation, recours) (Abbet/Veuillet, op. cit., n. 142, ad art. 80 LP). L'absence d'indication des voies de recours ne saurait empêcher de façon indéfinie l'entrée en force de la décision. Il faut toutefois que la décision soit reconnaissable comme telle, ce qui dépend notamment des circonstances du cas, en particulier des connaissances juridiques de l'administré et du fait qu'il soit ou non représenté par un mandataire professionnel. Le destinataire d'une décision administrative reconnaissable comme telle mais dépourvue d'indication quant aux voies de droit doit entreprendre dans un délai raisonnable les démarches voulues pour sauvegarder ses droits (consultation d'un avocat ou de l'autorité qui a statué); pour définir cette période, le délai ordinaire de recours de trente jours peut servir de référence. A défaut, la décision peut être considérée comme exécutoire et servir de titre à la mainlevée définitive (Abbet/Veuillet, op. cit., n. 148 ad art. 80 LP).

Les décisions qui n'ont pas été communiquées, respectivement notifiées à la personne concernée ne déploient pas d'effets juridiques et n'acquièrent pas force exécutoire. L'autorité supporte le fardeau de la preuve de la notification lorsqu'il est contesté que cette dernière ait bien eu lieu. En l'absence d'accusé de réception, cette preuve peut résulter d'indices ou de l'ensemble des circonstances, par exemple d'un échange de courriers ou de l'absence de protestation à une mise en demeure; encore faut-il que cette mise en demeure se réfère à la décision invoquée comme titre de mainlevée. Une attestation d'entrée en force de chose jugée ne permet pas de guérir le vice de communication. Elle ne suffit pas non plus à apporter la preuve de la notification (Abbet/Veuillet, op. cit., n. 11 et 147 ad art. 80 LP).

3.1.3 Une décision administrative ne constitue un titre de mainlevée que s'il y a identité entre le poursuivant et le créancier désigné dans ce titre, entre le poursuivi et le débiteur désigné et entre la prétention déduite en poursuite et le titre, ce qui est examiné d'office par le juge de la mainlevée (Abbet/Veuillet, op. cit., n. 150 ad art. 80 LP).

Le créancier d'une prestation de droit public est la collectivité (Confédération, canton ou commune) ou la personne de droit public ou privé investie de la puissance publique, mais pas le service administratif qui lui est subordonné et qui est dénué de la personnalité juridique. Un changement de créancier par rapport au titre est susceptible de se produire lorsqu'une collectivité ou une entité délégataire de la puissance publique succède à une autre dans ses droits et obligations (Abbet/Veuillet, op. cit., n. 152 ad art. 80 LP).

La mainlevée définitive ne peut en principe être prononcée que contre la personne désignée en qualité de débitrice dans la décision. Contre un tiers que la loi désigne comme débiteur solidaire, la mainlevée ne peut être accordée que si la décision lui a été notifiée, avec indication des voies de droit, et s'il est précisé expressément qu'à défaut de contestation la décision pourra être exécutée contre lui (Abbet/Veuillet, op. cit., n. 154 ad art. 80 LP et les références citées).

3.2.1 En 2006, 2008 et 2013, le régime de perception de la taxe d'équipement était prévu par la loi générale sur les zones de développement (LGZD) et son règlement d'application (RGZD) dans leurs versions en vigueur à l'époque.

Selon l'art. 2 al. 1 let. a et b LGZD, la délivrance des autorisations de construire selon les normes d'une zone de développement est subordonnée, sous certaines réserves, à l'approbation préalable par le Conseil d'Etat d'un PLQ, assorti d'un règlement, ainsi que des conditions particulières applicables au projet.

Les PLQ sont accompagnés d'un règlement de quartier qui détermine notamment la répartition des frais de construction des voies de communication et de leur équipement, selon accord préalable avec l'autorité municipale (art. 4 al. 1 let. a LGZD). A défaut de règlement de quartier adopté spécialement ou de conventions particulières, le Conseil d'Etat fixe de cas en cas les participations aux frais d'équipement (art. 4 al. 2 LGZD). Les prestations prévues à l'art. 4 al. 1 let. a LGZD sont assurées par le paiement d'une taxe d'équipement calculée en fonction des frais d'équipement public du quartier considéré, de l'importance et de la destination des constructions et installations projetées (art. 4 al. 3 LGZD).

L'art. 8 RGZD confirme le principe légal de la taxe d'équipement et dispose qu'à défaut de règlement de quartier adopté spécialement ou de conventions particulières, les prestations prévues par l'art. 4 let. a LGZD sont assurées par le paiement d'une taxe d'équipement proportionnelle aux frais d'équipement public de base du quartier considéré et à l'importance du projet présenté.

Selon l'art. 10 RGZD, le débiteur de la taxe d'équipement au sens de l'art. 4 LGZD est le propriétaire ou le superficiaire du terrain sur lequel doit être érigé le projet qui fait l'objet d'une autorisation définitive de construire (al. 1). En cas d'aliénation du terrain suite à la délivrance de l'autorisation de construire et de réalisation du projet prévu par celle-ci par le nouveau propriétaire, la taxe d'équipement est transférée à ce dernier (al. 2).

La taxe d'équipement est due par chaque propriétaire ou superficiaire à raison de l'importance des surfaces brutes de plancher assignées à sa parcelle, selon l'autorisation de construire considérée (art. 11 al. 1 RGZD). La taxe d'équipement se monte en principe à 40 fr. le m2 de surface brute de plancher à créer (art. 11 al. 2 RGZD). La taxation s'opère sur la base d'un bordereau notifié à la suite de la délivrance d'une autorisation définitive de construire (art. 11B RGZD). Les taxes d'équipement sont mises à la charge des intéressés par la notification d'un bordereau par le département; ce bordereau peut être frappé d'un recours, conformément à l'art. 7 LGZD (art. 18 al. 1 RGZD). Lorsque plusieurs personnes sont propriétaires d'un immeuble, elles sont solidairement obligées envers l'Etat au paiement des taxes d'équipement (art. 18 al. 2 RGZD).

L'art. 7 LGZD prévoit que les modalités de recours prévues par les art. 145, 146 et 149 de la loi sur les constructions et les installations diverses (LCI) sont applicables aux décisions du département prises sur la base de la LGZD.

3.2.2 Le régime de perception de la taxe d'équipement a été modifié par la loi modifiant la LGZD du 1er septembre 2016, entrée en vigueur le 1er janvier 2017 (PL 11783).

Selon l'art. 3A al. 1 nouveau LGZD, la taxe d'équipement constitue une contribution des propriétaires, cas échéant des superficiaires, aux coûts de réalisation, de modification ou d'adaptation des voies de communication publiques, en particulier celles prévues par le programme d'équipement tel que défini à l'art. 3 al. 3 let. a LGZD (dans sa nouvelle teneur).

L'art. 3B nouveau LGZD institue un Fonds intercommunal d'équipement (FIE), sous forme d'une fondation de droit public dotée de la personnalité juridique, chargé de rendre les décisions de taxation relatives à la taxe d'équipement, de les notifier aux débiteurs et d'en gérer le suivi.

L'art. 4 LGZD a été modifié au vu de modifications introduites par les art. 3A et 3B nouveaux LGZD. L'art. 8 RGZD a été supprimé par la novelle.

L'art. 10 al. 1 RGZD, dans sa nouvelle teneur, prévoit que le débiteur de la taxe d'équipement au sens de l'art. 3A LGZD est le propriétaire ou le superficiaire du terrain sur lequel doit être érigé le projet qui fait l'objet d'une autorisation définitive.

Dans sa nouvelle teneur, l'art. 18 RGZD prévoit que les taxes d'équipement sont mises à la charge des intéressés par la notification d'un bordereau par le FEI (al. 1). Ces bordereaux peuvent être frappés d'un recours, conformément aux dispositions de l'art. 7 LGZD (al. 2). Lorsque plusieurs personnes sont propriétaires d'un immeuble, elles sont solidairement obligées envers l'Etat au paiement des taxes d'équipement (al. 4).

L'art. 7 LGZD, dans sa nouvelle teneur, prévoit que les modalités de recours prévues par les art. 145, 146 et 149 LCI sont applicables aux décisions du département, prises sur la base de la LGZD, ainsi qu'à celles du FIE prises sur la base de l'art. 3A LGZD.

Selon l'art. 12 al. 6 nouveau LGZD, les modifications apportées par la loi 11783 du 1er septembre 2016 s'appliquent à toutes les autorisations de construire délivrées après leur entrée en vigueur, ainsi qu'aux autorisations déjà délivrées et dont la taxe demeure due, sous réserve du montant de ladite taxe.

3.3.1 En l'espèce, c'est à bon droit que le recourant reproche au Tribunal d'avoir considéré que les pièces produites ne valaient pas titre de mainlevée, au motif que le créancier désigné dans la facture du 31 décembre 2013 (l'Office de l'urbanisme) n'était pas le même que le créancier poursuivant (le FIE).

Le créancier mentionné dans les factures des 3 juillet 2006, 1er janvier 2008 et 31 décembre 2013 - sur lesquelles le recourant se fonde pour obtenir la mainlevée requise - est l'Etat de Genève, soit pour lui le Département, respectivement l'Office de l'urbanisme. Depuis le mois de janvier 2017, la compétence de l'Etat de Genève pour rendre des décisions en matière de taxes d'équipement, les notifier aux débiteurs et en gérer le recouvrement, a été déléguée au recourant - qui est une fondation de droit public dotée de la personnalité juridique - conformément à l'art. 3B al. 4 LGZD entré en vigueur le 1er janvier 2017. L'art. 12 al. 6 LGZD prévoit par ailleurs que les modifications apportées par la novelle du 1er septembre 2016 "s'appliquent aux autorisations déjà délivrées et dont la taxe demeure due". Ainsi, le recourant est l'autorité compétente pour recouvrer les taxes d'équipement liées à des autorisations de constuire délivrées avant le 1er janvier 2017, dans la mesure où ces taxes demeuraient impayées à cette date.

En l'occurrence, il est constant que l'autorisation DD 6______ a été délivrée avant le 1er janvier 2017 et que la taxe litigieuse n'a pas été intégralement versée par l'intimée. Il s'ensuit que, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, le recourant est l'autorité compétente pour agir en mainlevée contre l'intimée aux fins de recouvrer la créance faisant l'objet de la poursuite n° 1______.

3.3.2 En revanche, c'est à juste titre que le Tribunal a retenu que les pièces produites ne valaient pas titre de mainlevée définitive à l'encontre de l'intimée, au motif, notamment, que celle-ci ne figure pas - dans la facture du 31 décembre 2013 - en tant que débitrice de la taxe d'équipement réclamée dans le dossier DD 6______.

Il n'est pas contesté que l'intimée est devenue l'une des propriétaires de la parcelle n° 7______ au printemps 2006, peu après la délivrance de l'autorisation DD 6______, et qu'elle est susceptible - en cette qualité - d'être redevable de la taxe d'équipement y relative (cf. art. 4 al. 1 et 3 aLGZD; art. 10 al. 2, 11 al. 1 et 18 al. 2 aRGZD). L'intimée admet par ailleurs avoir reçu la facture du 3 juillet 2006 ainsi que le bulletin de versement du 4 octobre 2006.

Ainsi que le relève le recourant, la facture du 3 juillet 2006 revêt les caractéristiques matérielles d'une décision administrative, au sens de l'art. 80 al. 2 ch. 2 LP, dès lors qu'elle astreint l'intimée à payer une somme d'argent déterminée à l'Etat de Genève, au titre de la taxe d'équipement due dans le dossier 6______, conformément aux conditions financières fixées par le Département le 20 mai 2005 (celles-ci ayant été acceptées par l'intimée qui a signé l'autorisation de construire comme requérante). Le courrier d'accompagnement du 6 juillet 2006 indique en outre que cette taxe d'équipement est réclamée sur la base de l'art. 11 aRGZD, lequel mentionne l'administré tenu au paiement de la taxe ainsi que les bases de calcul applicables. Le caractère officiel et contraignant de cette facture ressort de son entête et de son contenu (indication du créancier [l'Etat de Genève], de l'autorité compétente, du montant réclamé, de la cause de l'obligation [une créance de droit public cantonal], des bases de calcul de la taxe et du délai de paiement fixé), ainsi que de son courrier d'accompagnement, avec la mention des dispositions réglementaires applicables. Matériellement, cette facture constitue un bordereau de taxation, auquel la loi cantonale et son règlement d'application attribuent la valeur d'une décision sujette à recours (cf. art. 4 et 7 aLGZD; art. 11B et 18 al. 1 aRGZD). Quand bien même cette facture ne mentionne pas les voies de droit, son caractère décisionnel était clairement reconnaissable pour l'intimée, qui est une société spécialisée dans la promotion immobilière à Genève depuis 1995. A réception du bulletin de versement du 4 octobre 2006, l'intimée s'est d'ailleurs acquittée d'un montant de 156'947 fr. en faveur du Département.

Cela étant, si la facture du 3 juillet 2006 équivaut à une décision administrative au sens de l'art. 80 al. 2 ch. 2 LP, comme le plaide le recourant, elle ne saurait en revanche valoir titre de mainlevée définitive. En effet, la facture du 1er janvier 2008 - qui revêt les mêmes caractéristiques décisionnelles - indique expressément "annuler et remplacer" la facture du 3 juillet 2006. Le fait que la réquisition de poursuite mentionne la facture du 1er janvier 2008 comme titre de créance (et non celle du 3 juillet 2006) et fixe le dies a quo des intérêts réclamés au 1er janvier 2008 (et non au 3 juillet 2006) atteste également de l'annulation de cette facture par le Département. Or le recourant ne saurait se fonder sur une décision qui a été annulée - et qui est donc inexistante - pour obtenir la mainlevée de l'opposition formée à la poursuite n° 1______.

Le recourant ne peut davantage se fonder sur la facture du 1er janvier 2008, dans la mesure où il n'a pas démontré avoir notifié cette facture à l'intimée - qui affirme ne l'avoir jamais reçue - alors que le fardeau de la preuve lui incombe sur ce point. Il sera relevé à cet égard qu'une attestation d'entrée en force ne suffit pas à apporter la preuve de la notification. C'est également en vain que le recourant se réfère aux courriers que l'intimée a échangés avec le Département en 2009 et 2013, puisque ceux-ci ne se réfèrent nullement à la facture du 1er janvier 2008. Conformément aux principes rappelés ci-avant (cf. consid. 3.1.2), une décision qui n'a pas été communiquée, respectivement notifiée à la personne concernée ne déploie pas d'effets juridiques et n'acquière pas force exécutoire. A l'instar de celle du
3 juillet 2006, cette facture n'est donc pas un titre de mainlevée définitive.

Enfin, la facture du 31 décembre 2013 n'est pas opposable à l'intimée, dès lors qu'elle a été émise au nom des consorts B______/C______/D______ et adressée à ceux-ci, à l'exclusion de tout tiers. En particulier, le nom de l'intimée ne figure ni sur la facture, ni sur le bulletin de versement annexé, ni sur le courrier d'accompagnement du 13 février 2014. Le 25 mars 2014, l'intimée a d'ailleurs écrit au Département pour lui signaler que cette facture n'était pas adressée aux bonnes personnes, les consorts B______/C______/D______ n'étant pas débiteurs de la taxe d'équipement litigieuse, sans que le Département ne juge utile de rectifier son erreur en émettant une facture libellée au nom de l'intimée (l'intéressé a, au contraire, persisté à réclamer le paiement de la somme de 313'893 fr. aux consorts B______/C______/D______). Au surplus, contrairement à ce que soutient le recourant, l'intimée n'a pas reconnu être débitrice du solde de la taxe d'équipement dans son courrier du 25 mars 2014, puisqu'elle s'est bornée à relever que les consorts B______/C______/D______ n'étaient pas concernés par cette taxe, tout en soulignant qu'elle en contestait tant l'exigibilité que la quotité. En tout état, la facture du
31 décembre 2013 ne saurait valoir titre de mainlevée définitive, puisque l'intimée n'y est pas désignée comme la débitrice de la taxe d'équipement liée à l'autorisation de construire DD 6______.

3.3.3 En définitive, le recourant n'étant pas au bénéficie d'un jugement ou d'une décision exécutoire au sens de l'art. 80 LP, c'est à bon droit que le Tribunal l'a débouté des fins de sa requête de mainlevée.

Le recours sera dès lors rejeté.

4. Le recourant, qui succombe, supportera les frais de son recours, arrêtés à 1'125 fr. et compensés avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève (art. 61 al. 1 OELP; art. 105 al. 1, 106 al. 1 et 111 al. 1 CPC).

Il sera en outre condamné à verser à l'intimée la somme de 4'500 fr., débours et TVA inclus, à titre de dépens de recours (art. 85, 89 et 90 RTFMC; art. 23, 25 et 26 LaCC), ce qui tient compte de la difficulté de la cause et de l'ampleur du travail effectué par son conseil.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :


A la forme :

Déclare recevable le recours interjeté le 25 novembre 2022 par le FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT (FIE) contre le jugement JTPI/13271/2022 rendu le 10 novembre 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/11500/2022-20 SML.

Au fond :

Le rejette.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 1'125 fr., les met à la charge du FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT (FIE), et les compense avec l'avance fournie, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne le FONDS INTERCOMMUNAL D'EQUIPEMENT (FIE) à verser à A______ SA la somme de 4'500 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Monsieur Laurent RIEBEN, président; Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, Madame Nathalie RAPP, juges; Madame Marie-Pierre GROSJEAN, greffière.

 

Le président :

Laurent RIEBEN

 

La greffière :

Marie-Pierre GROSJEAN

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière civile; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 72 à 77 et 90 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les
art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.
L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.