Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/498/2025 du 27.06.2025 ( PC ) , REJETE
En droit
rÉpublique et | canton de genÈve | |
POUVOIR JUDICIAIRE
| ||
A/1182/2025 ATAS/498/2025 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 27 juin 2025 Chambre 5 |
En la cause
A______
| recourant |
contre
SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES | intimé |
A. a. A______ (ci-après : l’intéressé), né en ______ 1977, est divorcé et père de l’enfant B______, née en novembre 2010 et placée sous sa garde exclusive. Il est bénéficiaire de prestations complémentaires depuis plusieurs années.
b. À la fin de chaque année civile, le service des prestations complémentaires (ci‑après : SPC) a envoyé un courrier à l’intéressé, dans lequel il rappelait que ce dernier avait une obligation de renseigner, par laquelle il devait signaler, sans délai, les changements dans sa situation personnelle et/ou financière. Il devait, notamment, annoncer toute augmentation ou réduction des revenus et/ou des rentes et/ou de la fortune mobilière et/ou immobilière en Suisse et à l’étranger. Il était encore spécifié qu’en cas d’omission ou de retard, il s’exposait à une demande de restitution des prestations versées indûment, voire à des poursuites pénales.
c. Par courrier du 25 mai 2024, l’intéressé a informé le SPC qu’il avait perçu des prestations de l’assurance-invalidité, comme cela résultait de la copie de la décision de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI) du 12 décembre 2023 qui était jointe au courrier. Ladite décision mentionnait le versement d’une rente mensuelle complémentaire pour l’enfant B______, liée à la rente invalidité de sa mère, de CHF 765.-, pour la période allant du 1er avril au 31 décembre 2022 et de CHF 784.- par mois pour la période débutant le 1er janvier 2023. Au total, il s’agissait d’un paiement rétroactif de CHF 16'223.- en faveur de l’intéressé.
d. Par décision du 9 décembre 2024, le SPC a informé l’intéressé qu’il avait procédé au recalcul de ses droits et qu’au regard des prestations déjà versées pour l’intéressé pour la période allant du 1er avril 2022 au 31 décembre 2024, son droit aux prestations s’élevait à CHF 75’695.- alors que le total des prestations déjà versées s’élevait à CHF 88'163.-. Il en résultait un solde rétroactif, en faveur du SPC, d’un montant de CHF 12’468.-.
B. a. Par courrier du 3 février 2025, l’intéressé a réagi à la demande de remboursement en demandant au SPC de lui fixer un rendez-vous afin de discuter de ce qu’il qualifiait « d’aberration ». Il précisait qu’il serait accompagné de C______. Un rendez-vous lui a été fixé en date du 27 février 2025.
b. Par courrier du 3 mars 2025, l’intéressé a demandé la remise de l’intégralité du montant dont le remboursement était réclamé par le SPC, exposant notamment qu’il ne disposait pas de cette somme. Il ajoutait qu’il avait déjà envoyé au SPC, à deux reprises, la copie de la décision de l’OAI du 12 décembre 2023, qui mentionnait les prestations versées pour sa fille B______, une première fois en janvier 2024 et la deuxième fois en mars 2024, ce que le SPC contestait. Il avait une fois encore envoyé la décision de l’OAI avec un courrier recommandé d’accompagnement du 25 mai 2024.
c. Par décision du 13 mars 2025, le SPC a refusé la demande de remise de l’intéressé au motif qu’il ne remplissait pas la condition de la bonne foi. La rente complémentaire enfant AVS/AI se rapportant à la mère de B______ avait été versée à l’intéressé, qui ne l’avait pas signalée. Partant, l’intéressé n’avait pas respecté son obligation de renseigner spontanément et rapidement le SPC de tout changement dans sa situation personnelle et/ou financière de telle sorte que la condition de la bonne foi ne pouvait lui être reconnue.
d. Par courrier du 20 mars 2025, l’intéressé s’est opposé à la décision de refus de remise, insistant sur le fait qu’il avait communiqué au SPC le courrier de l’OAI, à deux reprises, en janvier et en mars 2024 sans que le SPC en tienne compte. Il reconnaissait n’avoir pas joint un courrier d’accompagnement à la décision de l’OAI mais il avait semblé évident que s’il envoyait ce courrier dans une enveloppe portant ses coordonnées, le SPC en tiendrait compte dans le cadre de son dossier. De surcroît, il alléguait n’avoir pas reçu le courrier du 9 décembre 2024 avant le 28 janvier 2025 et encourageait le SPC à entreprendre des recherches car, disait-il, « les deux courriers doivent être chez vous ».
e. Par décision sur opposition du 28 mars 2025, le SPC a rejeté l’opposition et confirmé sa décision du 13 mars 2025, au motif qu’en dépit des allégations de l’intéressé, ce dernier n’apportait aucune preuve démontrant qu’il avait communiqué le changement de situation au SPC. Partant, ce dernier considérait qu’il n’avait appris l’existence de la rente perçue pour la fille de l’intéressé qu’en date du 27 mai 2024, date de réception de la correspondance de l’intéressé du 25 mai 2024. Dès lors, l’intéressé restait devoir au SPC le montant de CHF 12'468.-.
C. a. Par acte posté en date du 3 avril 2025, l’intéressé a interjeté recours contre la décision sur opposition du 28 mars 2025 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans). Le recourant contestait la position du SPC selon laquelle ce dernier n’avait jamais reçu les deux courriers d’information de l’intéressé. De surcroît, il expliquait n’avoir pas les moyens de rembourser le montant demandé dès lors qu’il avait utilisé ces fonds pour rembourser ses dettes. Il demandait à la chambre de céans s’il avait besoin d’un avocat pour le représenter et concluait, implicitement, à l’annulation de la décision.
b. Par courrier du 11 avril 2025, la chambre de céans a informé le recourant qu’elle n’était pas habilitée à se prononcer sur le besoin éventuel d’un avocat mais qu’à toutes fins utiles, elle lui remettait, en annexe, une liste d’adresses utiles en cas de litige.
c. Par réponse du 24 avril 2025, le SPC a considéré que le recourant n’invoquait dans son écriture aucun nouvel argument ni n’apportait de nouvel élément susceptible de conduire l’intimé à une appréciation différente du cas et a conclu au rejet du recours.
d. Par réplique du 14 mai 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions, relevant notamment qu’il avait toujours remis en temps et en heure, l’ensemble des documents concernant l’évolution de sa situation personnelle. Il sollicitait une comparution personnelle, de manière à pouvoir être entendu sur ce qui précédait. Il précisait que l’OAI avait pris la décision d’allouer une rente pour enfants à B______, dès le mois d’avril 2022, puis avait versé un montant rétroactif depuis cette date. Il considérait que le fait que le SPC ait été informé de la décision au mois de janvier 2024 ou au mois de mai 2024 ne changeait strictement rien quant au calcul du montant rétroactif dû jusqu’au mois de décembre 2023. Tout au plus pouvait-on lui reprocher une négligence légère pour les prestations reçues du mois de janvier au mois de mai 2024, mais non pas pour la période antérieure.
e. La chambre de céans a appointé une audience de comparution personnelle des parties, qui s’est déroulée le 12 juin 2025. Lors de celle-ci, le recourant s’est présenté accompagné de C______, mère de D______, la deuxième enfant du recourant et a expliqué qu’elle s’occupait des affaires administratives du recourant.
La chambre de céans a décidé de l’entendre à titre de renseignement.
Elle a confirmé qu’elle aidait le recourant dans le cadre de toutes ses démarches administratives et être intervenue dans la présente cause. Elle avait vu la décision qui avait été rendue par l’OAI et qui concernait les prestations servies à la mère de B______ mais qui devaient être versées au recourant car c’était ce dernier qui avait la garde exclusive de l’enfant. Elle confirmait n’avoir pas communiqué la copie de la décision de l’OAI au SPC, car le recourant l’avait glissée dans une enveloppe, sans ajouter de lettre d’accompagnement. Elle pouvait confirmer avoir vu les deux enveloppes, sur lesquelles était inscrit le nom du SPC, de mémoire au mois de décembre ou février, pour les deux premières enveloppes. S’agissant de la lettre du 25 mai 2024, elle l’avait rédigée pour le recourant, afin que ce dernier signale qu’il avait déjà envoyé à deux reprises la copie de la décision de l’OAI au SPC. Elle confirmait que le recourant faisait régulièrement appel à elle, en ce qui concernait les démarches administratives, mais que dans le cas de la transmission de la décision de l’OAI au SPC, le recourant s’était contenté d’agir comme il le faisait pour les factures destinées à son assurance-maladie, à savoir qu’il avait glissé la copie de la décision de l’OAI dans une enveloppe, qu’il avait adressée au SPC en pensant que ce service saurait ce qu’il fallait en faire. Elle ajoutait que c’était sur renseignements donnés par un employé du SPC dénommé E______ que l’intéressé avait fait recours, en raison du fait que le SPC était intervenu trop tard et que le recourant avait donc un droit à une remise totale de son obligation de rembourser. Par ailleurs, elle a confirmé qu’elle avait prêté à plusieurs reprises de l’argent au recourant, par petites sommes, en cash, sans reconnaissance de dette car il était le père de sa fille D______ et elle avait confiance en lui. Le recourant l’avait remboursée en cash et elle n’avait pas versé ce montant sur son compte bancaire.
Le recourant a confirmé qu’il devait un montant de CHF 14’000.- à C______ et qu’il lui avait remboursé le montant de CHF 12'000.-, de mémoire en une fois. Il avait ensuite précisé avoir retiré cet argent de son compte bancaire en deux fois, mais sans savoir exactement dans quelles proportions. À la demande de la chambre de céans, il s’est engagé à lui faire parvenir, sous 10 jours, les relevés bancaires confirmant ses explications.
Le recourant a ajouté qu’il était possible que les copies de la décision de l’OAI qu’il avait transmises, à deux reprises au SPC, aient été classées, par erreur, dans le dossier de F______, la mère de B______, et non pas dans son propre dossier, ce qui expliquerait la raison pour laquelle le SPC n’en avait pas tenu compte.
Le représentant du SPC est intervenu pour souligner qu’il n’y avait aucune raison d’aller regarder le dossier de la mère de B______ ; il a confirmé que lorsqu’un document était reçu, il était tamponné avec la date du jour de la réception. À la demande de la chambre de céans, le représentant du SPC s’est engagé à aller vérifier si les copies se trouvaient dans le dossier de la mère de B______ et d’en informer la chambre de céans sous 10 jours.
Le représentant du SPC a ajouté que le montant dont le remboursement était demandé s’élevait à CHF 14'782.-, ce qui représentait une somme importante, raison pour laquelle il considérait que le recourant pouvait se rendre compte du fait qu’il avait perçu cet argent à double ; d’une part, il avait reçu les prestations complémentaires, qui étaient censées combler ce manque d’argent et d’autre part, il l’avait reçu une deuxième fois, en un paiement rétroactif, de la part de l’OAI.
Le recourant lui a répondu qu’il avait envoyé la copie de la décision de l’OAI au SPC, qui n’avait pas réagi pendant plusieurs mois, ce qui l’avait conforté dans l’idée qu’il pouvait conserver cet argent. Il en avait profité pour rembourser, au mois de décembre 2024, ses dettes à l’égard de C______.
f. Faisant suite à la demande de la chambre de céans, le recourant a transmis à cette dernière un courrier du 17 juin 2025, dont l’annexe était un justificatif comptable de Postfinance, confirmant un retrait d’espèces de CHF 15'000.-, intervenu en date du 17 décembre 2024, sur le compte du recourant.
g. Par courrier du 19 juin 2025, le SPC a informé la chambre de céans que seule la décision de l’OAI qui avait été adressée directement à F______, la mère de B______, figurait dans son dossier. Il était précisé qu’en ce qui concernait l’instruction de la cause de cette dernière, le secteur des cas nouveaux du SPC n’avait aucune raison de tenir compte de la décision relative à la rente de l’enfant B______ dès lors qu’il avait été informé que cette dernière vivait à une autre adresse [soit celle du recourant]. De surcroît, et comme cela résultait de la jurisprudence de la chambre de céans, on ne pouvait exiger du SPC qu’il fasse le lien entre deux bénéficiaires et que l’exécution du devoir de renseigner de l’un vaille également pour l’autre. Enfin, comme cela avait été soulevé lors de l’audience de comparution personnelle, le recourant ne pouvait invoquer sa bonne foi dès lors qu’il avait utilisé, pour lui-même, le montant correspondant au rétroactif de rente versé par l’OAI pour sa fille, alors même qu’il avait été averti que le calcul de ses prestations complémentaires devait être repris pour tenir compte de la rente concernée.
h. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.
i. Les autres faits et renseignements seront mentionnés, en tant que de besoin, dans la partie « En droit » du présent arrêt.
1.
1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).
Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.
1.2 Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 al. 1 LPGA).
2. Le litige porte sur le bien-fondé du refus de l'intimé d'accorder au recourant la remise de son obligation de restituer la somme de CHF 12'468.-.
3.
3.1 Selon l'art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile.
Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l'obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2019 du 9 juillet 2020 consid. 4.1).
3.2 L'art. 4 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11) précise que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l’intéressé se trouve dans une situation difficile (al. 1). Est déterminant, pour apprécier s’il y a une situation difficile, le moment où la décision de restitution est exécutoire (al. 2). La demande de remise doit être présentée par écrit. Elle doit être motivée, accompagnée des pièces nécessaires et déposée au plus tard 30 jours à compter de l’entrée en force de la décision de restitution (al. 4). La remise fait l’objet d’une décision (al. 5).
3.3 À teneur de l'art. 24 LPCC, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le règlement fixe la procédure de la demande de remise ainsi que les conditions de la situation difficile (al. 2).
3.4 L’art. 15 al. 1 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) prévoit que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile.
4.
4.1 À teneur de l'art. 31 LPGA, l'ayant droit, ses proches ou les tiers auxquels une prestation est versée sont tenus de communiquer à l’assureur ou, selon le cas, à l’organe compétent toute modification importante des circonstances déterminantes pour l’octroi d’une prestation (al. 1). Toute personne ou institution participant à la mise en œuvre des assurances sociales a l’obligation d’informer l’assureur si elle apprend que les circonstances déterminantes pour l’octroi de prestations se sont modifiées (al. 2).
Selon l'art. 24 de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance‑vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC‑AVS/AI ‑ RS 831.301), l'ayant droit ou son représentant légal ou, le cas échéant, le tiers ou l'autorité à qui la prestation complémentaire est versée, doit communiquer sans retard à l'organe cantonal compétent tout changement dans la situation personnelle et toute modification sensible dans la situation matérielle du bénéficiaire de la prestation. Cette obligation de renseigner vaut aussi pour les modifications concernant les membres de la famille de l'ayant droit.
Conformément à l'art. 11 al. 1 LPCC, le bénéficiaire ou son représentant légal doit déclarer au service tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations qui lui sont allouées ou leur suppression.
4.2 Savoir si la condition de la bonne foi, présumée en règle générale (art. 3 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210), est réalisée doit être examiné dans chaque cas à la lumière des circonstances concrètes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_269/2009 du 13 novembre 2009 consid. 5.2.1). La condition de la bonne foi doit être remplie dans la période où l’assuré concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4.1 et les références).
4.3 La jurisprudence constante considère que l’ignorance, par le bénéficiaire, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre qu’il était de bonne foi. Il faut bien plutôt qu’il ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d'emblée lorsque les faits qui conduisent à l'obligation de restituer (violation du devoir d’annoncer ou de renseigner) sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, l'assuré peut invoquer sa bonne foi lorsque l'acte ou l'omission fautifs ne constituent qu'une violation légère de l'obligation d'annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_640/2023 du 19 avril 2024 consid. 5.2, 9C_43/2020 du 13 octobre 2020 consid. 3 et 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4).
4.4 On parlera de négligence grave lorsque l'ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d'une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_ 640/2023 du 19 avril 2024 consid. 5.2 et 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4). La mesure de l'attention nécessaire qui peut être exigée doit être jugée selon des critères objectifs, où l'on ne peut occulter ce qui est possible et raisonnable dans la subjectivité de la personne concernée (faculté de jugement, état de santé, niveau de formation, etc. ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_413/2016 du 26 septembre 2016 consid. 3.1 ; Sylvie PÉTREMAND, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 69 ad art. 25 LPGA). Il faut ainsi en particulier examiner si, en faisant preuve de la vigilance exigible, l’assuré aurait pu constater que les versements ne reposaient pas sur une base juridique. Il n’est pas demandé à un bénéficiaire de prestations de connaître dans leurs moindres détails les règles légales. En revanche, il est exigible de lui qu’il vérifie les éléments pris en compte par l’administration pour calculer son droit aux prestations. On peut attendre d'un assuré qu'il décèle des erreurs manifestes et qu'il en fasse l'annonce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_498/2012 du 7 mars 2013 consid. 4.2). On ajoutera que la bonne foi doit être niée quand l’enrichi pouvait, au moment du versement, s’attendre à son obligation de restituer, parce qu’il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l’attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 CC ; ATF 130 V 414 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_319/2013 du 27 octobre 2013 consid. 2.2).
4.5 En revanche, l’intéressé peut invoquer sa bonne foi si son défaut de conscience du caractère indu de la prestation ne tient qu’à une négligence légère, notamment, en cas d’omission d’annoncer un élément susceptible d’influer sur le droit aux prestations sociales considérées, lorsque ladite omission ne constitue qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner sur un tel élément (ATF 112 V 97 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_16/2019 précité consid. 4 et 9C_14/2007 du 2 mai 2007 consid. 4 ; DTA 2003 n. 29 p. 260 consid. 1.2 et les références ; RSAS 1999 p. 384 ; Ueli KIESER, Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts - ATSG, 2020, n. 65 ad art. 25 LPGA).
5.
5.1 Les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (ci-après : DPC), valable dès le 1er avril 2011 (état au 1er janvier 2024), énoncent que si une prestation est versée à tort et que l'assuré ne pouvait s'en rendre compte en faisant preuve de l'attention minimale exigible au vu des circonstances et du cas d'espèce, force est d'admettre la bonne foi (DPC n° 4652.01). À l'inverse, nul ne peut invoquer sa bonne foi si elle est incompatible avec l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui. Ainsi, la condition de la bonne foi n'est pas réalisée lorsque le versement à tort d'une prestation complémentaire est dû à une grave négligence ou au dol de la personne tenue à restitution. Tel est le cas si, lors de la demande ou de l'examen des conditions économiques, certains faits n'ont pas été annoncés ou que des indications fausses ont été fournies intentionnellement ou par négligence grave ; il en est de même lorsqu'un changement dans la situation personnelle ou matérielle n'a, intentionnellement ou par grave négligence, pas été annoncé ou l'a été avec retard, ou lorsque des prestations complémentaires indues ont été acceptées en connaissance de leur caractère indu (DPC n° 4652.02). Commet une négligence grave celui qui, lors de la demande de prestation, de l'examen des conditions du droit, ou du paiement de la prestation complémentaire indûment versée, ne fait pas preuve du minimum d'attention que l'on est en droit d'exiger de lui en fonction de ses compétences et de son degré de formation. Fait preuve de négligence grave la personne qui omet d'annoncer une modification de son revenu, qu'il soit obtenu sous forme de rente ou en vertu de l'exercice d'une activité lucrative, ou qui ne contrôlant pas – ou seulement à la légère – la feuille de calcul des prestations complémentaires, n'annonce pas une erreur de calcul qu'elle aurait facilement pu reconnaître (DPC n° 4652.03).
5.2 Le Tribunal fédéral a eu à se prononcer à de multiples reprises sur la question de la négligence grave.
À titre d’exemple, le Tribunal fédéral a retenu une négligence grave excluant toute bonne foi dans le cas :
- d’une bénéficiaire qui n’avait pas spontanément informé le service sur l’état de sa fortune, d’autant plus qu’elle avait reçu chaque début d’année des informations précises à ce sujet (arrêt du Tribunal fédéral 9C_746/2016 du 11 janvier 2017 consid. 4) ;
- d’un assuré qui aurait pu déceler que la feuille de calcul comportait une erreur manifeste en faisant preuve de l’attention nécessaire, ce quand bien même il aurait annoncé des revenus que le SPC avait omis de prendre en compte ; le Tribunal fédéral a en particulier relevé que lorsqu'une prestation complémentaire n'était que légèrement trop élevée, l'attention requise et l'obligation de signaler l'erreur lors du contrôle des relevés étaient moins strictes que dans le cas de la perception d'une prestation de plusieurs centaines de francs trop élevée chaque mois, qui devrait être constatée sans plus attendre (arrêt du Tribunal fédéral 9C_385/2013 du 19 septembre 2013 consid. 4.4 ; pour un cas d’application, voir l’arrêt du Tribunal fédéral 9C_720/2013 du 9 avril 2014 consid. 4.5, dans lequel la prestation complémentaire annuelle a été réduite de CHF 150.-) ;
- d’un couple qui n’avait pas réagi à une décision erronée accroissant les prestations complémentaires versées, alors qu’il avait annoncé la perception d’une nouvelle rente devant aboutir à une diminution des prestations ; le Tribunal fédéral a relevé qu’un examen sommaire de la feuille de calcul, qui ne présentait aucune difficulté de lecture ou de compréhension, aurait permis à l’intéressé de constater que les revenus annoncés n’avaient pas été pris en considération ; le manque de vigilance de l’assuré, qui avait omis de contrôler la feuille de calcul et d’informer l’administration de l’erreur manifeste qu’elle venait de commettre, excluait sa bonne foi (arrêt du Tribunal fédéral 9C_189/2012 du 21 août 2012 consid. 4) ;
- d’un bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait passé sous silence l'augmentation du revenu de son épouse, en violation de son obligation de renseigner (arrêt du Tribunal fédéral P 17/03 du 3 février 2004 consid. 4.1).
En revanche, la condition de la bonne foi a été considérée comme remplie dans le cas :
- d’une épouse d’un bénéficiaire, auquel les prestations étaient versées, qui n’avait pas annoncé sa séparation, dès lors que l’intéressée ne disposait d’aucun droit propre ou autonome ni n’était soumise à aucune obligation découlant du Code civil suisse vis-à-vis du service ; le seul fait que l’intéressée avait signé le formulaire de demande en sa qualité d’épouse d’un requérant de prestations complémentaires et qu’elle avait joué un rôle dans le calcul des prestations allouées à son ex-mari ne suffisait pas pour en faire une bénéficiaire de prestations ni une personne soumise à l’obligation de restituer du vivant de son mari au sens de l’art. 2 al. 1 OPGA ; on ne pouvait par conséquent lui reprocher d’avoir violé un quelconque devoir d’annoncer et sa bonne foi devait être reconnue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_638/2014 du 13 août 2015 consid. 6) ;
- d’une bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait omis d’annoncer une rente AI versée à son conjoint, dont une partie était versée avec effet rétroactif : la bonne foi de l’intéressée a été admise pour la période correspondant au versement rétroactif de la rente AI ; la Haute cour a rappelé que la condition de la bonne foi devait être réalisée dans la période où l'assurée concernée avait reçu les prestations indues dont la restitution était exigée, en l'occurrence les prestations complémentaires, et que durant cette période, les revenus du couple ne comprenaient effectivement que la rente AI perçue par la bénéficiaire, son époux n'ayant encore touché aucun montant de la part de l'assurance-invalidité ; au moment où elle avait perçu les prestations complémentaires, elle avait donc disposé à bon droit de celles-ci (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4.1) ;
- d’une bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait vu sa rente AVS augmenter au décès de son époux et qui avait informé uniquement la caisse de compensation du décès de celui-ci, à l’exclusion des autres assureurs ; les juges cantonaux avaient retenu que le regroupement géographique de différentes caisses était susceptible de créer une certaine confusion dans l’esprit des assurés, a fortiori chez ceux d’un certain âge, et que la négligence reprochée à l’assurée ne pouvait être que légère, ce que le Tribunal fédéral a confirmé (arrêt du Tribunal fédéral P 36/02 du 23 décembre 2002 consid. 3.2).
6.
6.1 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 193 consid. 2 et les références).
6.2 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références ; 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 et les références). Aussi n’existe‑t‑il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).
7.
En l'espèce, le recourant, allègue avoir transmis sans délai la copie de la décision de l’OAI du 12 décembre 2023 au SPC et avoir ainsi rempli son obligation de renseigner, raison pour laquelle sa bonne foi doit être admise, de même que sa demande de remise de son obligation de rembourser.
Le SPC, en revanche, soutient que ce n’est qu’en mai 2024, soit cinq mois après avoir reçu la décision, que le recourant a informé le SPC, tout en prétendant ne plus être en possession de la somme versée, qu’il avait utilisée pour régler ses dettes.
7.1 En dépit des explications du recourant, ce dernier n’a pas été en mesure de démontrer qu’il avait, dès le mois de janvier 2024, transmis la copie de la décision de l’OAI au SPC. Après avoir effectué des recherches sous le dossier de F______, mère de l’enfant du recourant, le SPC a confirmé qu’il n’y avait pas de trace d’un courrier qui aurait été envoyé par ce dernier.
Entendue par la chambre de céans, C______ a déclaré avoir rédigé la lettre du 25 mai 2024 mais n’a pas été en mesure de confirmer que le recourant avait déjà envoyé la copie de la décision de l’OAI au mois de janvier ou de février 2024 au SPC.
À l’aune de ce qui précède, le recourant n’est pas parvenu à démontrer au degré de la vraisemblance prépondérante qu’il avait informé sans délai le SPC et la violation de son obligation de renseigner doit être retenue.
7.2 S’ajoute à cela qu’après avoir reçu copie de la pièce de PostFinance confirmant le retrait d’un montant de CHF 15’000.- par le recourant, en date du 17 décembre 2023, la chambre de céans considère qu’il est établi que ce dernier n’avait pas l’intention de rembourser le SPC, dès lors qu’il s’est empressé de retirer les fonds reçus de l’OAI pour payer une dette, alors même qu’il savait qu’il ne pouvait conserver cet argent.
À cet égard, il convient de rappeler les déclarations du recourant en audience, selon lesquelles il avait envoyé la copie de la décision de l’OAI au SPC, qui n’avait pas réagi pendant plusieurs mois, ce qui l’avait conforté dans l’idée qu’il pouvait disposer de cet argent.
Or, c’est l’inverse qui est démontré par la pièce comptable de PostFinance, à savoir que le recourant a commencé par retirer l’argent le 17 décembre 2023, dès réception du montant versé par l’OAI et ce n’est qu’après plusieurs mois, en mai 2024, qu’il a informé le SPC de la décision de l’OAI, tout en sachant qu’il n’était plus capable de rembourser les montants indûment versés par le SPC dès lors qu’il s’était défait d’une très grande partie des fonds pour régler ses dettes. Ce faisant, le recourant s’est volontairement dessaisi d’une somme qu’il savait devoir rembourser.
Les agissements du recourant, qui pourraient être assimilés à du dol, ne lui permettent pas d’invoquer sa bonne foi.
8.
8.1 Partant, la chambre de céans n’a d’autre choix que de rejeter le recours.
8.2 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. f bis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours recevable.
Au fond :
2. Le rejette.
3. Dit que la procédure est gratuite.
4. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.
La greffière
Véronique SERAIN |
| Le président
Philippe KNUPFER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le