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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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PM/1099/2023

AARP/162/2024 du 16.05.2024 sur JTPM/148/2024 ( EXE ) , REJETE

Descripteurs : MESURE THÉRAPEUTIQUE INSTITUTIONNELLE;SUSPENSION DE L'EXÉCUTION DE LA PEINE;SOLDE DE LA PEINE;CONCOURS D'INFRACTIONS;PEINE D'ENSEMBLE
Normes : cp.60; cp.62.alc; cp.49
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/1099/2023 AARP/162/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du jeudi 16 mai 2024

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, ______, représenté par Me C______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTPM/148/2024 rendu le 6 mars 2024 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

 

et

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. En temps utile, A______ appelle du jugement du 6 mars 2024, par lequel le Tribunal d'application des peines et des mesures (TAPEM) a ordonné la levée du traitement institutionnel des addictions prononcé le 3 novembre 2020 et la réintégration pour le solde des peines privatives de liberté suspendues, fixé à 1'649 jours, frais à la charge de l'État.

Il entreprend intégralement ce jugement, concluant à son annulation, au prononcé de la poursuite du traitement institutionnel des addictions, le Service de l'application des peines et mesures (SAPEM) devant être invité à prendre toutes les dispositions nécessaires afin d'émettre un ordre de placement au sein d'une institution spécialisée (art. 60 al. 3 du Code pénal [CP]) dans les meilleurs délais.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. A______, ressortissant marocain, né le ______ 1990 dans son pays, est arrivé en Suisse en 2003 pour y rejoindre sa mère. Il a été scolarisé mais a abandonné ses études, a effectué des stages de peintre en bâtiment, puis divers petits travaux jusqu'en 2014. Dès 2015, sa consommation de stupéfiants ayant empiré, il n'a plus été en mesure d'exercer une quelconque activité professionnelle ou suivre une formation. Il touche l'aide sociale depuis la naissance de son enfant, né en ______ 2013, qui vit avec sa mère. Le couple est séparé depuis à tout le moins 2019.

b.a. Par jugement du 3 novembre 2020, le Tribunal correctionnel (TCO) a reconnu A______ coupable de brigandages, d'extorsion, d'utilisations frauduleuses d'un ordinateur et de tentative d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur, de vols, de dommages à la propriété et de consommation de stupéfiants, l'a condamné à une peine privative de liberté de quatre ans, sous déduction de 302 jours de détention avant jugement, et a ordonné son expulsion pour une durée de sept ans. L'exécution de la peine a été suspendue au profit d'un traitement institutionnel des addictions.

b.b. À cette date, A______ avait déjà été condamné à sept reprises, depuis 2010, notamment pour vol, dommages à la propriété, brigandage, escroquerie, abus de confiance, agression, lésions corporelles simples, empêchement d'accomplir un acte officiel, violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, ainsi qu'infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants.

Il avait été détenu du 24 juillet 2015 au 13 mai 2019, hormis une brève période de deux mois et 20 jours, passée au foyer "D______", pour un suivi de ses addictions au cannabis et à l'alcool, où il n'était pas parvenu à s'adapter, d'après lui car les autres pensionnaires souffraient d'addictions plus lourdes (héroïne). Il avait fait des sorties non-autorisées, durant lesquelles il fumait un ou deux joints et voyait sa famille.

À sa sortie de prison, il avait continué à fumer des joints et, sa situation familiale s'étant dégradée, sa compagne ne lui laissant plus voir leur fils, il avait commencé à prendre quotidiennement du crack.

Réincarcéré en janvier 2020, il avait débuté, en février de la même année, un suivi psychologique et psychiatrique qui, selon ses dires, l'avait beaucoup fait réfléchir. Il avait déclaré au TCO souhaiter se reconstruire, devenir autonome, responsable, un bon citoyen, comme tout le monde, payer ses factures, trouver un travail et s'occuper de sa famille, conscient de ce qu'il était arrivé à un âge où il devait changer et "attraper le dernier wagon". Dans ce but, il avait contacté la fondation "E______", avec l'aide de son avocat.

b.c. Selon l'expertise du 31 mars 2020, sur laquelle s'est fondé le TCO, A______ souffrait notamment d'un trouble de la personnalité borderline avec traits dyssociaux, ainsi que d'un syndrome de dépendance à des drogues multiples (cannabis et cocaïne), le risque de récidive étant considéré comme élevé. La seule mesure adaptée apparaissait être un placement dans un établissement spécialisé dans la prise en charge des personnes toxicodépendantes, tels "D______", "F______" ou "G______", permettant de poursuivre le sevrage dans de bonnes conditions, avec un entourage soutenant et un suivi encadrant, étant toutefois précisé qu'un tel traitement, déjà tenté par le passé, n'avait pas permis de rémission prolongée.

c. Le 16 février 2021, A______ a été placé par le SAPEM auprès de la fondation "F______", dans le canton de Vaud.

Le 15 mars 2021, cette institution a mis un terme au séjour, au motif que la prise d'urine effectuée le jour de l'arrivée du patient s'était révélée positive au THC ; en outre, il avait fugué et les tests réalisés à son retour s'étaient révélés positifs au THC et à la cocaïne. Il avait également été surpris en train de falsifier l'une de ses prises d'urine, ce qui avait jeté le soupçon sur celles revenues négatives à toute substance. Son séjour avait ainsi été ponctué de ses envies de consommation, outre le manque de transparence face aux différentes ruptures du cadre, ce qui avait compromis sa prise en charge ainsi que le bon déroulement de la thérapie.

d. Par jugement du 18 mai 2021, le TAPEM a ordonné la levée, pour cause d'échec, du traitement institutionnel des addictions de A______ et sa réintégration dans l'exécution du solde de sa peine privative de liberté.

Saisie d'un recours, la Chambre de recours de la Cour de justice (CPR) a, par arrêt du 5 juillet 2021 (ACPR/448/2021), annulé ce jugement et renvoyé la cause au TAPEM pour nouvelle décision, estimant qu'il convenait d'examiner la possibilité d'une modification de la mesure en faveur d'un milieu plus "contraignant".

e.a. Par jugement du 8 septembre 2021, le TAPEM a ordonné la poursuite du traitement institutionnel des addictions de A______, au motif qu'il y avait lieu de lui offrir la possibilité de faire ses preuves dans un cadre plus strict.

e.b. Entretemps, A______ avait encore été condamné, par voie d'ordonnance pénale du 25 août 2021, à laquelle il avait fait opposition, pour tentative de vol et dommages à la propriété commis le 19 mars 2021, et été interpellé, le 3 septembre 2021, pour des infractions de vol, tentative de vol, dommages à la propriété et consommation de stupéfiants.

e.c. Le 5 septembre 2021, A______ a été libéré par le Tribunal des mesures de contrainte (TMC), car il avait pris contact avec la fondation "E______", un rendez-vous de préadmission étant prévu le 7 suivant pour intégrer le foyer "H______" (dépendant de la fondation "E______") et il convenait de ne pas mettre en péril cette admission, dernière chance du précité de traiter ses addictions, en lien étroit avec les infractions commises. Le TMC a obligé A______, entre autres mesures de substitution, à entreprendre un traitement de ses addictions auprès de ladite fondation et à se soumettre strictement aux règles de cette structure, sous le contrôle du Service de probation et d'insertion (SPI).

f.a. À la suite de l'entretien de préadmission, la fonction "E______" a requis des garanties, notamment le sevrage de A______ préalablement à son entrée.

f.b. Le 9 octobre 2021 A______ a été interpellé pour des faits de vol et de dommages à la propriété et placé en détention provisoire, ce qui a mis fin aux mesures de substitution.

f.c. Par jugement du Tribunal de police (TP) du 6 décembre 2021, il a été condamné, pour les faits commis entre le 19 mars et le 9 octobre 2021, à une peine privative de liberté de neuf mois, sous déduction de 100 jours de détention avant jugement. Le SAPEM a suspendu l'exécution de la peine au profit de la mesure, conformément à l'art. 9 al. 1 de l'Ordonnance relative au code pénal et au code pénal militaire (O-CP-CPM), de sorte que A______ a été libéré le 6 janvier 2022.

g.a. Le 11 janvier 2022, la fondation "E______" a informé le SPI, en se référant à un entretien de la veille, de ce que, si les conditions formulées en septembre 2021 étaient remplies, une admission de A______ pourrait être envisagée pour le 22 février 2022.

g.b. Le 14 janvier 2022, A______ a été arrêté puis placé en détention provisoire à la prison de B______ à la suite de l'ouverture d'une nouvelle procédure pour des faits de vol et dommages à la propriété, essentiellement commis entre les 10 et 13 janvier 2022, pour lesquels il sera condamné par jugement du 2 mai 2022, puis l'exécution de la peine également suspendue en application de l'art. 9 al. 1 O-CP-CPM.

Il ne s'est donc pas présenté à son admission auprès de la fondation "E______", de sorte que cette dernière a indiqué qu'elle n'entrerait plus en matière sur une éventuelle demande de sa part.

h.a. Le 5 avril 2022, le SAPEM a préavisé la levée de la mesure thérapeutique institutionnelle, constatant l'absence d'évolution et de perspective d'amélioration de A______.

h.b. Par requête du 8 avril 2022, le Ministère public (MP) a conclu à la réintégration de A______.

h.c. Par jugement du 6 mai 2022, le TAPEM a fait droit à la demande.

Cette décision était motivée par le fait que A______, alors qu'il savait qu'il allait être enfin admis à la fondation "E______", n'avait pas saisi l'occasion de sa libération du 6 janvier 2022 pour faire la preuve de sa bonne foi et de sa motivation à exécuter de manière correcte la mesure à laquelle il était astreint. Hors de prison, il se révélait incapable de respecter le cadre règlementaire, adoptait une attitude désinvestie, reprenait la consommation de stupéfiants et ne cessait de commettre de nouvelles infractions. La mise à profit de sa détention en cours pour effectuer un travail thérapeutique – il avait débuté un suivi psychothérapeutique et psychiatrique hebdomadaire à la prison de B______ depuis le 25 janvier 2022 – ne permettait pas de renverser ce constat et semblait, au contraire, démontrer que A______ parvenait uniquement à effectuer un travail sur ses addictions une fois "au pied du mur", en prison, éloigné par la force des choses de toute tentation.

h.d. Par arrêt du 26 juillet 2022 (ACPR/501/2022), la CPR a annulé ce jugement, estimant que le SAPEM aurait dû trouver un cadre permettant à A______ de sortir du cercle vicieux de la consommation, cadre qu'il n'avait jamais eu. Il était prématuré d'estimer que la mesure serait inopérante, alors qu'elle n'avait pas débuté. Les crises et les rechutes faisaient partie du tableau clinique des personnes dépendantes. Les conditions pour poser un constat d'échec de la mesure n'étaient par conséquent pas réalisées.

i. Le SAPEM a aussitôt adressé des demandes urgentes d'admission aux fondations "F______", "E______" et "I______" à J______ [VD], étant précisé que, A______ aurait indiqué, ce qu'il contestera ultérieurement, à ce service, lors d'un entretien en août 2022, s'opposer à un placement dans un canton germanophone ou italophone, dès lors qu'il ne maîtrisait que le français.

La première de ces institutions a répondu qu'elle n'était pas en mesure de donner une suite favorable à cette requête, le passé ayant démontré que l'intéressé, qui adoptait une attitude désinvestie, était incapable de respecter le cadre réglementaire, et qu'aucun élément ne permettait de conclure que son comportement s'était modifié.

La deuxième a opposé un refus.

La troisième, tout en constatant que les différentes tentatives de mise en œuvre de la mesure s'étaient toutes soldées par un échec en raison des réincarcérations de l'intéressé, s'est tout d'abord déclarée disposée à le rencontrer. Toutefois, après un premier rendez-vous manqué à un entretien d'admission, puis un second annulé en raison d'une nouvelle incarcération, la fondation "I______" a, le 30 novembre 2022, donné un préavis défavorable à l'admission en raison de la situation fragile de A______, à laquelle la structure ne serait pas adaptée.

j. Par jugement du 17 janvier 2023, le TAPEM a ordonné la poursuite du traitement institutionnel jusqu'au prochain contrôle annuel, en rappelant l'échéance de la mesure au 3 novembre 2023, et enjoint au SAPEM d'explorer toutes les pistes utiles en vue de trouver un établissement adapté.

k.a. Le 26 janvier 2023, le SAPEM a formulé deux demandes d'admission, l'une auprès du site résidentiel du "K______" à Neuchâtel, l'autre auprès du foyer "D______".

Le premier a décliné au motif que l'institution n'était pas en mesure de prendre en charge A______, au vu des comorbidités psychiques mentionnées dans l'expertise du 31 mars 2020, du fait que l'intéressé présentait des antécédents de violence, y compris envers les forces de l'ordre, et de l'expulsion dont était assortie sa condamnation, qui rendait un travail sur la réintégration sociale presque impossible pour l'établissement.

Le second a accepté d'organiser un entretien de préadmission, prévu le 21 février 2023, auquel l'intéressé ne s'est pas présenté. Après avoir été chapitré par le SAPEM, A______ a repris contact avec le foyer et un nouvel entretien de préadmission a été fixé le 21 mars 2023. "D______" a toutefois finalement refusé de l'accueillir, au motif que son programme impliquait de travailler, à terme, au sein d'une entreprise locale et de résider dans le canton de Vaud, ce qui excluait de facto l'intéressé. Le délai d'attente était en toute hypothèse supérieur à une année.

k.b. Le 10 juillet 2023, le SAPEM a adressé une demande d'admission à la "L______" à M______ [Bâle]. Informé de ce que les résidents étaient libres de leurs allées et venues, de sorte que l'établissement ne pouvait garantir que A______ ne quitte pas l'institution sans son accord, le SAPEM a estimé que les conditions d'accueil ne remplissaient pas ses exigences.

k.c. Une demande du 23 septembre 2023 au centre d'accueil "N______", dans le canton de Fribourg, a été rejetée, la liste d'attente pour un placement avoisinant les 12 mois.

k.d. La demande d'admission du 10 octobre 2023 à "O______" pour un accueil au centre résidentiel et ambulatoire du "P______" a également été rejetée, au motif qu'aucun projet de réinsertion ne pouvait être envisagé, dès lors que A______ serait expulsé dès la fin du placement.

l.a. Selon le préavis du SAPEM du 27 octobre 2023, dans cet intervalle, A______ a été incarcéré deux jours en mars 2023, du 20 au 21 avril 2023, date à laquelle il a été libéré au bénéfice de mesures de substitution, lesquelles ont été dénoncées par le SPI quatre jours plus tard, du 11 mai au 10 octobre 2023, et à nouveau depuis le 19 décembre 2023.

l.b. En définitive, au jour du prononcé du jugement du TAPEM, les peines dont A______ devait exécuter le solde, par 1'649 jours, étaient les suivantes, selon décisions du :

- Tribunal de police du 6 décembre 2021, neuf mois, sous déduction de la détention subie à titre de détention avant jugement, et d'exécution de la peine et de la mesure ;

- du Tribunal de police du 2 mai 2022, six mois, sous déduction de la détention subie à titre de détention avant jugement, et d'exécution de la peine et de la mesure ;

- du Tribunal de police du 12 septembre 2023, 12 mois, sous déduction de la détention subie à titre de détention avant jugement, et d'exécution de la peine et de la mesure ;

- du Ministère public du 2 novembre 2023, 180 jours, sous déduction de la détention subie à titre de détention avant jugement, et d'exécution de la peine et de la mesure ;

- du Tribunal d'application des peines et des mesures du 2 décembre 2019 ordonnant la réintégration de A______ dans la peine prononcée par le TCO le 16 novembre 2017, dite peine étant partiellement complémentaire à celles prononcées par le Ministère public les 26 décembre 2011 et 7 mai 2015, pour un solde de quatre mois et quatre jours.

l.c. Une procédure pénale (P/1______/2023) a encore été ouverte pour des faits notamment de vol et de dommages à la propriété commis entre le 13 octobre et le 19 décembre 2023, qui ont donné lieu à sa condamnation, par jugement du TP du 16 avril 2024, à une peine privative de liberté de huit mois, sous déduction de 120 jours de détention avant jugement (JTDP/434/2024 désormais en force).

m.a. Le 27 octobre 2023, le SAPEM a préavisé la levée de la mesure de traitement des addictions, estimant un placement concrètement irréalisable, les arguments des institutions contactées étant intrinsèques aux circonstances du cas d'espèce, soit l'impossibilité d'entamer un processus de réinsertion au vu de l'expulsion prononcée et la difficulté d'une prise en charge liée aux troubles mis en exergue dans l'expertise du 31 mars 2020. Un traitement thérapeutique institutionnel au sens de l'art. 59 CP n'était pas non plus envisageable, l'expertise ayant souligné qu'un traitement institutionnel non spécialisé ne permettrait pas une prise en charge suffisamment approfondie des comportements toxicomaniaques, tout en risquant d'aggraver la désocialisation. Un traitement ambulatoire selon l'art. 63 CP ne diminuerait quant à lui ni les risques de consommation de stupéfiants, ni le risque de récidive. Enfin, la clinique Q______ et les établissements psychosociaux médicalisés n'acceptaient pas les placements de personnes bénéficiant d'une mesure de traitement des addictions et il était illusoire d'envisager un placement dans un canton alémanique ou au Tessin, où A______ ne pourrait pas bénéficier d'un encadrement psychosocial et d'un suivi addictologique dans une langue qu'il comprenait.

m.b. Par requête du 7 novembre 2023, le Ministère public a conclu à la levée de la mesure et à la réintégration de A______.

m.c. A______ s'y est opposé. Une levée de la mesure ne devait être admise que si son exécution se révélait impossible sur l'ensemble du territoire suisse, et non pas si tel ou tel établissement refusait d'accueillir le condamné. Le SAPEM n'avait ainsi pas suivi l'injonction du TAPEM d'explorer les possibilités de placement en Suisse allemande et au Tessin, avant de conclure à une impossibilité de placement. Or, les infractions commises étaient en lien avec ses addictions, qui n'avaient pu être prises en charge du fait que la mesure ordonnée par le TCO en 2020 n'avait jamais débuté. Par ailleurs, le législateur lui-même avait analysé la coordination entre l'exécution d'une mesure et l'expulsion judiciaire et ne l'avait considérée ni problématique, ni impossible.

C. a. Par ordonnance du 3 avril 2024, la juge exerçant la direction de la procédure a prononcé que la mesure institutionnelle ordonnée par le TCO le 3 novembre 2020 était prolongée jusqu'à droit jugé dans la présente procédure, au cas où A______, détenu dans le cadre d'une autre procédure, serait remis en liberté (OARP/17/2024).

b. A______, qui a refusé de quitter la prison de B______, ne s'est pas présenté à l'audience d'appel fixée le 26 avril 2024.

c.a. Par la voix de son conseil, autorisé à le représenter, il persiste dans ses conclusions, reprenant essentiellement l'argumentation développée dans le mémoire de recours motivé valant déclaration d'appel.

Le TAPEM avait considéré à tort qu'un traitement était voué à l'échec en raison de son comportement. Certes, il avait un long passé d'addiction et de délinquance et ne ressortait de prison que pour recommencer, mais les infractions commises étaient en lien direct avec sa dépendance et les rechutes devaient être considérées comme normales.

La justice avait ordonné le traitement, et le SAPEM, fût-il désabusé par les multiples rechutes et refus des institutions contactées, devait tout mettre en œuvre pour exécuter cette décision. Or, il n'avait manifestement pas tout tenté, puisque de nombreuses institutions figurant sur la liste de la Convention intercantonale relative aux institutions sociales (CIIS) n'avaient pas été approchées. Il n'était dès lors pas établi que la mise en place de la mesure fût impossible dans toute la Suisse.

c.b. À l'appui de ses arguments, A______ produit divers documents, soit :

- deux attestations du suivi psychothérapeutique et psychiatrique hebdomadaire entamé dès son incarcération, en décembre 2023. Ses médecins y confirment qu'il était investi dans sa prise de soin et demandeur d'aide ; il s'était présenté à tous les entretiens proposés et le travail thérapeutique était centré sur sa problématique anxieuse, addictologique ainsi que sur la gestion de ses émotions. Son état psychique s'était toutefois péjoré dernièrement, avec une symptomatologie anxio-dépressive, un repli sur soi et une hypersomnie, qui pouvait être mise en lien avec la procédure en cours.

- le procès-verbal de son audition par le TP, le 16 avril 2024, lors de laquelle il a expliqué avoir "fait plusieurs centres", mais que cela n'avait "pas vraiment fonctionné" ; que, depuis deux ans, il avait "envie de s'en sortir", mais qu'à chaque fois, il commettait une nouvelle infraction, retournait en prison et, à sa sortie, ne parvenait pas à trouver un centre ; qu'il avait contacté, en décembre 2023, un médecin à la Jonction, avec lequel il avait entamé des démarches afin de mettre en place un suivi à la "Fondation R______" ou une hospitalisation à Q______ dans l'attente de trouver un centre pour y exécuter la mesure.

Il avait commis des infractions alors qu'il fréquentait ce médecin en raison de sa consommation quotidienne de crack. Il commettait des vols afin d'échanger le butin contre de la drogue ou le vendre pour financer sa consommation, qui était importante.

Le suivi et le traitement médicamenteux dont il bénéficiait en détention lui faisaient du bien et le mettaient "sur la bonne voie" ;

- une liste de la cinquantaine d'institutions offrant des prestations stationnaires dans le domaine de la dépendance, reconnues en Suisse par les cantons, répertoriées dans la base de données du CIIS.

d. Le MP a fait savoir qu'il concluait au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement attaqué.

D. Me C______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, au tarif horaire de chef d'étude, trois entretiens d'1h30 chacun avec A______ (19 mars, 5 et 18 avril), 4h20 pour la rédaction d'un recours considéré comme valant déclaration d'appel et 2h30 pour la préparation de l'audience d'appel (laquelle a duré 30 minutes).

EN DROIT :

1. Un jugement du TAPEM prononçant la levée d'une mesure thérapeutique institutionnelle et ordonnant l'exécution du reste de la peine privative de liberté suspendue est, depuis le 1er janvier 2024, sujet à appel auprès de la Chambre de céans (art. 365 al. 3. du Code de procédure pénale [CPP] et 42 al. 2 de la Loi genevoise d'application du code pénal [LaCP]).

Interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP) l'appel est donc recevable.

2. 2.1. À teneur de l'art. 60 al. 1 CP, lorsque l'auteur est toxico-dépendant ou qu'il souffre d'une autre addiction, le juge peut ordonner un traitement institutionnel, à condition que l'auteur ait commis un crime ou un délit en relation avec cette addiction (let. a) et qu'il soit à prévoir que ce traitement le détournera d'autres infractions en relation avec cette addiction (let. b). Le juge tient compte de la demande et de la motivation de l'auteur (al. 2). Le traitement s'effectue dans un établissement spécialisé ou, si besoin, dans un hôpital psychiatrique. Il doit être adapté aux besoins particuliers de l'auteur et à l'évolution de son état (al. 3).

2.2. L'art. 62c al. 1 CP prévoit que la mesure est levée si son exécution ou sa poursuite paraît vouée à l'échec (let. a) ou s'il n'y a pas ou plus d'établissement approprié (let. c).

2.2.1. La première hypothèse est réalisée lorsque, au cours de l'exécution de la mesure thérapeutique, il s'avère qu'il n'y a pas lieu de prévoir une amélioration thérapeutique, respectivement une diminution du danger que l'auteur commette de nouvelles infractions (ATF 141 IV 49 consid. 2.3; 134 IV 315 consid. 3.7; arrêts du Tribunal fédéral 6B_475/2023 du 14 juin 2023 consid. 5.1 et 6B_1438/2020 du 18 novembre 2021 consid. 5.3).

Une mesure thérapeutique institutionnelle suppose en effet, entre autres conditions, qu'il soit à prévoir que la mesure détourne l'auteur de commettre de nouvelles infractions (art. 59 al. 1 let. b CP). Cela signifie qu'elle doit être levée si le traitement médical n'a plus de chances de succès, à savoir lorsque l'auteur n'est pas (ou plus) soignable ou que le traitement n'est plus apte à prévenir la commission de nouvelles infractions (ATF 137 IV 201 consid. 1.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_475/2023 du 14 juin 2023 consid. 5.1). La notion de traitement médical doit être entendue largement. Même la simple prise en charge de l'auteur dans un milieu structuré et surveillé accompagnée d'un suivi psychothérapeutique relativement lointain constitue un traitement, si elle a pour effet prévisible d'améliorer l'état de l'intéressé de manière à permettre, à terme, sa réinsertion dans la société (ATF 137 IV 201 consid. 1.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_129/2023 du 5 mai 2023 consid. 2.1).

L'échec de la mesure peut résulter de l'insuffisance de possibilités thérapeutiques, du manque de respect des avis ou recommandations des thérapeutes ou du refus d'un traitement. Le traitement n'est voué à l'échec que s'il est définitivement inopérant; une simple crise de l'intéressé ne suffit pas. En effet, les personnes dépendantes en particulier, présentent régulièrement un tableau clinique dont font partie les crises et les échecs et les rechutes, lesquelles ne doivent donc pas nécessairement conduire à admettre l'échec d'une mesure. En revanche, le comportement non coopératif ou indiscipliné de l'intéressé peut, notamment, justifier un tel constat. Les particularités de la situation concrète sont déterminantes dans l'appréciation de l'échec ou du succès d'une mesure (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1147/2020 du 26 avril 2021 consid. 3.3.2 et 6B_460/2011 du 16 septembre 2011 consid. 2.6; L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 3 et 5 ad art. 62c).

De manière générale, la levée d'une mesure en raison de son échec ne doit pas être prononcée à la légère, mais de manière restrictive (ATF 143 IV 445 consid. 2.2 ; 141 IV 49 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1247/2022 du 19 janvier 2023 consid. 3.1).

2.2.2. La seconde hypothèse n'est pas uniquement applicable lorsqu'aucune institution adaptée n'existe, mais aussi quand il n'y a pas de place disponible pour l'intéressé dans un établissement adapté (ATF 6B_1293/2016 du 23 octobre 2017 consid. 2.1 et 6B_1001/2015 du 29 décembre 2015 consid. 3.2). L'exécution de la mesure doit en principe être impossible dans toute la Suisse et non pas lorsque telle institution de tel canton refuse d'accueillir l'auteur en raison d'un manque de place. L'autorité d'exécution ne peut donc pas se limiter au canton où elle se trouve ou au concordat auquel ce dernier est partie (ATF 102 IV 166 consid. 3b ; L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), op.cit, n. 9 ad art. 62c).

2.3. Si la durée de la privation de liberté entraînée par la mesure est inférieure à celle de la peine privative de liberté suspendue, le reste de la peine est exécuté (art. 62c al. 2 CP).

Le juge peut toutefois aussi ordonner une nouvelle mesure à la place de l'exécution de la peine, s'il est à prévoir que cette nouvelle mesure détournera l'auteur d'autres crimes ou délits en relation avec son état (art. 62c al. 3 CP).

Une nouvelle expertise sera alors nécessaire (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), op.cit., n. 23 ad art. 62c).

2.4. En l'espèce, la volonté de l'appelant de se soigner et de retrouver une vie "normale" ne saurait être mise en doute. Comme l'a souligné son avocat, il s'est montré proactif et il faut prendre acte des efforts qu'il a déployés, notamment afin de trouver un médecin spécialisé dans les addictions, susceptible de l'aider à mettre en place un suivi dans l'attente de la possibilité d'une entrée dans une institution.

Le seul fait que l'appelant soit désireux de suivre un traitement institutionnel ne suffit cependant pas, à lui seul, pour justifier le maintien de la mesure.

Force est à cet égard de constater que, privé de cadre coercitif, l'appelant s'est révélé incapable de résister à sa dépendance en s'abstenant de consommer des stupéfiants, fût-ce pour une brève période. Après le constat d'échec de ses séjours auprès des fondations "D______" et "F______", la CPR a estimé qu'un maintien de la mesure se justifiait encore, dans un milieu "plus contraignant", et a encouragé, dans son arrêt du 26 juillet 2022, la poursuite des efforts afin de trouver un lieu de traitement adapté. Pour répondre à cette injonction, le SAPEM a, entre septembre 2021 et octobre 2023, effectué des démarches auprès de huit institutions ("E______", "F______", "I______", "K______", "D______", "L______", "N______", "O______"), sans succès.

L'appelant estime que d'autres institutions eussent dû être envisagées. Il ne prétend toutefois pas que l'une ou l'autre de celles figurant sur la liste du CIIS qu'il a fournie, répondrait à ses besoins. La plupart de celles offrant un environnement francophone ont d'ailleurs, soit déjà été approchées par le SAPEM, soit n'offrent pas de cadre suffisamment coercitif, soit encore sont réservées à des personnes souffrant de dépendance à l'alcool, à l'exclusion d'autres substances. Quant aux centres se trouvant dans des cantons germanophones ou au Tessin, à supposer qu'ils répondent aux besoins de l'appelant et offrent le degré d'encadrement que son état exige, l'on ne voit pas comment le suivi psychothérapeutique et psychiatrique dont il a, à l'évidence, besoin, pourrait être assuré dans une langue qu'il ne maîtrise pas. L'appelant ne l'explique du reste pas.

Dans ces conditions, il faut considérer, à l'instar du TAPEM, que, faute d'établissement adapté en Suisse, et disposé à accueillir l'appelant, le maintien de la mesure paraît vain, de sorte que celle-ci doit être levée.

L'on relèvera à cet égard que, dans un arrêt déjà ancien, le Tribunal fédéral avait estimé que l'art. 62 al. 1 let. b CP ne trouverait que rarement application, puisque, selon l'art. 56 al. 5 CP, le juge ordonnant une mesure devrait s'assurer au préalable de l'existence d'une institution susceptible de l'exécuter (cf. arrêt du Tribunal fédéral 6B_815/2015 du 11 avril 2016 consid. 2.1.2). Tel avait été le cas en l'espèce, la mesure ayant été prononcée alors qu'un placement auprès de la fondation "E______" – contactée par l'appelant – ou des centres "D______", "F______" ou "G______" – suggérés par les experts – pouvait être envisagé. Les circonstances sur lesquelles s'est fondé le TCO ont toutefois évolué : l'appelant, qui, à l'époque venait de passer près de quatre ans en détention et était connu pour une addiction de longue date, essentiellement au cannabis et à l'alcool, a depuis lors développé une dépendance importante au crack. Les institutions évoquées, quant à elles, soit n'offrent plus d'encadrement adapté (cf. "G______", qui a été transformée en centre ambulatoire en septembre 2019), soit, après les échecs essuyés en raison du comportement de l'appelant, refusent désormais expressément de le prendre en charge.

Un placement dans un établissement spécialisé dans la prise en charge de personnes toxicodépendantes, avec un cadre soutenant et un suivi encadrant, étant la seule mesure adaptée proposée par les experts en 2020, il n'y a pas lieu d'examiner si une nouvelle mesure, au demeurant non sollicitée, pourrait être envisagée.

L'exécution du solde des peines que l'appelant doit encore subir sera dès lors ordonnée.

A toute bonne fin, l'attention du SAPEM est attirée sur le fait qu'il lui incombe de veiller scrupuleusement, dans le cadre du plan d'exécution de la peine, à ce que l'appelant bénéficie, grâce au contexte contraignant de la détention, des soins qu'il n'a pas été possible de lui prodiguer sous l'égide de la mesure.

3. 3.1. Reste à déterminer le solde des peines à exécuter.

Selon le jugement du TAPEM, ce solde était de 1'649 jours, auxquels s'ajoutent désormais les 120 jours infligés par jugement du TP du 16 avril 2024 (240 jours ./. 120 jours de détention avant jugement) dont à déduire la détention subie depuis cette date.

3.2.1. Alors que l'art. 62a al. 2 CP envisage l'hypothèse d'un concours entre la peine privative de liberté suspendue au profit d'une mesure et une nouvelle peine de même genre, sanctionnant une infraction commise durant la libération conditionnelle, et prescrit le prononcé d'une peine d'ensemble selon l'art. 49 CP, la loi, de même que la doctrine principale, sont muettes sur cette question pour le cas de l'échec de la mesure avant la libération conditionnelle, au sens de l'art. 62c al. 1 CP. Or, on ne voit pas ce qui justifierait que les deux situations fussent traitées différemment. L'objectif d'éviter l'addition, au fil des années, de plusieurs peines privatives de liberté suspendues dont l’exécution cumulée, après un certain temps peut s’avérer problématique dans la perspective de la prévention spéciale (Message du Conseil fédéral concernant la modification du code pénal suisse du 21 septembre 1998, FF 1999 1787, 1891) devrait également prévaloir dans une hypothèse telle la présente. Il sera donc retenu qu'il y a une lacune de la loi, qu'il convient de combler, en prononçant une peine d'ensemble, conformément au principe d'aggravation.

3.2.2. Il sera estimé que, s'il avait eu à connaître de l'ensemble des infractions commises par l'appelant postérieurement à son jugement, tout en tenant compte de la particularité de la situation, les infractions commises étant liées à sa toxicomanie, et de la réintégration prononcée par le TAPEM le 2 décembre 2019 dans le solde de quatre mois et quatre jours de peines remontant à 2011, 2015 et 2017, le TCO aurait prononcé :

- la peine de base de quatre ans qu'il a fixée, et qui sanctionne les faits les plus graves ;

- une peine de cinq mois pour les faits ayant conduit à la condamnation du 6 décembre 2021 (peine de base : neuf mois par le jeu du concours réel) ;

- une peine de trois mois, pour ceux objet de la condamnation du 2 mai 2022 (peine de base : six mois par le jeu du concours réel et rétrospectif) ;

- une peine de six mois au lieu des 12 mois infligés le 12 septembre 2023 (peine de base ; concours réel) ;

- une peine de deux mois pour les faits ayant conduit à la condamnation du 2 novembre 2023 au lieu de la peine de base (complémentaire et partiellement complémentaire) de 180 jours ;

- une peine de deux mois pour les infractions jugées le 16 avril 2024 (au lieu de la peine de base de 240 jours arrêtée par le TP).

Aussi, le solde de la peine doit être fixé à cinq ans, dix mois et quatre jours, dont à déduire 807 jours au jour du prononcé du jugement dont est appel (selon le calcul du SAPEM auquel s'est référée la juridiction de première instance, qui est correct et n'a du reste pas suscité de discussion de la part de l'appelant) + 120 jours de détention préventive subis à la date du jugement du TP du 16 avril 2024 + 30 jours courus depuis lors, soit 957 jours. Après déduction, le total des peines privatives de liberté encore à purger est ainsi de 1'172 jours à la date du prononcé du présent arrêt.

3. L'appelant succombe sur le principe. Toutefois, son appel aura permis à la CPAR d'exercer, d'office, son plein pouvoir de cognition en réduisant sensiblement le solde de peines cumulées à exécuter. Celui-là ne supportera par conséquent que la moitié des frais de la procédure de seconde instance, y compris un émolument de jugement de CHF 1'000.- (art. 428 CPP).

4. 4.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'étude, débours de l'étude inclus (let. c). En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

4.2. Dans le cas des prévenus en détention provisoire, une visite par mois jusqu'au prononcé du jugement ou de l'arrêt cantonal est admise, indépendamment des besoins de la procédure, pour tenir compte de la situation particulière de la personne détenue (AARP/235/2015 du 18 mai 2015 ; AARP/480/2014 du 29 octobre 2014). Ce régime ne s'applique toutefois pas au détenu condamné, pour lequel seules doivent être retenues la/les visite(s) effectivement nécessaire(s) à la procédure, telle la préparation de la demande de révision ou d'audiences (AARP/168/2016 du 26 avril 2016 consid. 4.2 et AARP/526/2015 du 7 décembre 2015 consid 4.3.1 [demande de libération conditionnelle] ; AARP/571/2014 du 29 décembre 2014 consid. 4.1.3 confirmé par la décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.8 du 21 juillet 2015 consid. 7.2 [demande de révision]).

Le temps considéré admissible pour les visites dans les établissements du canton est d'une heure et 30 minutes quel que soit le statut de l'avocat concerné, ce qui comprend le temps de déplacement (AARP/181/2017 du 30 mai 2017 consid. 8.2.2.2 et 8.3.5 ; cf. également Ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.369 du 12 juillet 2017 consid. 4.2.4).

4.2. En l'occurrence, l'état de frais de l'avocat d'office de l'appelant fait état de trois visites à B______ en moins d'un mois, ce qui est excessif. Seules seront dès lors retenues celle faisant suite au jugement du TAPEM et celle précédant l'audience d'appel.

Lors même que le jugement entrepris mentionnait clairement et correctement la voie de l'appel, conformément à la récente modification du CPP et de la LaCP, le défenseur d'office a commencé par saisir la CPR d'un recours motivé, qui a été transmis à la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) et que celle-ci a traité comme une déclaration d'appel. Une telle déclaration n'aurait pas eu à être motivée (cf. ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2014.51 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 ; décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.165 du 24 janvier 2014 consid. 4.1.3 et BB.2013.127 du 4 décembre 2013 consid. 4.2) et fait double emploi avec le temps consacré à la préparation de la plaidoirie, celle-ci se limitant à en reprendre le contenu, sous la seule exception de la référence au jugement récent du TP, que la CPAR avait à l'esprit, pour en avoir, d'office, déjà ordonné l'apport. De surcroît, les quatre heures et 20 minutes consacrées à la rédaction du mémoire de recours sont excessives, étant relevé que le défenseur d'office avait déposé une écriture du 31 janvier 2024 devant le TAPEM, dont ledit recours est très largement inspiré. Pour tous ces motifs, il sera fait masse du travail de rédaction du mémoire et de celui de préparation des débats d'appel, à hauteur de deux heures et 30 minutes.

La rémunération sera dès lors arrêtée à CHF 1'686.35, pour six heures d'activité, audience d'appel comprise, au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 1'200.-), plus une vacation (CHF 100.-), la majoration forfaitaire de 20% (CHF 260.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 8.1% (CHF 126.35).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTPM/148/2024 rendu le 6 mars 2024 par le Tribunal d'application des peines et des mesures dans la procédure PM/1099/2023.

Le rejette.

Annule néanmoins le jugement dont est appel et, statuant à nouveau :

Ordonne la levée du traitement institutionnel des addictions au sens de l'art. 60 CP prononcé par le Tribunal correctionnel le 3 novembre 2020 à l'encontre de A______.

Ordonne la réintégration pour le solde des peines privatives de liberté que A______ doit encore subir, soit les peines prononcées par le Tribunal correctionnel le 3 novembre 2020, par le Tribunal de police le 6 décembre 2021, le 2 mai 2022, le 12 septembre 2023 et le 16 avril 2024, par le Ministère public le 2 novembre 2023, ainsi que celle dont la réintégration a déjà été ordonnée par Tribunal d'application des peines et des mesures le 2 décembre 2019.

Fixe le solde de ces peines à 1'172 jours (peine d'ensemble) à la date du prononcé du présent arrêt.

Laisse les frais de la procédure de première instance à la charge de l'État.

Condamne A______ à la moitié des frais de la procédure d'appel, en CHF 1'215.-, qui comprennent un émolument de CHF 1'000.-.

Arrêt à CHF 1'686.35 TTC la rémunération pour la procédure d'appel de Me C______, défenseur d'office de l'appelant.


 

Notifie le présent arrêt à l'appelant, soit pour lui son conseil, et au Ministère public.

Le communique, pour information, au Tribunal d'application des peines et des mesures, au Service de l'application des peines et mesures et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Aurélie MELIN ABDOU

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale.


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

 

 

 

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

120.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

20.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'215.00