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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3212/2020

JTAPI/626/2021 du 21.06.2021 ( ICCIFD ) , REJETE

Descripteurs : VALEUR FISCALE;REVENU DE LA FORTUNE IMMOBILIÈRE(DROIT FISCAL);VALEUR LOCATIVE;USUFRUIT;LEGS
Normes : LIFD.21.al1.letb; LIPP.24.al1.letb; LIPP.46; LIPP.48
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3212/2020 ICCIFD

JTAPI/626/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 21 juin 2021

 

dans la cause

 

A______, représentée par AUBINEAU AVOCATS ASSOCIÉS, avec élection de domicile

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

 

EN FAIT

1.             Feu B______, ressortissant suisse, est décédé le ______ 2013 à Monaco, lieu de son dernier domicile. C’est là que sa partenaire, C______, avec qui il n’était pas marié, a également son domicile.

2.             A______ (ci-après : la contribuable ou la recourante) et D______ sont les deux enfants du défunt. Ils sont domiciliés à Genève.

3.             La succession du défunt comprend notamment les parcelles nos 1______ et 2______ de la commune de I______, la première abritant notamment un immeuble d’habitation (ci-après : l'immeuble), la seconde étant libre de toute construction.

4.             A teneur des bordereaux du 25 février 2019 que l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a notifié à la contribuable pour les impôts fédéral direct (IFD), cantonal et communal (ICC) 2013, la valeur fiscale de la moitié de la parcelle n° 1______ s’élevait à CHF 25'206’000.- et la valeur locative de l’immeuble à CHF 38'703.- (IFD) et à CHF 29'414.- (ICC).

5.             Le 11 mars 2019, la contribuable a formé réclamation contre ces bordereaux, faisant valoir qu’elle n’avait pas eu la jouissance de l’immeuble en 2013, dans la mesure où la compagne du de cujus, C______, « disposait d’un droit d’habitation de fait et a(vait) occupé » ce bien.

6.             A teneur de l’arrêt que le Tribunal fédéral a rendu le 4 juin 2019 (cause 5A_973/2017) dans un litige civil opposant C______ aux deux héritiers, feu B______ avait rédigé deux testaments. Dans le deuxième, il avait disposé que ses deux enfants devaient hériter de l’immeuble, chacun à raison de la moitié, et il les avait astreints à le vendre, s’ils le souhaitaient, « dans un délai et des conditions qui ser(aient) déterminées par (sa) compagne, C______ qui pourr(ait) (y) résider le temps qui lui plair(ait) ». Il avait par ailleurs institué cette dernière en tant qu’exécutrice testamentaire. Il y est par ailleurs fait état du fait qu’en 2015, C______ avait déposé auprès de l’autorité régionale de conciliation de l’G______-Haute Argovie une requête en conciliation concernant « le litige principal, soit la délivrance d’un droit d’habitation en tant que legs (action en délivrance de legs) ».

A teneur du ch. 2 du dispositif de cet arrêt, l’office du registre foncier de Genève, section I______, était « instruit de radier du registre foncier l’annotation, ordonnée par le Tribunal régional de l’G______-Haute Argovie du 8 juin 2015 et par le Tribunal fédéral le 19 décembre 2017, d’une restriction du droit d’aliéner portant sur les parcelles n° 1______ et 2______ (propriété "E______") ».

7.             Les testaments susmentionnés n’ont pas été versés dans la présente procédure.

8.             Par bordereaux du 8 avril 2019, l'AFC-GE a taxé la contribuable pour les IFD et ICC 2014. Ce faisant, elle a fixé la valeur locative de l’immeuble à CHF 56'638.- (IFD) et à CHF 40'779.- (ICC).

9.             Le 17 avril 2019, sous la plume de son mandataire, la contribuable a formé réclamation contre ces bordereaux. Elle a repris les arguments formulés dans sa réclamation du 11 mars 2019.

10.         Par décisions du 16 septembre 2019, l'AFC-GE a rejeté cette réclamation.

11.         Par décisions du 30 septembre 2019, l'AFC-GE a admis la réclamation du 11 mars 2019 sur des points ne faisant pas l’objet du présent litige, la rejetant pour le surplus. Le même jour, elle a notifié à la contribuable des bordereaux rectificatifs pour les IFD et ICC 2013.

12.         Par courrier adressé à l'AFC-GE le 30 septembre 2019, sous la plume de son conseil, la contribuable a formé une (nouvelle) « réclamation contre les bordereaux (pour les) périodes fiscales 2013 et 2014 ». Elle y a notamment exposé que, dans ses deux testaments « censés établis en date du 29.12.2012 », le défunt avait, d’une part, laissé à ses deux enfants la propriété des parcelles nos 1______ et 2______ (à parts égales) et, d’autre part, institué en faveur de C______ un legs de droit d'habitation de l'immeuble et nommé celle-ci aux fonctions d’exécutrice testamentaire, s'agissant de ce bien.

Elle a ajouté que de nombreuses procédures judiciaires (civiles et pénales), qui auraient une influence sur le sort de l’immeuble, opposaient toujours C______ aux héritiers. Ceux-ci avaient procédé (le 23 mai 2013) à un partage partiel de la succession et à l’inscription de celui-ci au registre foncier. Ils étaient donc formellement copropriétaires de l’immeuble. Afin d'assurer son droit d'habitation sur ce bien, C______ avait requis et obtenu du tribunal du canton de la commune d'origine du défunt (F______) l'inscription au registre foncier d'une restriction du droit d'aliéner à l'encontre des héritiers. Elle avait par ailleurs empêché les copropriétaires d'occuper leur bien et l’avait même mise à la porte de son domicile par la force, l’obligeant ainsi à trouver un nouveau logement. Suite à une demande de mesures provisionnelles que C______ avait déposée auprès du Tribunal de H______, celui-ci, tout comme la Cour suprême du canton de Berne et le Tribunal fédéral, avaient jugé que les autorités de la Principauté monégasque étaient compétentes pour connaître du sort d'immeubles sis hors de Monaco.

Il en résultait que la valeur locative ne devait pas être imposée chez les deux héritiers, l'usage de l’immeuble étant impossible pour eux. En effet, dans la mesure où la compagne du défunt disposait d'un droit d'habitation « de fait » et occupait effectivement l'immeuble, ils n'en avaient pas l'usage.

13.         Percevant ce courrier comme une « réclamation » formée contre les bordereaux des 8 avril et 30 septembre 2019, l'AFC-GE l’a rejetée, par décisions du 11 septembre 2020.

Dans la mesure où au 31 décembre 2013 et 2014, la contribuable était inscrite au registre comme propriétaire de l’immeuble, elle était responsable des impôts y relatifs. Le droit d’habitation sur ce bien n’ayant pas été inscrit au registre foncier en faveur d’une tierce personne, il y avait lieu de considérer qu'elle avait concédé gratuitement la jouissance de ce bien, si bien que la valeur locative y relative devait être imposée chez elle. Toutefois, si, au terme des procédures judiciaires concernant l’immeuble, elle ne devait pas avoir le droit d’habitation y relatif, elle pourrait déposer une demande de reconsidération des taxations litigieuses.

14.         Par acte du 12 octobre 2020, sous la plume de son conseil, le contribuable a recouru contre ces décisions devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant implicitement à leur annulation, sous suite de frais et dépens.

Ella a repris les arguments et explications qu’elle avait formulés précédemment, ajoutant qu’elle ne pouvait accepter la position de l'AFC-GE selon laquelle elle devait être imposée sur la valeur locative de l’immeuble au motif qu'un droit d'habitation sur ce bien n'avait jamais été inscrit au registre foncier en faveur d’un tiers et qu'elle aurait dès lors concédé la jouissance de ce bien à titre gratuit.

15.         Par acte du 14 décembre 2020, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

L'inscription au registre foncier du droit d'habitation en faveur de C______ n'avait été ni requise, ni établie. En effet, aucun jugement dans ce sens n'avait été apporté comme justificatif.

Au vu des nombreux litiges qui opposaient C______ aux héritiers, il était, à ce jour, difficile de connaître le sort de l’immeuble et de l'existence d'un droit d'habitation ferme.

Aucun jugement entérinant l'allégation selon lequel la compagne du défunt était titulaire d'une créance en délivrance du legs n'avait été fourni, une action en délivrance du legs étant toujours en cours. Admettre l'existence d'un droit d'habitation de fait était en contradiction avec la jurisprudence récente du tribunal (cf. JTAPI/343/2020 du 4 mai 2020, contre lequel un recours a été déposé auprès de la chambre administrative de la Cour de justice - ci-après : la chambre administrative). Il en allait de même quant à l'existence de la preuve que C______ aurait effectivement occupé l'immeuble en 2013 et 2014, étant précisé qu'elle était domiciliée à Monaco au cours de ces années.

16.         La recourante n’a pas donné suite au courrier du tribunal du 18 décembre 2020 qui l’invitait à déposer son éventuelle réplique d’ici au 18 janvier 2021.

17.         A teneur du registre de l’office cantonal de la population et des migrations (OCPM), la contribuable a résidé à l’adresse de situation de l’immeuble (3______, route de I______) du 1er mai 2008 au 9 avril 2014.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l'AFC-GE (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable sous l’angle des art. 49 LPFisc et 140 LIFD.

3.             A titre liminaire, il y a lieu de constater que les décisions entreprises constituent des décisions sur reconsidération (dans la mesure où, les 16 et 30 septembre 2019, l'AFC-GE avait déjà statué sur les réclamations que la recourante avait formulé les 11 mars et 17 avril 2019), qui auraient préalablement dû faire l'objet d'une réclamation, relevant de la compétence de l’autorité intimée (cf. art. 57 al. 4 LPFisc cum art. 39 ; art. 149 al. 4 LIFD cum art. 133 al. 1 LIFD). Déposé auprès du tribunal avant que l'autorité compétente ait statué sur réclamation, le recours est ainsi prématuré, de sorte qu'il devrait être déclaré irrecevable (cf. not. ATA/382/2016 du 3 mai 2016 ; ATA/1341/2015 du 15 décembre 2015) et la cause renvoyée à l'AFC-GE pour raison de compétence (cf. art. 11 al. 3 LPA cum art. 2 al. 2 LPFisc).

Cela étant, dès lors que, dans sa réponse, l'AFC-GE a exposé les motifs pour lesquels elle aurait rejeté cette réclamation et que la recourante, à qui l'occasion de répliquer a été dûment donnée, a pu se déterminer à leur égard, un tel renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure, ce qui serait incompatible avec l'intérêt de la partie concernée à ce que sa cause soit tranchée dans un délai raisonnable (cf. ATF 145 I 167 consid. 4.4 et 142 II 218 consid. 2.8.1, par analogie), étant par ailleurs observé que, selon les art. 39 al. 3 LPFisc et 132 al. 2 LIFD, la réclamation déposée contre une décision de taxation déjà motivée peut être considérée comme un recours et transmise au tribunal, si le contribuable y consent, ce qui paraît être le cas en l'occurrence.

Il convient donc d'entrer en matière sur le recours.

4.             Aux termes des art. 21 al. 1 let. b LIFD et 24 al. 1 let b de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), est imposable, à titre de revenu, la valeur locative des immeubles ou de parties d'immeubles dont le contribuable se réserve l'usage en raison de son droit de propriété ou d'un droit de jouissance obtenu à titre gratuit.

5.             La fortune nette est imposable auprès du propriétaire ou de la personne pouvant disposer économiquement du bien en question (art. 46. LIPP). Les éléments de fortune soumis à usufruit sont imposables auprès de l'usufruitier (art. 48 LIPP).

6.             Selon l'art. 776 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210), le droit d'habitation est le droit de demeurer dans une maison ou d'en occuper une partie (al. 1). Les règles de l'usufruit sont applicables, sauf disposition contraire de la loi (al. 3). L'art. 765 al. 1 CC prévoit que l'usufruitier supporte les frais ordinaires d'entretien et les dépenses d'exploitation de la chose, ainsi que les intérêts des dettes dont elle est grevée, et qu'il est tenu d'acquitter les impôts et autres redevances, le tout en proportion de la durée de son droit.

En matière fiscale, une partie de la doctrine considère que le bénéficiaire d'un droit d'habitation est imposable de la même manière que l'usufruitier. Ce traitement identique se justifie, selon elle, par le fait qu'un droit réel d'habitation confère à son titulaire un droit d'usage illimité sur l'immeuble grevé, qui équivaut dans ses effets à celui d'un propriétaire. Le bénéficiaire du droit d'habitation est dès lors imposable sur la valeur vénale du logement concerné. En revanche, d'autres auteurs font prévaloir la double restriction matérielle du droit d'habitation par rapport à l'usufruit, à savoir qu'il ne permet que d'habiter l'immeuble grevé et que son exercice ne peut être transféré à des tiers. Ils refusent ainsi en général de traiter fiscalement de la même manière l'usufruit et le droit d'habitation (cf. ATA/65/2020 du 21 janvier 2020 consid. 3c et les auteurs cités, étant précisé que par arrêt 2C_195/2020 du 18 mars 2021, le Tribunal fédéral a déclaré irrecevable le recours déposé auprès de lui contre cet arrêt).

Le tribunal a eu l'occasion de juger qu'une part de copropriété grevée d'un droit d'habitation ne doit pas être taxée auprès de son propriétaire, au titre de la fortune, mais du bénéficiaire du droit d'habitation (JTAPI/1363/2015 du 23 novembre 2015 ; le recours formé contre ce jugement a été admis sur un autre point in ATA/363/2017 du 28 mars 2017). Par ailleurs, statuant sur la question de savoir si l'épouse séparée au bénéfice d'un droit d'habitation devait se voir imposée sur les frais hypothécaires acquittés par son mari, la chambre administrative a retenu que les personnes titulaires d'un droit d'usage ou d'habitation se trouvaient économiquement dans une position analogue à celle d'un propriétaire ou d'un usufruitier, de sorte qu'elles étaient imposables en lieu et place du propriétaire (ATA/924/2018 du 11 septembre 2018 consid. 5a, citant Nicolas MERLINO in Yves NOËL/Florence AUBRY GIRARDIN [éd.], Commentaire romand, Impôt fédéral direct, 2ème éd., 2017, n. 35 et 39 p. 507 s.).

Sur la base de ce qui précède, la chambre administrative a confirmé la pratique de l'AFC-GE consistant à imposer le bénéficiaire du droit d'habitation au même titre que l'usufruitier et, par conséquent, que ce premier est imposé sur la totalité du bien grevé de son droit au titre d'impôt sur la fortune (ATA/1161/2018 du 30 octobre 2018 consid. 4).

Dans un arrêt plus récent, la chambre administrative a à nouveau jugé qu'il incombe au bénéficiaire du droit d'habitation, et non au nu-propriétaire, d'acquitter l'impôt sur la fortune et l'impôt immobilier complémentaire sur l'immeuble grevé de cette servitude personnelle (cf. ATA/65/2020 du 21 janvier 2020 précité).

Dans un jugement du 4 mai 2020, cité par l’autorité intimée (JTAPI/343/2020), lequel porte sur un cas dans lequel le droit d’habitation fondé sur un jugement n’avait pas été inscrit au registre foncier, le tribunal a retenu qu’il incombait au titulaire de ce droit d'acquitter la totalité de l'impôt sur la valeur locative et sur la fortune y relatives, relevant que ce droit avait été stipulé dans un arrêt de la chambre civile de la Cour de justice (cf. consid. 7).

7.             Dans certains cas particuliers, il est possible de constituer une servitude sans inscription au registre foncier, « notamment » lorsque le bénéfice de la servitude se fonde sur un jugement formateur, entré en force. L'inscription au registre foncier n'est alors que déclarative, et non constitutive (cf. arrêt du Tribunal fédéral 5A_516/2011 du 8 novembre 2011 consid. 4.3.1 et les références citées).

8.             Aux termes de l’art. 484 CC, le disposant peut faire, à titre de legs, des libéralités qui n’emportent pas d’institution d’héritier (al. 1). Il pourra soit léguer un objet dépendant de la succession ou l’usufruit de tout ou partie de celle-ci, soit astreindre ses héritiers ou légataires à faire, sur la valeur des biens, des prestations en faveur d’une personne ou à la libérer d’une obligation (al. 2).

Le légataire n'acquiert pas la qualité de successeur à titre universel du défunt à l'ouverture de la succession. Il ne fait pas partie de la communauté héréditaire et ne répond pas des dettes du défunt. Il n'est qu'un successeur entre vifs et, à ce titre, ne dispose que d'une créance tendant à la délivrance du bien légué ou à l'exécution de la prestation conférée par le défunt (cf. Anouchka HUBERT-FROIDEVAUX, Commentaire du droit des successions, 2012, n. 12 et 13 ad art. 484 CC p. 136).

L’art. 485 CC stipule que la chose léguée est délivrée dans son état au jour de l’ouverture de la succession, avec ses détériorations et ses accroissements, libre ou grevée de charges (al. 1) et que le débiteur du legs a les droits et les obligations d’un gérant d’affaires pour impenses et détériorations postérieures à l’ouverture de la succession (al. 2).

Le légataire n’acquiert qu’une créance en délivrance du legs contre les héritiers et si ceux-ci ne s’exécutent pas, il peut agir en justice pour réclamer son legs. Cette action lui appartient, si une intention contraire ne résulte pas du testament, dès que les débiteurs des legs ont accepté la succession ou ne peuvent plus la répudier (cf. art. 562 CC cum art. 484 CC).

9.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés ; cette maxime oblige notamment les autorités compétentes à prendre en considération d'office l'ensemble des pièces pertinentes qui ont été versées au dossier. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_649/2020 du 10 novembre 2020 consid. 6.4).

10.         En matière fiscale, il appartient à l'autorité de démontrer l'existence d'éléments créant ou augmentant la charge fiscale, tandis que le contribuable doit supporter le fardeau de la preuve des éléments qui réduisent ou éteignent son obligation d'impôts. S'agissant de ces derniers, il appartient au contribuable non seulement de les alléguer, mais encore d'en apporter la preuve et de supporter les conséquences de l'échec de cette preuve, ces règles s'appliquant également à la procédure devant les autorités de recours (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_32/2020 du 8 juin 2020 consid. 3.5 ; ATA/513/2021 du 11 mai 2021 consid. 5b ; ATA/1077/2020 du 27 octobre 2020 consid. 7).

Par ailleurs, en droit fiscal, le principe de la libre appréciation de la preuve s'applique. L'autorité forme librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées, en choisissant entre les preuves contradictoires ou les indices contraires qu'elle a recueillis. Cette liberté d'appréciation, qui doit s'exercer dans le cadre de la loi, n'est limitée que par l'interdiction de l'arbitraire. Il n'est pas indispensable que la conviction de l'autorité de taxation confine à une certitude absolue, qui exclurait toute autre possibilité ; il suffit qu'elle découle de l'expérience de la vie et du bon sens et qu'elle soit basée sur des motifs objectifs (ATA/513/2021 du 11 mai 2021 consid. 5b et les références citées).

11.         En l’espèce, le testament du de cujus, qui daterait du 29 décembre 2012 et dont un extrait est cité dans l’arrêt du Tribunal fédéral 5A_973/2017 du 4 juin 2019, n’a pas été versé au dossier, la recourante s’étant limitée à produire seulement une copie de cet arrêt. Cela étant, au vu de la teneur de cet extrait, il semble, certes, que C______ peut prétendre être légataire du droit d’habitation de l’immeuble dans la mesure « qui lui plair(ait) », ce que, à teneur de cet arrêt, elle a fait valoir en 2015 par une action en délivrance de ce legs. Ce seul fait ne permet toutefois pas de retenir que la recourante doit être libérée de son obligation, en sa qualité de copropriétaire de l’immeuble, de s'acquitter de l’impôt sur la valeur locative et sur la fortune y relatives, étant donné qu’elle n’a pas démontré avoir effectivement délivré ce legs en 2013 ou en 2014, conformément à l’art. 485 CC, aucun élément au dossier ne permettant, du reste, de retenir qu’elle serait tenue de s’exécuter. Au vu des éléments figurant au dossier, il apparaît au contraire que la recourante s’est opposée à la délivrance de ce legs et, de ce fait, que C______ s’est vue contrainte d’intenter une action en délivrance de legs. Le constat que la recourante, en sa qualité de débitrice de ce legs, a refusé de s’exécuter est également corroboré par le fait que, selon le registre de l’OCPM, elle - et non C______ - a résidé dans l’immeuble du 1er janvier 2013 au 9 avril 2014. Le seul fait qu’elle aurait cessé de l’occuper personnellement depuis lors est insuffisant pour admettre que, dès cette dernière date, le droit d’habitation y relatif a effectivement été transféré à C______, rien n’indiquant du reste que celle-ci aurait occupé l'immeuble au cours de ces années.

Dans ces conditions, c’est à bon droit que l’autorité intimée a imposé la moitié des valeurs fiscale et locative de l’immeuble chez la recourante.

12.         Au vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

13.         Vu cette issue, un émolument de CHF 700.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 144 al. 1 LIFD et 52 al. 1 LPFisc). Cette dernière n'a pas droit à une indemnité de procédure (art. 87 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 - a contrario).

 


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 12 octobre 2020 par A______ contre les décisions prises à son égard par l'administration fiscale cantonale le 11 septembre 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met un émolument de CHF 700.- à la charge de A______, lequel est couvert par son avance de frais du même montant ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Yves JOLIAT, président, Alia CHAKER MANGEAT et Laurence DEMATRAZ, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Yves JOLIAT

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

La greffière