Décisions | Sommaires
ACJC/351/2023 du 06.03.2023 sur JTPI/9493/2022 ( SFC ) , MODIFIE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE C/12545/2022 ACJC/351/2023 ARRÊT DE LA COUR DE JUSTICE Chambre civile DU LUNDI 6 MARS 2023 |
Entre
A______ SA, sise ______ [GE], recourante contre un jugement rendu par la 10ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 17 août 2022, comparant par Me Hrant HOVAGEMYAN, avocat, DEMOLE HOVAGEMYAN, rue
Charles-Bonnet 2, case postale, 1211 Genève 3, en l'Étude duquel elle fait élection de domicile,
et
B______ S.P.A., sise ______, Italie, intimée, comparant par Me G______, avocate, ______, en l'Étude de laquelle elle fait élection de domicile.
A. a. Par jugement JTPI/9493/2022 du 17 août 2022, notifié le lendemain, le Tribunal de première instance, statuant par la voie de la procédure sommaire, a déclaré A______ SA en état de faillite dès le ______ 2022 à 8 heures 30 (ch. 1 du dispositif).
Les frais judiciaires, arrêtés à 200 fr. et compensés à due concurrence avec l'avance effectuée par B______ S.P.A. (ch. 2), ont été mis à la charge de A______ SA, qui a été condamnée à rembourser à cette dernière la somme de 200 fr. avancée (ch. 3). A______ SA a également été condamnée à verser à B______ S.P.A. la somme de 3'502 fr. TTC à titre de dépens (ch. 4). Enfin, les parties ont été déboutées de toutes autres conclusions (ch. 5).
b. Par acte déposé le 29 août 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ SA a formé recours contre ce jugement. Après avoir requis qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle avait déposé, auprès de la Cour, à l'intention de B______ S.P.A, un montant de 236'826 fr. 95, correspondant à la totalité de la dette à rembourser, intérêts et frais compris, au sens de l'art. 174 al. 2 ch. 2 LP et établi être solvable, elle a conclu à ce que la nullité du jugement entrepris soit constatée, subsidiairement à ce que celui-ci soit annulé, sous suite de frais.
Préalablement, A______ SA a requis la suspension du caractère exécutoire et de la force de chose jugée formelle du jugement entrepris dès le dépôt du recours. Elle a également sollicité que le Registre du commerce soit invité à se conformer à l'effet suspensif accordé et par conséquent à radier les mentions portées audit registre consécutivement au prononcé de la faillite.
A l'appui de son acte, A______ SA a produit plusieurs pièces nouvelles, soit deux documents bancaires attestant du versement d'un montant total de 236'826 fr. 95 sur le compte bancaire de la Cour de justice (236'799 fr. 50 le 26 août 2002 et 27 fr. 45 le 29 août 2002; pièces nos 2a et 2c), le solde de la poursuite no 1______ au 25 août 2022 (pièce no 2b), deux communications de l'Office des faillites au sujet dudit solde (pièce no 2d) et des frais de l'office (pièce no 2e), une attestation de solvabilité du 25 août 2022 de son organe de révision (pièce no 3a) et un extrait du registre des poursuites la concernant (pièce no 3b).
c. Par décision du 31 août 2022, la Cour de justice a accordé la suspension de l'effet exécutoire attaché au jugement entrepris ainsi que la suspension des effets juridiques de l'ouverture de la faillite.
d. Aux termes de son mémoire de réponse expédié au greffe de la Cour de justice le 3 octobre 2022, B______ S.P.A. a conclu au rejet du recours et, en tout état, à ce qu'il soit dit que le montant de 236'826 fr. 95 versé par A______ SA lui est définitivement acquis, à ce qu'il soit ordonné à la direction des finances du Pouvoir judiciaire de lui reverser ce montant, soit directement soit en mains de son conseil ou de l'Office des poursuites, et à ce que A______ SA soit condamnée aux frais.
A l'appui de son mémoire de réponse, elle a produit, outre deux procurations signées par C______ accompagnées de la pièce d'identité du signataire, deux pièces nouvelles, soit un décompte de l'Office des poursuites au 5 octobre 2022 (pièce no 1) et un courriel du 19 septembre 2022 (pièce no 2).
e. A______ SA a spontanément répliqué le 17 octobre 2022, persistant dans ses conclusions. Elle a produit une pièce nouvelle, soit un courriel du 17 octobre 2022.
f. B______ S.P.A. a spontanément dupliqué le 26 octobre 2022, persistant également dans ses conclusions.
g. Le 2 novembre 2022, A______ SA s'est déterminée sur la duplique de sa partie adverse.
h. Par courrier du 4 novembre 2022, le greffe de la Cour de justice a transmis lesdites déterminations à B______ S.P.A. et a informé les parties que la cause serait gardée à juger dans un délai de 15 jours dès réception du courrier et que, passé ce délai, toute nouvelle écriture serait retournée à son auteur.
i. B______ S.P.A. a pris position sur les déterminations de A______ SA le 18 novembre 2022 et a déposé deux pièces nouvelles, soit un courrier de l'Office des poursuites du 10 novembre 2022 et la réponse à celui-ci datée du 17 novembre 2022.
j. Par courrier du 22 novembre 2022, le greffe de la Cour de justice a transmis ladite prise de position à A______ SA et a informé les parties que la cause était gardée à juger, en leur rappelant que toute nouvelle écriture ne serait pas prise en considération et retournée à son auteur.
k. Le même jour, A______ SA a adressé au greffe de la Cour de justice une écriture, reçue le lendemain, destinée à compléter le dossier relativement à sa solvabilité, à laquelle étaient jointes plusieurs pièces nouvelles, soit un extrait du registre des poursuites la concernant du 22 novembre 2022 (pièce no 4), une ordonnance du Tribunal de première instance du 21 novembre 2022 (pièce no 5), un procès-verbal de séquestre du 24 octobre 2022 (pièce no 7) et un état de ses liquidités au 22 novembre 2022 (pièce no 8).
l. Par courrier du 23 novembre 2022, le greffe de la Cour de justice a retourné ladite écriture à A______ SA, en précisant que la cause avait été gardée à juger le 22 novembre 2022.
m. Par courrier du 24 novembre 2022, A______ SA a réexpédié son écriture du 22 novembre 2022 au greffe de la Cour de justice, soutenant que celle-ci était recevable dès lors qu'elle avait été expédiée le 22 novembre 2022 avant minuit, soit avant que la cause puisse être gardée à juger selon la communication de la Cour de justice du 4 novembre 2022 et que, n'ayant reçu la prise de position de B______ S.P.A. que le 23 novembre 2022, le clôture des échanges le 22 novembre 2002 la privait de son droit inconditionnel à la réplique.
B. Les faits pertinents suivants résultent du dossier:
a. B______ S.P.A est une société de capitaux de droit italien anciennement dénommée D______ S.P.A (ci-après: B______ S.P.A). A teneur des extraits du registre du commerce italien versés à la procédure, dont le plus récent date du mois d'août 2022, C______ est le directeur général de la société et son représentant légal.
A______ SA est une société anonyme dont le siège se situe à E______ (Genève).
b. Par ordonnance de "sequestro conservativo" du 11 décembre 2015, le Tribunal de Massa (Italie) a autorisé B______ S.P.A à procéder à la saisie conservatoire des biens de A______ SA jusqu'à concurrence de 600'000 euros.
Cette mesure visait à garantir une créance que B______ S.P.A alléguait détenir à l'encontre de A______ SA en vertu d'un contrat de partenariat et de licence conclu le 19 septembre 2014 et signé par C______.
c. Le 18 décembre 2015, se fondant sur l'ordonnance du 11 décembre 2015, l'autorité italienne compétente en exécution du séquestre a procédé à la mise sous séquestre de vingt-six montres propriété de A______ SA estimées à 226'440 euros.
d. Par ordonnance du 26 avril 2019, le Tribunal, après avoir, par ordonnance du 14 décembre 2017, reconnu et déclaré exécutoire en Suisse le "sequestro conservativo" prononcé par le Tribunal de Massa le 11 décembre 2015, décision confirmée par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (DCSO/527/2019 du 28 novembre 2019) puis le Tribunal fédéral (5A_1001/2019 du 21 février 2020), a ordonné le séquestre de tous les biens et créances appartenant à A______ SA et autres objets de valeur en main de celle-ci à son siège et dans ses boutiques à Genève jusqu'à concurrence de 379'165 fr. 40 (600'000 euros fixés dans l'ordonnance du 11 décembre 2015 - la valeur des vingt-six montres séquestrées en Italie de 266'440 euros).
A teneur du procès-verbal de séquestre (enregistré sous no 2______) établi le 9 mai 2019 trente-et-une montres - d'une valeur estimée à 1'515'500 fr. au total - ont été séquestrées en mains de A______ SA.
B______ S.P.A était représentée par Me G______.
e. Parallèlement, le 25 avril 2016, B______ S.P.A a introduit une procédure arbitrale à l'encontre de A______ SA devant la London Court of International Arbitration, dont le siège se situe à F______ (Angleterre), enregistrée sous la cause no 163311.
Dans le cadre de cette procédure, deux sentences incidentes ont été rendues les 20 septembre 2019 et 22 mai 2020, condamnant A______ SA à payer à B______ S.P.A 90'912.53 GBP, respectivement 56'169.81 GBP et 18'619.67 GBP à titre de frais et dépens.
Ces sentences sont définitives et exécutoires.
f. Le 18 août 2020, B______ S.P.A, représentée par Me G______, a fait notifier à A______ SA un commandement de payer, poursuite no 1______, portant sur les sommes de 108'436 fr. 02 (soit la contrevaleur de 90'912.53 GBP) avec intérêts à 5% dès le 20 septembre 2019 ainsi que de 66'997 fr. 28 (soit la contrevaleur de 56'169.81 GBP) et de 22'208 fr. 86 (soit la contrevaleur de 18'619.67 GBP) avec intérêts à 5% dès le 22 mai 2020.
Ces montants correspondent aux frais et dépens obtenus par B______ S.P.A consécutivement aux sentences incidentes des 20 septembre 2019 et 22 mai 2020.
g. A______ SA a formé opposition totale à ce commandement de payer.
h. Le 17 novembre 2020, B______ S.P.A a introduit devant le Tribunal une requête en exéquatur des deux sentences arbitrales incidentes précitées et en mainlevée définitive de l'opposition à l'encontre de A______ SA.
i. Par jugement JTPI/8290/2021 du 22 juin 2021, le Tribunal a reconnu et déclaré exécutoires les sentences incidentes du 20 septembre 2019 et du 22 mai 2020 et a en conséquence prononcé la mainlevée définitive de l'opposition formée par A______ SA à concurrence des montants indiqués dans le commandement de payer.
A______ SA a été condamnée aux frais de la procédure de mainlevée, soit 2'750 fr., ainsi qu'à 3'255 fr. TTC à titre de dépens.
j. Par arrêt du 9 novembre 2021, la Cour de justice a rejeté le recours interjeté contre ce jugement par A______ SA, qui a été condamnée aux frais judiciaires (3'125 fr.) et dépens (2'000 fr.) du recours.
Le recours formé contre cette décision par A______ SA a été rejeté par le Tribunal fédéral par arrêt 5D_6/2022 du 6 mai 2022. Les frais du recours, fixés à 5'000 fr., ont été mis à la charge de A______ SA.
k. Dans le cadre de ces différentes procédures, B______ S.P.A était représentée par Me G______.
l. Le 25 novembre 2021, B______ S.P.A, agissant par Me G______, a requis la continuation de la poursuite à l'encontre de A______ SA.
m. Le 9 décembre 2021, une commination de faillite a été notifiée à A______ SA. Un délai de 20 jours lui a été imparti pour s'acquitter des montants réclamés.
Cette commination de faillite n'a pas fait l'objet d'une plainte.
n. A______ SA n'a procédé à aucun versement dans le délai imparti.
o. Le 12 mai 2022, le Tribunal arbitral, statuant au fond dans le litige opposant les parties, a notamment condamné A______ SA à verser à B______ S.P.A les sommes de 211'635.86 euros plus intérêts moratoires à 10% l'an dès le 26 avril 2016, 43'582.50 euros plus intérêts moratoires à 10% l'an dès le 30 septembre 2015 ainsi que, conjointement et solidairement avec un second défendeur, 112'979.36 GBP à titre de remboursement des frais d'arbitrage et 599'462.42 GBP plus intérêts moratoires à 10% depuis le prononcé de la sentence. B______ S.P.A a par ailleurs été enjointe à accomplir, dans les 30 jours à compter du prononcé de la sentence, les démarches nécessaires à la levée du séquestre ordonné en Italie sur vingt-six montres propriété de A______ SA et à restituer celles-ci à cette dernière.
Aucune des parties n'a, à teneur du dossier, exécuté ladite sentence.
p. Le 10 juin 2022, B______ S.P.A a absorbé par fusion une société tierce.
q. Par courrier du 7 juin 2022, une étude d'avocats londonienne, mandatée par B______ S.P.A, a mis en demeure A______ SA de s'acquitter des différents montants mis à sa charge dans le cadre de la procédure arbitrale.
C. a. Le 29 juin 2022, B______ S.P.A, agissant par Me G______, a saisi le Tribunal d'une réquisition de faillite, concluant, sous suite de frais, au prononcé de la faillite de A______ SA ainsi qu'à la mention de la faillite au Registre du commerce.
A l'appui de sa réquisition, elle a produit une procuration datée du 5 août 2020 donnant le pouvoir à Me G______ de la représenter en relation avec les "poursuites à l'encontre de A______ SA et autres procédures en Suisse ainsi que tous mandats connexes, parallèles ou subséquents". Cette procuration était signée par C______ au nom de B______ S.P.A.
b. Une audience a eu lieu le 11 août 2022 en présence des parties.
A______ SA a conclu, sous suite de frais, principalement à l'irrecevabilité de la requête en faillite, d'une part, pour incapacité de postuler du conseil de B______ S.P.A et, d'autre part, pour absence d'intérêt digne de protection à agir et abus de droit de B______ S.P.A, tenue de lui restituer vingt-six montres valant davantage que la créance mentionnée dans la commination de faillite. Subsidiairement, A______ SA a conclu au rejet de la requête en faillite aux motifs qu'elle était fondée à invoquer l'exception d'inexécution puisque B______ S.P.A n'avait pas déféré à l'ordre de restitution des montres résultant de la sentence arbitrale du 12 mai 2022 et qu'en tout état, la créance de B______ S.P.A devait être considérée comme éteinte par compensation - exception expressément soulevée à l'audience - avec sa créance en restitution des montres au vu de la valeur de celles-ci.
B______ S.P.A a persisté dans sa requête en faillite.
D. a. Dans le délai de recours contre le jugement entrepris, A______ SA a déposé, auprès de la Cour, un montant de 236'826 fr. 95 à l'intention de B______ S.P.A. (236'799 fr. 50 le 26 août 2022 et 27 fr. 45 le 29 août 2022).
b. Selon une attestation de l'organe de révision de A______ SA du 25 août 2022, la situation financière de la société était saine. Le dernier exercice clôturé et audité au 31 décembre 2020 était bénéficiaire et le serait vraisemblablement également pour l'année 2021 comme cela était le cas depuis la création de la société en 2007. A______ SA disposait par ailleurs de liquidités immédiatement disponibles de plus de 48 millions au 31 décembre 2020 et de plus de 21 millions au 15 août 2022.
c. En date du 26 août 2022, A______ SA faisait l'objet de quatre poursuites au stade de l'opposition (384'917 fr. 30 en faveur de B______ S.P.A.; 13'665 fr. en faveur de la Confédération suisse; 17'200 fr. en faveur d'une étude d'avocat et 758'058 fr. 65 en faveur d'un tiers) et avait six poursuites payées.
d. En date du 26 août 2022, le solde de la poursuite no 1______ initiée par B______ S.P.A contre A______ SA s'élevait à 232'542 fr. 95, intérêts et frais compris.
1. 1.1 L'appel étant irrecevable dans les affaires relevant de la compétence du tribunal de la faillite selon la LP (art. 309 let. b ch. 7 CPC), seule la voie du recours est ouverte (art. 319 let. a CPC; art. 174 LP).
Interjeté auprès de l'autorité compétente (art. 120 al. 1 let. a LOJ), dans le délai utile de 10 jours et selon la forme requise (art. 321 al. 1 et 2 CPC; art. 174 al. 1 LP), le recours est recevable.
1.2 Sont également recevables le mémoire de réponse, la duplique et la prise de position du 18 novembre 2022 de l'intimée ainsi que la réplique et les déterminations du 2 novembre 2022 de la recourante (art. 322 CPC; sur le droit à la réplique spontanée: cf. ATF 146 III 97 consid. 3.4 et les références citées), étant précisé qu'en cas de notification par pli simple l'autorité supporte, en cas de doute, les conséquences de l'absence de preuve de la date de notification (ATF 129 I 8).
En revanche, les écritures complémentaires de la recourante du 22 novembre 2022 ne seront pas prises en considération, dès lors que leur dépôt n'a pas été autorisé et que la présentation d'arguments ou de faits nouveaux après l'expiration du délai de recours n'est pas admissible (art. 327 CPC; cf. consid. 2 infra; ATF 142 III 413 consisd. 2.2.4).
1.3 Les décisions rendues en matière de faillite sont soumises à la procédure sommaire (art. 251 let. a CPC). Les faits sont établis d'office (maxime inquisitoire, art. 255 let. a CPC).
2. 2.1 Dans le cadre d'un recours, les conclusions, les allégations de faits et les preuves nouvelles sont irrecevables (art. 326 al. 1 CPC). Les dispositions spéciales de la loi sont réservées (al. 2).
En vertu de l'art. 174 al. 1 2ème phrase LP, les parties peuvent faire valoir devant l'instance de recours des faits nouveaux lorsque ceux-ci se sont produits avant le jugement de première instance. Cette disposition spéciale de la loi vise les faits nouveaux improprement dits (faux nova ou pseudo-nova), à savoir ceux qui existaient déjà au moment de l'ouverture de la faillite et dont le premier juge n'a pas eu connaissance pour quelque raison que ce soit; ces faits peuvent être invoqués sans restriction et prouvés par pièces, pour autant qu'ils le soient dans le délai de recours (ATF 139 III 491 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 5A_243/2019 du 17 mai 2019 consid. 3.1).
Aux termes de l'art. 174 al. 2 LP, le failli peut aussi invoquer des vrais nova, à savoir des faits qui sont intervenus après l'ouverture de la faillite en première instance, pour autant qu'ils servent à établir que les conditions de l'art. 174 al. 2 LP sont réalisées; selon la jurisprudence, ces vrais nova doivent également être produits avant l'expiration du délai de recours (ATF 139 III 491 consid. 4.4; 136 III 294 consid. 3). En vertu de la lettre claire de l'art. 174 al. 2 LP, aucun autre novum n'est admissible (arrêts du Tribunal 5A_1005/2020 du 19 janvier 2021 consid. 3.1.2; 5A_252/2020 du 18 juin 2020 consid. 4.1.2).
2.2 En l'espèce, les pièces produites par la recourante à l'appui de son recours (pièces nos 2a à 3b) sont recevables dès lors qu'elles tendent à démontrer que les conditions fixées par l'art. 174 al. 2 LP sont réunies. En revanche, les autres documents déposés par les parties ainsi que les allégués de fait y relatifs seront déclarés irrecevables dans la mesure où ils ont été versés au dossier après l'expiration du délai de recours.
3. La recourante soutient que le jugement serait nul, dès lors qu'il ne prononce pas la faillite comme requis par l'art. 171 LP ainsi que par l'intimée dans sa réquisition de faillite, mais la "déclare en état de faillite".
3.1 Sous la note marginale "D. Jugement de faillite; 1. Déclaration", l'art. 171 LP prévoit que le juge doit prononcer, sauf exception, la faillite.
Selon la jurisprudence, la nullité absolue d'une décision, qui peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office, ne frappe que les décisions affectées d'un vice qui doit non seulement être particulièrement grave, mais doit aussi être manifeste ou dans tous les cas clairement reconnaissable, et pour autant que la constatation de la nullité ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Hormis dans les cas expressément prévus par la loi, il n'y a lieu d'admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire. Entrent principalement en ligne de compte comme motifs de nullité la violation grossière de règles de procédure ainsi que l'incompétence qualifiée (fonctionnelle ou matérielle) de l'autorité qui a rendu la décision; en revanche, des vices de fond n'entraînent qu'à de rares exceptions la nullité d'une décision (cf. ATF 145 III 436 consid. 4 et les arrêts cités; 137 I 273 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 2C_573/2020 du 22 avril 2021 consid. 5).
3.2 En l'espèce, si l'art. 171 LP prévoit que le juge doit prononcer la faillite, la note marginale de cette disposition est "déclaration", de sorte qu'il ne saurait être considéré que le dispositif du jugement entrepris serait entaché d'un vice, et encore moins d'un vice suffisamment grave pour constituer un cas de nullité. L'art. 166 al. 1 LP dispose également qu'il peut être requis du juge une "déclaration de faillite". La formulation critiquée est au demeurant usuellement employée, sans que cela n'ait suscité une quelconque réaction de la part du Tribunal fédéral, et a une signification et une portée identiques à celles d'un prononcé de faillite. Le Tribunal a d'ailleurs mentionné, dans les considérants du jugement, que la faillite devait être prononcée.
Le grief de la recourante, qui confine à la témérité, sera en conséquence rejeté.
4. La recourante se plaint d'un déni de justice au motif que le premier juge n'aurait pas examiné l'ensemble des points soulevés par ses soins.
4.1 Une autorité se rend coupable d'un déni de justice formel prohibé par l'art. 29 al. 2 Cst. si elle omet de se prononcer sur des griefs qui présentent une certaine pertinence ou de prendre en considération des allégués et arguments importants pour la décision à rendre (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1; 133 III 235 consid. 5.2).
4.2 En l'espèce, il ressort des considérants du jugement entrepris que le premier juge a traité l'ensemble des arguments invoqués par la recourante. Le fait que la solution retenue diverge de la position défendue par cette dernière ne permet pas de retenir qu'un déni de justice formel aurait été commis.
Partant, le grief de la recourante à cet égard est infondé.
5. Demeurent litigieux dans le cadre de la présente procédure de recours, tant la recevabilité de la réquisition de faillite en lien avec la capacité de postuler de l'avocate de l'intimée (consid. 6) et l'existence d'un intérêt digne de protection à requérir la faillite (consid. 7), que son bien-fondé s'agissant du rejet de l'exception d'inexécution (consid. 8) et de l'objection de compensation (consid. 9) soulevées par la recourante.
6. Le premier juge a retenu que Me G______ avait le pouvoir de représenter l'intimée dans la présente procédure de faillite au vu de la procuration produite et de sa constitution comme mandataire de l'intimée de manière ininterrompue depuis avril 2019 pour toutes les procédure d'exécution forcée intentées à Genève à l'encontre de la recourante. Il a précisé que, compte tenu de la nature de la procédure applicable, seul un titre établissant clairement l'inexistence ou la révocation du mandat confié avant le dépôt de la réquisition de faillite était susceptible de remettre en cause la validité de la procuration fournie. A cet égard, la fusion intervenue le 10 juin 2022 et le courrier de mise en demeure du 7 juin 2022 de l'étude d'avocats britannique n'avaient manifestement pas pour objet ni pour conséquence que le mandat initialement conféré à Me G______ pour les procédures de séquestre et d'exécution forcée à Genève n'aurait pas été valable ou serait révoqué, ni à partir de quand.
La recourante reproche au premier juge d'avoir procédé à un renversement du fardeau de la preuve et de lui avoir imposé une probatio diabolica (preuve très difficile ou impossible à fournir) en exigeant la production d'un titre démontrant clairement l'inexistence ou la révocation du mandat confié au conseil de l'intimée avant le dépôt de la réquisition de faillite. Elle relève que la procuration date du 5 août 2020, soit de plus de deux ans, est antérieure à la sentence arbitrale du 12 mai 2022, à la mise en demeure tendant notamment au recouvrement des créances litigieuses émise par une étude d'avocats britannique déclarant agir pour l'intimée ainsi qu'à la fusion du 10 juin 2022, ne désigne pas spécifiquement la procédure en cause, étant libellée en termes généraux, et qu'il ne peut être déterminé si la personne qui l'a signée dispose du pouvoir d'engager seule l'intimée.
6.1 L'art. 68 al. 1 CPC dispose que toute personne capable d'ester en justice peut se faire représenter au procès. Le représentant doit justifier de ses pouvoirs par une procuration (art. 68 al. 3 CPC).
La capacité de postuler du représentant constituant une condition de recevabilité de la demande (ATF 147 III 351 consid. 6.2.1 et 6.3) soumise à un examen d'office (art. 60 CP), la procuration doit être produite d’emblée et spontanément (non sur réquisition) par la partie qui se prévaut d’un rapport de représentation, qu’il s’agisse de représentation professionnelle ou non (May Canellas, Petit commentaire CPC, 2020, n. 21 ad art. 68 CPC). Si la procuration fait défaut ou n’apparaît pas suffisante, le tribunal fixe un délai pour la régularisation de ce vice (art. 132 al. 1 CPC; ATF 147 III 351 consid. 6.2.1 et 6.3). L’omission doit toutefois être imputable à une inadvertance. A défaut de production dans le délai imparti, l’acte n’est pas pris en considération (art. 132 al. 1 CPC). S’il s’agit de la demande, celle-ci est déclarée irrecevable; si la personne qui se présente au nom du défendeur n’a pas de pouvoirs, le défendeur est considéré comme défaillant à la procédure (May Canellas, op. cit., n. 21 ad art. 68 CPC et les références citées).
La procuration doit indiquer l’affaire pour laquelle elle est délivrée. Le degré de précision ne doit pas être apprécié avec une rigueur excessive (May Canellas, op. cit., n. 23 ad art. 68 CPC). La procuration peut ainsi être formulée en termes larges (Bohnet, Commentaire romand CPC, 2ème éd., 2019, n. 26 ad art. 68 CPC).
Le représentant d'une personne morale doit justifier de ses pouvoirs par une procuration signée par quelqu'un qui, selon le droit matériel, peut valablement représenter ladite personne morale (arrêts du Tribunal fédéral 4A_454/2018 du 5 juin 2019 consid. 2.4; 4A_93/2015 du 22 septembre 2015 consid. 1.2.1 et 4D_2/2013 du 1er mai 2013 consid. 2.2.1).
6.2 En l'espèce, la signature figurant sur la procuration du 5 août 2020 en faveur du conseil de l'intimée produite à l'appui de la réquisition de faillite est la même que celle apposée sur les procurations jointes au mémoire de réponse au recours. Selon la carte d'identité annexée à celles-ci, cette signature est celle de C______, qui est le directeur général et représentant légal de l'intimée depuis le mois de novembre 2020 selon les extraits du registre du commerce italien versés à la procédure dont le plus récent date du mois d'août 2022. Il résulte au demeurant du dossier que C______ dispose du pouvoir d'engager l'intimée depuis à tout le moins le mois de septembre 2014 puisqu'il était également le signataire du contrat de partenariat et de licence ayant lié les parties. La fusion intervenue le 10 juin 2022 n'a ainsi eu aucune conséquence sur la capacité de l'intéressé à représenter l'intimée. En tout état, même à supposer que C______ ne disposerait plus du pouvoir de représenter l'intimée, cela ne signifierait pas encore que la procuration a cessé d'exister, celle-ci prévoyant expressément que l'incapacité du client ne met pas fin au mandat.
Par ailleurs, la procuration concernée indique la nature du mandat confié, à savoir "poursuites à l'encontre de la recourante et autres procédures en Suisse". Le fait que les termes employés soient généraux ne saurait en tant que tel remettre en cause la validité de la procuration au regard des développements qui précèdent, tout comme le fait qu'elle date de plus de deux ans. Comme l'a relevé à juste titre le premier juge, depuis l'établissement de la procuration, le conseil de l'intimée a représenté celle-ci dans toutes les étapes de la procédure de poursuite litigieuse (réquisition de poursuite, procédure en exéquatur et en mainlevée définitive et réquisition de continuer la poursuite), sans que sa capacité de postuler ne soit remise en cause. Il apparaît ainsi légitime de considérer que la présente procédure de faillite, qui constitue l'étape suivante de la poursuite engagée, est couverte par la procuration.
Enfin, comme retenu par le premier juge, le fait qu'une étude d'avocats londonienne, agissant pour le compte de l'intimée, ait, le 7 juin 2022, adressé une lettre de mise en demeure à la recourante pour le paiement des sommes mises à sa charge dans le cadre de la procédure arbitrale, dont celles résultant des sentences incidentes des 20 septembre 2019 et 22 mai 2020, ne permet pas de conclure que la procuration en faveur de l'avocate de l'intimée aurait été révoquée, ce d'autant que le mandat confié à celle-ci est limité aux procédures de poursuite intentées en Suisse.
Par conséquent, c'est à juste titre que le premier juge a retenu que l'intimée est valablement représentée dans la présente procédure.
Les développements qui précèdent s'appliquent mutadis mutandis s'agissant des procurations produites par l'intimée à l'appui de son mémoire de réponse au recours.
7. Le premier juge a retenu que l'intimée avait un intérêt digne de protection et ne commettait pas un abus de droit à requérir la faillite de la recourante. La sentence arbitrale du 12 mai 2022 condamnait la recourante à verser à l'intimée plusieurs centaines de milliers d'euros et de livres sterling alors que l'obligation de levée de séquestre et de restitution des biens séquestrés prononcée à l'encontre de l'intimée ne concernait que les montres saisies en Italie, d'une valeur estimée au jour de leur saisie à 226'440 euros, et non celles séquestrées en Suisse, de sorte que l'intérêt de l'intimée à obtenir la faillite et faire réaliser les biens séquestrés en Suisse demeurait malgré l'entrée en force de la sentence arbitrale du 12 mai 2022.
La recourante reproche au premier juge d'avoir considéré que l'obligation de levée de séquestre et de restitution prononcée aux termes de la sentence arbitrale du 12 mai 2022 ne concernait que les montres séquestrées en Italie et non celles séquestrées en Suisse d'une valeur de 1'515'500 fr. Elle soutient que comme le séquestre suisse est le complément du séquestre italien, l'obligation de lever le séquestre italien comporte l'obligation de lever son complément suisse. Ainsi, dans la mesure où l'intimée n'a pas procédé à la levée desdits séquestres et restitué les montres séquestrées alors qu'elle en avait l'obligation et que les montants concernés sont nettement supérieurs aux créances objets de la commination de faillite, l'intimée ne disposerait d'aucun intérêt digne de protection à requérir la faillite.
Ce raisonnement ne saurait être suivi. S'il est certes exact que tant le séquestre italien que le séquestre suisse se fondent sur l'ordonnance de "sequestro conservativo" du 11 décembre 2015 et que le second a été prononcé en complément du premier, il n'en demeure pas moins qu'il s'agit de deux séquestres distincts ordonnés par des autorités différentes et que, selon le dispositif clair et univoque de la sentence arbitrale du 12 mai 2022, seule une obligation de lever le séquestre prononcé en Italie et de restituer les montres séquestrées dans ce cadre a été décidée. Il n'apparaît ainsi pas critiquable de considérer que l'obligation de lever de séquestre prévue dans la sentence arbitrale du 12 mai 2022 ne concerne que le séquestre italien. La recourante ne critiquant pas pour le surplus l'argumentation juridique présentée par le premier juge, il n'y a pas lieu d'y revenir.
Le grief de la recourante à cet égard est en conséquence infondé.
8. Le premier juge a retenu que la recourante ne pouvait pas se prévaloir de l'exception d'inexécution de l'art. 82 CO au stade de la faillite pour les trois motifs suivants. Premièrement, cette exception ne pouvait pas faire obstacle à une décision judiciaire exécutoire, étant uniquement à disposition du débiteur qui conteste l'exigibilité d'une créance pour laquelle il n'existe pas de titre de mainlevée définitive. L'ATF 148 III 145 cité par la recourante ne concernait pas une procédure de faillite mais de mainlevée d'opposition. Deuxièmement, les obligations incombant aux parties consécutivement à la procédure arbitrale n'étaient pas assimilables à des prestations réciproques librement convenues dans le cadre d'un rapport d'échange mais résultaient de sentences arbitrales définitives, auxquelles les parties ne pouvaient plus s'opposer en se prévalant d'une inexigibilité des créances. Enfin, troisièmement, l'exception d'inexécution n'entrait pas dans les hypothèses limitativement énumérées à l'art. 172 ch. 3 LP, n'étant pas une cause d'extinction d'une dette pécuniaire.
La recourante conteste que l'exception d'inexécution ne puisse plus être invoquée au stade de la faillite, faisant valoir que, selon l'ATF 148 III 145, cette exception s'applique pleinement en droit des poursuites. Elle conteste également, en se référant à un auteur de doctrine, que les hypothèses visées à l'art. 172 ch. 3 LP soient énumérées de façon limitative.
8.1 Le recours doit être motivé (art. 321 al. 1 in initio CPC). La motivation doit, à tout le moins, satisfaire aux exigences qui sont posées pour un mémoire d'appel (arrêt du Tribunal fédéral 5D_43/2019 du 24 mai 2019 consid. 3.2.2.1). Le recourant doit ainsi tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. A défaut, l'instance de recours ne peut entrer en matière (arrêts du Tribunal fédéral 5A_453/2022 du 13 décembre 2022 consid. 3.1 et les références citées; 4A_168/2022 du 10 juin 2022 consid. 5.2).
Lorsque la décision attaquée se fonde sur plusieurs motivations indépendantes, alternatives ou subsidiaires, toutes suffisantes pour sceller le sort de la cause, la partie recourante doit, sous peine d'irrecevabilité, démontrer que chacune d'entre elles est contraire au droit en se conformant aux exigences de motivation requises (ATF 142 III 364 consid. 2.4; 138 III 728 consid. 3.4; 136 III 534 consid. 2).
8.2 En l'espèce, le refus du premier juge d'admettre l'exception d'inexécution soulevée par la recourante se fonde sur une triple motivation dont chacune d'elles se suffit à elle-même. Or, afin de démontrer le caractère erroné de la première motivation, la recourante se contente de se prévaloir de l'ATF 148 III 145, sans critiquer les motifs retenus pas le premier juge pour exclure l'application de cet arrêt au cas d'espèce. Elle n'émet par ailleurs aucune critique à l'encontre de la seconde motivation développée par le premier juge, qui considère que les conditions d'application de l'art. 82 CO ne sont pas réalisées.
Il s'ensuit qu'il ne sera pas entré en matière sur les griefs de la recourante relatifs à l'admissibilité de l'exception d'inexécution soulevée par ses soins, faute de motivation suffisante.
9. Le premier juge a rejeté l'objection de compensation soulevée par la recourante fondée sur la créance en restitution des vingt-six montres séquestrées en Italie qu'elle détiendrait à l'encontre de l'intimée. Il a considéré que la compensation de créances ne pouvait pas être invoquée au stade de la faillite, les moyens pour s'opposer à la faillite étant extrêmement limités. La jurisprudence en la matière étant rare et peu motivée, il pouvait en être fait abstraction. L'admission du moyen de compensation au stade de la faillite impliquerait en effet, dans une procédure exclusivement orale, de reconnaître une déclaration de compensation survenue oralement en audience, ce qui n'apparaît pas conciliable avec l'exigence de la preuve par titre ni le fait que la manifestation de volonté de celui qui entend compenser doit survenir à l'égard du créancier et non du seul juge.
A titre superfétatoire, le premier juge a considéré que les conditions formelles et matérielles de la compensation n'étaient pas réunies. La déclaration de compensation, formulée oralement à titre subsidiaire dans l'hypothèse où la réquisition de faillite ne serait pas déclarée irrecevable, constituait une déclaration conditionnelle dépendant de la décision du juge sur ce point, ce qui n'était pas compatible avec la loi, qui exige qu'une telle déclaration, à l'instar de l'exercice de tous les droits formateurs, soit inconditionnelle et irrévocable. Cela implique qu'elle ne peut dépendre de la volonté d'un tiers mais doit résulter de la seule volonté du déclarant. Les créances concernées n'étaient en outre pas de même nature, les créances de l'intimée à l'origine de la poursuite étant des dettes d'argent alors que la créance compensante de la recourante en restitution des montres séquestrées en Italie constituant une obligation de faire, et la valeur actuelle desdites montres n'était pas démontrée. Enfin, la valeur des montres séquestrées en Italie ne pouvait s'exprimer qu'en euros, de sorte que même à supposer que l'obligation de faire incombant à l'intimée soit de nature pécuniaire, elle ne serait pas compensable avec ses créances en paiement converties en francs suisses pour les besoins de la poursuite et dont la monnaie d'origine était la livre sterling, l'art. 84 al. 2 CO ne s'appliquant pas à l'égard d'une dette en poursuite, le débiteur devant s'en acquitter auprès de l'Office des poursuites dans la monnaie de la poursuite, soit le franc suisse.
La recourante conteste que la compensation ne puisse pas être invoquée en audience de faillite. Elle fait valoir que la jurisprudence du Tribunal fédéral, même si elle est peu abondante, doit être prise en compte et que la Cour a elle-même admis, dans l'ACJC/1560/2015 du 17 décembre 2015, que la compensation constituait un moyen de paiement et d'extinction de la dette. Au demeurant, la déclaration de compensation était intervenue à l'audience de faillite, à laquelle l'intimée était présente et représentée, de sorte qu'elle l'a reçue, et a été inscrite au procès-verbal d'audience, lequel constitue un titre.
La recourante conteste également que les conditions formelles et matérielles de la compensation ne soient pas réunies au motif que, contrairement à ce que soutient le premier juge, la compensation peut être invoquée à titre éventuel ainsi que l'a rappelé la Cour dans un arrêt récent (ACJC/1184/2021), que l'obligation de faire peut être convertie en dommages et intérêts pour cause d'inexécution au moment de compenser, ce qui a été le cas comme en atteste le procès-verbal de l'audience du 11 août 2022, que le fait que la créance compensante et celle compensée soient libellées en monnaies différentes ne constitue pas un empêchement à la compensation pourvu que les monnaies aient cours légal, que la valeur des montres séquestrées en Italie ressort des différentes pièces produites qu'elle liste et enfin que si le créancier ne peut effectivement poursuivre un débiteur en Suisse dans une autre monnaie que le franc suisse, le débiteur dispose en revanche du choix d'éteindre sa dette, respectivement de prouver l'avoir éteinte, dans la monnaie de la relation sous-jacente conformément à l'art. 84 CO, le premier juge ayant confondu le paiement en mains de l'Office des poursuites et le paiement libératoire au créancier.
9.1 A l'expiration d'un délai de vingt jours à compter de la notification de la commination de faillite, le créancier peut requérir du juge la déclaration de faillite (art. 166 al. 1 LP, première phrase). Le juge doit prononcer la faillite sauf dans les cas mentionnés aux art. 172 à 173a LP (art. 171 LP, deuxième phrase). La réquisition de faillite doit en particulier être rejetée lorsque le débiteur justifie par titre que la créance a été acquittée en capital, intérêts et frais ou que le créancier lui a accordé un sursis (art. 172 ch. 3 LP).
Dans un arrêt du 11 décembre 2002 (5P_316/2002), le Tribunal fédéral a admis la compétence du juge de la faillite pour trancher une question de droit matériel, soit en l'occurrence l'invalidation pour dol d'un accord conclu, en relevant notamment que le juge de la faillite tranchait une question de droit matériel lorsqu'il examinait si la créance déduite en poursuite avait été éteinte par compensation ou novation (consid. 4.2.1).
Dans un autre arrêt du 17 juin 2004 (7B_105/2004), le Tribunal fédéral a, dans le cadre d'une plainte au sens de l'art. 17 LP contre une commination de faillite, considéré qu'il n'appartenait pas aux autorités de poursuite, mais au juge du fond ou, cas échéant, au juge de la faillite dans le cadre de la procédure d'ouverture de la faillite, de déterminer si la créance opposée en compensation était prouvée par un jugement entré en force, un titre assimilé ou une reconnaissance de dette inconditionnelle signée par le poursuivant (consid. 2.1).
La doctrine admet que le débiteur puisse prouver par titre sa libération par compensation devant le juge de la faillite (Giroud/Theus Simoni, Basler Kommentar SchKG II, 3ème éd., 2021, n. 13 ad art. 172 LP; Marchand, La compensation dans la procédure de poursuite, in JdT 2012 II 61 p. 68; Commetta, Commentaire romand LP, 2005, n. 7 ad art. 172 LP).
Dans un arrêt ACJC/1560/2015 du 17 décembre 2015, la Cour, se référant à l'auteur de doctrine COMETTA et à des jurisprudences fédérales rendues dans des procédures de mainlevée définitive, a admis que le moyen de la compensation puisse être soulevé devant le juge de la faillite si la créance compensante résulte elle-même d'un titre exécutoire ou qu'elle est admise sans réserve par le poursuivant, estimant que l'art. 172 ch. 3 LP ne visait pas uniquement le paiement mais aussi toute autre cause de droit civil (consid. 2.3).
9.2 Aux termes de l'art. 120 al. 1 CO, lorsque deux personnes sont débitrices l'une envers l'autre de sommes d'argent ou d'autres prestations de même espèce, chacune des parties peut compenser sa dette avec sa créance, si les deux dettes sont exigibles.
La compensation suppose notamment une identité des prestations dues, laquelle est donnée lorsqu'on se trouve en présence de deux dettes d'argent ou de prestations portant sur d'autres choses fongibles de même nature ou qualité. Elle peut ne pas exister originairement, pourvu qu'elle soit réalisée au moment de compenser. L'obligation de faire, convertie en une dette en dommages-intérêts pour cause d'inexécution (art. 107 CO) devient compensable avec une créance en argent (Jeandin/Hulliger, Commentaire romand CO I, 3ème éd., 2021, n. 11 ad art. 120 CO; Tercier/Pichonnaz, Le droit des obligations, 6ème éd., 2019, p. 377). L'identité des prestations n'est en revanche jamais donnée dès lors que l'une ou l'autre des créances porte sur la livraison d'une chose déterminée (créance en restitution de titres déposés auprès d'une banque; ATF 91 III 104 consid. 5; Jeandin/Hulliger, op. cit., n. 12 ad art. 120 CO).
9.3 Selon l'art. 107 al. 2 CO, lorsque l'une des parties à un contrat bilatéral ne s'exécute pas dans le délai imparti, le créancier qui en fait la déclaration immédiate peut renoncer à son droit de demander l'exécution et d'actionner en dommages-intérêts pour cause de retard et réclamer des dommages-intérêts pour cause d'inexécution.
Cette disposition s'applique aux prestations visées par un contrat synallagmatique, à savoir un contrat dont les obligations principales sont dans un rapport d'échange (Tercier/Pichonnaz, op. cit., p. 318 et 324).
9.3 En l'espèce, au vu des jurisprudences et des opinions doctrinales susexposées, il est douteux que le premier juge ait été fondé à retenir que la recourante n'était pas autorisée à se prévaloir du moyen de la compensation devant lui, la créance invoquée en compensation résultant d'une sentence arbitrale définitive et exécutoire et la recourante ayant formellement opposé la compensation à l'intimée à l'audience de faillite. Cette question peut toutefois souffrir de demeurer indécise, les conditions à la compensation fixées par l'art. 120 al. 1 CO n'étant, en tout état, pas réunies.
En effet, la créance compensante invoquée par l'intimée tend à la restitution de vingt-six montres séquestrées en Italie, soit d'objets déterminés. Or, au regard des développements qui précèdent, l'identité des prestations n'est jamais donnée en présence d'une telle créance. En tout état, comme le relève à juste titre le premier juge, les créances à compenser ne sont pas de même nature, celles de l'intimée constituant des créances d'argent et celle de la recourante une obligation de faire, de sorte qu'elles ne peuvent être compensées, la condition de l'identité des prestations dues n'étant pas réalisée. Une conversion de l'obligation de faire de l'intimée en une dette en dommages-intérêts pour cause d'inexécution n'apparaît au demeurant pas possible, dès lors que, ne s'agissant pas d'une obligation contractuelle se trouvant dans un rapport d'échange, l'art. 107 CO ne saurait s'appliquer. Enfin, la possibilité prévue par l'art. 345 CPC de convertir une obligation de faire non exécutée en une dette d'argent nécessite une décision du tribunal de l'exécution déterminant le montant dû, de sorte que, faute de l'existence d'une telle décision, une compensation ne saurait intervenir en l'état.
Au vu de ce qui précède, la décision du premier juge de rejeter l'objection de compensation soulevée par la recourante n'apparaît pas critiquable, faute d'identité des prestations dues. Le grief de la recourante est ainsi infondé, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si les autres motifs retenus à l'appui de ladite décision sont légitimes.
Il s'ensuit que c'est à juste titre que le premier juge a considéré qu'il n'existait aucune raison de ne pas prononcer la faillite requise par l'intimée.
10. La recourante requiert subsidiairement l'annulation de la faillite prononcée sur la base de l'art. 174 al. 2 LP, exposant avoir déposé la totalité du montant à rembourser auprès de la Cour de céans à l'attention de l'intimée et avoir démontré sa solvabilité.
10.1 En vertu de l'art. 174 al. 2 LP, l'autorité de recours peut annuler l'ouverture de la faillite lorsque le débiteur rend vraisemblable sa solvabilité et établit par titre que la dette, intérêts et frais compris, a été payée (ch. 1) ou que la totalité de la somme à rembourser a été déposée auprès de l'autorité judiciaire supérieure à l'intention du créancier (ch. 2), ou encore que celui-ci a retiré sa réquisition de faillite (ch. 3). Ces deux conditions, soit le paiement de la dette à l'origine de la faillite, le dépôt de la totalité de la somme à rembourser ou le retrait de la requête de faillite et la vraisemblance de la solvabilité, sont cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 5A_1040/2021 du 24 janvier 2022 consid. 3.1.1 et les références citées).
10.2 L'extinction de la dette au sens de l'art. 174 al. 2 LP exige que la créance mise en poursuite soit payée avec les intérêts et les frais, c'est-à-dire qu'elle corresponde à l'extinction selon l'art. 172 ch. 3 LP. Conformément à l'art. 209 al. 1 LP, le cours des intérêts prend en principe fin avec l'ouverture de la faillite en première instance. Si le jugement de faillite est attaqué et que l'effet suspensif est accordé au recours, les intérêts continuent d'être dus et ce jusqu'à la date du paiement ou du dépôt auprès de l'autorité judiciaire supérieure (Giroud/Theus Simoni, op. cit., n. 21 ad art. 174 LP).
Si le jugement de faillite est annulé, l'éventuel dépôt effectué auprès de l'autorité judiciaire supérieure est remis au créancier (Giroud/Theus Simoni, op. cit., n. 25a ad art. 174 LP).
10.3 La solvabilité, au sens de l'art. 174 al. 2 LP, consiste en la capacité du débiteur de disposer de liquidités suffisantes pour payer ses dettes échues et peut aussi être présente si cette capacité fait temporairement défaut, pour autant que des indices d'amélioration de la situation à court terme existent. Si le débiteur doit seulement rendre vraisemblable - et non prouver - sa solvabilité, il ne peut se contenter de simples allégations, mais doit fournir des indices concrets tels que récépissés de paiements, justificatifs des moyens financiers (avoirs en banque, crédit bancaire) à sa disposition, liste des débiteurs, extrait du registre des poursuites, comptes annuels récents, bilan intermédiaire, etc. En plus de ces documents, le poursuivi doit établir qu'aucune requête de faillite dans une poursuite ordinaire ou dans une poursuite pour effets de change n'est pendante contre lui et qu'aucune poursuite exécutoire n'est en cours contre lui. L'extrait du registre des poursuites constitue un document indispensable pour évaluer la solvabilité du failli. La condition selon laquelle le débiteur doit rendre vraisemblable sa solvabilité ne doit pas être soumise à des exigences trop sévères; il suffit que la solvabilité apparaisse plus probable que l'insolvabilité. L'appréciation de la solvabilité repose sur une impression générale fondée sur les habitudes de paiement du failli (arrêts du Tribunal fédéral 5A_1040/2021 du 24 janvier 2022 consid. 3.1.2; 5A_615/2020 du 30 septembre 2020 consid. 3.1; 5A_600/2020 du 29 septembre 2020 consid. 3.1; 5A_251/2018 du 31 mai 2018 consid. 3.1 et les références).
10.4 En l'espèce, il n'est pas contesté que la recourante a, avant l'échéance du délai de recours, déposé la totalité de la somme à rembourser auprès de la Cour à l'intention de l'intimée.
La recourante a par ailleurs suffisamment rendu vraisemblable sa solvabilité. En effet, à teneur de l'extrait du Registre des poursuites produit par ses soins, aucune faillite autre que celle présentement initiée n'est pendante contre elle et elle ne fait l'objet d'aucune poursuite exécutoire. Sur les dix poursuites inscrites, quatre sont au stade de l'opposition et six ont été soldées. Les poursuites mentionnées étant d'un nombre limité et ne concernant pas, à l'exception de deux d'entre elles, des dépenses courantes, il ne saurait être considéré, contrairement à ce que soutient l'intimée, que la recourante ne s'acquitterait de ses dettes que sous la pression de poursuites.
Il résulte en outre d'une attestation de l'organe de révision de la recourante jointe au recours que la situation financière de celle-ci est saine. Ses exercices comptables ont toujours été bénéficiaires depuis sa création et les liquidités à sa disposition au 15 août 2022 s'élevaient à plus de 21 millions. Le fait que lesdites liquidités aient diminué de plus de la moitié depuis le 31 décembre 2020 ne saurait remettre en cause la solvabilité de la recourante dans la mesure où elles demeurent largement suffisantes pour couvrir les poursuites dont elle fait l'objet, d'un montant total de 1'173'840 fr. 95, respectivement pour s'acquitter des sommes mises à sa charge dans la sentence arbitrale du 12 mai 2022.
Enfin, il n'est pas déterminant que la recourante n'ait fourni aucun extrait de compte annuel récent ou bilan intermédiaire. Dans la mesure où elle ne doit pas prouver mais uniquement rendre vraisemblable sa solvabilité, les documents produits apparaissent suffisants.
Au vu de ce qui précède, les conditions fixées par l'art. 174 al. 2 LP étant réalisées, le chiffre 1 du dispositif du jugement de faillite, déclarant la recourante en état de faillite, sera annulé.
Le montant dû par la recourante à l'intimée correspond au solde de la poursuite à la date du dépôt opéré auprès de l'autorité de céans, soit au 26 août 2022, les intérêts ayant cessé de courir à compter de cette date. A teneur des pièces produites, ce solde s'élevait à 232'542 fr. 95, intérêts et frais compris. Ladite somme sera en conséquence remise à l'intimée.
La recourante ayant déposé une somme de 236'826 fr. 95, soit une somme supérieure au montant dû, le solde, de 4'284 fr., lui sera restitué (236'826 fr. 95 - 232'542 fr. 95).
11. 11.1 Le paiement de la dette étant intervenu postérieurement au prononcé de la faillite, la décision du premier juge de mettre les frais judiciaires et dépens de première instance, arrêtés respectivement à 200 fr. et à 3'502 fr., à la charge de la recourante sera confirmée.
11.2 Pour le même motif, les frais du recours, arrêtés à 750 fr. (art. 52 let. b et 61 OELP), seront mis à la charge de la recourante et compensés à due concurrence avec l'avance de 1'000 fr. fournie par celle-ci, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). Le solde de 250 fr. sera restitué à la recourante.
La recourante sera condamnée à verser à l'intimée 2'000 fr. à titre de dépens de recours, débours compris, étant précisé que l'intimée est sise à l'étranger, de sorte qu'il n'y a pas de TVA à prélever (art. 85, 88, 89 et 90 RTFMC; art. 25 LaCC).
* * * * *
La Chambre civile :
A la forme :
Déclare recevable le recours interjeté le 29 août 2022 par A______ SA contre le jugement JTPI/9493/2022 rendu le 17 août 2022 par le Tribunal de première instance dans la cause C/12545/2022-10 SFC.
Au fond :
Annule le chiffre 1 du dispositif du jugement précité.
Rejette la requête de faillite formée par B______ S.P.A. le 29 juin 2022.
Confirme ledit jugement pour le surplus.
Invite la Trésorerie générale de l'Etat de Genève à restituer la somme de 236'826 fr. 95 déposée par A______ SA à hauteur de 232'542 fr. 95 en faveur de B______ S.P.A. et de 4'284 fr. en faveur de A______ SA.
Déboute les parties de toutes autres conclusions.
Sur les frais :
Arrête les frais judiciaires du recours à 750 fr., les met à la charge de A______ SA et les compense à due concurrence avec l'avance versée, qui reste acquise à l'Etat de Genève.
Invite l'Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, à restituer à A______ SA le solde de l'avance versée en 250 fr.
Condamne A______ SA à verser à B______ S.P.A. 2'000 fr. à titre de dépens du recours.
Siégeant :
Madame Pauline ERARD, présidente; Madame Sylvie DROIN, Madame
Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Mélanie DE RESENDE PEREIRA, greffière.
La présidente : Pauline ERARD |
| La greffière : Mélanie DE RESENDE PEREIRA |
Indication des voies de recours :
Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.