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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1536/2022

ATAS/1049/2023 du 22.12.2023 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1536/2022 ATAS/1049/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 22 décembre 2023

Chambre 3

 

En la cause

Monsieur A______
représenté par Me Yves MAGNIN, avocat

 

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : le bénéficiaire), né en 1967, a reçu, dès juin 2013, des prestations complémentaires ainsi que des subsides à l’assurance-maladie.

b. L’intéressé perçoit, depuis juin 2013 également, une allocation pour impotent et une rente entière de l’assurance-invalidité, ainsi qu’une rente du 2ème pilier versée par la Fondation Institution supplétive.

c. Le 8 juillet 2014, l’intéressé a indiqué au Service des prestations complémentaires (ci‑après : le SPC) qu’il ne possédait aucun bien immobilier, que ce soit en Suisse ou à l’étranger.

d. Le 17 décembre 2019, dans le cadre de la révision périodique de son dossier, le bénéficiaire a informé le SPC que sa situation économique s’était modifiée, suite à la vente d’un appartement en Espagne. L’intéressé a joint notamment un acte notarié daté du 23 août 2019 portant sur la vente d’un appartement dont il était copropriétaire à 50% avec sa mère, ainsi qu’un relevé faisant état du versement du montant de EUR 77'600.- le 28 août 2019 sur un compte (n° 1______) dont il était titulaire auprès d’ABANCA, en Espagne. Il indiquait en outre posséder six comptes bancaires.

e. Par décision du 27 janvier 2020, le SPC a établi un nouveau plan de calcul dès le 1er février 2020, compte tenu d’un montant de CHF 87'121.- retenu à titre de biens dessaisis.

f. Le 28 janvier 2020, le SPC a requis de la part de l’intéressé toute pièce justifiant notamment l’utilisation du montant de EUR 77'600.- (soit CHF 87'121.-), ainsi qu’une évaluation de la valeur locative du marché de 2013 à 2018 et une estimation officielle de la valeur vénale du marché pour les années précitées.

g. Lors d’un entretien en date du 5 février 2020, l’intéressé a expliqué notamment que le bien avait été acheté par sa mère, sans qu’il en soit au courant. Il en avait été copropriétaire à 50%. Il avait transféré l’argent de la vente sur son compte auprès du CRÉDIT AGRICOLE, puis auprès du CRÉDIT SUISSE et de POSTFINANCE. Il avait notamment utilisé l’argent pour aider deux amies en Roumanie et en Hongrie, à qui il transférait de l’argent tous les mois depuis environ trois ans. Il avait gardé les preuves de ces versements.

h. Le 23 février 2020, le bénéficiaire a transmis au SPC, notamment, une copie complète de l’acte de vente du bien immobilier, une attestation signée le 5 décembre 2019 concernant un prêt de CHF 2’000.- en faveur de Monsieur B______ des justificatifs relatifs aux dons effectués en faveur de plusieurs associations caritatives, des pièces attestant les versements et les cadeaux faits en faveur de ses deux amies, ainsi que des quittances d’achats alimentaires en Espagne. Il n’y avait pas eu de frais d’entretien du bien immobilier.

B. a. Par deux décisions datées du 18 mars 2020, notifiées au bénéficiaire par courrier du 31 mars 2020, le SPC a repris les calculs des prestations pour la période du 1er avril 2014 au 31 mars 2020 et réclamé le remboursement des prestations qui lui avaient été versées à tort, soit un montant total de CHF 80'133.40 (correspondant à CHF 79'030.- de prestations complémentaires et CHF 1'103.40 de subsides partiels à l’assurance-maladie de base). À compter du 1er avril 2020, les prestations allaient être limitées au remboursement des frais médicaux et au versement d’un subside partiel à l’assurance-maladie.

Le calcul des prestations complémentaires a été repris en fonction des éléments initialement non déclarés, soit :

la moitié de la valeur vénale du bien immobilier détenu conjointement avec sa mère du 1er avril 2014 au 31 août 2019 ;

la moitié du produit de la vente du bien immobilier et l’épargne du 1er septembre au 31 décembre 2019 ;

son épargne, ses donations et les diminutions de fortune non justifiées dès le 1er janvier 2020.

Les circonstances du cas d’espèce dépassaient la simple violation du devoir d’annoncer, de sorte que les dispositions pénales s’appliquaient et les prestations versées à tort pouvaient être réclamées dès le 1er avril 2014.

b. Par courrier du 24 avril 2020, complété en date des 28 mai et 11 septembre 2020, l’intéressé s’est opposé à ces décisions. Avant le 24 juin 2019, il ignorait que sa mère l’avait inscrit en tant que copropriétaire du bien immobilier sis en Espagne. Or, il ne pouvait pas déclarer un bien alors qu’il en ignorait son existence. Ce n’était qu’à compter du 25 juin 2019 qu’un montant à titre de fortune immobilière pouvait être pris en compte. Il contestait également le produit du bien immobilier, dans son principe et sa quotité. Le produit de la vente avait été en grande partie dépensé depuis lors, et il pouvait en fournir les justificatifs. Les calculs effectués par le SPC comportaient pas moins de 76 erreurs. Il souhaitait que les décomptes reflètent la réalité.

Il a joint notamment une attestation signée, datée du 6 avril 2020, selon laquelle la mère du bénéficiaire, à l’insu de son fils, avait fait mentionner le nom de ce dernier sur l’acte d’achat du bien immobilier.

c. Par décision du 25 mars 2022, le SPC a rejeté l’opposition formée par l’intéressé et confirmé la somme due de CHF 80'133.40, précisant notamment que même si l’intéressé avait ignoré être propriétaire pour moitié d’un bien immobilier, il convenait d’en tenir compte dans le calcul rétroactif des prestations complémentaires.

Ainsi, sur la base de la valeur vénale correspondant à la moitié du produit net perçu suite à la vente du bien, soit EUR 77'600.-, le SPC avait pris en considération, de 2014 à 2019, le montant de la fortune immobilière, son produit, les frais d’entretien des bâtiments y relatifs, selon un tableau qu’il produisait.

C. a. Par acte du 13 mai 2022, l’assuré a interjeté recours contre cette décision, en concluant, préalablement, à l’audition de témoins, principalement, à l’annulation de la décision, sous suite de frais et dépens.

Le recourant proteste de sa bonne foi et allègue n’avoir pas commis la moindre négligence. Sa mère a acquis l’appartement le 24 mai 2012, pour le prix de EUR 195'000.-, car elle souhaitait qu’il vienne vivre en Espagne avec elle. Pour preuve, la déclaration de sa mère et son absence lors de l’acquisition du bien, comme cela ressort de l’acte notarié daté du 24 mai 2012, qu’il produit. Le recourant affirme n’avoir découvert le bien immobilier que le 24 juin 2019, à l’occasion d’un litige financier entre sa mère, âgée de 88 ans, et un tiers. Étant donné qu’il ne souhaitait pas vivre en Espagne, le bien a été vendu le 23 août 2019 pour EUR 160'000.-, dont EUR 4'800.- de frais, soit EUR 77'600.- pour chacun. Entre l’achat et sa vente, le bien n’a jamais été utilisé par sa mère, ni loué, comme l’indique une attestation du 11 mai 2022.

Selon lui, la prescription pénale n’est pas applicable et seul un nouveau calcul depuis 2019 est justifié, sans prise en compte d’un intérêt. Si une période antérieure devait être prise en compte, le recourant rappelle, concernant le produit de la fortune immobilière, que l’appartement est resté tout le temps inhabité.

S’agissant des revenus retenus à titre de valeur locative du bien, il produit une expertise datée du 9 juin 2021 effectuée par Monsieur C______ attestant que le loyer pour un bien similaire est, en moyenne, de EUR 566.-.

Par ailleurs, le taux de change applicable est celui du jour de la décision.

Enfin, le recourant fait valoir qu’il ne s’est pas dessaisi de certains montants.

b. Invité à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 3 juin 2022, a conclu au rejet du recours.

Il note que, selon l’acte d’achat du 24 mai 2012 produit par le recourant, la prise en compte rétroactive de la valeur vénale du bien immobilier aurait dû être de EUR 97'500.- (correspondant à la moitié du prix d’achat fixé à EUR 195'000.-) au lieu de EUR 77'600.-.

Si le recourant n’était effectivement pas présent lors de l’établissement de l’acte d’achat, il n’apporte cependant pas la preuve de son ignorance de son statut de copropriétaire du bien immobilier. Il est peu probable, selon l’intimé, que le recourant n’ait donné aucune procuration à sa mère en vue de le représenter lors de l’achat du bien. Même s’il était ignorant de son statut, il était, quoi qu’il en soit, copropriétaire du bien du 24 mai 2012 au 23 août 2019.

La prise en compte de 4.5% de la valeur vénale pour calculer le produit du bien immobilier doit être confirmée au vu de la jurisprudence.

Le recourant produit, pour la première fois, une estimation de la valeur locative du bien immobilier, alors que ce document lui a été demandé le 28 janvier 2020.

c. Dans sa réplique du 25 juillet 2022, le recourant conteste le montant pris en considération à titre de capital du 2ème pilier dans les plans de calculs, dès lors qu’il ne perçoit qu’une rente du 2ème pilier. Il ajoute qu’il n’aurait pas pu louer l’appartement, vu qu’il en ignorait l’existence. En outre, il aurait fallu l’accord de sa mère.

d. Dans sa duplique du 4 août 2022, l’intimé relève que le grief concernant le capital du 2ème pilier n’a jamais été invoqué précédemment et en tire la conclusion qu’il ne peut être examiné par la Cour de céans. Plusieurs décisions rendues entre 2014 et 2021 font état de ce capital, lequel n’a jamais été contesté.

e. Une audience de comparution personnelle s’est tenue en date du 20 décembre 2022, lors de laquelle le recourant a expliqué notamment avoir ratifié, en 2019, l’acte d’achat de l’appartement. Il ne conteste plus les taux de change appliqués.

L’intimé a répété que la question du capital du 2ème pilier excède l’objet du litige.

f. La Cour de céans a entendu, à titre de renseignement, Monsieur D______, frère du recourant.

Convoquée, la mère du recourant n’a, quant à elle, pas pu se présenter, en raison de son état de santé.

g. Par écriture du 18 janvier 2023, l’intimé fait valoir que peu importe le fait que le recourant ait ignoré ou non son statut de propriétaire pour juger le bien-fondé de la décision de restitution.

h. Le 17 février 2023, le recourant a allégué que le capital du 2ème pilier correspond à un montant disponible en cas d’acquisition d’un bien immobilier.

i. Les autres faits seront repris – en tant que de besoin – dans la partie « en droit » du présent arrêt.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC ‑ RS 831.30).

Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             La modification du 22 mars 2019 de la LPC est entrée en vigueur le 1er janvier 2021 (Réforme des PC, FF 2016 7249 ; RO 2020 585).

D’après les principes généraux en matière de droit transitoire, on applique, en cas de changement de règles de droit et sauf réglementation transitoire contraire, les dispositions en vigueur lors de la réalisation de l’état de fait qui doit être apprécié juridiquement et qui a des conséquences juridiques (ATF 144 V 210 consid. 4.3.1).

Dans la mesure où le recours porte sur la restitution de prestations complémentaires du 1er avril 2014 au 31 mars 2020, et sur le droit aux prestations complémentaires à compter du 1er avril 2020, soit une période antérieure au 1er janvier 2021, le présent litige reste soumis à l'ancien droit, en l'absence de dispositions transitoires prévoyant une application rétroactive du nouveau droit. Les dispositions légales seront donc citées ci-après dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020.

5.             Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20] ; art. 43 LPCC et art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques inclusivement (art. 38 al. 4 let. a LPGA et art. 89C let. a LPA), le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

6.             Le litige porte sur la question de savoir si c’est à juste titre que l’intimé a requis du recourant la restitution de CHF 80'133.40 pour la période courant du 1er avril 2014 au 31 mars 2020, et lui a nié le droit au versement des prestations complémentaires à compter du 1er avril 2020.

Il s’agira en particulier de déterminer s’il y a lieu de prendre en considération, dans les plans de calculs rétroactifs, un montant à titre de fortune immobilière du 1er avril 2014 au 31 août 2019, une augmentation de l’épargne du 1er septembre au 31 décembre 2019 ainsi que des biens dessaisis dès janvier 2020.

7.              

7.1 À titre préalable, il convient d’examiner d’office si les demandes de restitution du 18 mars 2020 ne sont pas périmées.

7.2 Au niveau fédéral, l'art. 25 al. 1 1ère phrase LPGA, en relation avec l'art. 2 al. 1 let. a de l’ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11), prévoit que les prestations complémentaires fédérales indûment touchées doivent être restituées par le bénéficiaire ou par ses héritiers.

L'obligation de restituer suppose que soient remplies les conditions d'une révision procédurale (art. 53 al. 1 LPGA) ou d'une reconsidération (art. 53 al. 2 LPGA) de la décision – formelle ou non – par laquelle les prestations en cause ont été allouées (ATF 142 V 259 consid. 3.2 et les références ; 138 V 426 consid. 5.2.1 et les références ; 130 V 318 consid. 5.2 et les références).

À cet égard, la jurisprudence constante distingue la révision d'une décision entrée en force formelle, à laquelle l'administration est tenue de procéder lorsque sont découverts des faits nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 129 V 200 consid. 1.1 ; 127 V 466 consid. 2c et les références), de la reconsidération d'une décision formellement passée en force de chose décidée sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au fond, à laquelle l'administration peut procéder pour autant que la décision soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable. Ainsi, par le biais d'une reconsidération, on corrigera une application initiale erronée du droit (ATF 147 V 167 consid. 4.2 et la référence). L'obligation de restituer des prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps ne sont pas liées à une violation de l'obligation de renseigner (ATF 122 V 134 consid. 2e). Il s'agit simplement de rétablir l'ordre légal après la découverte du fait nouveau (arrêt du Tribunal fédéral 9C_522/2021 du 29 juin 2022 consid. 4.1 et la référence).

7.3 Au niveau cantonal, l'art. 24 al. 1 1ère phrase LPCC prévoit que les prestations indûment touchées doivent être restituées. Conformément à l’art. 43A LPCC, les décisions et les décisions sur opposition formellement passées en force sont soumises à révision si le bénéficiaire ou le service découvre subséquemment des faits nouveaux importants ou trouve des nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits avant (al. 1). Le SPC peut revenir sur les décisions ou les décisions sur opposition formellement passées en force lorsqu’elles sont manifestement erronées et que leur rectification revêt une importance notable (al. 2).

7.4 Conformément à l'art. 33 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal - J 3 05), les subsides indûment touchés doivent être restitués en appliquant par analogie l'art. 25 LPGA (al. 1). Lorsque les subsides ont été indûment touchés par un bénéficiaire de prestations du SPC, ce service peut en demander la restitution au nom et pour le compte du service de l'assurance-maladie (al. 2).

7.5 En dehors de l'éventualité de la restitution de prestations indûment touchées par le biais d'une reconsidération ou d'une révision procédurale de la décision entrée en force (ATF 130 V 318 consid. 5.2 et les références), l’ayant droit peut également être tenu à restitution en cas de violation de l'obligation de renseigner (cf. art. 25 al. 2 let. c et d de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 [OPC-AVS/AI - RS 831.301] et art. 9 al. 3 LPCC).

7.6 En vertu de l'art. 25 al. 2 1ère phrase LPGA (dans sa teneur en vigueur au 31 décembre 2020, applicable dans le cas d’espèce au vu de la date des décisions litigieuses rendues le 18 mars 2020 ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_193/2021 du 31 mars 2022 consid. 2.2 et les références), le droit de demander la restitution s'éteint un an après le moment où l'institution d'assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d'un acte punissable, pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant.

Les délais de l'art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office (ATF 133 V 579 consid. 4 ; 128 V 10 consid. 1).

7.7 En l’espèce, dans le cadre de la révision du dossier du recourant initiée en novembre 2019, l’intimé a appris notamment que le recourant avait été copropriétaire d’un bien immobilier en Espagne et qu’il s’était dessaisi d’éléments de sa fortune. Ces faits nouveaux, non déclarés auparavant, justifient indéniablement la révision, avec effet ex tunc, des décisions d’octroi de prestations complémentaires erronées.

En rendant ses deux décisions en date du 18 mars 2020, soit dans le respect du délai relatif d’un an, les demandes de restitution de l’intimé ne sont, partant, pas périmées.

 

 

 

8.

8.1 Il convient d’examiner si c’est à juste titre que l’intimé a, dans les plans de calcul rétroactifs, pris en considération un montant à titre de fortune immobilière à compter du 1er avril 2014.

8.2 La Confédération et les cantons accordent des prestations complémentaires destinées à couvrir les besoins vitaux des personnes qui remplissent certaines conditions (art. 2 al. 1 LPC). Les cantons peuvent accorder des prestations dépassant le cadre de la présente loi et fixer à cet effet des conditions particulières (art. 2 al. 2 1ère phrase LPC).

Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d'invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L'art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

Selon l'art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b) ; un quinzième de la fortune nette, dans la mesure où elle dépasse CHF 37’500.- pour les personnes seules (let. c) et les rentes, pensions et autres prestations périodiques, y compris les rentes de l'AVS et de l'AI (let. d) ainsi que les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (let. g).

8.3 Par fortune au sens de l’art. 11 al. 1 LPC, il faut comprendre toutes les choses mobilières et immobilières ainsi que les droits personnels et réels qui sont la propriété de l’assuré et qui peuvent être transformés en argent liquide (par le biais d’une vente ou d’un nantissement par exemple) pour être utilisés. Il suffit que l’assuré puisse effectivement disposer de l’élément de fortune en cause (ATF 146 V 331 consid. 4.1 ; 127 V 248 consid. 4a). En effet, comme les prestations complémentaires visent à couvrir les besoins vitaux courants, seuls peuvent être pris en compte les revenus effectivement perçus et les valeurs patrimoniales disponibles dont le bénéficiaire de prestations peut disposer sans restriction. Demeure réservé le cas de la renonciation à des revenus ou à des valeurs patrimoniales (art. 11 al. 1 let. g LPC). En d'autres termes, la prise en compte d'une valeur réelle dans le cadre de l'art. 11 al. 1 let. c LPC repose sur la fiction qu'elle peut être transformée en tout temps en patrimoine liquide et consommée en tant que tel (arrêt du Tribunal fédéral 8C_515/2023 du 19 octobre 2023 consid. 2.3 et la référence).

8.4 Quant aux dépenses, elles comprennent notamment, selon l’art. 10 LPC, les frais d’entretien des bâtiments et les intérêts hypothécaires, jusqu’à concurrence du rendement brut de l’immeuble (al. 3 let. b).

8.5 Selon l'art. 17 al. 1 OPC-AVS/AI, la fortune prise en compte doit être évaluée selon les règles de la législation sur l'impôt cantonal direct du canton du domicile. Lorsque des immeubles ne servent pas d'habitation au requérant ou à une personne comprise dans le calcul de la prestation complémentaire, ils seront pris en compte à la valeur vénale (art. 17 al. 4 OPC-AVS/AI), soit la valeur du marché (ch. 3444.02 des Directives de l’OFAS concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, état au 1er janvier 2020 ; DPC).

Selon l'art. 16 al. 1 OPC-AVS/AI, une déduction forfaitaire prévue pour l'impôt cantonal direct dans le canton de domicile s'applique aux frais d'entretien des bâtiments. Cette déduction s'applique même si la personne n'habite pas le bien immobilier dont elle est propriétaire (ATAS/1122/2013 du 19 novembre 2013 consid. 16a et les références) et même si l'immeuble n'est pas situé dans le canton (ATAS/40/2018 du 22 janvier 2018 consid. 10c).

À Genève, l’art. 20 al. 2 let. b du règlement d'application de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 13 janvier 2010 (RIPP - D 3 08.1) prévoit que la déduction forfaitaire, calculée sur la valeur locative selon l’art. 24 al. 2 de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), est de 10 %, si l’âge du bâtiment au début de la période fiscale est inférieur ou égal à 10 ans (let. a) ; 20 %, si l’âge du bâtiment au début de la période fiscale est supérieur à 10 ans (let. b).

8.6 Sur le plan cantonal, ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui remplissent les conditions de l'art. 2 LPCC et dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable (art. 4 LPCC). Le montant de la prestation complémentaire correspond à la différence entre les dépenses reconnues et le revenu déterminant du requérant (art. 15 al. 1 LPCC).

Aux termes de l'art. 5 al. 1 LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, moyennant certaines adaptations.

Les dépenses reconnues sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d’exécution, à l’exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d’aide sociale défini à l’art. 3 (art. 6 LPCC).

Selon l'art. 7 LPCC, la fortune comprend la fortune mobilière et immobilière définie par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution (al. 1). La fortune est évaluée selon les règles de la loi sur l'imposition des personnes physiques, du 27 septembre 2009, à l'exception des règles concernant les diminutions de la valeur des immeubles et les déductions sociales sur la fortune, prévues aux art. 50 let. e et 58 de ladite loi, qui ne sont pas applicables. Les règles d'évaluation prévues par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution sont réservées (al. 2).

8.7 Pour le calcul de la prestation complémentaire fédérale annuelle, sont pris en compte en règle générale les revenus déterminants obtenus au cours de l'année civile précédente et l'état de la fortune le 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est servie. La prestation complémentaire annuelle doit toujours être calculée compte tenu des rentes, pensions et autres prestations périodiques en cours (al. 1 et 3 de l'art. 23 OPC-AVS/AI).

8.8 Pour la fixation des prestations complémentaires cantonales, sont déterminantes, les rentes, pensions et autres prestations périodiques de l'année civile en cours (let. a), la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est demandée (let. b de l'art. 9 al. 1 LPCC).

9.             Dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 142 V 435 consid. 1 et les références ; 126 V 353 consid. 5b et les références ; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n'existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a et la référence).

10.         Par ailleurs, la procédure est régie par le principe inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 139 V 176 consid. 5.2 ; 125 V 193 consid. 2 et les références).

Le Tribunal fédéral des assurances a eu l’occasion de préciser que lorsqu’un nouveau calcul des prestations complémentaires est effectué dans le cadre de la révision impliquant une demande de restitution, il y a lieu de partir des faits tels qu’ils existaient réellement durant la période de restitution déterminante. Dans ce sens, on tiendra compte de toutes les modifications intervenues, peu importe qu’elles influencent le revenu déterminant à la hausse ou à la baisse. Ainsi, le montant de la restitution est fixé sans égard à la manière dont le bénéficiaire des prestations complémentaires assume son obligation d’annoncer les changements et indépendamment du fait que l’administration ait pris connaissance ou non des nouveaux éléments déterminants au gré du seul hasard. Il serait choquant, lors du nouveau calcul de la prestation complémentaire destiné à établir le montant de la restitution, de ne tenir compte que des facteurs défavorables au bénéficiaire de la prestation complémentaire. Le Tribunal fédéral a alors précisé que seul un paiement d’arriérés est exclu (ATF 122 V 19 consid. 5c ; VSI 1996 p. 212). Dans un arrêt de principe, le Tribunal fédéral a indiqué qu'à défaut d'une disposition d'exécution s'écartant de l'art. 24 al. 1 LPGA, dans le cadre d'une demande de restitution, la règle jurisprudentielle prévue par l'ATF 122 V 19, selon laquelle le paiement d'arriérés est exclu, est contraire au droit (ATF 138 V 298 consid. 5.2.2).

11.          

11.1 En l’occurrence, l’intimé a considéré que le bien immobilier sis en Espagne doit être pris en compte dans les calculs des prestations complémentaires à compter du 1er avril 2014, en application d’un délai de péremption plus long (7 ans ; cf. art. 25 al. 2, 2ème phrase LPGA), dès lors que le recourant a enfreint ses obligations au sens des art. 31 al. 1 let. a et d LPC.

11.2 Le recourant fait valoir que c’est seulement le 24 juin 2019 qu’il a appris qu’il était copropriétaire à 50% de l’appartement, de sorte qu’on ne peut lui reprocher de ne pas en avoir informé l’intimé plus tôt.

11.3 En l’occurrence, la question de savoir si un délai de prescription de 7 ans s’applique, peut, en l’état, rester ouverte pour les motifs qui suivent.

Il n’est pas contesté par l’intimé, ni contestable au vu des pièces versées au dossier, que lors de la signature, le 24 mai 2012, de l’acte notarié concernant l’achat du bien immobilier litigieux, le recourant n’était pas présent (cf. p. 4 de la pièce 3, chargé recourant).

Par ailleurs, contrairement à ce qu’avance l’intimé dans son écriture du 3 juin 2022, il résulte bel et bien de l’acte notarié précité que la mère du recourant s’est présentée chez le notaire sans disposer d’aucun pouvoir de représentation lui permettant d’agir au nom et pour le compte de son fils dans le cadre de l’achat du bien litigieux.

Il ressort en outre de l’acte notarié précité qu’un acte juridique émanant du recourant était encore nécessaire pour que ce dernier acquière la copropriété de l’appartement, soit en apportant la preuve d’un pouvoir de représentation octroyé à sa mère, soit en ratifiant l’acte d’achat (cf. p. 4 de la pièce 3, chargé recourant).

Il résulte de ce qui précède, que la propriété du bien immobilier litigieux ne peut être prise en considération qu’à compter de la date à laquelle le recourant a fait part de sa volonté de l’acquérir.

À cet égard, selon les explications fournies par le recourant, le 20 décembre 2022, par-devant la Cour de céans, ce dernier n’aurait pas ratifié l’achat du bien immobilier avant 2019. Au vu des pièces versées au dossier, cela ne paraît pas invraisemblable, dès lors qu’en 2018, la mère du recourant figurait encore comme unique propriétaire du bien litigieux (cf. attestation de paiement, datée du 19 octobre 2018, de l’impôt foncier pour l’année 2018, pièce 9 du courrier du recourant du 23 février 2020). Cela étant, dans la mesure où la date précise de la ratification effectuée par le recourant est un élément nécessaire pour déterminer à partir de quand le bien immobilier doit être pris en considération dans le calcul rétroactif des prestations complémentaires, il revient à l’intéressé d’apporter la preuve de la date exacte à laquelle il a ratifié l’acte d’achat, en sollicitant, pour ce faire, une attestation du notaire en Espagne.

Pour ce motif déjà, la cause doit être renvoyée à l’intimé pour instruction complémentaire. Une fois la date exacte déterminée, il lui reviendra d’inclure dans les calculs des prestations complémentaires la moitié de la valeur vénale du bien immobilier, jusqu’au 31 août 2019, dès lors que la vente du bien immobilier a eu lieu le 23 août 2019.

12.          

12.1 Le recourant conteste également la prise en compte, par l’intimé, d’un produit hypothétique de la fortune immobilière, faisant valoir à cet égard que l’appartement sis en Espagne n’a jamais été utilisé, ni par sa mère, ni loué à des tiers.

12.2 Selon la jurisprudence, un rendement hypothétique de la location d’un bien immobilier doit être pris en considération à titre de dessaisissement, au sens de l’art. 11 al. 1 let. g LPC, lorsqu’il n’est pas habité par son propriétaire, ni mis en location, à moins que celle-ci ne soit considérée comme étant impossible, en raison d’un manque d’infrastructures, telle que l’absence d’alimentation assurée en eau (cf. ATAS/676/2006 du 31 juillet 2006). Des arguments liés à la difficulté de louer, à la charge fiscale ou à des variations du cours de change ne sont, en principe, pas pertinents (arrêt du Tribunal fédéral P 53/04 du 9 mai 2005).

En l’occurrence, selon les déclarations du recourant, l’appartement était neuf (cf. procès-verbal de comparution personnelle du 20 décembre 2022). Quoi qu’il en soit, en l’absence de tout élément concret, dûment prouvé, qui justifierait d’admettre que l’appartement ne pouvait effectivement pas être loué, c’est à juste titre que l’intimé a pris en considération un produit hypothétique de la fortune immobilière.

12.3 S’agissant du montant pris en considération, l’intimé l’a déterminé en faisant application du taux forfaitaire de 4.5 % de sa valeur vénale (décision sur opposition du 25 mars 2022), ce que le recourant conteste également.

12.4 Dans le cas des immeubles sis à l’étranger, le Tribunal fédéral a rappelé que le montant qui doit en principe être pris en considération à titre de loyer lorsqu'un immeuble est vide, alors même qu'une location serait possible, est le loyer qui est usuellement pratiqué dans la région ou, autrement dit, un loyer conforme à la loi du marché (arrêt du Tribunal fédéral 9C_751/2018 du 16 avril 2019 consid. 7.2 et les références).

En l’occurrence, si le recourant n’a certes pas donné suite à la demande faite par l’intimé, en vertu de son devoir d’instruction, de produire une évaluation de la valeur locative du marché (cf. courrier de l’intimé du 20 janvier 2020), il n’en demeure pas moins qu’une telle évaluation a été produite par le recourant avec son recours, de sorte qu’il reviendra à l’intimé de prendre en compte le(s) montant(s) déterminant(s), à compter de la date à laquelle le recourant est devenu copropriétaire. La déduction forfaitaire à titre de frais d’entretien du bien immobilier devra être modifiée en conséquence.

13.          

13.1 Il convient également d’examiner si c’est à juste titre que l’intimé a effectué de nouveaux calculs rétroactifs pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2019, compte tenu de l’augmentation de l’épargne du recourant (provenant de la vente du bien immobilier) qu’il a annoncée en décembre 2019.

13.2 Au préalable, on relèvera que pour justifier le bien-fondé de sa demande de restitution des prestations complémentaires versées en trop du 1er septembre au 31 décembre 2019, l’intimé a considéré que l'augmentation de l’épargne, provenant de la vente du bien immobilier en août 2019, constituait un fait nouveau important permettant de « réviser » sa décision du 13 décembre 2018 d’octroi des prestations complémentaires à compter du 1er janvier 2019. Or, par définition, un fait nouveau, mais découvert après coup, qui permet la révision procédurale d'une décision entrée en force doit exister au moment où cette décision a été rendue. En l’occurrence, dans la mesure où l'augmentation de l’épargne consécutive à la vente du bien immobilier en Espagne a eu lieu en août 2019, il ne s'agit pas d'un fait qui existait déjà au moment de la décision du 13 décembre 2018, par laquelle l’intimé a octroyé des prestations complémentaires dès le 1er janvier 2019, et qui aurait été découvert après coup. Ce fait ne peut dès lors justifier la révision procédurale de cette décision.

13.3 En dehors de l'éventualité de la restitution de prestations indûment touchées lorsque les conditions d'une reconsidération ou d'une révision procédurale sont réalisées (ATF 130 V 318 consid. 5.2 et les références), l’ayant droit peut également être tenu à restitution en cas de violation de l'obligation de renseigner (cf. art. 25 al. 2 let. c et d OPC-AVS/AI).

Selon l'art. 25 al. 1 let. c OPC-AVS/AI, la prestation complémentaire annuelle doit être augmentée, réduite ou supprimée lorsque les dépenses reconnues, les revenus déterminants et la fortune subissent une diminution ou une augmentation pour une durée qui sera vraisemblablement longue ; sont déterminants les dépenses nouvelles et les revenus nouveaux et durables, convertis sur une année, ainsi que la fortune existant à la date à laquelle le changement intervient ; on peut renoncer à adapter la prestation complémentaire annuelle, lorsque la modification est inférieure à 120 fr. par an. Selon l'art. 25 al. 2 let. c OPC-AVS/AI, la nouvelle décision doit porter effet, dans les cas prévus par l'al. 1 let. c, lors d'une diminution de l'excédent des dépenses, au plus tard dès le début du mois qui suit celui au cours duquel la nouvelle décision a été rendue ; la créance en restitution est réservée lorsque l'obligation de renseigner a été violée. 

L'art. 25 OPC-AVS/AI permet d'adapter une décision de prestations complémentaires à des modifications postérieures de la situation personnelle et économique de l'ayant droit en raison d'un changement de circonstances. L'al. 1 de cette disposition règle la modification (augmentation, réduction ou suppression) de la prestation complémentaire annuelle (en cours d'année civile) et concerne la situation d'une révision de prestations durables au sens de l'art. 17 al. 2 LPGA. Son al. 2 règle le moment à partir duquel l'augmentation, la réduction ou la suppression prennent effet. Lorsqu'en application de l'art. 25 OPC‑AVS/AI, l'administration effectue une adaptation des prestations à la modification des conditions personnelles ou économiques de l'intéressé, celui-ci peut être tenu de restituer des prestations reçues en trop ; l'art. 25 al. 2 let. c et d in fine OPC-AVS/AI réserve expressément la créance en restitution lorsque l'obligation de renseigner a été violée (ATF 138 V 298 consid. 5.2.1 et les références).

13.4 En l’occurrence, il résulte des pièces versées au dossier qu’en date du 28 août 2019, le compte bancaire détenu par le recourant auprès D’ABANCA (n° 1______) a été crédité d’un montant de EUR 77'600.- (soit CHF 87'121.50), représentant la moitié du produit de la vente du bien immobilier. Il n’est pas contesté par le recourant que ce n’est qu’en décembre 2019, dans le cadre de la révision de son dossier initiée par l’intimé, qu’il a annoncé l’augmentation de sa fortune mobilière. Partant, il y a lieu de retenir une violation de l'obligation de renseigner de la part du recourant, fondant une obligation de restitution des prestations versées en trop.

13.5 Il convient dès lors de déterminer si le montant pris en compte à titre d’épargne dès le 1er septembre 2019 est correct.

En principe, sont pris en compte pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle, les revenus obtenus au cours de l’année civile précédente et l’état de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (art. 23 al. 1 OPC-AVS/AI).

Toutefois, lorsqu’il s’agit de modifier une prestation complémentaire en cours d’année, il y a lieu d’appliquer l’art. 25 al. 1 let. c OPC-AVS/AI, selon lequel lorsque les dépenses reconnues, les revenus déterminants et la fortune subissent une diminution ou une augmentation pour une durée qui sera vraisemblablement longue ; sont déterminants les dépenses nouvelles et les revenus nouveaux et durables, convertis sur une année, ainsi que la fortune existant à la date à laquelle le changement intervient.

Cette disposition règle en effet la modification (augmentation, réduction ou suppression) de la prestation complémentaire annuelle (en cours d'année civile), elle porte donc sur la modification de prestations complémentaires en cours (arrêts du Tribunal fédéral 9C_251/2013 du 22 août 2013 consid. 4.3.2 et les références ; 9C_675/2012 du 15 novembre 2012 consid. 3.1).

13.6 En l’occurrence, compte tenu de l’augmentation de l’épargne du recourant dès le 28 août 2019, l’intimé a effectué un nouveau plan de calcul des prestations complémentaires pour la période du 1er septembre au 31 décembre 2019, en prenant en considération un montant de CHF 98'337.40 à titre d’épargne, correspondant au produit de la vente du bien immobilier (CHF 87'121.50) auquel il a ajouté l’épargne existant au 1er janvier 2019 (CHF 11'215.90).

Or, on rappellera que lorsqu’il s’agit de modifier une prestation complémentaire en cours d’année civile, la fortune déterminante est celle existant à la date à laquelle le changement intervient (cf. art. 25 al. 1 let. c OPC-AVS/AI), de sorte que l’intimé ne pouvait se limiter à reprendre, telle quelle, l’épargne existant au 1er janvier 2019 et l’ajouter aux CHF 87'121.50. Il se devait, au contraire, de déterminer le montant de la fortune existant, au 31 août 2019, sur l’ensemble des comptes bancaires du recourant, ce qu’il n’a pas fait.

Pour ce motif également, la cause doit être renvoyée à l’intimé pour instruction complémentaire portant sur l’épargne existant au 31 août 2019.

14.          

14.1 Il convient encore d’examiner si c’est à bon droit que l’intimé a pris en compte un montant de CHF 38'597.- à titre de biens dessaisis à compter du 1er janvier 2020, pour justifier la révision procédurale de ses décisions d’octroi de prestations complémentaires rendues les 2 décembre 2019 et 27 janvier 2020.

14.2 Les revenus pris en considération dans le calcul des prestations complémentaires tant fédérales que cantonales comprennent notamment les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (art. 11 al. 1 let. g LPC pour les prestations complémentaires fédérales ; art. 5 LPCC, lequel renvoie à l’art. 11 LPC, s’agissant des prestations complémentaires cantonales).

Comme indiqué précédemment, ce sont les dispositions en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020 qui sont applicables. Or, jusqu’à cette date, la LPC ne comportait pas de définition du dessaisissement, cette notion ressortant de la jurisprudence.

14.3 Selon le Tribunal fédéral, il y a notamment dessaisissement lorsque la personne concernée a renoncé à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique et sans avoir reçu en échange une contre-prestation équivalente, ces deux conditions étant alternatives (ATF 146 V 306 consid. 2.31 ; 140 V 267 consid. 2.2 et les références). Le fait que l’intéressé ait eu l’intention d’éluder ou non la loi est sans importance (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, 2015, n° 94 ad art. 11 LPC).

Pour que l'on puisse admettre qu'une renonciation à des éléments de fortune ne constitue pas un dessaisissement, il faut que soit établie une corrélation directe entre cette renonciation et la contre-prestation considérée comme équivalente. Cela implique nécessairement un rapport de connexité temporelle étroit entre l'acte de dessaisissement proprement dit et l'acquisition de la contre-valeur correspondante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_945/2011 du 11 juillet 2012 consid. 6.2).

Selon l'art. 17a OPC-AVS/AI, la part de fortune dessaisie à prendre en compte (art. 11 al. 1 let. g LPC) est réduite chaque année de CHF 10'000.- (al. 1). La valeur de la fortune au moment du dessaisissement doit être reportée telle quelle au 1er janvier de l’année suivant celle du dessaisissement, pour être ensuite réduite chaque année (al. 2). Est déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle le montant réduit de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 3).

Le Tribunal fédéral a admis la conformité de cette disposition à la loi et à la constitution (ATF 118 V 150 consid. 3c/cc). Conformément à cette disposition, il faut qu'une année civile entière au moins se soit écoulée entre le moment où l'assuré a renoncé à des parts de fortune et le premier amortissement de fortune (Ralph JÖHL, Die Ergänzungsleistung und ihre Berechnung, in Soziale Sicherheit, SBVR vol. XIV, p. 1816 n. 247).

En cas de dessaisissement d'une part de fortune, le calcul de la prestation complémentaire doit se faire comme si l'ayant droit avait obtenu une contre‑prestation équivalente pour le bien cédé. Le revenu déterminant est donc augmenté, d'abord, d'une fraction de la valeur de ce bien conformément à l'art. 11 al. 1 let. c LPC. Il est augmenté, ensuite, du revenu que la contre-prestation aurait procuré à l'ayant droit (arrêt du Tribunal fédéral 9C_36/2014 du 7 avril 2014 consid. 3.2). En règle générale, la jurisprudence se réfère, pour fixer ce revenu, au taux d'intérêt moyen sur les dépôts d'épargne servi par l'ensemble des banques au cours de l'année précédant celle de l'octroi de la prestation complémentaire (ATF 123 V 35 consid. 2a ; 120 V 182 consid. 4e).

14.4 Dans le régime des prestations complémentaires, l'assuré qui n'est pas en mesure de prouver avec une vraisemblance prépondérante que ses dépenses ont été effectuées moyennant une contre-prestation adéquate ne peut pas se prévaloir d'une diminution correspondante de sa fortune, mais doit accepter que l'on s'enquière des motifs de cette diminution et, en l'absence de la preuve requise, que l'on tienne compte d'une fortune hypothétique (ATF 146 V 306 consid. 2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_246/2022 du 6 décembre 2022 consid. 3.4 et les références).

14.5 En l’occurrence, l’intimé a retenu que le recourant s’est dessaisi, entre le 1er septembre et le 31 août 2019, d’un montant de CHF 38'597.-, ce que le recourant conteste.

Il résulte de la note établie par l’intimé le 13 mars 2020 (pièce 68, dossier intimé) que ce dernier a déterminé le montant des biens dessaisis (CHF 38'597.-) en comparant l’épargne qu’il a prise en considération dès le 1er septembre 2019 (CHF 98'337.40) à celle qu’il a retenue au 31 décembre 2019 (CHF 59'740.35).

Comme la Cour de céans l’a déjà indiqué (cf. consid. 13.6), le montant de CHF 98'337.40 tel que retenu par l’intimé à titre d’épargne dès le 1er septembre 2019, ne peut être confirmé et doit faire l’objet d’une instruction complémentaire.

S’agissant ensuite de l’épargne que détenait le recourant au 31 décembre 2019, l’intimé a retenu un montant de CHF 59'740.35 (correspondant à une fortune mobilière de CHF 62'927.85 – CHF 3'187.50 de dettes).

Or, au vu du dossier produit par l’intimé, force est de constater que ce montant a été retenu en l’absence des pièces bancaires pertinentes. On ignore en effet les soldes, au 31 décembre 2019, des comptes détenus par le recourant auprès du Crédit Suisse (n° 2______), de Postfinance (n° 3______) et d’Abanca (n° IBAN 4______), étant précisé que le solde du deuxième compte auprès de cet établissement (n° IBAN 1______) a été pris en considération par l’intimé (EUR 53'449.43).

Pour ces motifs déjà, la Cour de céans n’est pas en mesure de confirmer le montant de CHF 38'597.- retenu à titre de biens dessaisis dès le 1er janvier 2020 par l’intimé.

14.6 S’agissant de la diminution de la fortune entre le 1er septembre et le 31 décembre 2019, le recourant la justifie notamment par un prêt en faveur d’un ami, des dons en faveur de deux amies et de plusieurs associations caritatives ainsi que des achats alimentaires en Espagne.

L’intimé a considéré, quant à lui, qu’aucune dépense justifiée ne pouvait venir en déduction du montant retenu à titre de biens dessaisis (cf. pièce 68 dossier intimé).

Le recourant explique, pièces à l’appui, avoir fait des dons en faveur de plusieurs associations caritatives, ainsi que des versements à deux amies établies à l’étranger, à qui il aurait offert également notamment des vêtements et la prise en charge de frais médicaux en Suisse.

Que ce soient les dons aux association caritatives, les versements ou cadeaux effectués en faveur d’amies, force est de constater qu’il s’agit de donations, lesquelles constituent des cessions à titre gratuit qui tombent sous le coup de l’art. 11 al. 1 let. g LPC (arrêts du Tribunal fédéral 9C_67/2011 du 29 août 2011 consid. 5.1 ; P 11/04 du 21 juillet 2004 consid. 3.2).

Ces montants ne peuvent donc pas être considérés comme étant des dépenses justifiées, de sorte que c’est à juste titre que l’intimé ne les a pas déduits du montant retenu à titre de biens dessaisis.

Le recourant se prévaut également, attestation signée à l’appui, d’un prêt en date du 5 décembre 2019, de CHF 2’000.- remboursables en dix mensualités de CHF 200.-, en faveur de Monsieur B______ (pièce 2 annexée à son courrier du 23 février 2020).

Selon la jurisprudence, l'octroi d'un prêt ne saurait être assimilé à un dessaisissement de fortune, dès lors qu’il fonde un droit au remboursement. Un dessaisissement doit toutefois être retenu lorsqu’il apparaît dès le départ, au regard des circonstances concrètes du cas d’espèce, que le prêt ne sera pas remboursé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_493/2022 du 28 septembre 2023 consid. 4.5 et les références).

L’existence d’un prêt en faveur de M. B______ ne peut, en l’état, être exclue par la Cour de céans. Il apparaît en effet qu’en raison d’un précédent emprunt, M. B______ a effectué des versements sur le compte que détient le recourant auprès du Crédit Suisse, avec la mention « remboursement prêt », en date notamment des 3 janvier et 1er octobre 2019.

En outre, l’intimé n’allègue aucune circonstance concrète permettant de retenir que le prêt ne sera pas remboursé.

Force est donc de constater qu’en l’absence d’une instruction complète effectuée par l’intimé portant notamment sur les relevés bancaires établis postérieurement au 5 décembre 2019 (date du prêt effectué par le recourant), qui auraient permis de retenir l’existence d’éventuels versements effectués par M. B______ en faveur du recourant, la Cour de céans n’est pas en mesure, en l’état, de déterminer si le montant du prêt (CHF 2’000.-) correspond à des biens dessaisis.

S’agissant enfin des dépenses alimentaires effectuées par le recourant en Espagne (cf. pièces 14 annexées à son courrier du 23 février 2020, en partie illisibles), on relèvera que ces frais ne peuvent pas venir en déduction du montant retenu à titre de biens dessaisis, étant donné que ces dépenses sont déjà comprises dans le montant forfaitaire destiné à la couverture des besoins vitaux, au sens de l’art. 10 al. 1 let. a LPC (ATAS/411/2019/ du 7 mai 2019 consid. 12). En effet, ce montant inclut notamment les frais de nourriture, d'habillement, de soins corporels, de consommation d'énergie (électricité, gaz, etc.), de communication, de transport ou de loisirs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_822/2009 du 7 mai 2010 consid. 3.3 et la référence). 

Toutefois, la Cour de céans constate que l’intimé ne s’est pas prononcé sur les éléments suivants, lesquels ressortent pourtant du dossier :

-          le recourant était assuré, en 2019, dans le cadre de l’assurance-maladie privée auprès de CSS ASSURANCE-MALADIE SA, pour une prime mensuelle de CHF 129.20 (pièce 47, dossier intimé) ; or, si le recourant est en mesure d’étayer, par pièces, le paiement de ces primes, il conviendra alors de les prendre en compte, en déduction du montant dessaisi ;

-          les frais de tenue des comptes bancaires que le recourant a pris en charge en 2019.

14.7 Pour ces motifs également, la cause doit être renvoyée à l’intimé pour instruction complémentaire, à charge pour ce dernier de requérir les pièces pertinentes auprès du recourant et de recalculer le montant des biens dessaisis, lequel sera reporté, tel quel, au 1er janvier 2020. Le produit hypothétique des biens dessaisis devra également être modifié en conséquence.

15.          

15.1 Le recourant fait également valoir qu’un montant à titre de capital du 2ème pilier a été retenu à tort dans les calculs effectués par l’intimé à compter du 1er avril 2014.

Le recourant se réfère, à cet égard, aux montants retenus à titre de capital du 2ème pilier figurant sur les plans de calcul, soit CHF 37'012.- du 1er avril 2014 au 31 décembre 2018 et CHF 37'292.65 à compter du 1er janvier 2019, lesquels correspondent à l’avoir de prévoyance que détient le recourant sur un compte de libre passage auprès de Rendita, fondation de libre passage, selon les attestations établies par cette institution et versées au dossier.

15.2 L’intimé est d’avis que ces éléments, non contestés dans le cadre de la procédure d’opposition, sont entrés en force de chose décidée, de sorte qu’ils ne peuvent être examinés par la Cour de céans.

15.3 Les aspects partiels d'un rapport juridique fixé par décision ne servent en règle générale qu'à motiver la décision et ne sont donc en principe pas attaquables de manière indépendante. La motivation de la décision se rapporte à l’ensemble des éléments de fait et de droit qui conduisent au dispositif de la décision. Aucun des différents aspects du rapport juridique formant l’objet du litige n’entre en force de chose décidée ; ils ne sont que des éléments de motivation de la décision contestée. Compte tenu de l’effet dévolutif du recours, de la maxime inquisitoire et de la maxime d’office, le pouvoir d’examen du juge porte sur tous les aspects du rapport juridique litigieux, y compris les aspects à propos desquels le recourant ne soulève aucun grief, en respectant, selon les cas, les droits procéduraux des parties, en particulier le droit d'être entendu de la partie menacée d'un éventuel désavantage ou le droit fondamental au double degré de juridiction (Jean MÉTRAL, Commentaire romand de la loi sur la partie générale des assurances sociales, 2018, nos 11 et 13 ad art. 11 LPGA ; cf. ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.3 ; 125 V 413 consid. 2b et 2c et les références).

En l’occurrence, le montant à titre de capital du 2ème pilier figurant dans le calcul des prestations complémentaires est un élément qui constitue l’un des aspects de la motivation de la décision de restitution litigieuse, de sorte que la Cour de céans peut examiner le bien-fondé de sa prise en compte par l’intimé.

15.4 S’agissant de la fortune à prendre en considération à titre de revenus, l’avoir de libre passage auquel la personne peut prétendre en vertu de l’art. 5 de la loi fédérale sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 17 décembre 1993 (loi sur le libre passage, LFLP ‑ RS 831.42) ou de l’art. 16 al. 2 de l’ordonnance sur le libre passage dans la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 3 octobre 1994 (ordonnance sur le libre passage, OLP - RS 831.425) doit être pris en compte dès qu’il est exigible et même si l’assuré n’en demande pas le versement (arrêt du Tribunal fédéral 9C_41/2011 du 16 août 2011 consid. 6.2). En effet, quand bien même les art. 5 LFLP et 16 al. 2 OLP sont des normes potestatives (« Kann‑Vorschriften ») qui laissent le choix à la personne assurée de demander ou non le versement de son capital de prévoyance, ils ne sauraient aller à l’encontre du principe général du droit des assurances sociales, selon lequel il appartient à la personne assurée d’entreprendre de son chef tout ce que l’on peut raisonnablement attendre d’elle pour atténuer les conséquences du dommage. On est ainsi en droit d’attendre et d’exiger qu’elle mette tout en œuvre pour concrétiser les possibilités de gain dont elle dispose, notamment en demandant le versement du capital de prévoyance déposé sur un compte de libre passage. Celui‑ci doit alors être pris en compte à partir du moment où son versement peut être exigé et non pas à partir du moment où il est demandé. En revanche, ce capital n’entre pas dans la fortune déterminante tant et aussi longtemps qu’il n’est pas disponible (Michel VALTERIO, op. cit., nos 43 et 44 ad art. 11 LPC).

La prévoyance professionnelle a pour but de protéger les personnes âgées, les survivants et les invalides en cas de survenance d'un cas d'assurance (vieillesse, décès ou invalidité, art. 1 al. 1 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40]). Le droit au versement selon l'art. 16 al. 2 OLP se rattache au cas d'assurance-invalidité. D'un point de vue téléologique, il est décisif pour le versement anticipé prévu dans cette disposition qu'il n'y ait plus d'intérêt à maintenir la couverture de prévoyance. C'est le cas lorsque le cas de prévoyance est déjà survenu sous la forme d'une invalidité d'au moins 70 % et qu'une rente entière de l'assurance-invalidité est versée sur cette base. Ce n'est que lorsque cela est prouvé, c'est-à-dire lorsque le droit à la rente a été définitivement accordé par l'autorité compétente (administration ou tribunal), que l'intérêt au maintien de la protection de prévoyance disparaît et que l'accès à l'avoir de prévoyance est possible (cf. ATF 146 V 331 consid. 5.3). Le capital de libre passage fait donc partie de la fortune devant être prise en compte pour le calcul des prestations complémentaires au sens de l’art. 11 al. 1 let. c LPC dès que l’assuré perçoit une rente entière d’invalidité de l’assurance-invalidité en vertu de l’art. 16 al. 2 OLP (ATF 146 V 331 consid. 3.1 et 4).

15.5 L’art. 11 al. 1 let. c LPC prévoit que la fortune nette doit être prise en compte comme revenu. Cela signifie que les dettes dûment prouvées doivent être déduites de la fortune brute. En revanche, les dettes incertaines ou dont le montant n'a pas encore été déterminé ne peuvent être déduites (ATF 142 V 311 consid. 3.1 ; Michel VALTERIO, op. cit., n° 46 ad art. 11 LPC). Lorsqu’il y a lieu de prendre en compte les avoirs de prévoyance déposés sur un compte de libre passage dans le calcul des revenus déterminants au sens de l’art. 11 al. 1 let. c LPC, il convient de déduire le montant des impôts qui seraient dus en cas de paiement en espèces de la prestation de sortie (ATF 140 V 201 consid. 4.2-4.4 ; voir également ATF 146 V 331 consid. 6).

Ladite dette fiscale doit être calculée à la date à partir de laquelle le capital de prévoyance professionnelle est pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires, afin d'être déduite du montant dudit capital pour que cet élément de fortune nette soit retenu au titre de « capital LPP » (ATF 140 V 201 consid. 4.4 ; ATAS/337/2020 du 14 mai 2020 consid. 4e ; ATAS/815/2019 du 10 septembre 2019 consid. 9d). La Cour de céans a précisé qu'il appartenait au SPC de requérir l'entraide administrative auprès de l'administration fiscale cantonale afin que celle-ci calcule le montant des impôts qui seraient dus sur ledit avoir de prévoyance professionnelle, plutôt que de retenir le montant brut versé sur le compte de libre passage de l'intéressé (ATAS/337/2020 du 14 mai 2020 consid. 4e ; ATAS/815/2019 du 10 septembre 2019 consid. 9d).

15.6 En l’occurrence, lors du dépôt de sa demande de prestations complémentaires en date du 13 juin 2014, le recourant était au bénéfice, depuis le 1er juin 2014, d’une rente entière de l’assurance-invalidité (décision de l’office cantonal de l’assurance-invalidité du 7 mars 2014), ce qui l’autorisait à retirer son avoir de libre passage, en application de l’art. 16 al. 2 OLP.

C’est dès lors à juste titre que l’intimé a tenu compte de ce capital en tant qu’élément de la fortune dans le calcul rétroactif des prestations complémentaires.

Toutefois, l’intimé a omis de déduire le montant des impôts qui seraient dus en cas de paiement en espèces de cette prestation. Le Tribunal fédéral a en effet rappelé que la prise en compte des impôts liés au retrait du capital de libre passage doit se faire dès que celui-ci est exigible et pris en compte à titre de fortune, et non pas au moment où il est effectivement retiré (cf. ATF 140 V 201 consid. 4.3).

La cause doit par conséquent être renvoyée à l’intimé pour instruction portant sur le montant des impôts qui seraient dus en cas de paiement en espèces de la prestation, en sollicitant l'administration fiscale cantonale à cet effet. L’intimé portera ce montant en déduction de la somme brute du capital LPP afin de déterminer le montant à retenir pour le calcul du droit aux prestations complémentaires. Les intérêts sur le capital LPP pris en considération à titre de produits de la fortune devront également être modifiés, en conséquence.

16.          

16.1 Enfin, la Cour de céans constate que l’intimé a pris en considération, dans le plan de calculs à compter du 1er janvier 2020, un montant de CHF 9'790.- à titre de rente du 2ème pilier, alors que le recourant perçoit uniquement un montant annuel de CHF 4'895.02, soit CHF 1’223.75 versés tous les trois mois (cf. courrier du 27 mai 2014 de la Fondation, institution supplétive LPP et relevé bancaire du 17 octobre 2019 établi par le Crédit Suisse joint au formulaire de révision périodique du 17 décembre 2019).

16.2 Pour ce motif également, la cause doit être renvoyée à l’intimé pour rectification du montant de la rente du 2ème pilier à compter du 1er janvier 2020.

17.         Au vu de ce qui précède, le recours est partiellement admis et la décision sur opposition du 25 mars 2022 annulée. La cause est renvoyée à l’intimé pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

18.         Le recourant obtenant partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 2’000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

19.         Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Annule la décision sur opposition de l’intimé du 25 mars 2022.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour instruction complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

5.        Condamne l’intimé à verser au recourant le montant de CHF 2'000.- à titre de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF ‑ RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Christine RAVIER

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le