Skip to main content

Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

1 resultats
P/23497/2022

AARP/286/2024 du 16.08.2024 sur JTDP/142/2024 ( PENAL ) , REJETE

Descripteurs : VOL(DROIT PÉNAL);COAUTEUR(DROIT PÉNAL)
Normes : CP.139
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/23497/2022 AARP/286/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 16 août 2024

 

Entre

A______, sans domicile fixe, comparant par Me B______, avocate,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/142/2024 rendu le 1er février 2024 par le Tribunal de police,

 

et

C______ SA, partie plaignante,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTDP/142/2024 du 1er février 2024, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de vol (art. 139 ch. 1 du Code pénal [CP]) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP), l'a condamné à une peine privative de liberté de 150 jours, sous déduction de dix jours de détention avant jugement, a ordonné la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 1______, les valeurs patrimoniales figurant sous chiffre 2 de cet inventaire lui étant restituées, et a mis à sa charge les frais de la procédure s'élevant à CHF 1'234.-, émolument complémentaire de jugement de CHF 600.- en sus.

À teneur de sa déclaration d'appel, A______ entreprenait ce jugement dans son ensemble, concluant à son acquittement et à son indemnisation pour la détention injustifiée, frais de procédure à charge de l'État.

Par mémoire d'appel du 4 juin 2024, il réduit ses conclusions, demandant, principalement, son acquittement du chef de vol uniquement, le prononcé d'une peine privative de liberté ne dépassant pas 40 jours, assortie du sursis, sous déduction de la détention subie avant jugement, renonçant ainsi à son indemnisation, frais à charge de l'État et, subsidiairement, le prononcé d'une peine plus clémente.

b.a. Selon l'ordonnance pénale du 16 novembre 2022, il est reproché ce qui suit à A______ :

Le 1er novembre 2022, à 12h47, dans la pharmacie D______ sise au sein du centre commercial E______ à F______ [GE], il a dérobé, de concert avec G______, à tout le moins quatre coffrets de parfum de marque H______, I______ et J______ pour une valeur totale de CHF 487.-, dans le but de se les approprier sans droit et de se procurer de la sorte un enrichissement illégitime.

b.b. Il était également reproché à A______, les faits de rupture de ban (art. 291 CP) et non contestés en appel, suivants :

Depuis une date indéterminée au mois de juillet 2022, il a pénétré en Suisse, plus particulièrement à Genève, puis persisté à y séjourner jusqu'au 7 novembre 2022, date de son arrestation, en violation de la mesure d'expulsion judiciaire prononcée à son encontre par le TP le 9 mai 2022 pour une durée de trois ans, le début de l'expulsion pour départ volontaire ayant été fixé au 16 juin 2022.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 7 novembre 2022, K______, employée de la pharmacie D______ située dans le centre commercial E______ à F______, a fait appel à deux policiers en patrouille pour leur signaler que deux hommes ayant commis un vol à l'étalage le 1er novembre 2022 se trouvaient à l'entrée du magasin. Elle les reconnaissait pour les avoir vus sur les images de vidéosurveillance, qu'elle n'était pas en mesure d'extraire mais que les policiers ont pu filmer à l'aide de leur téléphone portable.

b. Il ressort de la première vidéo, d'une durée de 34 secondes, que A______ est entré dans la pharmacie en se dirigeant directement vers une vendeuse, qu'il lui a parlé, puis qu'ils se sont dirigés tous les deux vers un rayon sur la droite du magasin. G______ n'est pas visible sur la vidéo.

Sur la seconde vidéo, d'une durée d'une minute et 32 secondes, G______ se trouve en plein champ de la caméra devant un présentoir de coffrets de parfums, alors qu'on distingue la vendeuse en compagnie de A______ près du rayon sur la droite. On voit G______ faire mine de regarder les coffrets et en mettre plusieurs dans son sac, tout en vérifiant que la vendeuse ne le regarde pas. Celle-ci se dirige ensuite vers G______, lui dit quelque chose, puis retourne en direction de A______, lequel prend son téléphone portable et le met à l'oreille, pendant que G______ place encore un coffret dans son sac puis sort du magasin. A______ retourne alors seul vers le rayon où il se trouvait auparavant. La vidéo s'arrête avant que A______ ne sorte du magasin.

c. Plusieurs coffrets de parfum ont été retrouvés dans la chambre de G______ aux Foyers L______ au cours de sa perquisition, dont un correspondant à l'un des parfums déclarés volés par la pharmacie. Par ailleurs, un aimant "démagnétiseur d'antivols" a été retrouvé sur A______.

d. C______ SA, pour la pharmacie D______, a déposé plainte pénale contre A______ et G______ pour le vol de quatre parfums (soit deux parfums de marque H______, un de marque I______ et un de marque J______) d'une valeur totale de CHF 487.-, déclarant se "porte[r] partie civile" pour ce montant.

e. K______, entendue devant le Ministère public (MP), a précisé qu'elle n'était pas présente le jour des faits et que la vendeuse ayant eu affaire aux prévenus était une remplaçante. Elle estimait, au visionnage des images de surveillance, que A______ était également impliqué dans le vol des parfums, ayant pour rôle de distraire sa collègue pendant que l'autre dérobait les articles. Elle a ajouté que, n'étant pas en période de soldes, le magasin ne vendait pas de parfums avec une réduction de 50%, seule une offre promotionnelle à 30% étant disponible, et il était donc possible que sa collègue l'ait proposée.

f. G______ a reconnu avoir volé un, puis trois coffrets de parfum. A______ n'avait rien à voir avec ce vol. Il avait connu ce dernier dans sa jeunesse en Italie mais l'avait ensuite perdu de vue avant de le retrouver à Genève. Celui-ci était entré seul dans la pharmacie et avait demandé conseil à la vendeuse pour acheter un parfum. Lui-même y était ensuite entré et avait dérobé lesdits objets, puis était sorti sans révéler à son ami qu'il les avait volés. Il ne savait pas pourquoi il avait fait cela, n'ayant pas eu l'intention de commettre ce vol en entrant dans le magasin ; il était ivre.

g. À la police et au MP, A______ a contesté avoir pris part aux vols commis par G______. Il connaissait ce dernier depuis plus de vingt ans. Ils avaient été ensemble au centre commercial, où ils avaient fait des achats et bu un café. Il était entré dans le magasin D______ dans le but d'acheter des cadeaux. Il voulait une "crème pour des boutons" et offrir un parfum à sa copine pour un montant maximal de CHF 50.-. Il avait demandé conseil à la vendeuse qui lui avait montré des produits à CHF 24.- ou 25.-. Il n'avait finalement rien trouvé dans la pharmacie mais avait acheté un ours en peluche dans la boutique d'en face. Il ignorait que G______ avait dérobé des parfums à ce moment-là. Interrogé sur ses moyens de subsistance, il a expliqué acheter et vendre tout ce qu'il trouvait. Il utilisait l'aimant retrouvé sur lui pour porter des pièces de monnaie ou ses clés.

h. Lors de l'audience de confrontation, quelques jours plus tard, A______ a fourni des explications confuses sur la raison de sa venue dans la pharmacie. Il avait demandé conseil à la pharmacienne car il voulait faire un cadeau à sa copine qui ne dépasserait pas CHF 90.-. Il avait hésité longtemps puis avait choisi un porte-clés avec un nounours. La vendeuse lui avait montré certains parfums avec une réduction à 50%. Il a ensuite expliqué qu'il avait CHF 100.- en poche et avait dit à la vendeuse qu'il voulait un parfum à moins de CHF 50.-. La vendeuse lui avait répondu que cela n'existait pas et qu'elle avait des petits flacons, comme des échantillons, à ce prix-là. Il avait ensuite acheté un ours en peluche à M______. Interrogé sur la crème mentionnée lors de sa précédente audition, il a maintenu qu'il voulait effectivement en acheter mais ne l'avait pas trouvée dans les rayons. Ne parlant pas français, il avait renoncé à demander conseil à la pharmacienne.

i. A______, convoqué par le TP suite à son opposition, ne s'est pas présenté, sans excuse, aux débats de première instance. Son conseil a été autorisé à le représenter.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite avec l'accord des parties.

b. Selon son mémoire d'appel, A______ conclut à son acquittement du chef de vol. Rien ne permettait d'affirmer qu'il savait que son ami allait subtiliser des objets pendant qu'il discutait avec la vendeuse. Les images vidéos ne permettaient pas de démontrer une quelconque implication de sa part. Si G______ avait profité sur le moment que la vendeuse soit distraite pour commettre son méfait, cela n'impliquait pas nécessairement qu'il était lui-même au courant de ce que son ami allait faire. Le seul fait qu'il soit entré en même temps que lui dans la pharmacie n'était pas suffisant et sa version des faits, parfaitement crédible, devait être retenue.

Au bénéfice de cet acquittement, la peine fixée en lien avec l'infraction de rupture de ban devait être nettement réduite et limitée à 50 jours. Cette peine devait être prononcée avec sursis, étant donné qu'il n'avait pas d'antécédent spécifique. En cas de confirmation du verdict de culpabilité, il sollicitait le prononcé d'une peine plus clémente.

c. Selon son mémoire de réponse, le MP conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.

L'appelant avait agi en coactivité avec G______ pour commettre le vol dans la pharmacie. Ses dénégations n'étaient pas crédibles, dès lors qu'il avait varié sur les raisons de sa présence dans le commerce et sa discussion avec la vendeuse. Les images de vidéosurveillance et les déclarations de K______ montraient clairement que son rôle avait été de distraire la vendeuse et de faire en sorte qu'elle tourne toujours le dos à son comparse, pendant que ce dernier dérobait les parfums. La peine prononcée était adéquate, la directive sur le retour ne s'appliquant pas en l'espèce. L'octroi du sursis était exclu au vu des précédentes condamnations qui ne l'avait pas dissuadé de réitérer ses agissements.

d. Par pli du 12 juin 2024, C______ SA a exposé ne pas avoir d'observation à formuler, mais précisé que le montant demandé en indemnisation était de CHF 637.-, soit CHF 487.- de marchandise volée et CHF 150.- de frais administratifs. Elle a produit un inventaire de la marchandise volée, non daté, contenant un parfum de marque I______ (valeur CHF 159.-), deux de marque J______ (valeur CHF 230.-) et un de marque H______ (valeur CHF 98.-).

e. Le TP se réfère intégralement au jugement rendu.

D. A______ est né le ______ 1988 en Algérie, pays dont il a la nationalité. Divorcé, il est père de deux garçons âgés de 11 et 9 ans, dont le premier vit chez sa grand-mère et le second avec son ex-femme. Il se déclare sans emploi ni revenu et indique loger chez des amis. Suite à son expulsion du territoire suisse valable depuis le 16 juin 2022, il dit s'être rendu en Allemagne pour déposer une demande d'asile et y aurait obtenu une autorisation provisoire de six mois. Il était toutefois revenu à Genève en juillet 2022, déclarant se sentir bien en Suisse et vouloir y rester, alors qu'il avait des problèmes avec les autorités algériennes.

À teneur de l'extrait du casier judiciaire suisse, il a été condamné :

-        le 19 février 2022, par le MP, à une peine pécuniaire de 60 jours-amende à CHF 10.- l'unité, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, pour entrée et séjour illégaux (art. 115 al. 1 let. a et b LEI), ainsi qu'à une amende de CHF 100.- pour vol d'importance mineure (art. 139 ch. 1 cum 172ter al. 1 CP) ;

-        le 9 mai 2022, par le TP, à une peine privative de liberté de trois mois pour vol (trois occurrences : 25.02.2022, 15.03.2022 et 16.03.2022 ; art. 139 ch. 1 CP) ainsi qu'à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 10.- l'unité, pour entrée et séjour illégaux (art. 115 ch. 1 let. a et b LEI) et violation de l'art. 33 al. 1 aLArm, son expulsion de Suisse pour une durée de trois ans étant ordonnée.

E. MB______, défenseure d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 4 heures et 30 minutes d'activité de collaboratrice et 3 heures et 5 minutes d'activité de l'avocat stagiaire, dont 55 minutes pour l'annonce d'appel et 2 heures et 5 minutes pour la déclaration d'appel et son suivi. En première instance, elle a été indemnisée pour 15 heures et 25 minutes d'activité.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre n'examine que les points attaqués du jugement de première instance (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP), sans être liée par les motifs invoqués par les parties ni par leurs conclusions, à moins qu'elle ne statue sur une action civile (art. 391 al. 1 CPP).

2. Le principe in dubio pro reo découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP. Il concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; 127 I 28 consid. 2a).

Ce principe signifie, au stade du jugement, que le fardeau de la preuve incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. La présomption d'innocence est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que le prévenu n'a pas prouvé son innocence ou encore lorsqu'une condamnation intervient au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve. Le juge ne doit pas non plus se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 127 I 38 consid. 2a).

3. 3.1.1. L'art. 139 ch. 1 CP réprime le comportement de quiconque, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l'approprier.

3.1.2. Est un coauteur celui qui collabore, intentionnellement et de manière déterminante, avec d'autres personnes à la décision de commettre une infraction, à son organisation ou à son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux. Il faut que, d'après les circonstances du cas concret, la contribution du coauteur apparaisse essentielle à l'exécution de l'infraction. La seule volonté quant à l'acte ne suffit pas. Il n'est toutefois pas nécessaire que le coauteur ait effectivement participé à l'exécution de l'acte ou qu'il ait pu l'influencer. La coactivité suppose une décision commune, qui ne doit cependant pas obligatoirement être expresse, mais peut aussi résulter d'actes concluants, le dol éventuel quant au résultat étant suffisant. Il n'est pas nécessaire que le coauteur participe à la conception du projet ; il peut y adhérer ultérieurement. Il n'est pas non plus nécessaire que l'acte soit prémédité ; le coauteur peut s'y associer en cours d'exécution. Il est déterminant que le coauteur se soit associé à la décision dont est issue l'infraction ou à la réalisation de cette dernière, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 135 IV 152 consid. 2.3.1 ; ATF 130 IV 58 consid. 9.2.1 ; 125 IV 134 consid. 3a ;
ATF 135 IV 152 consid. 2.3.1 ; SJ 2008 I 373 consid. 7.3.4.5 p. 382-383). La jurisprudence exige même que le coauteur ait une certaine maîtrise des opérations et que son rôle soit plus ou moins indispensable (ATF 120 IV 17 consid. 2d ;
136 consid. 2b ; 265 consid. 2c/aa ; 118 IV 397 consid. 2b).

Ce concept de coactivité montre qu'une personne peut être considérée comme auteur d'une infraction, même si elle n'en est pas l'auteur direct, c'est-à-dire si elle n'a pas accompli elle-même tous les actes décrits dans la disposition pénale (ATF 120 IV 17 consid. 2d).

3.2.1. En l'espèce, il est établi et admis que G______ a dérobé des coffrets de parfum dans la pharmacie D______ le 1er novembre 2022, alors que l'appelant demandait conseil à la vendeuse et discutait avec celle-ci dans un rayon. Reste à établir si, comme l'a retenu le TP, l'appelant avait connaissance de l'intention de son ami de commettre un vol et a pris part à ce méfait en qualité de coauteur.

Tout d'abord, il sera relevé que K______ n'était pas présente lors des faits et qu'elle n'en a eu connaissance que par le visionnage des images de vidéosurveillance, lesquelles figurent au dossier. Il ne s'agit donc pas d'un témoignage direct et l'interprétation des images par le témoin, qui a déclaré être persuadé que l'appelant a participé au vol, n'a aucune influence sur l'appréciation que peut s'en faire la Cour. À ce sujet, il peut être regretté que les images n'aient pas été extraites dans leur intégralité et/ou que la vendeuse effectivement présente le jour des faits n'ait pas été entendue ; ces éléments ne sont cependant pas indispensables à la solution du cas.

En effet, contrairement à ce que prétend l'appelant, on ne saurait qualifier sa version de faits de parfaitement crédible. Il s'est contredit sur les raisons de sa présence dans la pharmacie et sur les conseils sollicités. Ses explications sont également contredites par l'affirmation de K______ selon laquelle aucun parfum n'était vendu avec une réduction de 50%. Il a également prétendu avoir renoncé à demander à la vendeuse une "crème pour des boutons" car il ne parlait pas français, tout en expliquant avoir demandé conseil à cette même vendeuse pour un parfum, avec indication de son budget. Celui qu'il a évoqué pour un cadeau à son amie semble d'ailleurs disproportionné pour une personne sans moyen de subsistance. Il peut encore être rappelé que l'appelant a déclaré vivre grâce à la vente de ce qu'il trouvait et qu'il a été condamné pour plusieurs vols quelques mois avant les faits, compte non tenu de l'aimant retrouvé sur lui et pouvant servir à démagnétiser des antivols. Quant aux déclarations de son comparse le mettant hors de cause, elles ne peuvent être suivies puisque celui-ci ne pouvant nier l'évidence du vol face aux images de vidéosurveillance, il ne lui restait qu'à dédouaner son ami.

Sa version est également contredite par les images de vidéosurveillance. Il en ressort que l'appelant est entré dans la pharmacie et s'est directement dirigé, seul, auprès de la vendeuse pour lui demander quelque chose. Il n'apparaît pas qu'il aurait d'abord fait un tour des rayons pour trouver ce qu'il cherchait, contrairement à ce qu'il a déclaré. Les deux comparses sont entrés, puis sortis, séparément de la pharmacie, donnant l'apparence de ne pas être ensemble à la vendeuse ou aux caméras de surveillance, alors qu'il est admis qu'ils s'étaient rendus ensemble dans le centre commercial, où ils ont fait des achats et bu un café. L'enchaînement des faits démontre également que ce n'est que lorsque la vendeuse était occupée plus loin avec l'appelant que son comparse s'est approché du présentoir des parfums, puis, aussitôt que celui-ci a quitté la pharmacie après son méfait, l'appelant s'est désintéressé de la vendeuse et a consulté son téléphone portable. Ces éléments concrétisent le fait qu'il y avait bien une stratégie mise en place pour commettre ce vol, avec un rôle assigné à chacun, fût-ce par acte concluant.

Le rôle de l'appelant était clairement celui de distraire la vendeuse le temps que son comparse puisse se saisir des objets convoités. Cette participation excède le seuil de la complicité, outre que cette forme de participation accessoire n'a pas été plaidée. En effet, la répartition des tâches n'a pas uniquement favorisé l'infraction mais a permis à G______ de dérober, tranquillement, plusieurs parfums. S'il n'a pas pu être établi que A______ ait participé au butin, il ne s'agit pas là d'une condition indispensable pour retenir la coactivité.

Au sujet du butin, le TP a retenu dans sa partie en fait que, selon les images vidéos, G______ avait dérobé "à tout le moins trois" coffrets (jugement querellé consid. B.c), nombre que l'intéressé avait admis à la police, avant de retenir, sans autre explication, quatre coffrets volés. Cette question peut néanmoins demeurer ouverte dans la mesure où, même si seuls trois parfums avaient été dérobés, leur valeur totale dépassait les CHF 300.-, ce qui exclut de retenir une infraction d'importance mineure au sens de l'art. 172ter al. 1 CP. Par ailleurs, même si les quatre parfums déclarés volés lors du dépôt de la plainte ne correspondent pas exactement aux parfums listés par la partie plaignante dans son courrier à la CPAR du 12 juin 2024, la valeur totale de la marchandise est toujours restée identique, de sorte qu'il n'y a pas lieu de douter des déclarations de la partie plaignante à ce sujet.

Il doit ainsi être retenu que l'appelant a bien commis un vol, en coactivité avec G______, au préjudice de la pharmacie D______, portant sur quatre coffrets de parfum d'une valeur totale de CHF 487.-.

3.2.2. Par conséquent, la culpabilité de l'appelant du chef de vol au sens de l'art. 139 ch. 1 CP sera confirmée.

4 4.1.1. Le vol (art. 139 ch. 1 CP) est passible d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire et la rupture de ban (art. 291 al. 1 CP) d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

4.1.2. L'art. 47 CP prévoit que le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5 et 134 IV 17 consid. 2.1).

4.1.3. L'art. 41 al. 1 CP autorise le juge à prononcer une peine privative de liberté à la place d'une peine pécuniaire, si une peine privative de liberté paraît justifiée pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (let. a), ou s'il y a lieu de craindre qu'une peine pécuniaire ne puisse pas être exécutée (let. b).

Il y a lieu d'admettre qu'une peine pécuniaire ne peut être prononcée lorsque le condamné ne s'acquittera vraisemblablement pas des jours-amende, en présence d'un risque de fuite, par manque de moyens suffisants ou encore en raison d'une mesure d'éloignement prononcée par une autorité administrative (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI, Petit commentaire du Code pénal, 2ème éd., 2017, n. 3 ad art. 41).

4.1.4. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

L'exigence, pour appliquer l'art. 49 al. 1 CP, que les peines soient de même genre, implique que le juge examine, pour chaque infraction commise, la nature de la peine à prononcer pour chacune d'elle. Le prononcé d'une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation contenu à l'art. 49 CP n'est ensuite possible que si le juge choisit, dans le cas concret, le même genre de peine pour sanctionner chaque infraction commise. Que les dispositions pénales applicables prévoient abstraitement des peines de même genre ne suffit pas. Si les sanctions envisagées concrètement ne sont pas du même genre, elles doivent être prononcées cumulativement. La peine privative de liberté et la peine pécuniaire ne sont pas des sanctions du même genre (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1). Une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation suppose, à la différence de l'absorption et du cumul des peines, que le tribunal ait fixé (au moins de manière théorique) les peines (hypothétiques) de tous les délits (ATF 144 IV 217 consid. 3.5.3).

4.2.1. La faute de l'appelant est d'une gravité moyenne. Il s'en est pris au patrimoine d'autrui, par appât du gain facile, et a manifesté son mépris des décisions de justice, par confort personnel, revenant en Suisse. La période pénale en lien avec la rupture de ban est de cinq mois, alors que le retour sur le territoire national s'est effectué une semaine seulement après l'exécution de l'expulsion.

S'il a admis la rupture de ban, difficilement contestable, l'appelant a persisté à nier les faits de vol en fournissant des explications contradictoires. Il n'a manifesté aucun regret, ni montré la moindre inclination à quitter le territoire, semblant résolu à demeurer en Suisse dans l'indifférence de la mesure d'expulsion à son endroit.

Il a deux antécédents récents et spécifiques. Sa situation personnelle n'explique pas ses agissements, puisqu'il indique avoir été mis au bénéfice d'une autorisation provisoire qui lui permettait de demeurer en Allemagne à l'époque des faits.

Dès lors, il convient de retenir, à l'instar du premier juge, qu'au vu de ses antécédents, de son défaut de prise de conscience et de l'absence de statut et d'activité professionnelle légaux en Suisse, le prononcé d'une peine pécuniaire est exclu.

Il y a concours d'infractions. L'infraction abstraitement la plus grave est celle de vol, justifiant une peine privative de liberté de 90 jours, qu'il convient d'augmenter de 60 jours (peine hypothétique : 90 jours) pour la rupture de ban. Une peine d'ensemble de 150 jours est ainsi justifiée et adéquate. La peine prononcée en première instance sera ainsi confirmée, sous déduction de la détention avant jugement (art. 51 CP).

Vu la récidive et l'absence de circonstances particulièrement favorables, l'octroi du sursis est exclu (art. 42 al. 2 CP), ce qui n'est d'ailleurs pas plaidé par l'appelant.

4.2.2. L'appel sera ainsi intégralement rejeté et le jugement entrepris confirmé.

5. 5.1. En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu.

En qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CPP). Dans la mesure du possible, la partie plaignante chiffre ses conclusions civiles dans sa déclaration en vertu de l'art. 119 CPP et les motive par écrit ; elle doit les chiffrer au plus tard durant les plaidoiries (art. 123 al. 2 CPP) des débats de première instance, compte tenu de la règle énoncée à l'art. 122 al. 4 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_193/2014 du 21 juillet 2014 consid. 2.3 = SJ 2015 I p. 293 ; AARP/399/2017 du 13 décembre 2017 consid. 1.3).

5.2. En l'espèce, la partie plaignante a fait valoir ses conclusions civiles chiffrées dès sa constitution en novembre 2022. La partie plaignante a été renvoyée à agir par la voie civile par l'ordonnance pénale du 16 novembre 2022, comme le prescrivait l'art. 353 al. 2 aCPP en vigueur à cette date. Cette ordonnance pénale ayant été frappée d'opposition, il appartenait donc au TP de se prononcer sur les conclusions civiles en vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, ce que celui-ci a omis.

Cela étant, dans la mesure où la partie plaignante n'a pas déclaré d'appel ou d'appel joint à l'encontre du jugement du TP, le prévenu, seul appelant, ne pourra pas être condamné à lui verser un dédommagement, sauf à violer l'interdiction de la reformatio in pejus (art. 391 al. 2 CPP), de sorte que ces conclusions seront jugées irrecevables.

Il en va de même des conclusions civiles amplifiées en appel en lien avec CHF 150.- de frais administratifs. La partie plaignante ne les ayant pas fait valoir lors de la procédure préliminaire ni devant le TP, elle était forclose à s'en prévaloir en appel.

6. L'appelant, qui succombe, supportera les frais de la procédure d'appel envers l'État (art. 428 CPP), y compris un émolument de décision de CHF 1'000.-.

Vu l'issue de son appel et la confirmation des verdicts de culpabilité, il n'y a pas lieu de revoir la répartition des frais de première instance, y compris la mise à sa charge de l'émolument complémentaire de jugement.

7. 7.1.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès.

S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 al. 1 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique, arrêtant le tarif horaire, débours de l'étude inclus à : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) ; collaborateur CHF 150.- (let. b) ; chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement – l'assujettissement du patron de l'avocat au statut de collaborateur n'entrant pas en considération (arrêts du Tribunal fédéral 6B_486/2013 du 16 juillet 2013 consid. 4 et 6B_638/2012 du 10 décembre 2012 consid. 3.7) – l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

7.1.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Tel est notamment le cas de documents ne nécessitant pas ou peu de motivation ou autre investissement particulier en termes de travail juridique, telle l'annonce d'appel (AARP/184/2016 du 28 avril 2016 consid. 5.2.3.2 et 5.3.1 ; AARP/149/2016 du 20 avril 2016 consid. 5.3 et 5.4 ; AARP/146/2013 du 4 avril 2013) et la déclaration d'appel (ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2014.51 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 ; décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.165 du 24 janvier 2014 consid. 4.1.3 et BB.2013.127 du 4 décembre 2013 consid. 4.2).

7.2. En l'occurrence, il convient de retrancher de l'état de frais de MB______ l'entier de l'activité de son avocat stagiaire dans la mesure où celle-ci porte uniquement sur des postes couverts par le forfait.

Partant, la rémunération de la défenseure d'office de A______ sera arrêtée à CHF 875.61 correspondant à 4 heures et 30 minutes d'activité au tarif de CHF 150.‑/heure plus la majoration forfaitaire de 20% et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% en CHF 65.61.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/142/2024 rendu le 1er février 2024 par le Tribunal de police dans la procédure P/23497/2022.

Le rejette.

Déclare irrecevables les conclusions civiles formulées par C______ SA.

Condamne A______ aux frais de la procédure d'appel, en CHF 1'215.-, lesquels comprennent un émolument de jugement de CHF 1'000.-.

Arrête à CHF 875.61, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseure d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP) et de rupture de ban (art. 291 al. 1 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 150 jours, sous déduction de 10 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Ordonne la confiscation et la destruction des objets figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 1______ (art. 69 CP).

Ordonne la restitution à A______ des valeurs patrimoniales figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 1______.

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'234.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.- (art. 426 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 2'946.25 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

[…]

Fixe l'émolument complémentaire de jugement à CHF 600.-.

Condamne A______ à payer à l'Etat de Genève l'émolument complémentaire fixé à CHF 600.-. "

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Secrétariat d'État aux migrations et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Sonia LARDI DEBIEUX

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'834.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

140.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

0.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'215.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'049.00