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Décisions | Chambre de surveillance

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C/24397/2024

DAS/92/2025 du 22.05.2025 sur DJP/271/2025 ( AJP ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/24397/2024 DAS/92/2025

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

DU JEUDI 22 MAI 2025

 

Appel (C/24397/2024) formé le 31 mars 2025 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève), représenté par Me Michael ANDERS, avocat.

* * * * *

Arrêt communiqué par plis recommandés du greffier
du 27 mai 2025 à :

- Monsieur A______
c/o Me Michael ANDERS, avocat
Boulevard des Tranchées 36, 1206 Genève.

- Madame B______
______, ______.

- Monsieur C______
______, ______.

- JUSTICE DE PAIX.

 


EN FAIT

A.           a) D______, née [D______] le ______ 1928 à E______ (Valais), originaire de Genève, veuve, est décédée ab intestat à F______ (Genève) le 1______ octobre 2024.

D______ avait une fille, B______ et deux fils, A______ et C______.

D______ avait été mise au bénéfice d'une mesure de curatelle de représentation par ordonnance du Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) du 14 octobre 2020, le curateur s'étant vu confier la tâche de la représenter dans la succession de son mari, G______. Par ordonnance du 8 décembre 2020, la curatelle de représentation instaurée en faveur de D______ a été transformée en curatelle de représentation et de gestion, le curateur devant non seulement la représenter dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d'affaires administratives et juridiques, mais également gérer ses revenus et biens et administrer ses affaires courantes.

b) Par courrier du 11 décembre 2024, un conseil s'est constitué auprès de la Justice de paix pour le compte de A______, sollicitant de cette juridiction qu'elle lui fasse suivre les écrits adressés antérieurement à son mandant.

c) Par courrier du 27 janvier 2025, A______ a sollicité le bénéfice d'inventaire.

d) Par courrier du 29 janvier 2025, la Justice de paix lui a répondu que sa demande en bénéfice d'inventaire ne remplissait pas les conditions des art. 580ss CC, celle-ci devant parvenir à l'autorité dans le mois suivant la connaissance du décès. Or, selon les échanges intervenus entre A______ et la Justice de paix, le premier avait eu connaissance du décès de sa mère au plus tard le 11 décembre 2024.

e) Le 11 février 2025, A______ a requis de la Justice de paix le classement sans frais de sa demande du 27 janvier 2025 en bénéfice d'inventaire et a formellement requis l'établissement d'un inventaire conservatoire au sens de l'art. 553 CC. Il a proposé la désignation de Me H______, notaire, à cette fin.

A______ a allégué que le 23 janvier (recte: 21 janvier) 2025, une décision d'approbation des comptes du curateur de feu D______ avait été rendue, contre laquelle il entendait recourir, lesdits comptes étant lacunaires et inexacts. A______ avait également l'intention d'agir en responsabilité contre l'Etat, le curateur ayant notamment signé l'acte de partage de la succession de feu G______, époux de D______, alors que cette dernière n'avait plus sa capacité de discernement durant la période des pourparlers ayant abouti à cet acte.

f) Par pli du 20 février 2025, A______ a sollicité de la Justice de paix la fixation d'un nouveau délai pour réclamer le bénéfice d'inventaire (art. 580 al. 1 CC) et la fixation d'un nouveau délai pour répudier la succession de D______ au sens de l'art. 567 al. 1 CC.

A l'appui de sa requête, A______ a exposé que sa mère était sous curatelle au moment de son décès. Le curateur avait rédigé son rapport et établi ses comptes finaux le 7 novembre 2024 et le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) les avait approuvés par décision du 23 janvier (recte: 21 janvier) 2025, qu'il avait reçue le 24 janvier 2025. Or, avant cette décision, A______ ne pouvait pas connaître l'état de la succession et donc se déterminer en pleine connaissance de cause en matière de bénéfice d'inventaire et de répudiation.

g) Par courrier du 20 février 2025, la Justice de paix a sollicité de A______ qu'il établisse, pièces justificatives à l'appui, la date à laquelle il avait eu connaissance du décès de D______.

L'intéressé a répondu avoir appris le décès de sa mère le jour de sa survenance.

h) Par courrier portant la date du 29 février 2025, mais reçu par la Justice de paix le 20 février 2025, A______, agissant en personne, a requis la désignation d'un représentant de la communauté héréditaire afin de former un recours contre la décision rendue par le Tribunal de protection le 23 janvier (recte: le 21 janvier) 2025, le délai pour recourir arrivant à échéance le 24 février 2025. A______ a allégué que son frère et sa sœur n'avaient pas l'intention de prendre part à la procédure de recours.

i) Le 24 février 2025, A______, agissant en personne, a formé recours auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice contre la décision rendue par le Tribunal de protection le 21 janvier 2025 approuvant les rapport et comptes finaux du curateur de D______ et arrêtant ses honoraires.

Selon lesdits rapport et comptes finaux, D______ disposait d'un compte auprès de [la banque] I______ actif à hauteur de 33'784 fr. Elle était par ailleurs usufruitière de la maison familiale sise à F______, la valeur de l'usufruit ayant été estimée à 275'000 fr. Les poursuites en cours s'élevaient à 147'425 fr., correspondant, selon les éléments qui ressortent de la procédure, à des arriérés de factures de l'EMS.

B.            Par décision DJP/271/2025 du 18 mars 2025, la Justice de paix a rejeté la demande de restitution des délais de répudiation et pour requérir la procédure de bénéfice d'inventaire formée par A______; la Justice de paix a également rejeté sa requête en bénéfice d'inventaire et en inventaire conservatoire et a mis à la charge de la succession des frais judiciaires à hauteur de 514 fr. 20.

En substance, la Justice de paix a considéré que le fait que la défunte bénéficiait d'une mesure de protection ne dispensait pas A______ de procéder aux vérifications usuelles afin d'évaluer les actifs et les passifs de la succession, ce qu'il ne démontrait pas avoir fait. Il n'était pas envisageable, sous l'angle de l'arbitraire, que les héritiers d'une personne sous curatelle soient avantagés par rapport aux autres. A______ aurait pu requérir une prolongation du délai de répudiation avant son échéance, si l'étendue d'une dette, dont l'influence sur son choix d'accepter ou pas la succession était décisive, n'avait pas encore été déterminée. De surcroît, les demandes de restitution de délais n'avaient pas été faites avec la célérité nécessaire, puisqu'elles avaient été formulées le 20 février 2025, soit bien après ses premières interpellations et environ un mois après la connaissance du motif invoqué. Enfin, le délai pour requérir la procédure en bénéfice d'inventaire n'était pas susceptible d'être prolongé en raison de sa nature. Dans la mesure où A______ avait eu connaissance du décès de D______ le 1______ octobre 2024 [soit le jour même du décès], le délai pour requérir la procédure en bénéfice d'inventaire était arrivé à échéance le 1______ novembre 2024 et celui de l'inventaire conservatoire le 1______ janvier 2025.

C.           a) Le 31 mars 2025, A______ a formé appel auprès de la Cour de justice (ci-après: la Cour) contre cette décision, reçue le 21 mars 2025, concluant à son annulation et au renvoi de la cause à la Justice de paix afin qu'elle désigne le notaire qu'il avait déjà proposé pour l'établissement d'un inventaire conservatoire; l'appelant a également conclu à la restitution du délai pour répudier la succession à compter de la clôture de l'inventaire conservatoire.

L'appelant a soutenu que le droit fédéral ne fixait aucun délai pour demander l'inventaire conservatoire; la loi d'application genevoise n'en prévoyait pas non plus. Faute pour lui d'avoir répudié au plus tard le 1______ janvier 2025, il avait "acquis la succession purement et simplement", ce qui correspondait à sa volonté, car la succession de D______ devait être solvable. Sur ce point, l'appelant a fait état de créances de la défunte totalisant 885'237 fr. 50 (416'000 fr. au motif que D______ avait été appauvrie sans cause dans la succession de feu son époux; créance en remboursement de 329'237 fr. 50 des charges de fonctionnement de la maison familiale sise à F______ au 1er mars 2020 contre B______ et C______ qui occupaient ladite maison; créance en répétition estimée à 140'000 fr. contre B______ et son conjoint, en leur qualité de gestionnaires du patrimoine de la défunte postérieurement au décès de G______). Le 24 janvier 2025, il avait toutefois reçu la décision du Tribunal de protection qui approuvait les rapport et comptes du curateur de D______. Il avait constaté des erreurs et des omissions importantes dans lesdits rapport et comptes, qu'il avait mentionnées dans son recours du 24 février 2025 contre la décision d'approbation formé devant la Chambre de surveillance de la Cour. En particulier, les rapport et comptes ne mentionnaient pas les biens sis en France dont la défunte était propriétaire en sa qualité de membre de la succession non partagée de feu son époux; la valeur de l'usufruit sur l'immeuble sis à F______, telle que retenue par le curateur en 275'000 fr., était erronée et aurait dû figurer pour une valeur nulle; les créances dont il est fait état ci-dessus ne figuraient pas non plus dans les rapport et comptes. Il était dès lors légitime de solliciter un inventaire conservatoire, devant être établi contradictoirement et il était fondé à invoquer un juste motif au sens de l'art. 576 CC, de sorte que la décision attaquée était arbitraire dans ses considérants et dans son résultat. Le reproche d'absence de célérité dans la demande de restitution n'était pas soutenable, dans la mesure où le délai d'un mois avait été "absorbé" par l'examen de la décision du Tribunal de protection, la préparation et la rédaction du recours y relatif, la demande de restitution ayant été formée le 20 février 2024 (recte: 2025), soit avant l'expiration du délai de recours de 30 jours. Enfin, le droit n'excluait pas une prolongation ou une restitution du délai de l'art. 580 CC relatif au bénéfice d'inventaire.

A l'appui de son appel, l'appelant a produit des pièces ne figurant pas dans le dossier de première instance, soit: copie d'échanges de courriers intervenus avec son frère et sa sœur, avec le curateur de D______ et l'Office des poursuites; toutes ces pièces sont antérieures à la date du prononcé de la décision attaquée.

b) Par avis du greffe de la Cour du 20 mai 2025 l'appelant a été informé de ce que la cause était gardée à juger, aucune prise de position des autres héritiers de D______ n'ayant été requise.

EN DROIT

1. 1.1.1 Les décisions du juge de paix, qui relèvent de la juridiction gracieuse, sont soumises à la procédure sommaire (art. 248 let. e CPC) et sont susceptibles d'un appel dans le délai de dix jours à compter de leur notification (art. 314 al. 1 CPC) auprès de la Chambre civile de la Cour de justice (art. 120 al. 2 LOJ), si la valeur litigieuse est égale ou supérieure à 10'000 fr. (art. 308 al. 2 CPC). L'appel doit être motivé (art. 311 al. 1 CPC).

1.1.2 En l'espèce, il ressort du rapport et comptes établis par le curateur de D______ que la valeur de sa succession dépasse la somme de 10'000 fr., de sorte que l'appel est recevable. Il a par ailleurs été formé dans le délai et en respectant la forme requise, de sorte qu'il est recevable.

1.2 La Cour revoit la cause en fait et en droit, avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

2. 2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

2.2 En l'espèce, l'appelant a produit des pièces nouvelles devant la Cour de justice. Celles-ci sont toutefois toutes antérieures au prononcé de la décision attaquée par la Justice de paix et l'appelant n'expose pas ce qui l'aurait empêché de les produire en première instance, à l'appui des requêtes qu'il a formulées.

Dès lors, les pièces nouvelles sont irrecevables.

3. L'appelant a pris des conclusions en désignation d'un notaire afin d'établir un inventaire conservatoire; il a également conclu à ce que le délai pour répudier la succession lui soit restitué, à compter de la clôture de l'inventaire conservatoire.

3.1.1 Les héritiers acquièrent de plein droit l’universalité de la succession dès que celle-ci est ouverte (art. 560 al. 1 CC). Ils sont saisis des créances et actions, des droits de propriété et autres droits réels, ainsi que des biens qui se trouvaient en la possession du défunt, et ils sont personnellement tenus de ses dettes ; le tout sous réserve des exceptions prévues par la loi (art. 560 al. 2 CC).

3.1.2 Les héritiers légaux ou institués ont la faculté de répudier la succession (art. 566 al.1 CC).

Le délai pour répudier est de trois mois (art. 567 al. 1 CC). Il court, pour les héritiers légaux, dès le jour où ils ont connaissance du décès, à moins qu’ils ne prouvent n’avoir connu que plus tard leur qualité d’héritiers (art. 567 al. 2 CC).

Lorsqu'un inventaire a été dressé à titre de mesure conservatoire, le délai de répudiation commence à courir pour tous les héritiers dès le jour où la clôture de l'inventaire a été portée à leur connaissance par l'autorité.

Les héritiers qui ne répudient pas dans le délai fixé acquièrent la succession purement et simplement (art. 571 al. 1 CC).

3.1.3 L’autorité compétente peut, pour de justes motifs, accorder une prolongation de délai ou fixer un nouveau délai aux héritiers légaux et institués (art. 576 CC).

En raison des lourdes conséquences que la déchéance du droit de répudier peut avoir pour un héritier, l’art. 576 CC permet de tenir compte de circonstances exceptionnelles. L’autorité compétente doit ainsi, lorsqu’il existe de justes motifs, prolonger le délai de répudiation ou, si celui-ci est échu, en fixer un nouveau. Constituent un juste motif le fait que l’héritier est domicilié dans un pays avec lequel les communications sont difficiles, des tensions au sein de la communauté héréditaire qui empêchent un héritier d’avoir une vision précise de l’état de celle-ci (par exemple, en raison de l’existence d’actions en justice encore pendantes ou l’absence de contact entre les héritiers et le de cujus depuis de nombreuses années), la situation personnelle d’un héritier (maladie, grand âge, etc.), la grande complexité de la succession (en particulier quand les biens sont situés dans plusieurs Etats), voire le fait qu’une dette importante dont on ignorait l’existence est tardivement signalée aux héritiers. L’autorité examinera notamment si l’héritier a fait son possible pour clarifier la situation. La demande de prorogation du délai doit être déposée aussitôt que l’héritier a connu les faits qui la justifient (Steinauer, Le droit des successions, 2ème éd., n. 975ss).

3.1.4 Selon l'art. 553 al. 1 CC, l'autorité fait dresser un inventaire: lorsqu'un héritier mineur est placé sous tutelle ou doit l'être (ch. 1), en cas d'absence prolongée d'un héritier qui n'a pas désigné de représentant (ch. 2), à la demande d'un héritier ou de l'autorité de protection de l'adulte (ch. 3), lorsqu'un héritier majeur est placé sous curatelle de portée générale ou doit l'être (ch. 4). L'inventaire est dressé conformément à la législation cantonale et, en règle générale, dans les deux mois à compter du décès (al. 2).

L'établissement d'un inventaire aux fins de sûreté (ou inventaire conservatoire) a pour but d'éviter que des biens de la succession ne disparaissent sans laisser de trace. L'inventaire consiste dès lors uniquement en une liste des actifs successoraux au moment de l'ouverture de la succession. Il ne produit pas d'effet matériel quant à la composition effective ou à la valeur de la succession et peut être modifié en tout temps; il ne peut servir de base pour le calcul des réserves et le partage de la succession. Il fait simplement preuve, au sens de l'art. 9 CC, que les biens inventoriés existaient à l'ouverture de la succession et ont été considérés à ce moment-là comme faisant partie de la succession (Steinauer, op. cit, n. 867).

Une partie de la doctrine estime que l'inventaire doit comprendre les actifs et les passifs du de cujus. Le droit fédéral ne l'exige pas. En effet, si l'énumération des passifs est importante pour l'estimation de la valeur de la succession, elle n'est en revanche pas nécessaire lorsque le but, comme c'est le cas pour l'inventaire de l'art. 553 CC, est purement conservatoire. Cela dit, rien n'empêche que l'inventaire énumère également les passifs; le droit cantonal peut par ailleurs l'exiger (art. 553 al. 2 CC). La pratique semble suivre cette tendance. Il n'est pas non plus exigé (pour les mêmes raisons) que l'inventaire comprenne la liste des libéralités rapportables ou sujettes à réunion, puisque celles-ci ne peuvent de toute manière plus être modifiées, mais le droit cantonal peut ici aussi l'exiger (Meier/Reymond-Eniaeva, CR, CC II, 2016, n. 3 ad art. 553).

L'inventaire conservatoire n'est pas destiné à déterminer les parts successorales ou la quotité disponible et ne saurait fonder comme tel une action en réduction, pas plus que lier les héritiers pour le partage. Il ne préjuge pas la question de l'existence des droits que les parties intéressées pourraient avoir sur les biens de la succession (Meier/Reymond-Eniaeva, CR, CC II, 2016, n. 4 ad art. 553).

Curieusement, l'art. 553 ne fixe pas de délai pour requérir l'établissement de l'inventaire. Il est toutefois dans la nature de cet inventaire d'intervenir peu après le décès (au plus, quelques semaines plus tard); l'autorité peut donc refuser d'y procéder lorsqu'il n'a plus de sens (Steinauer, op. cit. n. 868, note de bas de page n. 16).

Pour atteindre son but, l'inventaire doit commencer le plus tôt possible, mais la loi ne prévoit pas de délai pour le requérir. Il appartient aux cantons de régler les modalités de l'établissement de l'inventaire (art. 553 al. 2 CC); le droit fédéral prévoit néanmoins que l'inventaire doit être dressé, en règle générale, dans les deux mois à compter du décès (art. 553 al. 2 CC). L'inventaire n'est pas exclu après l'expiration de ce délai (qui est un délai d'ordre), mais l'inobservation de celui-ci peut être interprétée comme une renonciation à requérir l'inventaire (absence d'intérêt à la mesure) (Meier/Reymond-Eniaeva, CR, CC II, 2016, n. 20 ad. art. 553).

Lorsqu'un inventaire a été dressé à titre de mesure conservatoire, le délai de répudiation commence à courir pour tous les héritiers (pour autant qu'il ne soit pas déjà échu au moment où l'inventaire est dressé) dès le jour où la clôture de l'inventaire a été portée à leur connaissance par l'autorité; le délai d'un mois prévu à l'art. 580 al. 2 CC pour réclamer le bénéfice d'inventaire n'est en revanche pas prolongé (Meier/Reymond-Eniaeva, CR, CC II, 2016, n. 21 ad. art. 553).

3.1.5 Selon l'art. 106 LaCC, le juge de paix procède à l'inventaire prévu à l'art. 553 CC ou commet un notaire à cette fin (al. 1). Un ou plusieurs experts peuvent être désignés pour l'estimation des objets inventoriés (al. 2).

Selon l'art. 109 let. b LaCC, l'inventaire comprend: un procès-verbal renfermant la description et l'estimation des objets de valeur (ch. 1); l'état des dettes connues (ch. 2).

3.1.6 L'héritier qui a la faculté de répudier peut réclamer le bénéfice d'inventaire. Sa requête sera présentée à l'autorité compétente dans le délai d'un mois (art. 580 al. 1 et 2 CC).

La procédure d'inventaire prévue aux art. 580 à 592 a un double but: permettre à l'héritier d'obtenir une vue claire de l'état de la succession et lui donner le moyen de rester héritier tout en limitant sa responsabilité pour les dettes du de cujus.

Il arrive en effet qu'à l'ouverture de la succession, un héritier n'ait pas assez d'informations sur les actifs et sur les passifs successoraux pour mesurer le risque qu'il prendrait en acceptant la succession (Steinauer, op. cit. n. 1005 et 1006).

L'inventaire prévu par les art. 580ss CC doit être distingué de l'inventaire aux fins de sûreté de l'art. 553 CC; ce dernier n'a en effet qu'un caractère conservatoire et ne produit pas d'effets matériels (Steinaueur, op. cit. n. 1008).

Le délai d'un mois de l'art. 580 al. 2 CC est un délai de péremption. Une prorogation du délai est aussi possible, par application analogique de l'art. 576 CC (Steinauer, op. cit. n. 1014a).

3.1.7 Au terme de ses fonctions, le curateur adresse à l'autorité de protection un rapport final et, le cas échéant, les comptes finaux (art. 425 al. 1er 1ère phr. CC). L'autorité de protection de l'adulte examine et approuve le rapport final et les comptes finaux de la même façon que les rapports et les comptes périodiques (art. 425 al. 2 CC). Elle approuve ou refuse les comptes; au besoin, elle exige des rectifications (art. 415 al. 1 CC).

Le rapport final a un but d'information et non de contrôle de l'exécution de la curatelle. Il doit être approuvé s'il remplit son devoir d'information (arrêts du Tribunal fédéral 5A_714/2014 du 2 décembre 2014 consid. 4.3; 5A_151/2014 du 4 avril 2014 consid. 6.1; concernant les art. 451 ss aCC: arrêts 5A_665/2013 du 23 juin 2014 consid. 4.2.3; 5A_578/2008 du 1 er octobre 2008 consid. 1).

Un rapport rédigé par un mandataire est un compte rendu subjectif des circonstances. Son approbation n'implique pas d'examiner la véracité des éléments contenus dans le rapport, ni n'emporte l'acceptation des déclarations et de l'activité du curateur (vogel/affolter, Zivilgesetzbuch I (Basler Kommentar (2018), n. 22 ad art. 425). Elle n'a pas d'effet de droit matériel direct, n'a pas valeur de décharge complète du curateur, et n'est pas une décision portant sur l'existence ou l'absence d'une prétention à l'encontre du curateur, qui est du ressort du juge civil (5A_494/2013 consid. 2.1). Elle n'exclut en particulier pas l'exercice de l'action en responsabilité à l'encontre du curateur, qui est de la compétence exclusive du juge (arrêts 5A_714/2014 précité consid. 4.3; 5A_151/2014 consid. 6.1 et les références; 5A_587/2012 du 23 novembre 2012 consid. 3.2.1; ATF 70 II 77 consid. 1; 5A_274/2018 du 21 septembre 2018 consid. 4.3.1).

Les comptes finaux sont dépourvus d'effet matériel pour les tiers qui ne pourront notamment par exemple pas faire valoir l'extinction d'une créance que le curateur aurais omis de porter aux comptes (Fountoulakis, CR CC I, 2ème éd., 2024, n. 36 ad. art. 425).

L'autorité chargée de l'approbation du rapport et des comptes finaux n'a pas à se prononcer sur d'éventuels manquements du curateur (arrêts du Tribunal fédéral 5A_714/2014 du 2 décembre 2014 consid. 4.3; 5A_587/2012 du 23 novembre 2012 consid. 3.2.1).

3.2.1 L'appelant conclut à ce qu'un notaire soit désigné afin d'établir un inventaire conservatoire.

Ni le droit fédéral, ni le droit cantonal ne fixent certes de délai pour requérir un tel inventaire. L'art. 553 al. 2 CC prévoit néanmoins qu'en règle générale, il est dressé dans les deux mois à compter du décès.

En l'espèce, D______ est décédée le 1______ octobre 2024, ce que l'appelant admet avoir appris le jour même. Ce dernier a sollicité de la Justice de paix, le 27 janvier 2025, le bénéfice d'inventaire de l'art. 580 CC et non l'inventaire conservatoire de l'art. 553 CC. Il n'a formulé une telle requête que le 11 février 2025, soit près de quatre mois après le décès de D______. Or, l'inventaire conservatoire a pour but d'éviter que des biens de la succession ne disparaissent et il ne produit aucun effet matériel quant à la composition effective ou à la valeur de la succession. Si l'appelant soutient que les rapport et comptes établis par le curateur de D______ sont incomplets, au motif notamment qu'ils ne mentionnent pas des biens dont la défunte était propriétaire en France ainsi que des créances à l'égard de certains membres de l'hoirie, il ne soutient en revanche pas que des biens faisant partie de la succession risqueraient de disparaître sans laisser de traces. Si tel était le cas, ce qui n'a pas été allégué, ce risque se serait par ailleurs déjà concrétisé compte tenu du temps écoulé entre le décès de D______ et la demande d'inventaire conservatoire formée par l'appelant. Même si le droit genevois prescrit que l'inventaire conservatoire doit mentionner les actifs et les passifs, le but d'un tel inventaire n'est pas de permettre la correction, comme semble le souhaiter l'appelant, des rapport et comptes établis par le curateur de la défunte, lesquels sont dépourvus d'effet matériel pour les tiers. Dès lors, le fait que les créances alléguées par l'appelant n'y figurent pas ne signifie pas pour autant qu'il ne pourra pas s'en prévaloir si celles-ci existent effectivement.

Au vu de ce qui précède, un inventaire conservatoire serait, en l'espèce, dépourvu de tout intérêt, de sorte que c'est à juste titre que la Justice de paix ne l'a pas ordonné. La décision attaquée sera dès lors confirmée sur ce point.

3.2.2 L'appelant a également conclu à ce que le délai pour répudier la succession, à compter de la clôture de l'inventaire conservatoire, soit restitué. Dans la mesure où la Cour de céans a confirmé le refus de la Justice de paix d'ordonner un tel inventaire, l'examen de l'appel pourrait s'arrêter là. A titre superfétatoire, la question de la restitution du délai pour répudier la succession de D______ sera toutefois examinée ci-après.

En l'espèce, le délai pour répudier est arrivé à échéance le 24 janvier 2025 et seuls de justes motifs justifieraient qu'un nouveau délai soit fixé pour ce faire. Le seul motif allégué par l'appelant est sa prise de connaissance, le 24 janvier 2025, de la décision d'approbation des rapport et comptes du curateur de la défunte, lesquels seraient, selon lui, inexacts. L'appelant a toutefois exclusivement fait état, sous réserve de la valeur de l'usufruit dont bénéficiait la défunte sur l'immeuble familial sis à F______, qui devrait selon lui être réduite à zéro, de créances à l'encontre de certains membres de l'hoirie, lesquelles ne figurent pas sur les comptes établis par le curateur. Les allégations de l'appelant ne permettent par conséquent pas de retenir que la succession serait potentiellement déficitaire en raison de dettes qui n'auraient pas été prises en compte et dont l'appelant aurait appris tardivement l'existence.

L'appelant ne s'est par conséquent prévalu d'aucun juste motif qui permettrait de restituer le délai permettant de répudier la succession de D______. La décision attaquée sera par conséquent confirmée sur ce point également.

3.2.3 L'appelant a certes allégué dans son acte d'appel le fait que le délai de l'art. 580 CC relatif au bénéfice d'inventaire pouvait être prolongé. Il n'a toutefois pris aucune conclusion formelle sollicitant la prolongation ou la restitution dudit délai, de sorte qu'il ne sera pas entré en matière plus avant sur ce point.

Au vu de ce qui précède, il n'est pas non plus nécessaire d'examiner si l'appelant a tardé à présenter sa demande de restitution de délai.

4. Les frais de la procédure, arrêtés à 1'500 fr. (art. 26, 35, 67A et 67B RTFMC), seront mis à la charge de l'appelant, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront partiellement compensés avec l’avance de frais versée, en 500 fr., qui reste acquise à l’Etat de Genève. L'appelant sera condamné à verser le solde de frais, en 1’000 fr., à l’Etat de Genève.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l’appel formé par A______ contre la décision DJP/271/2025 rendue le 18 mars 2025 par la Justice de paix dans la cause C/24397/2024.

Au fond :

Confirme la décision attaquée.

Sur les frais :

Arrête les frais de la procédure d’appel à 1'500 fr., les met à la charge de A______ et les compense partiellement avec l’avance de frais versée, qui reste acquise à l’Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à l’Etat de Genève, soit pour lui les Services financiers du Pouvoir judiciaire, la somme de 1’000 fr. à titre de solde de frais judiciaires.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Monsieur
Cédric-Laurent MICHEL et Madame Paola CAMPOMAGNANI, juges;
Madame Jessica QUINODOZ, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.