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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1942/2023

ATAS/1012/2024 du 28.11.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1942/2023 ATAS/1012/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 28 novembre 2024

Chambre 3

 

En la cause

A______

représenté par Me Pierre-Bernard PETITAT, avocat

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en 1963, d’origine espagnole et de nationalité suisse, est père de quatre enfants, issus de trois unions.

b. Au bénéfice d’une formation de peintre sur voitures, l’assuré a effectué l’essentiel de sa carrière en Suisse. Après avoir travaillé dans une carrosserie, il a été employé, entre 2004 et 2007, dans le domaine des assurances où il a bénéficié de formations internes. Il a également travaillé dans le domaine de la restauration au Venezuela et en Espagne, où il a résidé de 2009 à 2018. Il est ensuite revenu en Suisse, n’a pas exercé d’activité depuis lors et est bénéficiaire de l’aide sociale.

B. a. Le 5 mars 2021, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : OAI), en invoquant une néoplasie rectale en 2013, une obésité morbide, un diabète de type II, des troubles ostéoarticulaires de l’épaule droite et des lombaires, ainsi qu’un trouble anxio-dépressif.

b. Dans un rapport du 14 mai 2021, le docteur B______, médecin traitant, a retenu comme diagnostic incapacitant un état dépressif, stable et sans évolution, une lombosciatique inflammatoire sur obésité morbide depuis 2020 et des arthralgies de type omalgies. Le médecin a également mentionné que l’assuré avait été traité pour un cancer du rectum en 2013 par chirurgie locale, sans autre traitement et qu’il était en rémission. Les limitations fonctionnelles énoncées étaient les suivantes : éviter le port de charges lourdes et les positions statiques. Le médecin traitant a estimé la capacité de son patient à exercer une activité adaptée à 30% (soit deux ou trois heures par jour).

c. Le docteur C______, psychiatre et psychothérapeute FMH, dans un rapport du 23 juin 2021, a conclu à un épisode dépressif d’intensité modérée.

Il explique que le patient lui a été adressé par son médecin-traitant en juin 2019. L’assuré est revenu en Suisse, mais sa compagne et leur fille sont restées en Espagne, ce qui a eu un impact sur sa santé psychique. La symptomatologie anxieuse et dépressive engendre de l’apathie, et une attitude de repli et d’évitement. Les répercussions des atteintes à la santé somatique sur le psychisme fluctuent en fonction de l’intensité des douleurs. Lorsque celles-ci sont très fortes, les activités sont limitées et l’humeur abaissée. Le patient conserve des ressources et une motivation mobilisables, mais son état de santé physique rend la réinsertion sur le marché de l’emploi difficile. Il est soutenu par sa famille et ses amis, et fait preuve de motivation pour améliorer sa qualité de vie. Les limitations fonctionnelles sont liées aux douleurs, qui l’empêchent de faire certains mouvements, réduisent sa mobilité et influencent son humeur.

Le psychiatre traitant a suggéré une expertise pluridisciplinaire afin d’évaluer plus précisément les limitations physiques et psychiques de son patient, qui bénéficie depuis juin 2019 d’un suivi et d’une psychothérapie d’orientation cognitive et comportementale ; il n’a pas souhaité de traitement médicamenteux, pas plus qu’il n’a accepté d’augmenter la fréquence des consultations psychothérapeutiques.

d. Le dossier a été soumis au Service médical régional de l’AI (SMR) qui, le 30 mars 2022, a constaté que ni le diabète, ni l’hypertension, ni le cancer du rectum ne constituaient des atteintes incapacitantes. Pour le surplus, il a suggéré une expertise bidisciplinaire, psychiatrique et rhumatologique, afin d’évaluer la capacité de travail de l’assuré.

e. Cette expertise a été confiée au D______ (D______), plus particulièrement aux docteures E______, spécialiste FMH en psychothérapie et psychiatrie, et Ariane F______, spécialiste FMH en rhumatologie, lesquelles ont rendu leur rapport en date du 29 juin 2022.

Au plan physique, ont été mentionnés : des lombosciatalgies droites, une périarthrite de la hanche droite, une rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, des gonalgies mécaniques des deux côtés sur de très probables troubles dégénératifs, des troubles dégénératifs du pied droit ainsi qu’une obésité sévère. Aucun diagnostic psychiatrique n’a été retenu.

De manière globale, les expertes ont retenu une capacité de travail de 100% avec un rendement diminué de 20% dans une activité adaptée telle que celle exercée précédemment par l’assuré dans les assurances (permettant d’éviter les stations debout ou assise prolongées, le port de charges, les déplacements fréquents, les mouvements répétés ou en élévation avec le membre supérieur droit et permettant de changer régulièrement de position).

f. Le 29 août 2022, le SMR s’est rallié aux conclusions de l’expertise et a admis, à compter du 1er janvier 2020, une incapacité de travail durable de 20% dans une activité adaptée telle que celle exercée précédemment.

g. Le 3 octobre 2022, l’OAI a adressé à l’assuré un projet de décision dont il ressortait qu’il se proposait de lui nier le droit à toute prestation.

h. Le 2 novembre 2022, l’assuré a contesté ce projet. Il a expliqué qu’ancien courtier en assurances, il avait souffert d’un cancer en 2013 et n’avait plus jamais retravaillé depuis. En substance, il reprochait surtout à l’OAI de ne pas avoir sollicité l’avis de ses médecins traitants quant au rapport d’expertise du 29 août 2022.

i. Par décision du 8 mai 2023, l’OAI a rejeté la demande de prestations au motif qu’à l’issue de l’instruction, il s’avérait que l’assuré disposait d’une capacité de travail de 100% dans son activité habituelle, avec une baisse de rendement de 20%, ce qui conduisait à un degré d’invalidité insuffisant pour ouvrir droit à une rente. Un reclassement ne s’avérait pas utile, puisqu’il ne permettrait pas de sauvegarder ou d’améliorer de manière notable la capacité de gain de l’intéressé.

C. a. Par écriture du 8 juin 2023, l’assuré a interjeté recours contre cette décision en concluant à l’octroi d’une rente d’invalidité et d’un reclassement professionnel.

En substance, le recourant invoque l’avis de ses médecin et psychiatre traitants.

Il rappelle qu’il bénéficie depuis juin 2019 d’un traitement et d’une psychothérapie d’orientation cognitive et comportementale.

Pour le surplus, il conteste la valeur probante de l’expertise pluridisciplinaire du 29 juin 2022 et reproche à l’intimé de ne pas avoir transmis ledit rapport à ses médecins traitants afin que ces derniers puissent se déterminer.

À l’appui de sa position, le recourant produit principalement un rapport rédigé le 4 juin 2023, par le docteur G______, spécialiste FHM en médecine interne générale.

Dans ce bref rapport, le médecin explique que son patient est significativement symptomatique au niveau des épaule et des hanches et qu’il présente une radiculalgie au membre inférieur droit. Il conclut à des limitations fonctionnelles très conséquentes des membres supérieurs dans toute activité au-delà de la hauteur des épaules et interdisant le port de charges, et signale des paresthésies qui réveillent l’assuré durant la nuit. Le médecin retient à titre de diagnostics : une tendinopathie chronique de la coiffe des rotateurs des deux côtés, une bursopathie péritrochantérienne chronique des deux côtés, une gonarthrose algique bilatérale chronique et à une lombosciatalgie L5 chronique non déficitaire sans conflit radiculaire et avec rétrécissement foraminal bilatéral.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 3 juillet 2023, a conclu au rejet du recours. Il considère que le rapport d’expertise bidisciplinaire, plus détaillé que les autres pièces médicales versées au dossier et se fondant sur une étude attentive de celui-ci, doit se voir reconnaître pleine valeur probante

c. Par écriture du 18 juillet 2023, le recourant a annoncé n’avoir pas d’autres remarques ou pièces à produire. Il a persisté dans ses conclusions.

d. La Cour de céans, par courrier du 15 décembre 2023, a invité le recourant à produire toute pièce médicale supplémentaire pouvant amener des éléments objectifs justifiant de s’écarter de l’expertise.

e. Le 15 mars 2024, le recourant a produit un nouveau rapport du Dr G______ du 13 mars 2024.

Le médecin indique que l’état de son patient n’a pas évolué depuis juin 2023, qu’il souffre depuis des années des épaules, des hanches, des genoux et de sciatalgies. Il confirme ses diagnostics et conclut qu’en raison des douleurs quotidiennes et des limitations fonctionnelles qui en découlent, son patient ne peut travailler « ne serait-ce qu’une heure », même en respectant les limitations proposées par l’expert rhumatologue. Il souligne que la prise en charge habituelle durant de longues années n’a pas permis d’améliorer son état. Les atteintes aux épaules se traduisent par une impotence claire en termes de mobilité des bras. L’antépulsion et l’abduction des membres supérieurs des deux côtés sont inférieures à 90°. L’assuré n’arrive donc pas à soulever les bras au-dessus du plan horizontal et se trouve limité dans la tenue du ménage au quotidien. Il ne peut porter de charges. Les douleurs sont par ailleurs responsables de réveils nocturnes ; il doit changer régulièrement de position dans son lit ; cela a pour conséquence une fatigue diurne. Qui plus est, la mobilisation est limitée en raison de la gonarthrose et des douleurs de hanche. Les déplacements sont donc réduits. L’assuré ne supporte pas non plus les positions statiques.

f. Par écriture du 26 mars 2024, l’intimé, après avoir soumis ce nouveau document au SMR, a persisté dans ses conclusions en rejet du recours.

g. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ – E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA – RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI – RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 À teneur de l’art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s’appliquent à l’assurance-invalidité, à moins que la loi n’y déroge expressément.

1.3 La procédure devant la Chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et de la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985 (LPA – E 5 10).

1.4 Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

2.             L’objet du litige porte le droit du recourant à une rente d’invalidité et/ou à un reclassement.

3.              

3.1 Le 1er janvier 2022, les modifications de la LAI du 19 juin 2020 (développement continu de l’AI ; RO 2021 705) et celles du 3 novembre 2021 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 (RAI – RS 831.201 ;
RO 2021 706) sont entrées en vigueur.

En l’absence de disposition transitoire spéciale, ce sont les principes généraux de droit intertemporel qui prévalent, à savoir l’application du droit en vigueur lorsque les faits déterminants se sont produits (cf. ATF 144 V 210 consid. 4.3.1 et la référence). Lors de l’examen d’une demande d’octroi de rente d’invalidité, est déterminant le moment de la naissance du droit éventuel à la rente. Si cette date est antérieure au 1er janvier 2022, la situation demeure régie par les anciennes dispositions légales et réglementaires en vigueur jusqu’au 31 décembre 2021. Si elle est postérieure au 31 décembre 2021, le nouveau droit s’applique (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_60/2023 du 20 juillet 2023 consid. 2.2. et les références).

3.2 En l’occurrence, la décision querellée concerne un premier octroi de rente dont le droit – s’il était reconnu – naîtrait avant le 31 décembre 2021. En conséquence, les dispositions légales applicables seront citées, ci-après, dans leur ancienne teneur.

4.              

4.1 Est réputée invalidité, l’incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l’ensemble ou d’une partie des possibilités de gain de l’assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d’une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu’elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2).

4.2 Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l’art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l’art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d’un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l’assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l’assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté ; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c ; 102 V 165
consid. 3.1 ; VSI 2001 p. 223 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral I 786/04 du
19 janvier 2006 consid. 3.1).

4.2.1 La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanant d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, telle la classification internationale des maladies (ci-après : CIM) ou le DSM-IV (Diagnostic and Statiscal Manual ; ATF 143 V 409 consid. 4.5.2 ; 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1 ; 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

4.2.2 Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d’évaluation de la capacité de travail, respectivement de l’incapacité
de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d’affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d’évaluation au moyen d’un catalogue d’indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d’évaluation aux autres affections psychiques
(ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d’atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d’un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au nombre desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l’art (ATF 143 V 409 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé, la portée des motifs d’exclusion définis dans l’ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l’absence d’une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d’assurance, si les limitations liées à l’exercice d’une activité résultent d’une exagération des symptômes ou d’une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d’un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d’une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, d’allégation d’intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, d’absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l’anamnèse, de plaintes très démonstratives laissant insensible l’expert, ainsi qu’en cas d’allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2 ;
132 V 65 consid. 4.2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).

4.2.3 L’organe chargé de l’application du droit doit, avant de procéder à l’examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d’une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l’assurance-invalidité, c’est-à-dire qui résiste aux motifs dits d’exclusion tels qu’une exagération ou d’autres manifestations d’un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

4.2.4 Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d’une procédure d’établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d’évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d’une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d’autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L’accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d’exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence). 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

-       Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3),

A.           Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3)

B.           Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles ; consid. 4.3.2) 

C.           Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

-       Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement ; consid. 4.4) 

Limitation uniforme du niveau d’activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l’anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

4.2.5 Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêts du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence ; 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

5.              

5.1 En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

La quotité de la rente est déterminée en fonction de l’incapacité de gain au moment où le droit à la rente prend naissance (cf. art. 28 al. 1 let. c LAI). Le droit à la rente naît au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré à fait valoir son droit aux prestations conformément à
l’art. 29 al. 1 LPGA, mais pas avant le mois qui suit le 18ème anniversaire de l’assuré (art. 29 al. 1 LAI).

5.2  

5.2.1 Pour évaluer le taux d’invalidité d’un assuré exerçant une activité lucrative, le revenu qu’il aurait pu obtenir s’il n’était pas invalide est comparé avec celui qu’il pourrait obtenir en exerçant l’activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré. Le Conseil fédéral fixe les revenus déterminants pour l’évaluation du taux d’invalidité ainsi que les facteurs de correction applicables (art. 16 LPGA et 28a al. 1 LAI).

La comparaison des revenus s’effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants des revenus sans et avec invalidité et en
les confrontant l’un avec l’autre, la différence permettant de calculer le taux d’invalidité (méthode générale de comparaison des revenus ; ATF 137 V 334 consid. 3.1.1 ; 128 V 29 consid. 1 ; 104 V 135 consid. 2a et 2b).

Selon la jurisprudence, il est possible de fixer la perte de gain d’un assuré directement sur la base de son incapacité de travail en faisant une comparaison en pour-cent. Cette méthode constitue une variante admissible de la comparaison des revenus basée sur des données statistiques : le revenu hypothétique réalisable sans invalidité équivaut alors à 100%, tandis que le revenu d’invalide est estimé à un pourcentage plus bas, la différence en pour-cent entre les deux valeurs exprimant le taux d’invalidité. L’application de cette méthode se justifie lorsque le salaire sans invalidité et celui avec invalidité sont fixés sur la base des mêmes données statistiques, lorsque les salaires avant et/ou après invalidité ne peuvent pas être déterminés, lorsque l’activité exercée précédemment est encore possible (en raison par exemple du contrat de travail qui n’a pas été résilié), ou encore lorsque cette activité offre de meilleures possibilités de réintégration professionnelle, en raison, par exemple, d’un salaire sans invalidité supérieur à celui avec invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 9C_237/2016 du 24 août 2016 consid. 2.2 et les références).

5.2.2 Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d’invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

5.2.3 On précisera également que le « marché du travail équilibré », auquel se réfèrent les art. 7 et 16 LPGA, est une notion théorique et abstraite, qui sert de critère de distinction entre les cas tombant sous le coup de l’assurance-chômage et ceux qui relèvent de l’assurance-invalidité. Elle implique, d’une part, un certain équilibre entre l’offre et la demande de main-d’œuvre et, d’autre part, un marché du travail structuré de telle sorte qu’il offre un éventail d’emplois diversifiés
(ATF 110 V 273 consid. 4b).

6.              

6.1 Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler (ATF 140 V 193 consid. 3.2 et les références ; 125 V 256 consid. 4 et les références). En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

6.2 Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n’est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu’en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l’affaire sans apprécier l’ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L’élément déterminant pour la valeur probante d’un rapport médical n’est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l’objet d’une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu’il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l’expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; 133 V 450 consid. 11.1.3 ; 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d’investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).

6.3 Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d’apprécier certains types d’expertises ou de rapports médicaux.

6.3.1 Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d’observations approfondies et d’investigations complètes, ainsi qu’en pleine connaissance du dossier, et que l’expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu’aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

6.3.2 Le but des expertises multidisciplinaires est de recenser toutes les atteintes à la santé pertinentes et d’intégrer dans un résultat global les restrictions de la capacité de travail qui en découlent. L’évaluation globale et définitive de l’état de santé et de la capacité de travail revêt donc une grande importance lorsqu’elle se fonde sur une discussion consensuelle entre les médecins spécialistes participant à l’expertise. La question de savoir si, et dans quelle mesure, les différents taux liés aux limitations résultant de plusieurs atteintes à la santé s’additionnent, relève d’une appréciation spécifiquement médicale, dont le juge ne s’écarte pas, en principe (ATF 137 V 210 consid. 3.4.2.3 ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_162/2023 du 9 octobre 2023 consid. 2.3 et les références).

6.3.3 Un rapport du SMR a pour fonction d’opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu’il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d’une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d’un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI ; ATF 142 V 58 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l’office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve ; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5 ; 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1).

6.3.4 En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l’expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l’unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S’il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l’objectivité ou l’impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a ; 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l’éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l’existence d’éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

6.3.5 On ajoutera qu’en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n’est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s’apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu’au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d’expertise (ATF 124 I 170 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l’administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu’un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion distincte. Il n’en va différemment que si ces médecins traitants font état d’éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l’expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l’expert (arrêt du Tribunal fédéral 8C_458/2023 du 18 décembre 2023 consid. 3.2 et la référence).

7.             Selon la jurisprudence, tant dans les cas de tableaux cliniques objectivables que non objectivables, le droit aux prestations de l’assurance-invalidité présuppose de la même manière une appréciation médicale compréhensible des effets de l’atteinte à la santé sur la capacité de travail et de gain. Des difficultés à clarifier des faits ou à fournir des preuves peuvent nécessiter la prise en compte – au besoin en se procurant des informations étrangères à l’anamnèse – d’autres domaines de la vie comme des comportements durant les loisirs ou des engagements familiaux. Si les effets d’une symptomatologie douloureuse objectivable ou non objectivable (par imagerie médicale) sur la capacité de travail restent vagues et indéterminés malgré des investigations consciencieuses et complètes et si les limitations ne peuvent pas être justifiées autrement que par les données subjectives fournies par la personne assurée, la preuve du fondement de la prétention n’est pas apportée et n’est pas rapportable. L’absence de preuve correspondante doit être supportée par la personne assurée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_27/2015 du 26 août 2015 consid. 6.1).

8.              

8.1 Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d’un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l’exactitude d’une allégation, sans que d’autres possibilités revêtent une importance significative ou entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 ; 139 V 176 consid. 5.3 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 135 V 39 consid. 6.1 et la référence).

8.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les références). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 – Cst; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; 122 V 157 consid. 1d).

9.             En l’espèce, la décision litigieuse, fondée sur l’avis du SMR du 29 août 2022, se ralliant lui-même aux conclusions du rapport d’expertise rhumato-psychiatrique du 29 juin 2022, retient, dès janvier 2020, une incapacité de travail de 20% dans l’activité habituelle, qualifiée par les experts d’adaptée. En l’absence d’incapacité de travail d’au moins 40% en moyenne durant une année, les conditions pour pouvoir prétendre une rente d’invalidité (art. 28 al. 1 let. b LAI) ont été niées.

Le recourant conteste les conclusions des experts en invoquant l’avis de ses médecins traitants.

9.1 Il convient dès lors d’examiner la valeur probante du rapport d’expertise bidisciplinaire, contestée par le recourant.

La Cour de céans constate en premier lieu que ce rapport a été rendu en pleine connaissance du dossier, qu’il comporte une anamnèse et un status rhumatologique et psychiatrique fouillés, qu’il se fait l’écho des plaintes de l’assuré, que les diagnostics et les conclusions sont bien motivés et que le volet psychiatrique est articulé autour de la grille d’analyse structurée prévue par la jurisprudence. Aussi convient-il en principe d’en reconnaître la valeur probante.

Il ressort en synthèse de ce rapport qu’en l’absence de limitation fonctionnelle d’ordre psychique, seuls les diagnostics relatifs aux atteintes somatiques ont été reconnus comme ayant des répercussions sur la capacité de travail.

Sur le plan psychique, l’experte n’a retenu aucun diagnostic invalidant. Elle a précisé avoir noté une discordance entre les données objectives de l’examen clinique psychiatrique et les plaintes de l’assuré. En particulier, n’ont été relevés ni signes d’asthénie physique ou psychique, ni troubles de la concentration. Le diagnostic d’épisode dépressif moyen a donc été écarté en l’absence de critères suffisants. L’assuré est apparu autonome dans les actes de la vie quotidienne et ses plaintes sont apparues essentiellement liées aux difficultés sociales financières et familiales. Les ressources ont été qualifiées de bonnes. L'examen clinique a été décrit comme peu contributif sur le plan psychiatrique. Les plaintes de l’assuré étaient peu précises et liées principalement aux douleurs et à ses difficultés sociales, familiales et financières.

Sur ce plan, on notera que l’experte a expliqué les raisons qui l’amenaient à s’écarter du diagnostic d’épisode dépressif moyen retenu par le psychiatre traitant. D’ailleurs, le psychiatre traitant a lui aussi fait état, chez son patient, de ressources mobilisables. Il est par ailleurs intéressant de remarquer qu’il a expressément mentionné que c’était l’état de santé physique de son patient qui rendait sa réinsertion sur le marché de l’emploi difficile. En définitive, le psychiatre traitant ne s’est pas prononcé sur la capacité de travail de son patient. C’est lui qui a suggéré la mise en place d’une expertise à cette fin. En l’état, force est de constater que, sur le plan psychique, aucun élément objectif n’est amené qui pourrait faire douter des conclusions de l’expertise.

S’agissant des atteintes somatiques, l’experte en a retenu plusieurs : des lombosciatalgies droites de longue date, augmentées depuis environ trois ans, des gonalgies de type mécanique apparues progressivement suite à des arthroscopies des genoux, des douleurs de l’épaule droite en augmentation progressive depuis quatre à cinq ans et des douleurs au pied droit, en charge principalement, depuis environ cinq ans. Il a été relaté que les douleurs lombaires étaient toujours présentes, constantes, surtout la journée, en position assise ou debout prolongée, que l’assuré se plaignait de gonalgies bilatérales à la marche avec des épisodes de lâchages ou de blocages et une tuméfaction occasionnelle, que les douleurs de l’épaule étaient également présentes selon les mouvements et que les douleurs nocturnes réveillaient l’assuré à plusieurs reprises durant la nuit ; il signalait aussi d’importantes douleurs au niveau du gros orteil du pied droit, à la marche et dans les chaussures.

À l’examen clinique, l’experte a observé une obésité sévère, l’absence de troubles statiques, un discret syndrome vertébral lombaire, une épaule droite douloureuse et limitée dans tous les plans, un genou indolore avec un discret épanchement des deux côtés, un hallux valgus débutant au pied droit avec une mobilité de l’hallux limitée. Elle a noté qu’une imagerie par résonance magnétique lombaire effectuée en février 2021 avait montré une discopathie débutante L4-L5 et L5-S1 sans conflit disco-radiculaire évident et des sacro-iliaques normales. Une IRM de l’épaule droite pratiquée en septembre 2020 avait décrit une rupture complète de la coiffe et un remaniement important du trochiter.

En résumé, l’experte a retenu des lombosciatalgies droites avec un discret syndrome vertébral lombaire, des signes de périarthrite de la hanche droite et un status neurologique normal. L’IRM lombaire était non relevante. Les douleurs de l’épaule droite étaient en relation avec une rupture massive de la coiffe des rotateurs objectivée en 2021. Les gonalgies étaient de type mécanique, probablement en relation avec des troubles dégénératifs. Les douleurs à la marche au pied droit étaient dues à un hallux valgus débutant.

Force est donc de constater que l’experte a donc tenu compte de toutes les atteintes somatiques diagnostiquées par les médecins traitants.

Elle en a également tiré les conséquences en termes de limitations fonctionnelles : assuré limité dans la station debout ou assise prolongée, dans le port de charges et les déplacements fréquents, ainsi que pour les mouvements répétés ou en élévation du membre supérieur droit.

Dans ces conditions, la conclusion selon laquelle un travail de bureau dans les assurances serait une activité adaptée n’apparaît pas critiquable. Il a été tenu compte tant des atteintes somatiques que de leurs conséquences pour évaluer la capacité de travail dans cette activité à 100%, avec une diminution de rendement de 20% pour tenir compte des limitations (changements fréquents de positions surtout).

Le recourant admet d’ailleurs lui-même que l’experte rhumatologue a retenu les mêmes limitations fonctionnelles que son médecin traitant tout en tirant des conclusions divergentes quant à sa capacité de travail.

À l’instar de l’intimé, la Cour de céans constate que le recourant n’apporte aucun élément objectivement vérifiable de nature clinique ou diagnostique qui aurait été ignoré dans le cadre de l’expertise et qui serait suffisamment pertinent pour remettre en cause le bien-fondé des conclusions des expertes ou établir le caractère incomplet de leur rapport. Il ne suffit pas de soutenir que les expertes auraient dû conclure différemment. Le fait que les médecins traitants aient une appréciation différente n’est pas en soi déterminant selon la jurisprudence.

Il résulte de ce qui précède que les arguments invoqués par le recourant ne permettent pas de mettre en doute les conclusions du rapport d’expertise.

Quant au fait que l’intimé n’ait pas sollicité l’avis des médecins traitants, il n’est pas pertinent : l’assuré a été informé des intentions de l’intimé par le biais de la communication du projet de décision de l’OAI, il a eu l’occasion d’accéder à son dossier et la possibilité de solliciter lui-même ses médecins, ce qu’il a d’ailleurs fait.

Partant, il convient de retenir qu’il est établi, au degré de la vraisemblance prépondérante requise, que les atteintes présentées par l’intéressé ont réduit sa capacité de travail de 20% à compter de janvier 2021. Ce taux d’incapacité de travail correspond au degré d’invalidité dans la mesure où l’activité habituelle a été qualifiée d’adaptée par les expertes. Il est dès lors insuffisant pour ouvrir droit à une rente d’invalidité.

10.         Le recourant conclut également à l’octroi d’une mesure de reclassement.

10.1 Selon l’art.17 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée (al. 1er). La rééducation dans la même profession est assimilée au reclassement (al. 2). Sont considérées comme un reclassement les mesures de formation destinées à des assurés qui en ont besoin, en raison de leur invalidité, après achèvement d'une formation professionnelle initiale ou après le début de l'exercice d'une activité lucrative sans formation préalable, pour maintenir ou pour améliorer sensiblement leur capacité de gain (art. 6 al. 1 RAI).

10.2 En l’occurrence, l’activité habituelle de courtier en assurances ayant été jugée adaptée, un reclassement ne serait pas susceptible de maintenir ou améliorer sensiblement la capacité de gain de l’assuré.

C’est le lieu de rappeler par ailleurs que le droit à une mesure de réadaptation présuppose qu'elle soit appropriée au but de la réadaptation poursuivi par l'assurance-invalidité, tant objectivement – en ce qui concerne la mesure – que sur le plan subjectif – en rapport avec la personne de l'assuré. En effet, une mesure de réadaptation ne peut être efficace que si la personne à laquelle elle est destinée est susceptible, partiellement au moins, d'être réadaptée. Partant, si l'aptitude subjective de réadaptation de l'assuré fait défaut, l'administration peut refuser de mettre en œuvre une mesure (arrêt du Tribunal fédéral 9C_846/2018 du 29 novembre 2019 consid. 5.1 et les références), sans qu'il soit nécessaire de recourir à la procédure préalable de mise en demeure prévue par l'art. 21 al. 4 LPGA (arrêts du Tribunal fédéral 8C_480/2018 du 26 novembre 2018 consid. 7.3 et les références; 9C_59/2017 du 21 juin 2017 consid. 3.3 et les références), une telle procédure préalable n'étant requise que si une mesure de réadaptation a été commencée et qu'il est question de l'interrompre (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_783/2015 du 7 avril 2016 consid. 4.8.2 et les références).

En l’occurrence, l’aptitude subjective de réadaptation du recourant ne paraît pas évidente, étant rappelé qu’il n’a plus cherché à exercer une activité lucrative depuis son retour en suisse, en février 2018.

Eu égard à ce qui précède, le droit à une mesure professionnelle sous la forme d’un reclassement n’est pas ouvert, pas plus que le droit à une rente.

11.         La décision de négation de prestations de l’intimé apparaît ainsi bien fondée. Le recours est rejeté.

Bien que la procédure ne soit pas gratuite en matière d’assurance-invalidité (cf. art. 69 al. 1bis LAI), il y a lieu en l’espèce de renoncer à la perception d’un émolument, le recourant étant au bénéfice de l’assistance juridique (art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 – RFPA – E 5 10.03).

 

 

***


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Renonce à percevoir l’émolument.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le