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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/3586/2024

DCSO/264/2025 du 22.05.2025 ( PLAINT ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3586/2024-CS DCSO/264/25

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 22 MAI 2025

 

Plainte 17 LP (A/3586/2024-CS) formée en date du 29 octobre 2024 par A______.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par pli recommandé du greffier du ______ à :

- A______

______

______ [GE].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. A______ fait l'objet de poursuites parvenues au stade de la saisie, réunies dans la série n° 81 1______.

b. Dans le cadre des opérations de saisie, l'Office cantonal des poursuites (ci-après l'Office) a convoqué le débiteur le 20 juin 2024 pour son audition. A l'issue de celle-ci, des pièces complémentaires lui ont été demandées.

L'examen de ces pièces par l'Office, ainsi que les recherches effectuées par ce dernier, ont permis de constater que le débiteur, qui a atteint l'âge de la retraite, touche mensuellement une rente AVS de 1'505 fr., une rente de prévoyance française de 276 fr. 20 (équivalent de 3'127 euros annuels répartis sur 12 mois), des prestations complémentaires de 676 fr., une aide de la Ville de Genève de 200 fr. et un revenu tiré d'une activité indépendante de 968 fr. 50, soit un total de 3'625 fr. 70.

L'Office a par ailleurs retenu des charges incompressibles composées du montant de base mensuel d'entretien de 1'200 fr., de frais médicaux non pris en charge de 50 fr. et d'un loyer de 1'442 fr., soit un total de 2'629 fr. Les primes d'assurance-maladie du débiteur sont prises en charge par le Service des prestations complémentaires (ci-après SPC). Ses frais de transports, ses frais de repas à l'extérieur, ainsi que le tiers du loyer de 2'100 fr. n'étaient pas retenus car déjà déduits à titre de charge dans la comptabilité de son activité indépendante.

c. Fondé sur ces constats, l'Office a adressé le 11 octobre 2024 à A______ un avis concernant la saisie de ses gains d'indépendant, l'invitant à lui verser mensuellement la quotité saisissable de ses revenus, fixée à 930 fr.

Cet avis a été reçu le 21 octobre 2024 par le débiteur.

B. a. Par acte déposé le 29 octobre 2024 auprès de la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et faillites (ci-après la Chambre de surveillance). A______ s'est plaint du fait que la saisie ordonnée ne lui permettait pas de vivre et qu'elle était sensiblement plus élevée que celle exécutée jusqu'ici, dans le cadre de saisies antérieures, qui ne s'élevait qu'à 180 fr. par mois.

b. Dans ses observations du 15 novembre 2024, l'Office a conclu au rejet de la plainte et expliqué avoir constaté l'existence d'un revenu d'indépendant dans les pièces réunies suite à l'audition du 24 juin 2024, dont il n'avait pas tenu compte auparavant.

c. La Chambre de surveillance a avisé les parties le 26 novembre 2024 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de l'article 17 al. 1 LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre les mesures de l'Office ne pouvant être contestées par la voie judiciaire.

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

L'intégralité des moyens et conclusions du plaignant doit être à tout le moins sommairement exposée et motivée dans le délai de plainte, sous peine d'irrecevabilité. La motivation peut être sommaire mais doit permettre à l'autorité de surveillance de comprendre les griefs soulevés par la partie plaignante ainsi que ce qu'elle demande (ATF 142 III 234 consid. 2.2; 126 III 30 consid. 1b; 114 III 5 consid. 3, JdT 1990 II 80; arrêt du Tribunal fédéral 5A_237/2012 du 10 septembre 2012 consid. 2.2; Erard, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 32, 33 et 44 ad art. 17 LP).

Le délai de plainte en matière de saisie ne commence à courir qu’à partir de la notification du procès-verbal de saisie (ATF 133 III 580 consid. 2.2; 124 III 211; 107 III 7; arrêt du Tribunal fédéral 5A_934/2017 consid. 3.2). Lorsque le procès-verbal de saisie n’a pas encore été notifié, le délai de recours ne peut pas commencer à courir et un recours néanmoins formé est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 7B.23/2005 consid. 1.3; Jent-Sørensen, Basler Kommentar, SchKG, 2021, n° 19 ad art. 112 LP).

L'autorité de surveillance doit en tout état constater, indépendamment de toute plainte et en tout temps (ATF 136 III 572 consid. 4), la nullité d'une saisie violant de façon manifeste le minimum vital du débiteur (art. 22 al. 1 LP; ATF 114 III 78; arrêt du Tribunal fédéral 5A_680/2015 du 6 novembre 2015 consid. 3).

1.2 En l'espèce, la plainte vise un avis de saisie qui n'avait pas encore fait l'objet d'un procès-verbal de saisie au moment de son dépôt, de sorte qu'elle est prématurée et en principe irrecevable. Elle n'est en outre pas motivée, le plaignant se limitant à soutenir qu'il ne peut plus vivre avec ce que lui laisse l'Office, ce qui est insuffisant au vu des explications circonstanciées fournies par l'Office, de sorte qu'elle devrait également être déclarée irrecevable pour ce motif. C'est sous la réserve que la saisie exécutée ne porte pas atteinte au minimum vital du débiteur, ce que la Chambre de céans doit constater en tout temps et en l'absence de plainte ou de grief motivé. Il convient par conséquent d'examiner si le calcul de la quotité saisissable des revenus du débiteur calculée par l'Office est conforme aux principes applicables en la matière et ne porte pas atteinte au minimum vital du débiteur.

2. 2.1.1 Selon l'art. 93 al. 1 LP, les revenus relativement saisissables tels que les revenus du travail ne peuvent être saisis que déduction faite de ce que le préposé estime indispensable au débiteur et à sa famille (minimum vital).

Pour fixer le montant saisissable – en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (ATF 115 III 103 consid. 1c; ATF 112 III 79 consid. 2) – l'Office doit d'abord tenir compte de toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille, en s'appuyant pour cela sur les directives de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse (ci-après conférence des préposés; BlSchK 2009, p. 196 ss), respectivement, à Genève, sur les Normes d'insaisissabilité édictées chaque année par l'autorité de surveillance (ci-après : NI; publiées au recueil systématique des lois genevoises : RS/GE E.3.60.04; Ochsner, Le minimum vital (art. 93 al. 1 LP), in SJ 2012 II p. 119 ss, 123; Collaud, Le minimum vital selon l'article 93 LP, in RFJ 2012 p. 299 ss, 303; arrêt du Tribunal fédéral 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1).

2.1.2 Les revenus pris en considération sont les revenus réels du débiteur. L'Office ne peut en effet fixer le montant saisissable en se fondant sur un revenu hypothétique (ATF 115 III 103 consid. 1.c = JdT 1991 II 108; arrêt du Tribunal fédéral 5A_490/2012 du 23 novembre 2012 consid. 3; Kren Kostkiewicz, in KUKO SchKG, n° 17 ad art. 93 LP).

Si des revenus du débiteur sont insaisissables au sens des articles 92 et 93 LP, ils sont néanmoins ajoutés aux revenus saisissables afin de calculer la quotité saisissable (ATF 135 III 20 consid. 5.1).

En l'occurrence, les rentes AVS et les subsides alloués par une commune sont insaisissables, même s'ils excèdent le minimum vital du débiteur (art. 92 al. 1 ch. 8 LP; Vonder Mühl, Basler Kommentar, SchKG I, n° 30 ad art. 92 LP).

2.1.3 Les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur se composent en premier lieu d'une base mensuelle d'entretien, fixée selon la situation familiale du débiteur, qui doit lui permettre de couvrir ses dépenses élémentaires, parmi lesquelles l'alimentation, les vêtements et le linge, les soins corporels, l'entretien du logement, les frais culturels, la téléphonie et la connectivité, l'éclairage, l'électricité, le gaz, les assurances privées, etc. (art. I NI; OCHSNER, Le minimum vital, op. cit., p. 128). La base mensuelle d'entretien est fixée sous forme de forfaits attribués au débiteur et aux membres de sa famille en fonction de la composition du groupe familial. Pour un débiteur vivant seul il s'élève à 1'200 fr., pour un débiteur monoparental à 1'350 fr., pour un couple marié, deux personnes vivant en partenariat enregistré ou un couple avec enfants à 1'700 fr., pour les enfants, par enfant, à 400 fr. jusqu'à l'âge de 10 ans et 600 fr. après 10 ans (art. 1 NI), sous déduction des allocations familiales (Ochsner, op. cit., p. 132).

D'autres charges indispensables, comme les frais de logement (art. II.1 et II.3 NI), les primes d'assurance-maladie obligatoire (art. II.3 NI), les contributions d'entretien dues en vertu de la loi (art. II.5 NI) ou les frais de formation des enfants (art. II.6 NI), doivent être ajoutées à cette base mensuelle d'entretien, pour autant qu'elles soient effectivement payées (ATF 121 III 20 consid. 3b, JdT 1997 II p. 163; ATF 120 III 16 consid. 2c, JdT 1996 II p. 179; ATF 112 III 19, JdT 1988 II p. 118; OCHSNER, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 82 ad art. 93 LP). Les impôts ne sont pas pris en compte dans le calcul du minimum vital (art. III NI et jurisprudence citée).

Selon les Normes d'insaisissabilité, les frais de déplacement entre le domicile et le lieu de travail font en principe partie du minimum vital, s'ils sont indispensables à l'exercice d'une profession (ch. II.4 let. d). Lorsqu'un véhicule privé n'est pas indispensable à l'exercice de sa profession par le débiteur, les frais y afférents ne peuvent être pris en compte que de manière exceptionnelle, par exemple lorsque le débiteur souffre d'un handicap, a besoin d'une voiture pour pouvoir exercer son droit de visite ou conduire ses enfants à l'école ou encore habite dans un endroit très reculé, et que ce besoin ne peut être satisfait d'une manière moins onéreuse (DSCO/622/2017 du 30 novembre 2017 consid. 4.1.3 et les références citées).

Les frais médicaux ou de médicaments au sens large (médicaments, dentiste, etc.) que doit supporter le poursuivi pendant la saisie font partie du minimum vital pour autant qu'ils soient effectifs, nécessaires et ne soient pas payés par une assurance (ATF 129 III 242 consid. 4.1, JdT 2003 II 104, SJ 2003 I 375; ATF 85 III 67, JdT 1959 II 84; Ochsner, Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 144 et ss ad art. 93 LP).

Les frais indispensables à l'exercice d'une profession sont les besoins alimentaires accrus, les dépenses pour repas pris à l'extérieur, les dépenses supérieures à la moyenne pour l'entretien de vêtement et les frais de déplacements du domicile au lieu de travail (art. II.4 NI-2020).

2.1.4 Dans le cadre tracé par les dispositions légales et les nombreux principes dégagés par la jurisprudence, l'Office dispose, dans la détermination du minimum vital du débiteur, d'un pouvoir d'appréciation étendu (art. 93 al. 1 LP; ATF 134 III 323 consid. 2; Ochsner, in Commentaire Romand, Poursuite et faillite, 2005, n° 79 ad art. 93 LP), qui lui permet de prendre en considération aussi bien les intérêts des créanciers que ceux du débiteur (ATF 119 III 70 consid. 3b; Kren Kostkiewicz, in KUKO SchKG, 2ème édition, 2014, n° 17 ad art. 93 LP). La garantie du minimum vital prévue par l'art. 93 LP ne vise pas à permettre au débiteur de préserver un train de vie correspondant aux standards communément admis, mais à empêcher que l'exécution forcée ne porte atteinte à ses intérêts fondamentaux, le menace dans sa vie ou sa santé ou lui interdise tout contact avec l'extérieur (ATF 134 III 323 consid. 2; décision de la Chambre de surveillance DCSO/308/18 du 24 mai 2018 consid. 3).

2.2 En l'espèce, l'Office a respecté ces principes dans l'établissement de la quotité saisissable des revenus du plaignant et ce dernier ne développe aucun grief précis permettant de remettre en cause les éléments retenus. Il n'a notamment pas contesté l'existence du revenu d'indépendant introduit par l'Office dans ses ressources, ni le fait que certaines charges appartenant au minimum vital ont été considérées comme déjà déduites dans la détermination du bénéfice net de l'activité indépendante – ce qui apparaît correct. L'Office n'a pas non plus porté atteinte aux revenus insaisissables du débiteur, constitués de sa rente AVS et du subside communal, puisque le montant de la quotité saisissable fixé est intégralement couvert par les revenus d'indépendant, saisissables quant à eux.

Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas d'atteinte au minimum vital du débiteur, de sorte que la plainte aurait été rejetée, si elle ne devait être déclarée irrecevable pour les motifs exposés au considérant précédent.

3. La procédure devant l'autorité de surveillance est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP; art. 61 al. 2 let. a OELP) et ne donne pas lieu à l'allocation de dépens (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

Déclare irrecevable la plainte formée le 29 octobre 2024 par A______ contre l'avis de saisie de ses revenus d'indépendant émis le 11 octobre 2024 par l'Office cantonal des poursuites dans le cadre de la saisie, série n° 81 1______.

Siégeant :

Monsieur Jean REYMOND, président; Madame Alisa RAMELET-TELQIU et Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Elise CAIRUS, greffière.

 

Le président :

Jean REYMOND

 

La greffière :

Elise CAIRUS

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l’art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L’art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.