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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4009/2023

JTAPI/487/2024 du 23.05.2024 ( DOMPU ) , REJETE

Descripteurs : ORDURE MÉNAGÈRE;ENTREPOSAGE DES DÉCHETS;AMENDE
Normes : LGD.43.al1; LGD.43.al2; LC 21 911.24.al4; LC 21 911.24.al5
Relations : Sac rempli de matériel électronique déposé devant l’Ecopoint correspondant. Amende de CHF 200.- confirmée.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4009/2023 DOMPU

JTAPI/487/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 23 mai 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

VILLE DE GENÈVE - SERVICE DE L'ESPACE PUBLIC

 


EN FAIT

1.             Par décision du 2 novembre 2023, la Ville de Genève (ci-après : la ville), soit pour elle son service de la voirie, a infligé à Monsieur A______ une amende administrative de CHF 200.- en raison du constat, le mardi 17 octobre 2023 à 15h06, d'un dépôt illicite de déchets à côté de l’éco-point situé à la rue des Gazomètres, 1205 Genève, contrevenant aux dispositions légales sur la gestion des déchets.

2.             Par acte du 28 novembre 2023, M. A______, a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, principalement, à l’annulation de l’amende, s’agissant d'un incident d'un caractère involontaire et exceptionnel.

Ce n'était pas un dépôt illicite mais en réalité un malheureux oubli. En effet, dans la soirée du 16 octobre, vers 22h30 au moins, il avait eu deux poubelles à jeter. Dans le processus de dépôt de la première dans la benne à ordures située en bas de chez lui, il avait dû poser la seconde à terre afin d'ouvrir ladite benne. Cependant, pressé par son départ imminent pour un entraînement nocturne en salle de sport, il avait malencontreusement oublié de ramasser la deuxième poubelle. Il soulignait que cette poubelle était correctement conditionnée et prête à être jetée dans les règles. Elle ne constituait en aucun cas un dépôt encombrant ou non conforme, il n'y aurait eu aucun intérêt pour lui de la laisser dehors volontairement puisqu'elle rentrait dans la benne à ordures sans soucis. De plus, suite à l'intervention des agents municipaux qui avaient eu l'amabilité de le prévenir de cet oubli, il s'était immédiatement rendu sur place pour rectifier la situation et jeter son sac poubelle oublié à côté de la benne.

3.             Dans ses observations du 10 juillet 2023, la ville a conclu au rejet du recours.

L'amende était fondée sur un constat d'infraction aux termes duquel un sac poubelle de 35 litres de déchets avait été déposé, à même le sol, à côté des réceptacles de récupération, sur le centre de tri de la rue des Gazomètres.

Les bases légales et réglementaires invoquées figuraient sur ladite amende, étant rappelé que les conditions d'utilisation étaient affichées sur les écopoints et que le dépôt de déchets en dehors des horaires définis et hors des réceptacles était strictement interdit. L'examen du contenu de ce sac venait infirmer l'affirmation du recourant, selon laquelle le sac était correctement conditionné et prêt à être jeté dans les règles, de sorte qu'il n'y aurait eu aucun intérêt pour lui de le laisser dehors volontairement puisqu'il rentrait dans la benne à ordures sans soucis. En effet, il apparaissait que ce sac contenait du matériel électronique — vraisemblablement un routeur internet — que le recourant, lors de son interaction avec les contrôleurs du domaine public, avait reconnu avoir déposé hors des réceptacles du centre de tri, ne sachant pas qu'il devait le rapporter dans une boutique vendant ce genre de matériel, ce que les contrôleurs lui avaient alors expliqué. Le sac poubelle en cause contenait donc bien des déchets non conformes, qu'il avait déposés volontairement hors des réceptacles du centre de tri, ne sachant pas comment s'en débarrasser, aucun desdits réceptacles n'étant prévu pour recycler du matériel électronique.

Par ailleurs, l'action ultérieure du recourant, à savoir la reprise du sac de déchets en cause, accomplie, de surcroît, à la demande des contrôleurs du domaine public n'enlevait rien à la volonté manifeste de l'intéressé d'abandonner ce déchet sur le centre de tri.

Il convenait donc de confirmer la sanction de cette action de dépose illicite de déchets.

En tout état, l'infraction avait été dûment constatée et n'était, au demeurant, pas contestée. L'amende querellée est ainsi fondée tant en fait qu'en droit, son montant représentant le minimum légal prévu.

Elle a joint le constat et les photographies de l'infraction. Il ressort en particulier dudit constat que M. A______ avait reconnu les faits.

4.             Dans sa réplique du 26 février 2024, le recourant a persisté dans l'intégralité de ses conclusions.

Il maintenait qu'il s'agissait d'un oubli de sa part. De plus, il ajoutait que malgré ce qui avait été compris, il n'avait jamais eu l'intention de jeter dans l'écopoint le matériel électronique, soit une Salt Fiber Box. Il était censé vider le sac, rempli par sa famille, afin d'en effectuer le tri adéquat. Le sac n'était d'ailleurs pas fermé. Il aurait à ce moment constaté la présence de cette Salt Fiber Box et serait alors reparti avec, sachant qu'elle devait être rapporté à l'entreprise sous peine d'être facturée CHF 300.-.

Il n'avait eu aucun bénéfice à laisser ce sac à l'extérieur, car il ne s'agissait ni d'un objet encombrant, ni d'un sac excessivement volumineux pour ne pas rentrer dans les conteneurs à déchets situés à une courte distance. Il n'aurait pas été logique de jeter son routeur Salt volontairement, sachant que cela entraînerait des frais supplémentaires de CHF 300.-.

5.             Par duplique du 21 mars 2024, la ville a persisté intégralement dans ses conclusions.

 

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par la ville / le département en application de la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 50 LGD).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La LGD a pour but de régler la gestion de l'ensemble des déchets résultant d’activités déployées sur le territoire du canton ou éliminés à Genève, à l'exclusion des déchets radioactifs ; elle constitue la loi d'application des dispositions prévues en matière de déchets par la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et de ses ordonnances d'applications (cf. art. 1 LGD).

Il est interdit d’éliminer ou de déposer des déchets hors des installations publiques ou privées autorisées par le département ou des emplacements aménagés à cet effet et désignés par voie de règlement (art. 10 al. 1 LGD).

Les communes définissent l’infrastructure de collecte et fixent la fréquence des levées en fonction des besoins (art. 12 al. 2 LGD). Elles peuvent édicter des règlements particuliers (art. 16 al. 4 LGD).

À teneur de l’art. 5 al. 1 du règlement d'application de la loi sur la gestion des déchets du 28 juillet 1999 (RGD - L 1 20.01), les communes sont tenues d’informer la population sur les emplacements et les horaires des collectes sélectives et sur les modes d’élimination des déchets ménagers en vigueur sur leur territoire. À cet effet, elles sont habilitées à édicter des règlements ou directives communaux (art. 5 al. 2 RGD).

Selon l'art. 17 RGD, les communes peuvent édicter des règlements communaux sur le bon fonctionnement de leurs infrastructures de collecte et sur leur gestion des déchets ménagers (al. 1), ces règlements pouvant prévoir les sanctions et les mesures prévues dans la loi (al. 2).

4.             La Ville de Genève a édicté un règlement relatif à la gestion des déchets, qui fixe les modalités de la collecte, du transport et de l’élimination des déchets sur son territoire (art. 1 al. 1 du règlement communal sur la gestion des déchets du 1er février 2024 - LC 21 911).

Selon son art. 24, le service en charge de la collecte des déchets met des écopoints à disposition des ménages et des entreprises. Il s’agit d’installations de tri des déchets équipées de réceptacles destinés à la collecte des déchets recyclables, cas échéant des ordures ménagères et assimilées (al. 1).

Les conditions d’utilisation sont affichées sur les écopoints. Ceux-ci sont utilisables du lundi au samedi de 7h30 à 21h00, et les dimanches et jours fériés de 10h00 à 18h00 (al. 3).

Le dépôt de déchets hors des réceptacles est strictement interdit (al. 4).

Le dépôt de déchets tels que les déchets encombrants, les déchets spéciaux (à l’exception des piles), les déchets de métaux et ferraille, est strictement prohibé (al. 5).

Selon l'art. 32 de ce règlement, il est interdit d'éliminer ou de déposer des déchets sur le territoire de la Ville de Genève hors des emplacements et des installations aménagées à cet effet et en dehors des horaires définis par le service en charge de la collecte des déchets (al. 1).

Enfin, selon l'art. 33 de ce règlement, en application de l'art. 43 LGD, est passible d'une amende administrative de CHF 200.- à CHF 400'000.- tout contrevenant à la LGD et à son règlement d'application, ainsi qu'au règlement LC 21 911, ou encore aux ordres donnés par l'autorité compétente dans la limite de la LGD et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (al. 1). Il est tenu compte, dans la fixation de l'amende, du degré de gravité de l'infraction et/ou des antécédents du contrevenant (al. 2).

5.              À teneur de l'art. 43 al. 1 LGD, est passible d’une amende administrative de CHF 200.- à 400'000.- tout contrevenant a) à la LGD b) aux règlements et arrêtés édictés en vertu de la LGD c) aux ordres donnés par l’autorité compétente dans les limites de la LGD et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci.

Les amendes peuvent être infligées tant à des personnes morales qu'à des personnes physiques (art. 43 al. 2 LGD). Il est tenu compte, dans la fixation de l'amende, du degré de gravité de l'infraction et/ou des antécédents du contrevenant (art. 31 al. 2 du règlement LC 21 911).

Les amendes sont infligées par le service compétent de la ville, sans préjudice de plus fortes peines en cas de crimes, délits ou contraventions prévus par la LPE et de tous dommages-intérêts éventuels (art. 31 al. 3 du règlement LC 21 911 ; cf. aussi art. 44 al. 2 LGD). Les contraventions sont constatées par les agents de la force publique et tous autres agents ayant mandat de veiller à l’observation de la loi (art. 44 al. 1 LGD).

6.              Les amendes administratives prévues sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/968/2020 du 29 septembre 2020 ; ATA/440/2020 du 16 avril 2019).

En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/968/2020 précité ; ATA/440/2019 précité).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d'une simple négligence (ATA/1100/2020 du 3 novembre 2020 consid. 6b; ATA/440/2019 précité et les références citées).

7.              Selon la jurisprudence constante, l'administration doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende (ATA/403/2019 du 9 avril 2019 consid. 7c ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6d). Le juge ne la censure qu'en cas d'excès (ATA/403/2019 précité ; ATA/1277/2018 précité). Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité garanti par l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101) (ATA/968/2020 précité ; ATA/440/2019 précité).

8.             En l'espèce, le recourant a déposé à même le sol, soit en dehors des réceptacles prévus à cet effet, et donc en infraction à l'art. 24 al. 4 du règlement LC 21 911 (dont la teneur a été rappelée plus haut), un sac poubelle de 35 litres contenant notamment du matériel électronique, soit des déchets spéciaux, ce qui constitue en outre une infraction à l'art. 24 al. 5 du règlement LC 21 911. Il ressort du constat d’infraction que le recourant a reconnu les faits. Il est donc manifeste qu'une infraction à la LGD a été commise, ce qui justifie, en soi, le prononcé d'une amende administrative à l'encontre de son auteur.

9.             En outre, le tribunal relèvera que le recourant a utilisé l'éco-point à « 22h30 au moins », soit en dehors des horaires d'utilisation, ce qui constitue également une infraction à l'art. 24 al. 3 du règlement LC 21 911.

Le recourant nie cependant le caractère volontaire de l'acte, invoquant un simple oubli lié au fait qu'il était alors pressé. Ces explications ne sont pas déterminantes dans la mesure où cela équivaudrait à de la négligence, qui, selon la jurisprudence précitée, est suffisante pour fonder l'amende. Dans cette mesure, les explications données par le recourant au sujet du contenu du sac poubelle, pour autant qu'elles soient compréhensibles, ne sont de toute manière pas pertinentes.

Le montant de l'amende de CHF 200.- apparaît enfin proportionné par rapport à l'infraction commise et à la faute du recourant, dès lors qu'il se situe au plus bas de la fourchette fixée par la loi. Pour le surplus, le recourant n’a pas démontré qu’elle aurait des difficultés pécuniaires particulières l'empêchant de s'acquitter d'un tel montant. Il pourrait, cas échéant, demander un arrangement de paiement à la ville.

10.         Au vu de ce qui précède, l’amende sera confirmée, tant dans son principe que sa quotité et le recours sera rejeté.

11.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 200.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de CHF 100.- versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 28 novembre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de la Ville de Genève du 2 novembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant, un émolument de CHF 200.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Olivier BINDSCHEDLER TORNARE, président, Saskia RICHARDET VOLPI et Patrick BLASER, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

La greffière