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Décisions | Chambre de surveillance

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C/6044/2024

DAS/268/2024 du 18.11.2024 sur DTAE/4747/2024 ( PAE ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/6044/2024-CS DAS/268/2024

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 18 NOVEMBRE 2024

 

Recours (C/6044/2024-CS) formés en date du 26 juillet 2024 par Monsieur A______, domicilié ______ (Genève), représenté par Me B______, avocat, d'une part, et en date du 7 août 2024 par C______, domicilié ______ (Genève), représenté par
Me Arnaud PARREAUX, avocat, d'autre part.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 20 novembre 2024 à :

- Monsieur A______
c/o Me B______, avocat
______, ______.

- Monsieur C______
c/o Me Arnaud PARREAUX, avocat
Boulevard James-Fazy 3, 1201 Genève.

- Maître B______
______, ______.

- Maître D______
______, ______.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.


EN FAIT

A. a) Le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après: le Tribunal de protection) a été amené à se préoccuper de la situation de A______, né le ______ 1940, originaire de E______ (Genève), à réception le 14 mars 2024 d'un signalement émanant de D______, avocat.

A l'appui de son signalement, le précité a exposé que A______ l'avait à l'origine mandaté à la fin de l'année 2021, ainsi qu'un autre avocat fiscaliste, afin de le représenter dans le cadre d'un contentieux fiscal portant sur les exercices 2013 et suivants. Par la suite, A______ lui avait également remis des procurations datées du 18 octobre 2023 pour lui permettre de le représenter vis-à-vis de l'IMAD, de son assurance-maladie ou encore de la banque F______. En date du 4 décembre 2023, A______ avait chuté à domicile. Après avoir été transféré à l'Hôpital G______ dans l'attente d'un placement en EMS ou d'un retour à domicile, il avait été hospitalisé au sein de la Clinique de H______ trois semaines plus tôt, dans un contexte d'hétéro-agressivité. Dans un document rédigé de sa main et daté du 20 février 2024, qu'il avait remis à une ancienne voisine qui l'avait elle-même transmis à J______, directeur financier de la régie K______, qui gérait en partie ses affaires, A______ avait émis le souhait de bénéficier d'une assistance juridique hors du cercle familial et mentionné ne pas faire pleine confiance à C______, son fils unique, pour la gestion de ses affaires.

b) Selon un certificat médical du 20 mars 2024 établi par la Dre I______, médecin interne, A______, hospitalisé au sein de la Clinique de H______ depuis le 16 février 2024, souffrait de troubles neurocognitifs majeurs d'étiologie neurodégénérative probable avec symptômes comportementaux et psychologiques de la démence et un score de 15/30 à un MMS réalisé au mois de janvier 2024. En raison de ses troubles, le concerné, totalement incapable de discernement, n'était plus en mesure d'assumer la sauvegarde de ses intérêts dans tous les domaines de protection.

c) Par requête reçue par le Tribunal de protection le 2 avril 2024, C______ a indiqué qu'il intervenait en qualité de représentant thérapeutique et administratif de son père, A______, selon une procuration de ce dernier datée des 14 et 22 décembre 2023, en collaboration avec J______, lequel s'occupait de régler les factures depuis le compte propriétaire du concerné auprès de la régie. Il a ajouté que le corps médical était d'avis que A______ devait intégrer un EMS, en dépit de son souhait de retourner vivre à domicile. Il a par ailleurs indiqué qu'il était disposé à fonctionner en qualité de curateur, de manière à assurer une continuité dans la gestion des affaires de son père et à lui éviter des frais.

d) Par courrier du 26 avril 2024, B______, avocat, a indiqué avoir été mandaté par A______, lequel avait intégré un EMS quelques semaines plus tôt. Le précité, qui lui avait semblé capable de discernement, lui avait demandé d'évaluer les possibilités de regagner son domicile moyennant l'encadrement nécessaire, étant précisé qu'il avait rendu son fils responsable de sa situation. Dans un document manuscrit daté du 5 avril 2024 joint au courrier précité, A______ évoquait l'existence de "gros différends" avec son fils.

Dans un courrier complémentaire du 27 mai 2024, B______ a contesté l'incapacité de discernement de son mandant, requis l'audition de ce dernier, répété que le concerné souhaitait regagner son domicile, moyennant la mise en place de l'infrastructure requise, et exposé qu'il n'était pas favorable à la désignation de son fils aux fonctions de curateur, pour des raisons de compétences.

e) Le Tribunal de protection a tenu une audience le 28 mai 2024.

A______ a indiqué qu'il était bien traité au sein de l'EMS, mais qu'il souhaitait toutefois retourner chez lui, moyennant la mise en place d'un encadrement à domicile. Il a indiqué que la gestion de ses affaires financières était confiée à D______, à la régie et aux banquiers de F______ et qu'il faisait confiance à ces intervenants. Il a ajouté que les relations avec son fils, qui ne s'était pas occupé de ses affaires financières et qu'il préférait ne pas voir désigné aux fonctions de curateur, n'avaient pas toujours été faciles.

B______ a expliqué que son mandant, conscient de son besoin d'aide, désirait retourner chez lui moyennant la mise en place de l'infrastructure requise. Il a ajouté qu'il était disposé à se charger du domaine de l'assistance personnelle en cas d'instauration d'une mesure de protection.

D______ a pour sa part indiqué que le concerné l'avait mandaté ainsi qu'un avocat fiscaliste en 2021 et qu'ils avaient pu constater déjà quelques difficultés dans son suivi administratif depuis 2018. Depuis l'été précédent, le concerné, qui avait omis de communiquer certaines factures à J______, avait fait l'objet de quelques poursuites. Un suivi de proximité avait alors été proposé à A______, raison pour laquelle il avait signé plusieurs procurations spécifiques en sa faveur. Il a ajouté qu'il avait pu constater que A______ était assez isolé et qu'il ne voyait plus son médecin, lequel ne se déplaçait pas à domicile. S'agissant du litige fiscal, il a estimé que le rattrapage d'impôts du concerné représenterait un montant de l'ordre de deux à trois millions de francs, avec la nécessité de pouvoir accéder à ses comptes bancaires. Il a encore expliqué avoir appris l'existence d'une vente immobilière à terme et le fait que la succession du père du concerné n'était pas encore partagée, étant précisé que ce dernier et son frère ne s'entendaient pas bien, ce qui rendait la gestion des immeubles de l'hoirie difficile. Il a précisé se tenir à disposition pour exercer les fonctions de curateur de A______ en matière administrative et financière.

C______ a expliqué que l'opportunité d'un placement de son père en EMS avait été évoquée pour la première fois lors d'une réunion de réseau s'étant déroulée au mois de janvier 2024. Son père ne s'était pas opposé à cette éventualité, mais il avait changé d'avis à la suite de la visite d'une ancienne voisine. Lors d'une deuxième réunion de réseau, les médecins avaient été d'accord d'envisager un retour à domicile du concerné et il avait entrepris des démarches pour mettre en place l'aménagement nécessaire. A l'occasion du placement subséquent du concerné au sein de la Clinique de H______, il lui avait été indiqué à nouveau qu'un placement en EMS était préconisé. Il a encore expliqué que l'intégration de son père au sein de l'EMS L______ se passait bien et que sa maison nécessiterait un débarras et des aménagements en cas de retour à domicile. Enfin, il a indiqué qu'il était en mesure de se charger de la gestion du portefeuille financier de son père, qui s'était montré confus lorsqu'il avait évoqué avec lui la possibilité de devenir son curateur sans s'y opposer clairement, et de faire appel au besoin à des mandataires s'agissant des autres domaines.

Le Tribunal de protection a gardé la cause à juger à l'issue de l'audience.

B. Par décision du 28 mai 2024, reçue le 8 juillet 2024 par A______ et le 15 juillet 2024 par C______, le Tribunal de protection a institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______, né le ______ 1940 (ch. 1 du dispositif), désigné D______, B______ et C______ aux fonctions de curateurs (ch. 2), confié à D______ les tâches suivantes: représenter la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d’affaires administratives et juridiques, gérer les revenus et biens de la personne concernée et administrer ses affaires courantes (ch. 3), confié à B______ la tâche de veiller au bien-être social de la personne concernée et la représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre (ch. 4), confié à C______ la tâche de veiller à l’état de santé de la personne concernée, mettre en place les soins nécessaires et, en cas d’incapacité de discernement, la représenter dans le domaine médical (ch. 5), autorisé les curateurs à prendre connaissance de la correspondance de la personne concernée, dans les limites de leurs mandats respectifs, avec la faculté de la faire réexpédier à l'adresse de leur choix, et, si nécessaire, à pénétrer dans le logement de la personne concernée (ch. 6), dit que la décision était immédiatement exécutoire (ch. 7) et arrêté les frais judiciaires à 800 fr., mis à la charge de la personne concernée (ch. 8).

En substance, le Tribunal de protection a retenu qu'au vu des éléments portés à sa connaissance, A______ présentait des troubles neurocognitifs majeurs d'étiologie neurodégénérative qui le rendaient incapable de sauvegarder ses intérêts en personne, comme le démontrait le déclin progressif de la gestion de ses affaires depuis l'année 2018 et sa chute du mois de décembre 2023. Si, jusqu'alors, la personne concernée, qui disposait d'une fortune mobilière et immobilière importante et dont les affaires revêtaient une certaine complexité, avait pu compter sur la présence de plusieurs mandataires professionnellement qualifiés pour assumer la gestion de ses affaires administratives et financières, il s'avérait toutefois que son état de santé déclinait depuis plusieurs années déjà et qu'il n'était désormais plus en mesure de surveiller leur activité de manière suffisante. Par conséquent, il y avait lieu d'instaurer une curatelle de représentation et de gestion étendue à tous les domaines de protection en faveur du concerné.

S'agissant de la personne du curateur, A______ avait pu exprimer qu'il avait toute confiance en les mandataires actuellement chargés de la gestion de ses affaires administratives et financières et qu'il ne souhaitait pas voir son fils désigné aux fonctions de curateur, en dépit de la volonté de ce dernier de l'être, en évoquant un problème de compétences, mais également d'entente entre eux. Par ailleurs, C______ semblait s'être montré réticent ou à tout le moins peu réactif en dépit de la volonté clairement exprimée par son père de retourner vivre chez lui. En effet, le fils du concerné n'avait pas entrepris efficacement les démarches indiquées pour organiser la prise en charge de son père à domicile, ceci avant même son hospitalisation au sein de la Clinique de H______, alors même que le concerné disposait de moyens financiers confortables qui lui permettaient d'envisager le financement de tout l'équipement nécessaire et la rémunération de plusieurs employés.

Ainsi, il se justifiait de confier la représentation en matière médicale au fils de la personne concernée, dans la mesure où il apparaissait tout à faire apte à prendre des décisions éclairées en la matière en faveur de son père, et désigner aux fonctions de curateurs les mandataires qui assistaient d'ores et déjà le concerné, soit D______ s'agissant des domaines administratif, juridique et financier et B______ en matière d'assistance personnelle.

La décision a été déclarée immédiatement exécutoire.

C. a) Sous la plume de son conseil B______, A______ a, par acte du 26 juillet 2024, recouru contre l'ordonnance précitée, en concluant à ce que le chiffre 2 de son dispositif soit annulé en tant qu'il désigne son fils C______ en qualité de curateur et à ce que le chiffre 5 du même dispositif soit modifié en ce sens que les tâches de veiller à son état de santé, à la mise en place des soins nécessaires et, en cas d'incapacité de discernement, de le représenter dans le domaine médical, soient confiées à B______.

b) Sous la plume de son conseil, C______ a, par acte du 7 août 2024, également recouru contre l'ordonnance du 28 mai 2024, en concluant à ce que les chiffres 3 et 4 de son dispositif soient modifiés en ce sens que lui soient confiées également les tâches de représenter son père dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d'affaires administratives et juridiques, de gérer les revenus et biens de son père, d'administrer ses affaires courantes, de veiller à son bien-être social et de le représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre. A titre préalable, C______ a conclu, avec suite de frais judiciaires et dépens, à l'annulation du chiffre 7 du dispositif de l'ordonnance attaquée et à la restitution de l'effet suspensif à son recours.

c) La requête de restitution de l’effet suspensif au recours de C______ a été rejetée par décision de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (ci-après: la Chambre de surveillance) du 2 septembre 2024 (DAS/185/2024).

d) Le Tribunal de protection n’a pas souhaité revoir sa décision.

e) Par acte du 16 septembre 2024, C______ a conclu au rejet du recours de A______ et s'est référé pour le surplus aux conclusions prises dans son propre recours.

Il a produit un chargé de neuf pièces.

f) Par acte du 7 octobre 2024, A______ a conclu au rejet du recours de C______.

Il a produit un chargé de onze pièces.

g) Par déterminations du 13 septembre 2024 sur le recours de A______ et du 7 octobre 2024 sur le recours de C______, D______ a conclu à la modification de l'ordonnance attaquée en ce sens que les tâches de veiller au bien-être social de A______ et celles de veiller à son état de santé, à la mise en place des soins nécessaires et, en cas d'incapacité de discernement, de le représenter dans le domaine médical, soient confiées à un seul et même curateur.

Il a produit un chargé de vingt-deux pièces.

h) La cause a été gardée à juger le 6 novembre 2024.

D. Pour le surplus, les faits pertinents suivants ressortent de la procédure:

a) Par courriel du 5 août 2024 adressé à B______, à C______ et au conseil de ce dernier, M______, directeur ad interim de l'EMS L______, a accusé réception de l'ordonnance du Tribunal de protection du 28 mai 2024 ainsi que des diverses correspondances qui lui avaient été adressées par les susnommés. Il constatait que B______, chargé de veiller à l'état de santé de la personne concernée, et C______, chargé de veiller au bien-être social de celle-ci, défendaient deux points de vue diamétralement différents s'agissant du lieu de vie de leur protégé, le premier se positionnant en faveur d'un retour à domicile de A______, le second, d'un maintien en EMS. M______ rappelait qu'il n'appartenait pas à l'EMS de se prononcer sur cette question, invitait les curateurs à se consulter mutuellement et avertissait qu'en l'absence de solution concertée, l'EMS, qui refusait d'être mis sous pression ou "pris en otage" par ce différend entre les curateurs, serait tenu d'alerter le Tribunal de protection de la situation.

b) Par requête du 13 août 2024, A______, agissant sous la plume de son conseil, a sollicité du Tribunal de protection qu'il autorise, sur mesures superprovisionnelles, "la sortie d'EMS de A______ à la faveur d'un retour chez lui avec encadrement nécessaire et adéquat".

Il a notamment produit à l'appui de sa requête un certificat médical du 12 août 2024 par lequel le Dr N______, médecin spécialiste en gériatrie, attestait que la capacité de discernement de A______ était "largement conservée pour définir de manière consciente ce qu'il veut et ce qu'il refuse".

c) Par courrier du 3 septembre 2024, B______ a informé le Tribunal de protection que la veille, A______, en visite dans sa maison, avait décidé de rester chez lui et de ne pas rentrer à l'EMS. Aux alentours de 21h00, la police s'était présentée à son domicile, faisant état d'un avis de disparition émis par l'EMS. Selon les dires de B______, l'EMS avait pourtant été prévenu de la situation. A______ s'était conformé aux ordres de la police non sans déclarer qu'il s'opposait à son retour en institution.

d) Par courrier du 3 septembre 2024, M______ et O______, médecin répondant de l'EMS L______, ont informé le Tribunal de protection avoir pris acte de la décision de B______ de résilier le contrat d'accueil de A______ pour le 5 septembre 2024. Ils indiquaient que la double curatelle conjointement assurée par B______ et C______ était devenue ingérable pour l'établissement, l'un exigeant le retour à domicile, l'autre demandant le maintien à l'EMS. Ils invitaient le Tribunal de protection à clarifier d'urgence le rôle, la mission et le mandat des uns et des autres en lien avec l'ordonnance du 28 mai 2024.

e) Par courriel du 4 septembre 2024, C______ a sollicité du Tribunal de protection qu'il précise les prérogatives des curateurs en lien avec les chiffres 4 et 5 de l'ordonnance du 28 mai 2024.

f) Par courriel du 16 septembre 2024 adressé à C______, représenté par son conseil, et à B______, la Présidente de la 1ère Chambre du Tribunal de protection a indiqué qu'en l'état, le choix du lieu de vie ainsi que la mise en place du suivi social à assurer dans le ledit lieu revenait au curateur en charge de l'assistance personnelle, soit B______. Il était précisé que la répartition actuelle des tâches de la curatelle entre trois curateurs impliquait une indispensable collaboration efficiente et constructive entre eux. Ainsi, le choix du lieu de vie avait un coût, de sorte que le curateur de gestion du patrimoine devait être renseigné pour examiner la viabilité financière. De la même manière, le curateur de soin et thérapeutique devait pouvoir organiser des soins infirmiers à domicile et/ou de gestion de la médication, en fonction des instructions du médecin et collaborer avec le curateur en charge de l'assistance personnelle pour l'adaptation des prestations existantes ou à mettre en œuvre.

g) En réponse à une demande en ce sens du Tribunal de protection, B______ a, par courrier du 19 septembre 2024, exposé les aménagements mis en œuvre pour garantir la prise en charge adéquate de la personne concernée à domicile, soit en particulier un suivi médical régulier, la présence continue d'au moins une personne qualifiée dans le domaine de l'aide à la personne, un passage infirmier hebdomadaire, une séance de physiothérapie hebdomadaire à domicile, une potentielle intégration dans un foyer de jour à une fréquence devant encore être définie, ainsi que l'installation de dispositifs ergonomiques dans la maison.

h) Par apposition de son timbre humide sur le courrier précité, le Tribunal de protection a ratifié la résiliation du contrat d'accueil de l'EMS L______ le 20 septembre 2024.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions de l’autorité de protection peuvent faire l’objet d’un recours (art. 450 al. 1 CC) dans les trente jours à compter de leur notification (art. 450b al. 1 CC), auprès de la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 53 al. 1 LaCC). Le recours, interjeté par écrit, doit être dûment motivé (art. 450 al. 3 CC).

Ont qualité pour recourir: les personnes parties à la procédure, les proches de la personne concernée et les personnes qui ont un intérêt juridique à l'annulation ou à la modification de la décision attaquée (art. 450 al. 2 CC).

En l’espèce, les recours ont été formés par la personne concernée, respectivement par le fils de celle-ci, par ailleurs directement concerné par la décision entreprise en sa qualité de curateur.

La question de savoir si la personne concernée avait la capacité de discernement suffisante pour mandater un avocat en la personne de B______ – lequel a par ailleurs été désigné curateur d'assistance personnelle, tandis que la représentation en matière juridique a été confiée à D______ – afin de former recours contre l'ordonnance contestée peut se poser. Cela étant, aucune des parties ne remet en cause la représentation de A______ par B______ dans la présente procédure et aucune restriction dans l'exercice des droits civils de la personne concernée n'a été prononcée par le Tribunal de protection, si bien qu'il n'y a pas lieu de discuter davantage ce point. Au demeurant, il est acquis que A______ est dans l'incapacité de sauvegarder seul ses intérêts financiers et administratifs et d'assumer son assistance personnelle pour tous les actes de la vie quotidienne, y compris dans le domaine médical, ce qui n'est nullement remis en cause dans son recours.

Les conditions de forme et de délais étant remplies, les recours sont recevables.

1.2 La Chambre de céans établit les faits d'office, applique le droit d'office et n'est pas liée par les conclusions des parties (art. 446 CC).

1.3 Les pièces nouvellement produites devant la Chambre de céans sont recevables, dans la mesure où l’art. 53 LaCC, qui régit de manière exhaustive les actes accomplis par les parties en seconde instance, à l’exclusion du CPC (art. 450f CC cum art. 31 al. 1 let. c et let. d a contrario LaCC), ne prévoit aucune restriction en cette matière.

1.4 Dans ses déterminations sur les allégués du recours de sa partie adverse, C______ sollicite "à titre de moyen de preuve une expertise judiciaire sur la personne du recourant, Monsieur A______, s'agissant de son incapacité de discernement (art. 183 ss CPC)". Le recourant offre également, à titre de moyen de preuve, l'audition de diverses personnes, soit la Dre I______, médecin interne à l'unité P______ des HUG, M______, directeur ad interim du 1er mai au 31 octobre 2024 de l'EMS L______, et de "Mme Q______", responsable des soins au sein de l'EMS précité.

La question de la recevabilité de ces réquisitions de preuve, qui n'ont pas fait l'objet de conclusions, ont été formulées après l'écoulement du délai de recours et sont dans l'ensemble dépourvues de motivation, peut demeurer ouverte. En effet, les mesures d'instruction sollicitées ne sont pas pertinentes dans le cadre de la présente procédure, qui porte uniquement sur le choix des curateurs, étant encore ajouté que le certificat médical du 28 février 2024 de la Dre I______, de même que les écrits de M______ exposant la situation de conflit entre les curateurs, ont été versés à la procédure.

La Chambre de surveillance s'estime suffisamment renseignée par l'instruction menée par le Tribunal de protection ainsi que par les diverses écritures et pièces déposées par les intervenants à la procédure dans le cadre des présents recours.

1.5 Le recours peut être formé pour violation du droit, constatation fausse ou incomplète des faits pertinents et inopportunité de la décision (art. 450a al. 1 CC).

2. 2.1.1 Selon l'art. 390 CC, l'autorité de protection de l'adulte institue une curatelle notamment lorsqu'une personne majeure est partiellement ou totalement empêchée d'assurer elle-même la sauvegarde de ses intérêts en raison d'une déficience mentale, de troubles psychiques ou d'un autre état de faiblesse qui affecte sa condition personnelle (ch. 1).

2.1.2 A teneur de l'art. 400 al. 1 CC, l'autorité de protection nomme curateur une personne physique qui possède les connaissances et les aptitudes nécessaires à l'accomplissement des tâches qui lui sont confiées, qui dispose du temps nécessaire et qui les exécute en personne. Plusieurs personnes peuvent être désignées, si les circonstances le justifient. Celles-ci peuvent accomplir cette tâche à titre privé, être membre d'un service social privé ou public, ou exercer la fonction de curateur à titre professionnel. La loi, à dessein, n'établit pas de hiérarchie entre les personnes pouvant être désignées, le critère déterminant étant celui de leur aptitude à accomplir les tâches confiées. La complexité de certaines tâches limite d'ailleurs le recours à des non-professionnels, même si ceux-ci sont bien conseillés et accompagnés dans l'exercice de leur fonction (Message du Conseil fédéral, FF 2006, p. 6682/6683).

2.1.3 Lorsque la personne concernée propose une personne comme curateur, l'autorité de protection de l'adulte accède à son souhait pour autant que la personne proposée remplisse les conditions requises et accepte la curatelle (art. 401 al. 1 CC). L'autorité de protection de l'adulte prend autant que possible en considération les souhaits des membres de la famille ou d'autres proches (art. 401 al. 2 CC). Elle tient compte autant que possible des objections que la personne concernée soulève à la nomination d'une personne déterminée (art. 401 al. 3 CC).

Les vœux de la famille sont pris en considération lorsque la personne sous curatelle ne veut ou ne peut pas se prononcer elle-même ou lorsque la personne qu'elle propose ne possède pas les aptitudes nécessaires et que l'entourage est en mesure de trouver un curateur compétent. L'autorité de protection acceptera autant que possible la proposition de ces personnes, mais elle n'est pas tenue de le faire (Message du Conseil fédéral, FF 2006, p. 6684).

Des considérations d'ordre psychologique ou sociologique qui ne prêtent généralement pas à conséquence posent, dans de nombreuses situations, des problèmes lorsqu'il s'agit de confier à un membre de la parenté l'exercice d'un mandat de curatelle, même si ceux-ci possèdent les qualifications voulues; les relations avec la parenté comportent aussi une dimension émotionnelle – positive ou source de conflits – ce qui ne permet pas au curateur de prendre la distance suffisante par rapport aux événements et l'empêche de prendre les décisions pertinentes et allant dans le sens des intérêts de la personne à protéger (DAS/205/2019 du 11 octobre 2019; Häfeli, in CommFam Protection de l'adulte, 2013, n. 3 ad. Art. 401 CC).

2.2 En l'espèce, le Tribunal de protection a confié à D______ la tâche de représenter la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d’affaires administratives et juridiques, gérer les revenus et biens de la personne concernée et administrer ses affaires courantes, à B______ la tâche de veiller au bien-être social de la personne concernée et de la représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre, enfin, à C______ celle de veiller à l’état de santé de la personne concernée, mettre en place les soins nécessaires et, en cas d’incapacité de discernement, la représenter dans le domaine médical.

C______ sollicite d'être désigné co-curateur, aux côtés de D______, en matière d’affaires administratives et juridiques, de gestion des revenus et biens de la personne concernée et d'administration de ses affaires courantes. Il demande également à être désigné curateur, en lieu et place de B______, en matière d'assistance personnelle.

A______ sollicite quant à lui que les aspects thérapeutiques de la curatelle soient confiés à B______, en plus de la tâche consistant à veiller à son bien-être social.

2.2.1 En ce qui concerne tout d'abord le volet de l'assistance en matière d’affaires administratives et juridiques, de gestion des revenus et biens de la personne concernée et d'administration de ses affaires courantes, C______ expose qu'il dispose des compétences et du temps libre nécessaires pour assurer une telle mission et qu'il entretient une bonne collaboration avec les mandataires œuvrant sur ses aspects. Il argue qu'il serait dans l'intérêt de la personne concernée qu'il soit en mesure de vérifier les notes d'honoraires de D______ et, cas échéant, de B______ "sans que le secret professionnel ne puisse y faire obstacle".

Or, on ne voit pas en quoi une co-curatelle serait justifiée par les circonstances d'espèce. Les compétences de D______ pour assurer l'entier de la mission qui lui a été dévolue ne sont remises en cause par personne. Le prénommé, avocat et mandataire de la personne concernée depuis plusieurs années, a du reste indiqué bien connaître le patrimoine financier de A______, ce qui facilitera d'autant l'exécution de ses tâches.

De surcroît, lors de l'audience devant le Tribunal de protection, A______ a exprimé sa confiance envers D______, déclarant en revanche qu'il ne souhaitait pas que son fils soit désigné aux fonctions de curateur, ce dont il y a lieu de tenir compte.

Enfin, les notes d'honoraires des curateurs sont contrôlées par le Tribunal de protection, de sorte qu'il n'y a nul besoin d'une co-curatelle pour préserver les intérêts financiers de la personne concernée sous cet angle.

Il convient dès lors de rejeter le recours de C______ sur ce point.

Le chiffre 3 du dispositif de l'ordonnance attaquée sera ainsi confirmé.

2.2.2 S'agissant des volets relevant de la santé et de l'assistance personnelle, les recourants s'accordent pour dire qu'ils ne devraient pas être dissociés comme l'a prévu le Tribunal de protection, mais dévolus à la même personne. Les événements survenus depuis la notification de l'ordonnance attaquée révèlent en effet que la répartition des tâches décidée par le Tribunal de protection entre les deux curateurs, dont les opinions divergent sur des questions aussi essentielles que celle du lieu de vie, a conduit à des situations de blocage et de confusion qui ont impacté le bien-être et la stabilité de la personne concernée, celle-ci s'étant notamment vue ramenée à l'EMS en fin de soirée par la police alors qu'elle se trouvait chez elle.

La clarification des compétences apportée par le Tribunal de protection s'agissant du choix du lieu de vie de A______ et son retour à domicile n'excluent pas que de nouveaux conflits préjudiciables aux intérêts de la personne concernée ne surgissent entre les curateurs. En effet, comme l'a rappelé le Tribunal de protection, des interactions indispensables continueront d'exister entre les prestations de soins de santé et de bien-être social.

Les curateurs désignés par le Tribunal de protection ayant démontré leur approche très différente et leur incapacité à s'entendre pour le bien de la personne protégée, il convient, ainsi qu'ils le préconisent eux-mêmes, de confier ces deux volets à la même personne.

2.2.3 Dans le choix du curateur, il importe de considérer que A______ a, de manière constante, exprimé la volonté que son fils ne soit pas désigné à cette fin. Si, de manière générale, C______ affirme que son père est désormais incapable de discernement, il ne prétend toutefois pas que celui-ci serait dans l'impossibilité d'exprimer un choix éclairé s'agissant de la personne du curateur. A cet égard, il y a lieu de relever que A______ a été en mesure d'expliquer sa position, en indiquant que les relations avec son fils pouvaient être difficiles et en évoquant un manque de confiance. Il s'agit dès lors d'entendre l'avis de la personne concernée sur cette question, étayé par des explications suffisantes.

C______ soutient que B______ ne dispose pas des aptitudes nécessaires à l'accomplissement des tâches de curateur. Il lui reproche essentiellement d'avoir œuvré pour le retour à domicile de son père alors que tant les médecins de l'unité psychiatrique des HUG que ceux de l'Hôpital G______ avaient recommandé une institutionnalisation en EMS.

Si, effectivement, les médecins ont généralement préconisé que A______ intègre un EMS, la situation du prénommé a ceci de particulier qu'il jouit de moyens financiers permettant de mettre en place, à domicile, un réseau de soins conséquent autour de sa personne, ce que C______ a pourtant constamment refusé d'envisager. Ainsi, B______ a exposé les divers aménagements mis en place afin de garantir le bien-être et la santé de A______ depuis son retour à domicile, comprenant notamment la présence permanente d'un prestataire de soins à domicile, des passages infirmiers journaliers ainsi que l'installation de dispositifs ergonomiques.

Considérant la volonté affirmée de la personne concernée de rester à la maison et les moyens mis en œuvre pour assurer ce maintien à domicile, on ne voit pas que les démarches entreprises par B______ révèleraient son inaptitude à exercer le mandat de curatelle s'agissant des volets litigieux. Elles paraissent au contraire adéquates, tout du moins à ce stade, la question du lieu de vie pouvant toujours être reconsidérée ultérieurement, selon l'évolution de l'état de santé et des besoins de la personne concernée.

Au regard de ce qui précède, il convient de confirmer B______ dans les tâches qui lui ont été dévolues et de lui confier, de surcroît, celle de veiller à l'état de santé de A______ et de le représenter à cet égard si besoin, ces deux volets de la curatelle étant étroitement liés.

Il est à espérer que l'absence de pouvoir décisionnel du fils sur certains aspects de la vie de son père contribuera à des relations plus apaisées entre eux. Affaibli dans sa santé, A______ a sans aucun doute besoin de ses proches afin de lui apporter soutien et réconfort, quel que puisse être le nombre de professionnels qui l'entourent. Dans cette optique, B______, en sa qualité de curateur thérapeutique et d'assistance personnelle, est invité à collaborer avec le fils du concerné, notamment en lui fournissant les informations susceptibles de répondre aux préoccupations légitimes de celui-ci s'agissant du bien-être et de la santé de son père.

Les chiffres 2, 4 et 5 du dispositif de l’ordonnance attaquée seront par conséquent annulés et il sera statué conformément à ce qui précède.

3.   Les frais judiciaires seront arrêtés à 1'000 fr. (art. 67A et 67B RTFMC). Vu l'issue des deux recours, ils sont mis à la charge de C______ et compensés avec les avances de frais fournies à hauteur de 600 fr. et 400 fr., lesquelles restent acquises à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC). C______ sera condamné à verser à A______ la somme de 400 fr. au titre de remboursement de son avance.

ll n'est pas alloué de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :


A la forme :

Déclare recevable le recours formé le 26 juillet 2024 par A______ contre l’ordonnance DTAE/4747/2024 rendue le 28 mai 2024 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la cause C/6044/2024.

Déclare recevable le recours formé le 7 août 2024 par C______ contre l’ordonnance DTAE/4747/2024 rendue le 28 mai 2024 par le Tribunal de protection de l’adulte et de l’enfant dans la même cause.

Au fond :

Annule les chiffres 2, 4 et 5 du dispositif de cette ordonnance et cela fait, statuant à nouveau sur ce point :

Désigne D______ et B______ aux fonctions de curateurs.

Confie à B______ la tâche de veiller au bien-être social de la personne concernée et la représenter pour tous les actes nécessaires dans ce cadre, de veiller à son état de santé, mettre en place les soins nécessaires et, en cas d’incapacité de discernement, la représenter dans le domaine médical.

Confirme l’ordonnance attaquée pour le surplus.

Déboute les recourants de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires à 1'000 fr., les met à la charge de C______ et les compense avec les avances effectuées, lesquelles demeurent acquises à l'Etat de Genève.

Condamne en conséquence C______ à verser à A______ la somme de 400 fr. au titre de remboursement de son avance.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Stéphanie MUSY, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.