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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3684/2022

ATAS/240/2024 du 15.04.2024 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3684/2022 ATAS/240/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 15 avril 2024

Chambre 6

 

En la cause

 

A______
représentée par Me Christian BRUCHEZ, avocat

 

 

recourante

contre

 

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI

 

 

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), éducatrice de la petite enfance, est au bénéficie d’un délai-cadre d’indemnisation dès le 1er novembre 2021.

b. Le 20 mai 2022, l’office régional de placement (ci-après : l’ORP) lui a adressé une assignation relative à un poste d’éducatrice à 80% d’une durée indéterminée à pourvoir auprès de la crèche B______ (ci-après : la crèche ou l’employeur). Un délai au 24 mai 2022 lui était octroyé afin d’adresser son dossier de candidature complet à l’employeur potentiel.

c. L’assurée a envoyé son dossier de candidature le 22 mai 2022.

d. Début juin 2022, l’assurée a été engagée pour un remplacement du 17 au 30 juin 2022 auprès de l’établissement scolaire C______. À teneur de l’attestation de gain intermédiaire du 19 août 2022, elle a œuvré en cette qualité les 9, 10, 14, 15, 20, 21, 22, 23, 28 et 29 juin 2022.

e. Le 12 septembre 2022, la crèche a informé l’OCE de ce que l’assurée avait fait acte de candidature, mais n’avait pas été engagée dans la mesure où elle n’avait pas donné suite à la proposition de deux dates d’entretien.

f. Le 20 septembre 2022, l’OCE a invité l’assurée à lui transmettre, d’ici au 27 septembre 2022, ses observations quant à l’échec d’une possibilité d’emploi dans le cadre de l’assignation auprès de la crèche.

g. L’assurée a fait part de ses observations à l’OCE par courriel et courrier du 21 septembre 2022, contestant avoir refusé un poste. Suite à l’envoi de son dossier à la crèche, elle avait reçu un appel le 13 juin 2022 aux alentours de 18h30 lui proposant un entretien le 20 ou le 27 juin. Elle avait alors indiqué qu’elle travaillait ces jours-là et son interlocutrice lui avait alors répondu que ce n’était pas un souci, qu’elle allait voir avec sa collègue – car elle n’avait pas l’agenda de celle-ci sous les yeux – et qu’elle lui reviendrait. Suite à cet appel, elle n’avait plus reçu de nouvelles. Elle avait trouvé cela bizarre, mais pensait que cela pouvait arriver. Elle avait tenté à une reprise de rappeler la crèche un soir, sans succès.

B. a. Par décision de sanction du 3 octobre 2022, l’OCE a prononcé une suspension d’une durée de 31 jours, dans l’exercice du droit de l’assurée à l’indemnité, dès le 17 juin 2022.

Le 20 mai 2022, un poste d’éducatrice auprès de B______ lui avait été assigné, pour lequel elle devait adresser sa candidature dans un délai échéant au 24 mai 2022. Le 12 septembre 2022, le service employeurs de l’OCE avait été informé que l’employeur l’avait contactée par courriel pour fixer un rendez-vous, mais qu’elle n’avait jamais répondu. L’employeur lui avait ainsi envoyé un premier courriel le 13 juin 2022 en lui proposant deux dates d’entretien alternatives, soit les 20 ou 27 juin 2022. Sans nouvelles de la part de l’assurée au 16 juin 2022, la crèche lui avait communiqué qu’elle écartait sa candidature. Invitée à se déterminer par le service juridique, l’assurée n’avait pas non plus répondu dans le délai imparti. L’emploi qui lui avait été assigné était convenable. Faute de justification, il y avait motif à sanction, puisqu’elle avait fait échouer une possibilité d’emploi qui lui aurait permis de quitter l’assurance chômage de façon durable et, ce faisant, avait commis une faute grave. Selon le barème de sanction du secrétariat d’État à l’économie (ci-après : SECO), une suspension d’une durée de 31 à 45 jours devait être prononcée en cas de premier refus d’un emploi convenable.

b. Le 4 octobre 2022, l’assurée s’est opposée à cette décision, assurant n’avoir jamais reçu de courriel de la part de l’employeur, étant précisé qu’elle avait été jusqu’à vérifier ses courriels indésirables (spams). Elle sollicitait l’annulation de la sanction.

c. Par décision du 19 octobre 2023, l’OCE a rejeté l’opposition. Il ressortait de l’attestation de gain intermédiaire transmise par la recourante qu’elle n’avait travaillé que l’après-midi du 20 juin et pas du tout le 27 juin 2022. Elle aurait donc dû d’emblée donner une suite favorable à la proposition d’entretien relative au 27 juin à 11h00, puisqu’elle ne travaillait pas ce jour-là, contrairement à ce qu’elle avait soutenu. Il n’était en outre pas vraisemblable que l’assurée n’ait pas reçu les courriels des 13 et 16 juin 2022 de la crèche, dans la mesure où celle-ci les avait adressés à l’adresse fournie par l’assurée et n’avait pas reçu de message d’erreur par la suite. Enfin, il était établi que l’assurée n’avait pas repris contact avec la crèche suite à l’entretien du 13 juin 2022, alors que, selon sa version des faits, elle devait s’attendre à recevoir de nouvelles dates d’entretien. La faute était donc bien grave, dans la mesure où elle avait fait échouer une possibilité d’emploi convenable en ne se rendant pas à un entretien d’embauche proposé par l’employeur suite à une assignation.

C. a. L’assurée a recouru contre cette décision le 6 novembre 2022, concluant à son annulation. Elle confirmait n’avoir jamais reçu les courriels des 13 et 16 juin de la crèche. Suite à l’absence de nouvelles de la crèche, elle avait tenté de la joindre par téléphone, sans succès. Pour le surplus, elle a confirmé avoir eu des engagements à honorer les 20 et 27 juin, comme cela ressortait d’ailleurs d’une attestation établie par le directeur de l’établissement C______, qu’elle produisait. Le fait qu’elle n’avait pas touché de revenus ces jours-là ne signifiait pas qu’elle n’avait pas d’engagements préalables.

b. Par réponse du 9 janvier 2023, l’OCE a persisté dans les termes de la décision querellée, en ajoutant que l’attestation de l’établissement scolaire C______, ne signifiait pas qu’elle avait travaillé tous les jours des périodes mentionnées, sauf à retenir qu’elle n’avait pas déclaré à sa caisse de chômage l’ensemble de ses jours travaillés.

c. Par réplique du 1er mars 2023, le mandataire de la recourante a complété ses conclusions, en requérant, préalablement, son audition et celle de témoins, Monsieur D______ (directeur de l’établissement scolaire C______), Madame E______ (institutrice auprès de cet établissement), Mesdames F______ et G______ (adjointes de direction de la crèche) et concluant, subsidiairement, à la réforme de la décision entreprise en ce sens que la suspension de son droit à l’indemnité était réduite à un jour.

Persistant dans ses déclarations précédentes, elle a précisé que dans le cadre de son engagement à l’établissement C______, elle devait remplacer un enseignant qui travaillait à 100% et était engagée pour accompagner lors de la sortie de classe du 27 juin 2022.

Lors de l’entretien téléphonique avec une collaboratrice de la crèche B______, elle lui avait indiqué ne pas être disponible les 20 et 27 juin 2022, en raison de son engagement pour un remplacement à plein temps, bien qu’elle soit toujours intéressée par le poste. Son interlocutrice lui avait alors indiqué qu’elle reviendrait à elle pour lui proposer une autre date d’entretien. Sans nouvelles, elle avait tenté de joindre l’établissement un soir après son travail, mais sans succès. La recourante a produit un extrait de l’historique de ses appels relatifs à cette période dont il ressort que l’appel de la crèche a été reçu le 13 juin 2022 à 18h38 et qu’il a duré une minute et neuf secondes.

Le 17 juin 2022, premier jour de son remplacement, elle avait appris que l’enseignant qu’elle remplaçait ne travaillait pas le lundi matin, même s’il était engagé à 100%, ce en raison d’une dispense liée à son âge. Elle avait ainsi travaillé uniquement l’après-midi du 20 juin 2022. Concernant le 27 juin 2022, elle avait accompagné une autre enseignante, E______, qui en attestait, pour sa sortie de classe.

C’était donc en raison de ses engagements professionnels préalables durant la période du 17 au 30 juin 2022 qu’elle avait indiqué ne pas être disponible aux dates d’entretien proposées par téléphone le 13 juin 2022. Elle avait accepté d’accompagner la sortie scolaire, de manière non rémunérée comme l’usage le voulait, pour démontrer à l’établissement son investissement, en vue de réduire le dommage vis-à-vis du chômage, ainsi que pour éviter que la sortie soit annulée. Il ne pouvait donc lui être reproché de ne pas avoir été disponible, ce d’autant que son interlocutrice lui avait assuré que ce n’était pas un problème et qu’elle la rappellerait pour proposer d’autres dates. Elle n’avait jamais reçu les courriels de l’employeur des 13 et 16 juin 2022 et avait essayé de le joindre ensuite pour fixer une date d’entretien, depuis un téléphone fixe, mais sans succès. Elle avait été victime d’une erreur administrative de la part de l’employeur, ce d’autant que le courriel du 13 juin 2022 suivait de quelques minutes l’entretien téléphonique susmentionné et qu’il comportait les mêmes dates d’entretien que celles qui avaient été écartées lors dudit entretien. Il ne pouvait être retenu qu’elle s’était privée d’un emploi convenable par son comportement.

Subsidiairement, son indisponibilité pour un entretien le 27 juin 2022 était liée à sa volonté de se faire bien voir par la direction de l’école dans laquelle elle effectuait le remplacement, dans la perspective d’en obtenir d’autres et ainsi remplir son obligation de réduire son dommage vis-à-vis de l’OCE. Elle n’avait par ailleurs jamais fait l’objet d’une sanction de l’OCE, ni manqué de rendez-vous avec son conseiller. Sa faute devait tout au plus être considérée comme simple, avec une suspension d’indemnité d’un seul jour.

d. Dans sa duplique du 23 mars 2023, l’OCE a persisté dans les termes de sa décision et de ses écritures précédentes. La recourante admettait avoir privilégié une simple sortie scolaire non rémunérée, dans le cadre d’un remplacement d’une durée très limitée et dans l’optique d’obtenir d’autres hypothétiques remplacements ponctuels et de durées limitées, plutôt que de se rendre à l’entretien proposé pour lequel un poste d’une durée indéterminée était en jeu. Elle avait commis une faute grave en se privant de facto de la possibilité d’obtenir un emploi d’une durée indéterminée, soit en ne se rendant pas disponible pour l’entretien proposé par l’employeur et en ne prenant pas la peine de le recontacter.

Pour le surplus, la proposition de diminution de la sanction ne tenait compte ni des dispositions légales, ni de la jurisprudence ni encore du barème du SECO.

e. Par observations du 30 mars 2023, la recourante a précisé qu’au vu des circonstances qu’elle avait invoquées dans ses écritures précédentes, elle pouvait partir de bonne foi du principe que son indisponibilité aux dates proposées ne lui porterait pas préjudice dans le processus de sélection pour ce poste. Il ne pouvait donc lui être reproché de ne pas s’être déclarée d’emblée disponible à l’une des dates proposées.

f. Par courrier du 24 avril 2023, l’OCE a persisté.

g. Entendue en audience de comparution personnelle par la chambre de céans le 18 mars 2024, la recourante a indiqué avoir effectué plusieurs remplacements à l'école H______ durant les années 2021 et 2022. Le 9 juin 2022, on lui avait ainsi proposé un remplacement du 17 au 30 juin à la place de Monsieur I______ qui occupait une pleine charge. Le 17 juin, soit le premier jour de son remplacement, elle avait été informée que Monsieur I______ avait une décharge d'âge, c’est-à-dire qu'il ne travaillait pas une demie journée par semaine, durant laquelle les élèves étaient alors pris en charge par les maîtres artistiques. Il n'y avait donc pas besoin de remplaçant pour cette demie journée de décharge. Concernant l’accompagnement d’E______ à la sortie du 27 juin, il lui semblait l’avoir accepté début juin et l’avoir signifié au directeur de l’établissement qui l’avait libérée de son remplacement ce jour-là.

Concernant sa postulation auprès de la crèche B______, elle avait reçu un appel d'une « Madame G______» le lundi 13 juin à 18h38 alors qu’elle se trouvait dans un car, de retour d’une autre course d'école. Son interlocutrice lui avait demandé si elle était toujours intéressée par le poste, ce à quoi elle avait répondu affirmativement. G______ lui avait proposé deux dates pour un entretien. La recourante ayant expliqué ne pas être disponible à ces dates, il lui avait été dit qu'il n'y avait pas de souci et qu’un autre rendez-vous lui serait proposé ultérieurement, G______ n’ayant pas l'agenda sous les yeux. L'échange téléphonique avait été très court et ni l’assurée ni son interlocutrice n'avait proposé un autre rendez-vous. Lors de cet entretien téléphonique, l’assurée ne savait pas qu’elle ne travaillerait pas le lundi matin du 20 juin 2022, ignorant que Monsieur I______ bénéficiait d’une décharge.

Par la suite, l’assurée n’avait pas reçu le courriel de la crèche dont elle avait uniquement pris connaissance lorsqu’elle était venue consulter le dossier déposé par l’intimé auprès de la chambre de céans. Elle avait même cherché dans ses spams. Elle n’avait pas non plus reçu le courriel de la crèche du 16 juin 2022.

Environ une semaine après le téléphone du 13 juin 2022, elle avait rappelé la crèche vers 16h30 - 17h, depuis le téléphone fixe de son travail. Personne n'avait répondu. Il lui semblait avoir essayé à nouveau deux jours plus tard, mais la ligne était occupée. Elle n’avait plus essayé par la suite, pensant que la crèche rappellerait d’elle-même ou qu'elle avait déjà choisi quelqu'un d'autre.

Au jour de son audition, elle était en remplacement longue durée pour le département de l’instruction publique, de la formation et de la jeunesse dans plusieurs écoles. Elle était par ailleurs la remplaçante prioritaire des écoles C______, car elle avait effectué plusieurs remplacements auprès de ces établissements.

h. Entendue en tant que témoin le 18 mars 2024, F______ a indiqué occuper, conjointement avec G______, le poste d’adjointe de direction de la crèche B______ depuis avril 2018. Chacune des adjointes travaillait à un taux de 80% et elles étaient notamment toutes deux présentes les lundis.

En octobre 2022, le chômage les avait contactées pour savoir si elles avaient contacté la recourante pour un poste d'éducatrice. Elle s’était rappelée avoir effectué ce téléphone, surtout du fait qu’elle avait retrouvé un mail qui avait succédé à l’appel, ce qui lui avait permis de retrouver le contexte. Elle avait appelé l’assurée le 13 juin vers 18h30 et lui avait proposé une ou deux dates pour un entretien. L’assurée lui avait dit que ce n'était pas possible, dans son souvenir car elle travaillait. F______ lui avait alors répondu qu’elle allait voir avec sa collègue et la recontacter pour lui soumettre d'autres propositions. Le soir même, à 18h44, elle lui avait adressé un courriel lui proposant un entretien le 20 ou le 27 juin à deux horaires différents. Elle ne se rappelait pas des dates qu’elle lui avait préalablement soumises par téléphone. À son avis, le courriel de 18h44 consistait en de nouvelles propositions de dates. Elle n’avait pas eu de retour de la recourante et, au bout de trois jours, soit le 16 juin 2022, elle lui avait adressé un courriel lui communiquant que, faute de réponse, la crèche renonçait à sa candidature. D’après son souvenir, elle avait dû, après le téléphone, en discuter avec sa collègue G______ et rapidement trouver deux autres dates d'entretien qu’elle avait proposées par courriel à l’assurée.

La témoin pensait qu’elle avait elle-même rédigé les courriels des 13 et 16 juin. À sa connaissance, la crèche n’avait pas de problèmes particuliers avec l'envoi de ses courriels. Usuellement, des dates d'entretien pouvaient être proposées soit par téléphone, soit par courriels. Il y avait plusieurs candidats pour le poste assigné et F______ avait pensé que le poste n'intéressait peut-être plus l’assurée.

Elle n'avait pas le souvenir que celle-ci l'aurait recontactée après les mails des
13 et 16 juin. Il n’y avait pas de répondeur téléphonique prenant les messages lors d’appels à la crèche. Les appels en absence n’étaient pas traités. Elle quittait en général la crèche vers 17h et son téléphone était ensuite dévié sur la ligne du « groupe des bébés » où une personne répondait, sauf si les éducatrices étaient occupées avec les enfants.

Sur question, elle a indiqué qu’en général, elle n’envoyait pas de courriel confirmant le contenu d’un entretien téléphonique avec un candidat ou une candidate. Elle ne savait pas si elle avait pu donner les mêmes dates d'entretien à l’assurée par téléphone et ensuite par courriel quelques minutes plus tard. Si tel était le cas, c'était totalement involontaire.

i. G______ a également été entendue comme témoin lors de l’audience du 18 mars 2024. Elle a confirmé que c’était F______ qui s'était chargée de fixer un entretien. Elle ne se rappelait pas du téléphone que sa collègue aurait fait à la recourante. La marche à suivre usuelle consistait soit à envoyer un courriel pour confirmer un rendez-vous proposé par téléphone et précisant les détails tels que le lieu de l’entretien, soit à envoyer directement une proposition de
rendez-vous si la personne n’avait pas pu être jointe par téléphone. Dans le premier cas de figure, le courriel correspondait généralement à la discussion téléphonique. Si une personne était indisponible, un courriel était envoyé pour proposer d'autres dates. G______ ne se souvenait pas du cas précis de l’assurée, mais il était possible que quelques minutes après un téléphone avec une personne pour proposer des rendez-vous, d'autres dates soient proposées par courriel.

Dans le process (marche à suivre), c’était le directeur qui ouvrait quelques créneaux horaires que les adjointes proposaient ensuite aux candidats. Le directeur faisait toujours les entretiens avec l’une ou l’autre des adjointes.

G______ se souvenait avoir parlé du cas de l’assurée avec F______, suite à quoi elles avaient envoyé un courriel pour dire qu’elles considéraient que l’assurée n'était plus intéressée vu qu'elle n'avait pas répondu à la proposition de rendez-vous faite par courriel. Elle ne se rappelait pas du tout ce qui avait pu se passer entre le téléphone à 18h38 de l’assurée et le courriel de 18h44. Il était possible que si les deux dates proposées à l’assurée ne lui convenaient pas, F______ lui en ait proposé deux autres par courriel.

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Interjeté dans la forme et le délai de 30 jours prévus par la loi, l’acte de recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

3.             Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension du droit de la recourante à l'indemnité de chômage, durant 31 jours, du fait qu’elle aurait fait échouer une possibilité d’emploi suite à une assignation de juin 2022.

4.              

4.1 L'art. 8 LACI énumère les conditions d'octroi de l'indemnité de chômage. Conformément à l'art. 8 al. 1 LACI, l'assuré doit, pour bénéficier de cette prestation prévue par l'art. 7 al. 2 let. a LACI, être sans emploi ou partiellement sans emploi (let. a), avoir subi une perte de travail à prendre en considération (let. b), être domicilié en Suisse (let. c), avoir achevé sa scolarité obligatoire et n'avoir pas encore atteint l'âge donnant droit à une rente AVS et ne pas toucher de rente de vieillesse de l'AVS (let. d), remplir les conditions relatives à la période de cotisation ou en être libéré (let. e), être apte au placement (let. f) et satisfaire aux exigences de contrôle (let. g).

Ces conditions sont cumulatives (ATF 124 V 215 consid. 2). Elles sont précisées par plusieurs dispositions de la LACI et de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983
(OACI - RS 837.02), ainsi que – dans les limites d'admissibilité de telles directives administratives (ATF 144 V 202 ; 144 V 195 ; ATAS/1191/2014 du 18 novembre 2014 consid. 4 et doctrine et jurisprudence citées) – par les instructions édictées par le SECO en sa qualité d'autorité de surveillance de l'assurance-chômage chargée d'assurer une application uniforme du droit (art. 110 LACI), notamment par le biais du Bulletin relatif à l'indemnité de chômage (ci‑après : Bulletin LACI IC).

La condition de satisfaire aux exigences du contrôle, posée par l'art. 8 al. 1 let. g LACI, renvoie aux devoirs de l'assuré et prescriptions de contrôle prévus par
l'art. 17 LACI. Les al. 1 à 3 de cette disposition-ci imposent aux chômeurs des devoirs matériels, qui concernent la recherche et l'acceptation d'un emploi, ainsi que la participation aux mesures de marché du travail et aux séances et entretiens obligatoires, ainsi que des devoirs formels, qui ont pour objet l'inscription au chômage et la revendication régulière des prestations au moyen de formules officielles (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014 [ci-après : Commentaire], n. 1 ad art. 17 LACI).

4.2 En vertu de l'art. 17 LACI, l'assuré qui fait valoir des prestations d'assurance doit, avec l'assistance de l'office du travail compétent, entreprendre tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger. Il lui incombe, en particulier, de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu'il exerçait précédemment. Il doit pouvoir apporter la preuve des efforts qu'il a fournis (al. 1). Il est tenu d'accepter tout travail convenable qui lui est proposé (al. 3 1ère phr.).

Il est précisé qu'à teneur de l'art. 16 al. 1 LACI intitulé « travail convenable », en règle générale, l'assuré doit accepter immédiatement tout travail en vue de diminuer le dommage.

4.3 La violation des obligations que l’art. 17 LACI impose à l’assuré expose ce dernier à une suspension de son droit à l’indemnité.

En effet, aux termes de l’art. 30 al. 1 LACI, le droit de l’assuré à l’indemnité est suspendu entre autres lorsqu’il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu’on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable (let. c) ou n’observe pas les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l’autorité compétente, notamment refuse un travail convenable, ne se présente pas à une mesure de marché du travail ou l’interrompt sans motif valable, ou encore compromet ou empêche, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but (let. d).

Notamment dans de tels cas, l’assuré adopte un comportement qui, de manière générale, est de nature à prolonger la durée de son chômage. Il n’est en principe pas d’emblée privé de prestations, mais tout d’abord sanctionné en application de
l’art. 30 al. 1 let. c ou d LACI, puis, en cas de violations répétées, déclaré inapte au placement, en vertu des art. 8 al. 1 let. f et 15 LACI (ATAS/169/2020 du 2 mars 2020 consid. 4b).

Selon la jurisprudence, la suspension du droit à l'indemnité est destinée à poser une limite à l'obligation de l'assurance-chômage d'allouer des prestations pour des dommages que l'assuré aurait pu éviter ou réduire. En tant que sanction administrative, elle a pour but de faire répondre l'assuré, d'une manière appropriée, au préjudice causé à l'assurance-chômage par son comportement fautif
(ATF 133 V 89 consid. 6.2.2 ; ATF 125 V 197 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_316/2007 du 6 avril 2008 consid. 2.1.2), sans que soit requise la survenance d’un dommage effectif (arrêts du Tribunal fédéral C 30/06 du 8 janvier 2007 consid. 4.2 et C 152/01 du 21 février 2002 consid. 4). La suspension du droit à l'indemnité est soumise exclusivement aux dispositions de la LACI et de ses dispositions d'exécution (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in Ulrich MEYER [éd.], Soziale Sicherheit – Sécurité sociale, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, vol. XIV, 3ème éd., 2016, p. 2427 ss, n. 831).

Le motif de la suspension prévu par l’art. 30 LACI permet de sanctionner l’assuré non seulement en cas de faute grave, mais aussi en cas de négligence, même légère (ATAS/1057/2020 du 10 novembre 2020 consid. 3c ; ATAS/787/2020 du 9 septembre 2020 consid. 4 ; Boris RUBIN, Commentaire, n. 15 ad art. 30 LACI ; cf. aussi art. 45 al. 1 let. b OACI qui mentionne la négligence comme objet possible d’une décision de suspension).

Conformément à l’art. 30 al. 2 LACI, l’autorité cantonale prononce les suspensions notamment au sens de l’al. 1 let. c et d.

4.4 Tant qu’un assuré n’est pas certain d’obtenir un autre emploi, il a l’obligation d’accepter immédiatement l’emploi qui se présente (ATF 122 V 34 ; Boris RUBIN, Commentaire, n. 64 ad art. 30 LACI).

Les éléments constitutifs d'un refus d'emploi sont réunis non seulement en cas de refus d'emploi expressément formulé, mais encore lorsqu'un assuré : ne se donne pas la peine d'entrer en pourparlers avec l'employeur ; ne le fait pas dans le délai utile (arrêts du Tribunal fédéral 8C_379/2009 du 13 octobre 2009, C 245/06 du 2 novembre 2007 et C 30/06 du 8 janvier 2007) ; pose certaines restrictions lors de la fixation du rendez-vous d'embauche (arrêt du Tribunal fédéral C 125/06 du 9 mars 2007) ; hésite à accepter immédiatement l'emploi lors des pourparlers, alors que selon les circonstances, il aurait pu faire cette déclaration (ATF 122 V 34 consid. 3b ; DTA 2002 p. 58 ; 1999 p. 193 consid. 2 ; 1984 p. 167 ; 1982 p. 41 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_38/2011 du 14 décembre 2011, 8C_616/2010 du 28 mars 2011, C 17/07 du 22 février 2007, C 81/05 du 29 novembre 2005, C 214/02 du 23 avril 2003 et C 81/02 du 24 mars 2003) ; fait preuve d’un désintérêt manifeste (arrêts du Tribunal fédéral C 81/02 du 24 mars 2003 et C 72/02 du 3 septembre 2002), d’un manque d'empressement faisant douter de la réelle volonté du chômeur d'être engagé (arrêt du Tribunal fédéral C 293/03 du 5 novembre 2004) ou fait échouer la conclusion du contrat pour d'autres raisons (DTA 2012 p. 300 ; Boris RUBIN, Commentaire, n. 66 ad art. 30 LACI).

En particulier, le Tribunal fédéral a retenu, dans son arrêt 8C_125/2006 du 9 mars 2007 susmentionné, s’agissant d’un assuré qui ne s’était pas rendu à un entretien d’embauche, que la fixation d'une date d'entretien à court terme ne devait en principe pas constituer un obstacle sérieux pour un demandeur d'emploi. En effet, dans le cas d'un demandeur d'emploi au chômage, il fallait partir du principe qu'il était disponible à court terme et qu'il faisait donc preuve d'une flexibilité accrue, d'autant plus qu’il était tenu de se mettre à la disposition de l’office de chômage, d'accepter le travail convenable qui lui est proposé et de rechercher lui‑même de manière intensive un tel emploi (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2ème édition, Bâle 2007, p. 2261, ch. 268 et 270). En outre, la personne assurée est tenue d'entreprendre tout ce qui est en son pouvoir pour éviter ou réduire le chômage (NUSSBAUMER, op. cit., p. 2272 n. 311). C'est d’ailleurs la raison pour laquelle l’art. 25 let. d OACI prévoit expressément que l'office compétent décide, à la demande de l’assuré, de l’autoriser à déplacer la date de son entretien de conseil et de contrôle s’il apporte la preuve qu’il ne peut se libérer à la date convenue en raison d’un événement contraignant, notamment parce qu’il doit se déplacer pour se présenter à un employeur. Une candidature a manifestement la priorité sur l'entretien de contrôle, qui peut être reporté sans autre.

En résumé, selon la jurisprudence, il y a refus d'une occasion de prendre un travail convenable non seulement lorsque l'assuré refuse expressément un travail convenable qui lui est assigné, mais également déjà lorsque l'intéressé s'accommode du risque que l'emploi soit occupé par quelqu'un d'autre ou fait échouer la perspective de conclure un contrat de travail (ATF 122 V 34 consid. 3b ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_446/2020 du 28 janvier 2021 consid. 3.1 et 8C_379/2009 précité consid. 3).

5.              

5.1 Dans le domaine des assurances sociales notamment, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel il appartient au juge d'établir d'office l'ensemble des faits déterminants pour la solution du litige et d'administrer, le cas échéant, les preuves nécessaires (cf. art. 43 al. 1 et 61 let. c LPGA). En principe, les parties ne supportent ni le fardeau de l'allégation ni celui de l'administration des preuves. Cette maxime doit cependant être relativisée par son corollaire, soit le devoir de collaborer des parties, lequel comprend l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela est raisonnablement exigible, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués (ATF 138 V 86 consid. 5.2.3 ; ATF 125 V 193 consid. 2). Si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation de prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve, dans la mesure où, en cas d'absence de preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en supporter les conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être imputée à la partie adverse (ATF 124 V 372 consid. 3 ; RAMA 1999 n° U 344 p. 418 consid. 3). Cette règle ne s'applique toutefois que s'il se révèle impossible, dans le cadre de la maxime inquisitoire et en application du principe de la libre appréciation des preuves, d'établir un état de fait qui correspond, au degré de la vraisemblance prépondérante, à la réalité (ATF 139 V 176 consid. 5.2 et les références).

5.2 Si l’administration ou le juge, se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies par les investigations auxquelles ils doivent procéder d’office, sont convaincus que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d’autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation, il est superflu d’administrer d’autres preuves (appréciation anticipée des preuves ; ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c). Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

6.              

6.1 En l’espèce, l’intimé a suspendu le droit à l’indemnité de chômage de l’assurée pour une durée de 31 jours, au motif qu’en ne donnant pas suite à l’assignation du 20 mai 2022 auprès de la crèche B______, elle avait fait échouer une possibilité d’emploi qui lui aurait permis de quitter l’assurance-chômage.

L’assurée, de son côté, explique avoir envoyé sa candidature pour le poste dont il est question le 22 mai 2022. Par la suite, lorsqu’elle avait été contactée téléphoniquement par l’employeur potentiel, le 13 juin 2022, elle avait indiqué ne pas pouvoir se présenter aux deux dates d’entretien qui lui étaient proposées, dans la mesure où elle avait été engagée pour un remplacement à plein temps du 17 au 30 juin 2022. L’adjointe de direction de la crèche lui avait indiqué que ce n’était pas un problème et qu’elle la contacterait à nouveau pour lui proposer d’autres dates. N’ayant plus eu de nouvelles par la suite, l’assurée avait tenté de joindre la crèche téléphoniquement à deux reprises, sans succès. Elle avait ensuite pensé que le poste avait été repourvu. Elle n’avait jamais reçu le courriel de la crèche du 13 juin 2022, lui proposant deux dates d’entretien. Elle contestait dès lors avoir commis une faute.

Entendue lors de l’audience d’enquêtes du 18 mars 2024, F______ a confirmé la teneur du téléphone du 13 juin 2022 et notamment le fait qu’elle avait indiqué à l’assurée qu’elle la recontacterait pour lui faire de nouvelles propositions de dates, ce qu’elle avait fait par courriel quelques minutes plus tard. N’ayant pas eu de réponse à ce courriel durant les trois jours suivants, la crèche avait renoncé à la candidature de l’assurée, ce qu’elle lui avait fait savoir, également par courriel, le 16 juin 2022.

Dans ces circonstances et même en admettant, par hypothèse, la version des faits de l’assurée, il conviendrait de retenir que, d'un point de vue objectif et vu la jurisprudence topique précitée, elle a pris le risque de faire échouer son engagement en n’essayant pas de reprendre rapidement contact avec l’employeur potentiel et en ne se montrant pas proactive suite à l’entretien téléphonique qu’elle avait eu avec la crèche.

N’étant pas en mesure d’accepter les rendez-vous qui lui avaient été proposés, elle se devait de recontacter rapidement la crèche pour s’enquérir d’autres possibilités de rendez-vous, voire d’entreprendre d’autres démarches, comme demander à la direction de son école d'être libérée pour une des dates proposées. De telles démarches étaient en effet exigibles d’elle, ce même si elle n’avait pas reçu de courriel de la part de F______ et que cette dernière lui avait spécifié par téléphone qu’elle reviendrait à elle pour fixer un nouvel entretien.

L’assurée se devait de tout mettre en œuvre pour recontacter l’employeur potentiel afin de trouver un emploi. Les un ou deux appels (selon les versions) qu’elle allègue avoir effectués depuis un téléphone fixe en fin de journée dans les jours qui ont suivi, outre qu’ils ne sont pas avérés, ne sont à cet égard pas suffisants.

Sur le principe, c’est ainsi à juste titre que l’intimé a retenu le principe d’une faute et a prononcé une sanction.

7.              

7.1 Reste à examiner la quotité de dite sanction.

La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute et ne peut excéder, par motif de suspension, 60 jours, et dans le cas de l’al. 1 let. g, 25 jours (art. 30 al. 3 LACI ; arrêt du Tribunal fédéral C 254/06 du 26 novembre 2007 consid. 5.3). Le conseil fédéral peut prescrire une durée minimale pour la suspension (art. 30 al. 3bis LACI).

L’OACI, en son art. 45, distingue trois catégories de fautes – à savoir les fautes légères, moyennes et graves – et prévoit, pour chacune d'elles, une durée minimale et maximale de suspension, qui est d’un à quinze jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (al. 3). Il y a faute grave lorsque, sans motif valable, l’assuré, notamment, refuse un emploi réputé convenable (al. 4 let. b). Si l’assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l’indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence. Les suspensions subies pendant les deux dernières années sont prises en compte dans le calcul de la prolongation (al. 5).

L’obligation d’accepter un emploi convenable assigné par l’office compétent constitue une obligation fondamentale pour qui demande l’indemnité de chômage (art. 17 al. 3 1ère phr. LACI). Son inobservation est considérée comme une faute grave à moins que l’assuré puisse se prévaloir de circonstances laissant apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère (art. 30 al. 1 let. d, 1ère partie de phr., LACI en lien avec l’art. 45 al. 3 OACI ; ATF 130 V 125 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_616/2010 du 28 mars 2011 consid. 3.2 et 8C_379/2009 précité consid. 3). La jurisprudence considère que lorsqu'un assuré peut se prévaloir d'un motif valable (art. 45 al. 4 let. b OACI), il n'y a pas forcément faute grave, même si les conditions de cette disposition réglementaire sont réalisées. Par motif valable, il faut entendre un motif qui fait apparaître la faute comme étant de gravité moyenne ou légère. Il peut s'agir, dans le cas concret, d'un motif lié à la situation subjective de la personne concernée ou à des circonstances objectives (ATF 130 V 125 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_225/2011 du 9 mars 2012 consid. 4.2).

7.2 En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire dans les différents cantons. Le Bulletin LACI IC (D79) qualifie ainsi de grave la faute consistant en un refus d’un emploi convenable à durée indéterminée assigné à l’assuré ou qu’il a trouvé lui-même, et fixe la suspension à une durée entre 31 à 45 jours.

7.3 En l’occurrence, l’intimé s’est considéré lié par le minimum de 31 jours prévu par l’art. 45 al. 4 OACI et repris par le barème du SECO.

La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation. Il y a abus de celui-ci lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.2 ; 8C_601/2012 consid. 4.2, non publié in ATF 139 V 164 et les références).

Le pouvoir d'examen de l'autorité judiciaire de première instance (donc de la chambre de céans) n'est pas limité dans ce contexte à la violation du droit (y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation), mais s'étend également à l'opportunité de la décision administrative (« Angemessenheitskontrolle »). En ce qui concerne l'opportunité de la décision en cause, l'examen du tribunal porte sur le point de savoir si une autre solution que celle que l'autorité, dans un cas concret, a adoptée dans le cadre de son pouvoir d'appréciation et en respectant les principes généraux du droit, n'aurait pas été plus judicieuse quant à son résultat. Le juge des assurances sociales ne peut toutefois, sans motif pertinent, substituer sa propre appréciation à celle de l'administration ; il doit s'appuyer sur des circonstances de nature à faire apparaître sa propre appréciation comme la mieux appropriée (ATF 137 V 71 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 4.3 ; Boris RUBIN, op. cit., n. 110 ad art. 30).

7.4 Un refus d’un tel emploi, ne doit pas systématiquement et forcément être qualifié de grave, la durée de la suspension devant notamment toujours être proportionnelle à la gravité de la faute, conformément au principe de rang constitutionnel de la proportionnalité, qui s’applique à l’ensemble des activités étatiques (art. 5 al. 2 Cst.). Les autorités décisionnelles se doivent donc d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances – tant objectives que subjectives – du cas concret, notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations (arrêts du Tribunal fédéral 8C_758/2017 du 19 octobre 2018 consid. 5 et 8C_425/2014 du 12 août 2014 consid. 5.1).

À titre d’exemple, la chambre de céans a réduit la durée de la suspension du droit à l’indemnité d’un assuré de 31 jours à 22 jours pour défaut de suite donnée à une assignation reçue, en considérant que la faute de l’assuré, qui avait été convoqué à un entretien d’embauche pour un autre poste, était seulement moyenne (ATAS/1183/2018 du 18 décembre 2018).

De même, dans un arrêt du 25 mars 2019 (ATAS/262/2019), la chambre de céans a réduit la durée de la suspension du droit à l’indemnité d’un assuré de 31 jours à 16 jours pour défaut de suite donnée à une assignation reçue, en considérant que la faute de l’assuré, qui avait reçu plusieurs assignations et avait subi un surcroît d’activités, notamment la poursuite d’un stage pendant le délai de postulation, était d’une gravité moyenne inférieure.

7.5 Il convient donc d’examiner si, en l’espèce, des circonstances particulières pouvaient justifier de s’écarter de la présomption qu’un défaut de suite donnée à une assignation procède d’une faute grave.

Tel est manifestement le cas. En effet, la chambre de céans relève tout d’abord que l’assurée a immédiatement donné suite à l’assignation de l’ORP du 20 mai 2022, en envoyant son dossier complet à l’employeur le 22 mai 2022.

Par la suite, lorsqu’elle a été contactée téléphoniquement par F______ le 13 juin 2022, elle n’a pas refusé l’entretien, mais indiqué qu’elle avait des obligations professionnelles (cf. audition de F______) l’empêchant de se présenter aux horaires proposés. Cette dernière a confirmé avoir dit à l’assurée qu’elle la recontacterait pour lui proposer d’autres dates. Le contenu de cette discussion ne laissait ainsi en rien présager qu’en sollicitant d’autres dates d’entretien l’assurée diminuait ses chances d’obtenir le poste assigné. En outre, les motifs ayant justifié la demande de déplacement de l’entretien – soit la volonté de l’assurée d’honorer ses engagements auprès de son employeur temporaire, de montrer son investissement afin d’obtenir d’autres missions de remplacement et de réaliser du gain intermédiaire – s’inscrivaient dans l’obligation de l’assurée de diminuer le dommage. À cet égard, le fait que l’un des empêchements (celui du 27 juin 2022) résulte d’un engagement non rémunéré pour le compte du même établissement scolaire (soit l’accompagnement en course d’école prévu au préalable) procède d’une logique identique et n’apparaît pas critiquable, ce d’autant moins vu l’accord de l’adjointe de la crèche de proposer d’autres dates pour un entretien.

Au final, comme indiqué ci-avant dans la partie relative au principe de la faute, c’est essentiellement la passivité de l’assurée dans les jours qui ont suivi l’appel téléphonique du 13 juin 2022 qui pose problème. N’ayant pas été en mesure d’accepter les rendez-vous qui lui avaient été proposés, elle se devait de recontacter rapidement et de manière insistante la crèche pour s’enquérir d’autres possibilités de rendez-vous ou encore demander à la direction de son école de la libérer pour pouvoir se présenter à une des dates d’entretiens proposées initialement.

Il appert cependant que diverses circonstances tant objectives que subjectives sont à prendre en compte dans l’examen de la gravité de la faute.

Tout d’abord, il n’est pas établi que l’assurée, qui apparaît de bonne foi, a bien reçu le courriel du 13 juin 2022 de la crèche. L’expéditrice n’a pas sollicité d’accusé de réception et le seul fait que ce courriel n’ait pas fait l’objet d’un message d’erreur ne suffit pas à le considérer comme notifié à sa destinataire. Ce courriel ne saurait dès lors être retenu à sa charge.

De plus, F______ a confirmé avoir indiqué à l’assurée que c’était la crèche qui reviendrait à elle avec des propositions (et non l’inverse). Même si cela ne justifie pas entièrement la passivité de l’assurée, cela constitue également une circonstance atténuante.

Enfin, il ressort de l’attestation de gain intermédiaire que l’assurée travaillait les 14 et 15 juin 2022. Dans la mesure où sa candidature a ensuite été écartée par la crèche, faute de réponse, le 16 juin 2022 à la mi-journée (cf. pièce 56 int.), le laps de temps dont elle a disposé pour contacter la crèche et éventuellement sauver la possibilité d’être engagée était fort court.

7.6 Au vu de ces éléments, et dans la mesure, en outre, où il ressort de l’ensemble de son dossier administratif que l’assurée a fait preuve de régularité et d’assiduité dans ses recherches d’emploi et dans les suites qu’elle a données aux assignations précédentes de l’ORP, la chambre de céans estime que la qualification de faute grave est excessive et que la suspension de 31 jours du droit à l’indemnité de chômage équivalent à près d’un mois et demi sans rémunération (seuls les jours ouvrables étant pris en compte [art. 21 phr. 2 LACI]), est disproportionnée.

Il convient ainsi de retenir une faute de gravité moyenne de niveau inférieur et de prononcer une suspension de 16 jours dans l’exercice du droit à l’indemnité, laquelle respecte tant le principe de proportionnalité que celui de l’égalité de traitement (au vu notamment des jurisprudences précitées de la chambre de céans).

Dès lors que la durée de la suspension a été réduite par la chambre de céans, il appartiendra à la caisse de procéder au calcul du montant devant être restitué à l’assurée.

8.             La chambre de céans renonce, par appréciation anticipée des preuves (ATF 122 II 464 consid. 4a ; ATF 122 III 219 consid. 3c) à entendre D______ et E______, dans la mesure où les éléments sur lesquels ils seraient susceptibles de témoigner ne seraient pas de nature à changer l’issue du litige. Une telle manière de procéder ne viole pas le droit d’être entendu selon l’art. 29 al. 2 Cst. (SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b), la jurisprudence rendue sous l’empire de l’art. 4 aCst. étant toujours valable (ATF 124 V 90 consid. 4b ; ATF 122 V 157 consid. 1d).

9.             Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis, la décision litigieuse réformée, la sanction étant réduite de 31 à 16 jours de suspension du droit à l'indemnité de la recourante.

La recourante, assistée par un avocat et obtenant partiellement gain de cause, a ainsi droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la chambre de céans fixera à CHF 2'500.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 LPA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - RS E 5 10.03]).

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Réforme la décision de l'intimé du 19 octobre 2022, en réduisant de 31 à 16 jours la durée de suspension du droit de la recourante à l’indemnité de chômage.

4.        Alloue à la recourante, à charge de l’intimé, une indemnité de CHF 2'500.- à titre de dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le