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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1620/2024

ATAS/542/2024 du 28.06.2024 ( AJ ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1620/2024 ATAS/542/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 28 juin 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

représenté par Me Marlyse CORDONIER, avocate

 

 

recourant

 

contre

SWICA ASSURANCES SA

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré), né en ______ 1975, domicilié à Saint-Julien-en-Genevois (France), au bénéfice d’un permis G, a été engagé par B______ (ci-après : l’employeuse), sise à Meyrin, en tant qu’aide cuisinier dès le 1er juin 2022 pour une durée indéterminée. À ce titre, il était assuré contre les accidents auprès de SWICA ASSURANCES SA (ci-après : l’assureur).

b. Selon son contrat de travail, daté du 4 juillet 2022, l’assuré a été engagé pour des contributions irrégulières, rémunérées sur la base d’un salaire horaire, avec un temps d’essai de trois mois, à la suite duquel le délai de congé était d’un mois, de la 1re à la 5e année.

c. Les bulletins de salaire établis par l’employeuse, pour les mois de juin à septembre 2022, font état des cotisations versées par l’assuré pour la couverture d’assurance-accidents non professionnelle.

B. a. Le 11 octobre 2022, l’assuré a subi une agression à Genève, entraînant des atteintes à sa santé et une incapacité de travail.

b. L’agresseur a fait l’objet d’une procédure pénale pour menaces, lésions corporelles et appropriation illégitime (P/1______), pour laquelle l’assuré a bénéficié, à compter du 24 juillet 2023, de l’assistance judiciaire gratuite.

c. Par déclaration du 22 décembre 2022, l’employeuse a annoncé à l’assureur l’accident subi par l’assuré le 11 octobre 2022. Elle a indiqué, notamment, que le contrat de travail avait été résilié, que l’assuré avait été engagé du 1er juin au 31 octobre 2022 et que son dernier jour de travail, avant l’accident, avait été le 4 octobre 2022.

d. Par courriel du 31 janvier 2023, l’assuré a informé l’assureur que selon les explications fournies par son employeuse, il avait travaillé jusqu’au 6 septembre 2022.

e. Par courrier du 31 janvier 2023, l’assureur a confirmé la prise en charge des suites de l’accident, soit le versement des indemnités journalières à compter du 12 octobre 2022 et le remboursement des frais médicaux. Étant donné que le contrat de travail avait pris fin le 31 octobre 2022, les prestations étaient versées, à compter du 1er novembre 2022, directement à l’assuré. L’indemnité journalière était, provisoirement, réduite à 50%, en attendant les documents nécessaires.

f. Le 9 mars 2023, l’assureur a interpellé l’employeuse concernant certaines incohérences dans les documents transmis. En attendant ces renseignements, le versement des prestations était suspendu car l’existence d’une couverture d’assurance n’était pas établie, selon les documents à disposition de l’assureur.

g. Le 20 avril 2023, l’employeuse, soit pour elle, la fiduciaire C______ (ci-après : la fiduciaire), a expliqué que l’assuré avait été licencié oralement le 4 septembre 2022. Les rapports de travail avaient pris fin au 31 octobre 2022, soit à l’échéance du délai de congé. Toutefois, étant donné que l’assuré était rémunéré sur la base d’un salaire horaire, il n’avait reçu aucun salaire postérieurement au 4 septembre 2022. L’employeuse a également indiqué le nombre d’heures effectuées par l’assuré, du 29 août au 4 septembre 2022 (note téléphonique et questionnaire datés du 20 avril 2023).

h. Lors d’un entretien téléphonique avec l’assureur le 2 mai 2023, l’assuré a expliqué que le 4 septembre 2022, son employeuse lui avait indiqué qu’elle avait moins de travail et qu’il effectuerait moins d’heures. Il n’avait pas reçu de lettre de licenciement. L’employeuse l’avait recontacté, une fois, en octobre 2022 pour faire des heures, mais il n’avait pas pu. Le 12 octobre 2022, soit le lendemain de l’accident, il s’était rendu chez son employeuse pour récupérer son permis de travail, mais celle-ci ne lui avait pas dit qu’il était licencié. C’était l’avocate de l’assuré qui l’avait informé de la fin du contrat au 31 octobre 2022 et il n’avait récupéré ses affaires, chez son employeuse, qu’à la fin du mois d’octobre 2022.

i. Le 17 mai 2023, l’assuré, soit pour lui, Maître Marlyse CORDONIER, avocate à Genève, a requis une copie de son dossier.

j. Le 9 juin 2023, à la demande de l’assureur, la fiduciaire a transmis une copie du contrat de travail daté du 4 juillet 2022. Elle a précisé notamment que le licenciement de l’assuré n’avait pas été confirmé par écrit et que ce dernier n’avait pas été informé de la possibilité de conclure une assurance par convention, dans les suites de son licenciement.

k. Le 24 juillet 2023, l’assuré a requis, notamment, le versement des prestations. Étant donné que son contrat de travail avait pris fin au 31 octobre 2022, et qu’il avait travaillé plus de huit heures par semaine, il était assuré contre les accidents non professionnels à la date de l’accident. Si, par impossible, l’assureur refusait de lui verser tout ou partie des prestations, l’assuré sollicitait l’octroi de l’assistance juridique gratuite, étant donné qu’il était sans revenu.

l. Le 8 août 2023, à la demande de l’assureur, GASTROSOCIAL, caisse de compensation, a transmis les extraits des comptes individuels de l’assuré.

m. Par courriel du 11 septembre 2023, la fiduciaire a confirmé que son mandant, soit l’employeuse, avait proposé à l’assuré, entre le 4 septembre 2022, date de son licenciement, et le 11 octobre 2022, date de l’accident, de travailler deux jours. L’assuré n’ayant toutefois pas travaillé, ce dernier n’avait pas perçu de salaire.

n. Par pli du 13 septembre 2023, l’assureur a refusé de prendre en charge les suites de l’accident survenu le 11 octobre 2022, au motif que ce dernier était survenu après la fin de la couverture légale des 31 jours. Le dernier jour d’activité de l’assuré au sein de l’entreprise avait eu lieu le 4 septembre 2022, date de son licenciement annoncé oralement. Par la suite, l’employeuse lui aurait proposé, à deux reprises, de travailler pour des dépannages, ce que l’assuré avait refusé. En outre, ce dernier avait confirmé qu’entre le 4 septembre et le 11 octobre 2022, il n’avait pas repris d’activité professionnelle, ne s’était pas inscrit à l’assurance-chômage et n’avait pas conclu une assurance par convention. Dès lors, la prolongation légale de la couverture d’assurance-accidents de 31 jours avait pris fin le 5 octobre 2022, de sorte que l’assureur n’était pas compétent pour verser des prestations suite à l’accident survenu le 11 octobre 2022. Il renonçait toutefois à solliciter de l’assuré le remboursement des prestations (frais médicaux et indemnités journalières) déjà versées.

o. À la demande de l’assuré, l’assureur lui a notifié une décision formelle datée du 12 octobre 2023, reprenant la teneur de sa communication précitée et précisant renoncer à solliciter le remboursement des prestations versées jusqu’au 13 septembre 2023. La prise en charge de l’événement survenu le 11 octobre 2022 était du ressort de l’assureur-maladie de l’assuré.

p. Par pli du 26 octobre 2023, l’assuré, soit pour lui son conseil, a formé opposition à cette décision, sollicitant l’assistance juridique gratuite et l’octroi de prestations suite à son accident du 11 octobre 2022. Selon l’assuré, il était clair, conformément à la Recommandation n°7/87 du 4 septembre 1987 de la Commission ad hoc sinistres LAA, qu’il avait travaillé plus de huit heures par semaine, de sorte qu’il était assuré également contre les accidents non professionnels. Par ailleurs, son contrat de travail ayant été résilié le 4 septembre 2022, soit après le temps d’essai, il avait pris fin au 31 octobre 2022. Partant, l’intéressé était encore assuré contre les accidents non professionnels à la date de l’accident survenu le 11 octobre 2022. Enfin, il avait droit à l’octroi de l’assistance juridique gratuite dès lors qu’il était sans revenu et que la condition relative aux chances de succès de son opposition était remplie étant donné que les questions juridiques en lien avec l’existence de la couverture d’assurance-accidents étaient complexes.

q. Par décision sur opposition du 12 janvier 2024, l’assureur a rejeté l’opposition. En tant qu’employé de B______, l’intéressé avait été assuré obligatoirement contre les accidents professionnels et non professionnels. L’assuré n’avait toutefois pas droit à la prise en charge des suites de son accident survenu le 11 octobre 2022, puisque ce n’était pas la résiliation des rapports de travail qui était déterminante pour savoir quand prenait fin la couverture d’assurance, mais l’existence d’un droit au salaire. En l’occurrence, ce droit avait pris fin le 4 septembre 2022, soit le dernier jour travaillé par l’assuré avant son accident, comme l’attestaient les bulletins de salaire et l’extrait de son compte individuel. Dès cette date et durant les 31 jours qui avaient suivi, l’assuré n’avait pas travaillé, refusant les heures proposées. Partant, à l’expiration du délai de 31 jours, il avait cessé d’être obligatoirement assuré contre les accidents auprès de l’assureur. L’accident du 11 octobre 2022 était donc survenu après la fin de la couverture d’assurance.

La demande d’assistance juridique gratuite était également rejetée, au motif que l’on ne se trouvait pas en présence d’un cas exceptionnel rendant l’assistance d’un avocat objectivement nécessaire ; en outre, la cause était dénuée de succès.

C. a. Par acte du 12 février 2024, l’assuré, par l’intermédiaire de son conseil, a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre cette décision, en tant que l’intimée refusait de prendre en charge les suites de l’accident (procédure enregistrée sous la cause A/513/2024) et en tant qu’elle refusait l’octroi de l’assistance juridique gratuite (procédure enregistrée sous la cause A/1620/2024), concluant, sous suite de dépens, à l’annulation de la décision litigieuse, au versement par l’intimée des prestations en lien avec l’accident du 11 octobre 2022 et à l’octroi de l’assistance juridique gratuite pour la procédure d’opposition.

S’agissant du droit à l’assistance juridique gratuite, le recourant a fait valoir que la complexité de l’état de fait et des questions de droit nécessitait une aide juridique déjà au stade de la procédure d’opposition. En effet, il s’agissait, dans un premier temps, d’examiner quand avait pris fin la relation contractuelle, eu égard à son licenciement donné oralement, ce qui ressortait du droit du travail, puis, de déterminer quand la couverture d’assurance avait pris fin, étant relevé qu’il avait été un employé occupé à temps irrégulier, de sorte que la recommandation n°7/87 du 4 septembre 1987 de la Commission ad hoc sinistres LAA s’appliquait. Même si un assistant social avait pu l’aider sur les questions de la fin des relations contractuelles, il était certain qu’il n’aurait pas été en mesure de le renseigner sur la fin de la couverture d’assurance. L’intervention d’un avocat était ainsi justifiée. En outre, les chances de succès dans la procédure d’opposition ne pouvaient être déniées au vu de la complexité juridique du cas. Enfin, la condition de l’indigence était également remplie.

b. Par décision du 27 février 2024, la Vice-présidence du Tribunal civil a mis le recourant au bénéfice de l’assistance juridique suite au dépôt de son recours.

c. Par réponse du 26 mars 2024, l’intimée a conclu au rejet du recours. L’octroi de l’assistance juridique gratuite devait être nié pour les motifs indiqués dans la décision litigieuse. En outre, le recourant aurait pu faire appel au syndicat UNIA.

d. Par réplique du 19 avril 2024, le recourant a fait valoir qu’il n’était pas en mesure de faire appel à la protection juridique du syndicat UNIA dès lors qu’il n’en était pas membre. Quoi qu’il en soit, il imaginait mal comment un assistant social aurait pu l’aider, compte tenu de la complexité des questions juridiques qui se posaient.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger sur la question de l’assistance juridique gratuite, ce dont les parties ont été informées.

 

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Les décisions qui accordent ou refusent l'assistance gratuite d'un conseil juridique (art. 37 al. 4 LPGA) sont des décisions d'ordonnancement de la procédure au sens de l'art. 52 al. 1 LPGA (ATF 131 V 153 consid. 1), de sorte qu'elles sont directement attaquables par la voie du recours devant les tribunaux des assurances institués par les cantons (art. 56 al. 1 et 57 LPGA).

1.2 Selon l’art. 58 al. 2 LPGA, si le recourant est domicilié à l’étranger, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de son dernier domicile en Suisse ou celui du canton de domicile de son dernier employeur suisse.

Le siège social de l’employeuse du recourant, lequel est domicilié en France, est situé dans le canton de Genève, de sorte que la chambre de céans est compétente à raison de la matière et du lieu pour juger du cas d’espèce.

1.3 Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

2.             Est litigieux le droit du recourant à l’assistance juridique gratuite pour la procédure non contentieuse.

3.

3.1 Aux termes de l'art. 29 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.

Par renvoi de l'art. 1 al. 1 LAA, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-accidents, à moins que la loi n'y déroge expressément. Dans la procédure administrative en matière d'assurances sociales, l'assistance gratuite d'un conseil juridique est accordée au demandeur lorsque les circonstances l'exigent (art. 37 al. 4 LPGA).

La LPGA a ainsi introduit une prétention légale à l'assistance juridique dans la procédure administrative. La jurisprudence y relative rendue dans le cadre de l'art. 4 aCst. (art. 29 al. 3 Cst.) sur les conditions de l'assistance judiciaire en procédure d'opposition (partie dans le besoin, conclusions non dépourvues de toute chance de succès, assistance objectivement indiquée d'après les circonstances concrètes) continue de s'appliquer, conformément à la volonté du législateur (ATF 132 V 200 consid. 4.1 et les références ; 131 V 153 consid. 3.1 et les références).

Les conditions d'octroi de l'assistance judiciaire gratuite sont en principe remplies si les conclusions ne paraissent pas vouées à l'échec, si le requérant est dans le besoin et si l'assistance d'un avocat est nécessaire ou du moins indiquée (ATF 128 I 225 consid. 2.5 ; 125 V 371 consid. 5b et les références ; 125 V 201 consid. 4a). Le point de savoir si l'assistance d'un avocat est nécessaire ou du moins indiquée doit être tranché d'après les circonstances concrètes objectives et subjectives. Pratiquement, il faut se demander pour chaque cas particulier si, dans des circonstances semblables et dans l'hypothèse où le requérant ne serait pas dans le besoin, l'assistance d'un avocat serait judicieuse, compte tenu du fait que l'intéressé n'a pas lui-même des connaissances juridiques suffisantes et que l'intérêt au prononcé d'un jugement justifierait la charge des frais qui en découlent (arrêt du Tribunal fédéral 8C_297/2008 du 23 septembre 2008 consid. 3.2 et les références).

3.2 Ces conditions d'octroi de l'assistance judiciaire, posées par la jurisprudence sous l'empire de l'art. 4 aCst., sont applicables à l'octroi de l'assistance gratuite d'un conseil juridique dans la procédure non contentieuse. Toutefois, le point de savoir si elles sont réalisées doit être examiné à l'aune de critères plus sévères dans la procédure administrative (arrêt du Tribunal fédéral 8C_297/2008 du 23 septembre 2008 consid. 3.3 et les références). L'assistance par un avocat s'impose uniquement dans les cas exceptionnels où il est fait appel à un avocat parce que des questions de droit ou de fait difficiles rendent son assistance apparemment nécessaire et qu'une assistance par le représentant d'une association, par un assistant social ou d'autres professionnels ou personnes de confiance d'institutions sociales n'entre pas en considération (ATF 132 V 200 consid. 4.1 et les références). À cet égard, il y a lieu de tenir compte des circonstances du cas d'espèce, de la particularité des règles de procédure applicables, ainsi que des spécificités de la procédure administrative en cours. En particulier, il faut mentionner, en plus de la complexité des questions de droit et de l'état de fait, les circonstances qui tiennent à la personne concernée, comme sa capacité de s'orienter dans une procédure. Dès lors, le fait que l'intéressé puisse bénéficier de l'assistance de représentants d'association, d'assistants sociaux ou encore de spécialistes permet d'inférer que l'assistance d'un avocat n'est ni nécessaire ni indiquée. En règle générale, l'assistance gratuite est nécessaire lorsque la procédure est susceptible d'affecter d'une manière particulièrement grave la situation juridique de l'intéressé. Sinon, une telle nécessité n'existe que lorsque à la relative difficulté du cas s'ajoute la complexité de l'état de fait ou des questions de droit, à laquelle le requérant n'est pas apte à faire face seul (ATF 130 I 180 consid. 2.2 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_297/2008 du 23 septembre 2008 consid. 3.3 et la référence).

4.              

4.1 L’art. 3 al. 2 LAA dispose notamment que l’assurance cesse de produire ses effets à la fin du 31e jour qui suit le jour où prend fin le droit au demi-salaire au moins.

L’art. 7 de l’ordonnance sur l'assurance-accidents du 20 décembre 1982 (OLAA ‑  RS 832.202) définit les éléments qui sont réputés salaire au sens de l’art. 3 al. 2 LAA.

Selon la jurisprudence, ce n’est pas la date effective de la cessation des rapports de travail qui est déterminante, mais le droit au salaire (selon la loi ou le contrat de travail) qui peut se prolonger au-delà de cette date, par exemple en raison de vacances (ATF 107 V 106 ; arrêt du Tribunal fédéral U 385/99 du 27 mars 2000 ; ATAS/192/2020 du 25 février 2020 consid. 7).

4.2 L’assureur doit offrir à l’assuré la possibilité de prolonger de six mois au plus l’assurance par convention spéciale (art. 3 al. 3 LAA).

Les conventions individuelles ou collectives sur la prolongation de l’assurance contre les accidents non professionnels doivent être conclues avant l’expiration du rapport d’assurance (art. 8 OLAA).

4.3 L’art. 27 LPGA prévoit que, dans les limites de leur domaine de compétence, les assureurs et les organes d’exécution des diverses assurances sociales sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations (al. 1). Chacun a le droit d’être conseillé, en principe gratuitement, sur ses droits et obligations. Sont compétents pour cela les assureurs à l’égard desquels les intéressés doivent faire valoir leurs droits ou remplir leurs obligations (al. 2).

S’agissant du devoir d’information en matière d’assurance-accidents, l’art. 72 OLAA dispose que les assureurs veillent à ce que les employeurs […] soient suffisamment informés de la pratique de l’assurance-accidents (al. 1). Les employeurs […] sont tenus de transmettre les informations à leur personnel […], et en particulier la possibilité de conclure une assurance par convention (al. 2).

Selon la jurisprudence, une violation de ce devoir d’informer peut avoir pour conséquence, conformément au principe de la protection de la bonne foi de l’assuré, que la couverture d’assurance soit admise même en l’absence d’une assurance par convention (cf. ATF 143 V 341 consid. 3.2.2.1 et les références ; ATAS/939/2019 du 16 octobre 2019 ; sur la présomption naturelle qu’une personne informée aurait conclu une telle convention, cf. arrêts du Tribunal fédéral 8C_434/2023 du 10 avril 2024 consid. 7.3.3. et les références, destiné à la publication ; 8C_784/2008 du 11 septembre 2009 consid. 5.4 non publié in ATF 135 V 412, mais in SVR 2010 UV n° 2 p. 7).

5.              

En l’espèce, le recourant est d’avis que la complexité de sa cause justifiait l’assistance d’un avocat, ce que l’intimée conteste.

5.1 Le recourant, qui ne dispose pas de connaissances juridiques particulières et qui a été pris en charge pour des troubles psychiques dès le 7 décembre 2022, soit dans le courant de la procédure non contentieuse (rapport du 13 juillet 2023 de la docteure D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie ; pièce 12 chargé recourant), n’était vraisemblablement pas en mesure de défendre seul ses propres intérêts dans la procédure non contentieuse, de sorte qu’une assistance par un tiers était justifiée. Ces éléments ne justifient toutefois pas à eux seuls la nécessité d’être assisté d’un avocat. Il faut, en effet, encore déterminer, au regard de la difficulté du cas du point de vue objectif, si une assistance, fournie par un assistant social ou une personne de confiance, se serait révélée suffisante, étant rappelé que l’octroi de l’assistance gratuite d’un avocat en procédure administrative est plus restrictif qu’en procédure judiciaire et qu’il s’agit là d’un choix délibéré du législateur (arrêt du Tribunal fédéral 9C_486/2013 du 2 décembre 2013 consid. 3.2.3 non publié in ATF 139 V 600).

On relèvera que le recourant a sollicité l’assistance d’un avocat pour obtenir la poursuite du versement des prestations (indemnités journalières et frais de traitement) et pour formuler une opposition à la décision de l’intimée se déclarant incompétente pour la prise en charge des suites de l’accident du 11 octobre 2022, au motif que la couverture d’assurance avait pris fin le 5 octobre 2022.

Le point de savoir si l'assistance d'un avocat est nécessaire ou du moins indiquée doit être tranché d'après les circonstances concrètes objectives et subjectives. Pratiquement, il faut se demander pour chaque cas particulier si, dans des circonstances semblables et dans l'hypothèse où le requérant ne serait pas dans le besoin, l'assistance d'un avocat serait judicieuse, compte tenu du fait que l'intéressé n'a pas lui-même des connaissances juridiques suffisantes et que l'intérêt au prononcé d'un jugement justifierait la charge des frais qui en découlent (arrêt du Tribunal fédéral 8C_297/2008 du 23 septembre 2008 consid. 3.2 et les références).

À ce stade de la procédure, dès lors que l’intimée ne contestait pas le fait que le recourant, occupé à temps irrégulier, avait été assuré, dans le cadre de son contrat de travail, pour les accidents non professionnels, il s’agissait de déterminer si l’accident avait eu lieu avant la fin de la couverture d’assurance.

Or, l’état de fait paraît présenter une complexité particulière en ce sens que le dernier jour de travail rémunéré (le 4 septembre 2022) ne coïncide pas avec le dernier jour de validité du contrat de travail (le 31 octobre 2022), ce qui a des conséquences sur le plan juridique quant à la durée de la couverture d’assurance.

Cette complexité est renforcée par l’absence d’information de l’assuré, dès lors que l’employeuse a admis ne pas avoir transmis à l’assuré de renseignements quant à la possibilité de conclure une assurance par convention.

S’y ajoute la façon dont le licenciement a été effectué, sans confirmation écrite, cet élément générant un doute quant à la date exacte de licenciement s’ajoutant au fait que l’assuré n’avait pas été rémunéré, depuis plus d’un mois, lorsque son contrat de travail s’est terminé.

À l’aune de ces éléments, la chambre de céans considère que l’intervention d’un avocat était nécessaire au vu de la complexité de la cause.

5.2 S’agissant des chances de succès, l’employeuse a admis ne pas avoir informé l’assuré des possibilités qu’il avait de prolonger sa couverture accidents. Alors que l’assureur doit offrir à l’assuré la possibilité de prolonger de six mois au plus l’assurance par convention spéciale (art. 3 al. 3 LAA), l’intimée n’a fait aucune proposition en ce sens.

Ces omissions aussi bien de la part de l’employeuse que de l’intimée sont de nature à favoriser les chances de succès de l’assuré ; partant, il y a lieu de considérer que la cause n’est pas dénuée de chances de succès.

5.3 Enfin, au vu de la situation financière de l’assuré, qui n’a toujours pas retrouvé de travail fixe et qui n’a pas droit aux indemnités de chômage, la condition de la situation économique précaire est remplie.

Étant donné que toutes les conditions cumulatives requises pour l’octroi de l’assistance juridique sont réalisées, il y a lieu de mettre le recourant au bénéfice de cette assistance dès le dépôt de sa requête (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_923/2009 du 10 mai 2010 consid. 4.1.3), soit le 24 juillet 2023.

6.              

6.1 Bien fondé, le recours doit être admis.

6.2 Le recourant, assisté par un mandataire professionnellement qualifié et obtenant gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 1'500.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - RS E 5 10.03]).

6.3 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario et 89H al. 1 LPA).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Dit que le recourant a droit à l’assistance juridique gratuite pour la procédure administrative dès le 24 juillet 2023.

4.        Alloue au recourant, à la charge de l’intimée, une indemnité de CHF 1'500.- pour ses frais et dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le