Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public
ATAS/843/2023 du 01.11.2023 ( LAMAL ) , SANS OBJET
En droit
rÉpublique et | 1.1 canton de genÈve![endif]>![if> | |
POUVOIR JUDICIAIRE
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A/2758/2023 ATAS/843/2023 COUR DE JUSTICE Chambre des assurances sociales | ||
Arrêt du 1er novembre 2023 Chambre 4 |
En la cause
A______ représentée par Me Philippe DUCOR, avocat
| recourante |
contre
DÉPARTEMENT DE LA SANTÉ ET DE LA MOBILITÉ
| intimé |
A. a. A______ (ci-après l’intéressée ou la recourante), exploite une organisation d'aide et de soins à domicile (OASD) à Genève. Elle est au bénéfice d’une autorisation délivrée à cet effet par arrêté du 16 décembre 2021 du département de la sécurité, de la population et de la santé, dont la compétence en la matière a depuis été transférée au département de la santé et des mobilités (ci-après le département ou l’intimé).![endif]>![if>
b. La coopérative des soins infirmiers (ci-après la CSI) est une coopérative inscrite au registre du commerce ayant pour but de favoriser et garantir les intérêts économiques et professionnels de ses membres. ![endif]>![if>
c. Par courriel du 13 janvier 2022, le département, soit pour lui la direction générale de la santé (DGS), a annoncé à l’intéressée qu’il avait mandaté la CSI pour assurer la gestion du financement résiduel des OASD. Il a joint à ce courriel un document intitulé « Information externe » du 21 décembre 2021 contenant les directives relatives au financement résiduel des soins dès 2022. Celles-ci prévoyaient la délégation à la CSI du traitement des demandes et du versement de la part résiduelle cantonale des soins réalisés à partir du 1er janvier 2022 par toutes les OASD, et la transmission par celles-ci de tous les documents relatifs au contrôle des décomptes à la CSI, qui avait la faculté d’exiger les copies des factures ainsi que les justificatifs de remboursement par l'assurance et par l'assuré et de procéder à des contrôles des décomptes. ![endif]>![if>
d. L’intéressée a par la suite eu plusieurs échanges de courriers avec le Conseiller d’État en charge du département, certains étant adressés de concert avec d’autres OASD. Elle y a notamment mis en cause la légalité et l’opportunité d’une délégation de la gestion du financement résiduel des soins à la CSI. Dans ce cadre, dans un courrier du 14 février 2022, l’intéressée a déclaré s’opposer à l’application à son endroit des directives. Elle a à plusieurs reprises annoncé qu’elle refusait de transmettre ses décomptes à la CSI. Le 12 juillet 2022, elle a requis du département que celui-ci procède au paiement des décomptes ou, à défaut, qu’il rende des décisions lui refusant le versement du financement résiduel. Le département a répondu le 26 août 2022 que ce paiement ne lui était pas refusé, si bien qu’il n’y avait pas lieu de rendre de décision. ![endif]>![if>
L’intéressée a fait parvenir les décomptes suivants à la DGS :
- décompte du premier trimestre 2022, transmis le 8 juin 2022, portant sur un montant de CHF 219'777.45 ;![endif]>![if>
- décomptes des deuxième et troisième trimestres 2022, transmis le 21 novembre 2022, portant sur des montants respectifs de CHF 138'661.50 et CHF 135'702.74.![endif]>![if>
e. Le 14 décembre 2022, l’intéressée a rappelé au département qu’elle lui avait soumis les informations requises pour le financement résiduel pour les trois premiers trimestres de 2022, correspondant à un montant de CHF 494'141.69 qu’elle le mettait en demeure de verser au 31 décembre 2022. ![endif]>![if>
Elle a relancé le département le 23 janvier et le 3 février 2023, l’invitant à statuer sur sa demande au 20 février 2023 au plus tard, faute de quoi elle ouvrirait action à son encontre.
f. Par courrier du 10 mars 2023, le département a communiqué à l’intéressée qu’il lui était difficile de saisir la raison de son refus de l’examen des décomptes par la CSI. Cependant, par gain de paix, il avait invité ses services à examiner directement les décomptes de l’intéressée pour les périodes concernées, ce qui prendrait plusieurs semaines. ![endif]>![if>
g. Le 16 mars 2023, l’intéressée a fourni au département le décompte du quatrième trimestre 2022, portant sur un montant de CHF 134'024.83. ![endif]>![if>
B. a. Par acte du 20 mars 2023 interjeté devant la chambre administrative de la Cour de céans à l’encontre du département, l’intéressée a conclu, sous suite de dépens, à ce que l’intimé soit condamné à lui verser les montants de CHF 219'777.45 plus intérêts à 5 % l’an dès le 8 juin 2022, de CHF 138'861.50 et CHF 135'702.74 plus intérêts à 5 % l’an dès le 21 novembre 2022 et de CHF 134'024.83 plus intérêts à 5 % l’an dès le 16 mars 2023 ; à ce qu’il soit fait interdiction à l’intimé de déléguer la gestion du financement résiduel des soins à la CSI ou à tout autre tiers, et à l’annulation des art. 6 à 8 de la directive du 21 décembre 2021 ; à titre subsidiaire, à ce qu’il soit constaté que l’État de Genève avait commis un déni de justice en refusant ou en tardant à statuer sur le financement résiduel qui lui était dû et au renvoi de la cause à l’intimé afin qu’il statue, en lui donnant pour instructions impératives de verser à la recourante les montants faisant l’objet des conclusions principales, de renoncer à déléguer la gestion du financement résiduel à la CSI et d’annuler les art. 6 à 8 de la directive du 21 décembre 2021.![endif]>![if>
b. Par courrier du 19 avril 2023 à la chambre administrative, l’intimé a indiqué que la demande de paiement du financement résiduel de CHF 628'166.- pour 2022 avait été instruite, et un versement de CHF 611'511.- opéré à ce titre le 29 mars 2023. Le reliquat correspondait à la part à facturer aux patients, ce dont il avait informé la recourante. La cause pouvait être ainsi considérée comme close.![endif]>![if>
c. Par arrêt du 29 août 2023 (ATA/914/2023), la chambre administrative a décliné sa compétence, déclaré le recours irrecevable et l’a transmis à la chambre de céans comme objet de sa compétence.![endif]>![if>
d. Dans sa réponse du 27 septembre 2023, l’intimé a conclu à ce que la chambre de céans constate que le recours était sans objet et déboute la recourante de ses conclusions pour le surplus, les dépens devant être compensés. Les montants réclamés avaient été payés, comme il l’avait annoncé le 19 avril 2023. Le seul montant demeurant en suspens avait fait l’objet d’un récent ordre de virement à la suite des explications de la recourante. Par ailleurs, la DGS avait confirmé à la recourante que ses décomptes seraient à l’avenir examinés par ses soins. Partant, la recourante n’avait plus de motif de contestation. Dans la mesure où la quasi-totalité des OASD avait accepté le traitement de leurs demandes de financement résiduel par la CSI, il ne se justifiait pas que la chambre de céans se prononce sur cet aspect et annule les articles correspondants de la directive du 21 décembre 2021. ![endif]>![if>
e. Dans ses déterminations du 3 octobre 2023, la recourante a noté que si les montants dus avaient finalement été réglés, les intérêts moratoires afférents au financement résiduel n’avaient pas été versés. Or, le débiteur en retard dans un paiement devait de tels intérêts, selon un principe général applicable tant en droit privé qu’en droit public. Une indemnité de dépens était également due, dès lors que l’intimé avait acquiescé aux conclusions. La recourante s’est derechef exprimée sur la délégation du traitement du financement résiduel à la CSI. ![endif]>![if>
f. La chambre de céans a transmis copie de cette écriture à l’intimé le 5 octobre 2023. ![endif]>![if>
g. Sur ce, la cause a été gardé à juger. ![endif]>![if>
1. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 4 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).![endif]>![if>
Les litiges relatifs au financement résiduel des coûts des soins sont soumis à la LPGA lorsque le législateur cantonal n'a pas adopté de réglementation ou de réglementation différente (ATF 140 V 58 consid. 4.2). Le législateur genevois, dans la loi du 26 juin 2008 sur le réseau de soins et le maintien à domicile (LSDom - K 1 06) et la loi d'application de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 29 mai 1997 (LaLAMal - J 3 05), n'a pas prévu de règles spéciales concernant la procédure dans ce domaine. Partant, conformément à l'art. 57 LPGA, ces litiges relèvent de la compétence de la chambre de céans (arrêt du Tribunal fédéral 9C_484/2017 du 12 mars 2018 consid. 1.3).
2. En ce qui concerne la recevabilité du recours, la chambre de céans retient ce qui suit. ![endif]>![if>
2.1 Les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues (art. 52 al. 1 LPGA) et les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l’opposition n’est pas ouverte peuvent faire l'objet d'un recours devant le tribunal cantonal des assurances compétent (art. 56 al. 1 en relation avec les art. 57 al. 1 et 58 al. 1 LPGA). ![endif]>![if>
2.2 Dans la procédure juridictionnelle administrative, seuls peuvent en règle générale être examinés et jugés les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement d'une manière qui la lie, sous la forme d'une décision (en principe sur opposition). Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, si aucune décision n'a été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1, arrêt du Tribunal fédéral 9C_678/2011 du 4 janvier 2012 consid. 3.1). Lorsqu’aucune décision n’a été rendue, le recours est irrecevable (ATF 131 V 202 consid. 2.1). ![endif]>![if>
2.3 Toutefois, à teneur de l’art. 56 al. 2 LPGA, un recours peut être formé lorsque l’assureur, malgré la demande de l’intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition. Le droit de recours en vertu de cette disposition sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale, qui prévoit que toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit jugée dans un délai raisonnable (Cst. – RS 101) (arrêt du Tribunal fédéral 9C_687/2008 du 12 mars 2009 consid. 3.1). Cette disposition consacre le principe de la célérité ou, en d'autres termes, prohibe le retard injustifié à statuer. Il y a retard injustifié à statuer lorsque l'autorité administrative ou judiciaire compétente ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prévu par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 131 V 407 consid. 1.1). Le caractère raisonnable du délai s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard en particulier à la complexité de l'affaire, au comportement du requérant et à celui des autorités compétentes, ainsi qu'à l'enjeu du litige pour l'intéressé (arrêt du Tribunal fédéral 9C_230/2018 du 4 juin 2018 consid. 3.2). A cet égard, il appartient au justiciable d'entreprendre ce qui est en son pouvoir pour que l'autorité fasse diligence, que ce soit en l'invitant à accélérer la procédure ou en recourant, le cas échéant, pour retard injustifié. Le comportement du justiciable s'apprécie toutefois avec moins de rigueur en procédure pénale et administrative que dans un procès civil, où les parties doivent faire preuve d'une diligence normale pour activer la procédure. On ne saurait par ailleurs reprocher à une autorité quelques « temps morts » ; ceux-ci sont inévitables dans une procédure. Une organisation déficiente ou une surcharge structurelle ne peuvent cependant justifier la lenteur excessive d'une procédure. Il appartient en effet à l'Etat d'organiser ses juridictions de manière à garantir aux citoyens une administration de la justice conforme aux règles (ATF 130 I 312 consid. 5.2 et les références). ![endif]>![if>
La sanction du dépassement du délai raisonnable ou adéquat consiste d'abord dans la constatation de la violation du principe de célérité, qui constitue une forme de réparation pour celui qui en est la victime. Cette constatation peut également jouer un rôle sur la répartition des frais et dépens, dans l'optique d'une réparation morale (arrêt du Tribunal fédéral 9C_426/2011 du 14 décembre 2011 consid. 3.3).
2.4 Le juge qui constate un déni de justice au sens de l'art. 56 al. 2 LPGA rend une décision constatatoire et ne peut en règle générale pas statuer de manière formatrice ou condamnatoire. Il doit renvoyer la cause à l'assureur en l'invitant à trancher rapidement le droit aux prestations (Miriam LENDFERS in Basler Kommentar, Allgemeiner Teil des Sozialversicherungsrechts, 2020, nn. 51 et 54 ad 56 LPGA). L’autorité saisie d'un recours pour retard injustifié ne saurait ainsi se substituer à l'autorité précédente pour statuer au fond (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U 23/05 du 27 mars 2006 consid. 6).![endif]>![if>
2.5 En l’espèce, en l’absence de décision et conformément à ce qui précède, les conclusions condamnatoires de la recourante sont irrecevables et seules les conclusions tendant à la reconnaissance d’un déni de justice peuvent être examinées. ![endif]>![if>
2.5.1 S’agissant du déni de justice, on note que l’intimé s’est finalement acquitté des montants en souffrance après l’introduction de la présente procédure, soit le 29 mars 2023, alors que la recourante a requis les paiements des trois premiers décomptes en juin et novembre 2022. Il s’agit certes d’un délai important pour le règlement de ces décomptes, a fortiori dès lors que leur traitement a nécessité moins de 20 jours une fois que l’intimé a annoncé s’en saisir par courrier du 10 mars 2023. Cela étant, si la complexité de la procédure de traitement ne paraît en principe pas justifier de longs délais de traitement, et si aucune mesure d’instruction particulière ne semblait s’imposer en l’espèce, on ne saurait pour autant retenir un retard injustifié dans le cas d’espèce. En effet, la recourante a refusé d’adresser à la CSI ses décomptes, alors même que la DGS l’y avait invitée par courriels du 4 mai et du 8 juin 2022. Il est vrai que la recourante avait émis des objections quant à la désignation de la CSI, invoquant dans un premier temps des aspects relevant de la protection des données et de distorsion de la concurrence liée à l’exploitation par la CSI de données confidentielles. L’intimé a cependant répondu sur ces points dans son courrier du 26 août 2022, en soulignant que les informations communiquées à la CSI étaient anonymisées, et qu’aucune information relative au personnel engagé par l’OASD ou au patient ne figurait dans le décompte remis à la CSI. Il a ajouté qu’il continuait à assurer l’analyse de la comptabilité et des états financiers des OASD, de sorte qu’il était impossible à la CSI de favoriser ses membres ou certaines OASD. La recourante n’a pas contesté la pertinence de ces informations, notamment quant à l’anonymat des données fournies à la CSI, se contentant d’affirmer que l’attribution de la gestion du financement résiduel des soins à celle-ci était contraire à la loi dans son courrier du 14 décembre 2022. ![endif]>![if>
Partant, le long délai entre l’établissement des premiers décomptes pour 2022 et leur règlement ne relève pas d’une inaction critiquable de l’intimé, constitutive d’un déni de justice, mais s’explique par le refus de la recourante de se conformer aux modalités de facturation définies par l’intimé. Elle n’est ainsi pas fondée à se plaindre du fait que les versements liés au financement résiduel des soins n’ont pas été opérés dans des délais usuels. On notera en particulier que l’intimé n’a donné aucune assurance à la recourante sur le fait qu’il traiterait les décomptes qu’elle lui a transmis, de sorte qu’elle pouvait envisager que la non compliance à la procédure mise en place par l’intimé l’exposait au risque de ne pas obtenir les paiements dus. C’est également à juste titre que l’intimé a refusé de rendre une décision refusant le financement résiduel des soins, dès lors que le droit à ce remboursement n’était pas nié, mais subordonné au respect des modalités définies à cet effet par l’intimé.
2.5.2 La recourante fait valoir que les paiements intervenus après la litispendance ne rendent pas son recours pour déni de justice sans objet, dès lors que l’intimé ne s’est pas acquitté des intérêts moratoires qu’elle a exigés dès les dates respectives de transmission de ses décomptes. Conformément aux principes rappelés ci-dessus, il appartiendrait en principe à l’intimé de statuer sur ce point. Toutefois, par économie de procédure, la chambre de céans renoncera à lui renvoyer la cause à fin qu’il tranche cette prétention. ![endif]>![if>
En matière d’intérêts moratoires, on relèvera que jusqu’à l’entrée en vigueur de la LPGA, le Tribunal fédéral des assurances considérait qu’il n’y avait en principe pas de place pour des intérêts moratoires en matière d’assurances sociales, ceux-ci n’étant pas prévus par la législation (ATF 101 V 114 consid. 3). L’art. 26 LPGA prévoit désormais que les créances de cotisations échues sont soumises à la perception d’intérêts moratoires et les créances échues en restitution de cotisations indûment versées sont soumises au versement d’intérêts rémunératoires. Le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions pour les créances modestes ou échues depuis peu (al. 1). Des intérêts moratoires sont dus pour toute créance de prestations d’assurances sociales à l’échéance d’un délai de 24 mois à compter de la naissance du droit, mais au plus tôt douze mois à partir du moment où l’assuré fait valoir ce droit, pour autant qu’il se soit entièrement conformé à l’obligation de collaborer qui lui incombe (al. 2). Cette disposition n’est cependant pas applicable aux arriérés de participations aux coûts au sens de l’art. 64 LAMal, puisque celles-ci ne correspondent pas à la définition des cotisations (arrêt du Tribunal fédéral des assurances K 40/05 du 12 janvier 2006 consid. 4.2.1 et 4.2.2). De plus, l’art. 26 al. 2 LPGA s’applique à la relation entre assuré et assurance, mais non à la créance d’un fournisseur de prestations (arrêt du Tribunal fédéral des assurances K 4/06 du 15 novembre 2006 consid. 2.2). Selon la jurisprudence, l’art. 26 LPGA n’a pas eu pour effet d’introduire une obligation générale de verser des intérêts moratoires analogue à celle qui prévaut en droit des obligations (cf. art. 104 du Code des obligations suisse [CO – RS 220]), et l’obligation de l’assureur-maladie de payer des intérêts moratoires au fournisseur de prestations nécessite en règle générale une base dans la convention tarifaire (ATF 139 V 82 consid. 3.2.3 et 3.3.1). Selon la jurisprudence cantonale, ce principe peut être transposé aux créances des fournisseurs de prestations en paiement de la participation cantonale aux frais d'hospitalisation (arrêt de la Cour des assurances sociales du canton de Vaud du 10 octobre 2018 2018/902 AM 15-17 consid. 10b). Il peut également être appliqué par analogie au financement résiduel à charge non pas de l’assurance-maladie, mais du canton. Or, à Genève, le règlement fixant les montants destinés à déterminer le financement résiduel selon l’art. 25a de la loi fédérale sur l’assurance-maladie (RFRLAMal - J 3 05.23) ne prévoit pas le versement d’intérêts moratoires.
La recourante ne peut ainsi pas prétendre au versement de tels intérêts.
2.6 La recourante conclut en outre à titre subsidiaire ce qu’il soit ordonné à l’intimé de ne pas déléguer le traitement du financement résiduel des soins à la CSI et à la suppression des articles correspondants de la directive du 21 décembre 2021. ![endif]>![if>
Ces conclusions sont irrecevables. En effet, en l’absence de décision confirmant la délégation de la gestion du financement résiduel à la CSI et le bien-fondé des directives qui l’encadrent, ou de décision prise en application de ces éléments, la chambre de céans ne peut se prononcer in abstracto sur la légalité de cette délégation et sur la conformité au droit des directives, ni a fortiori les interdire et les annuler. Il convient de rappeler qu’à Genève, le contrôle abstrait de la conformité des normes cantonales au droit supérieur est du ressort de la Cour constitutionnelle (cf. art. 124 let. a de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 [Cst - GE ‑ A 2 00]).
Par surabondance, il faut souligner ce qui suit : Le juge des assurances sociales peut procéder à un contrôle préjudiciel de la conformité au droit supérieur de certaines normes cantonales lorsqu’il est saisi d’un recours à l’encontre d’une décision fondée sur ces normes, eu égard notamment au principe de la primauté du droit fédéral, consacré par l'art. 49 al. 1 Cst., lequel fait obstacle à l'adoption ou à l'application de règles cantonales qui éludent des prescriptions de droit fédéral ou qui en contredisent le sens ou l'esprit, notamment par leur but ou par les moyens qu'elles mettent en œuvre, ou qui empiètent sur des matières que le législateur fédéral a réglementées de façon exhaustive (ATF 138 I 410 consid. 3.1). Cela étant, dans un tel contrôle concret, la décision d’application de la norme viciée est seule l’objet du recours, et elle seule peut être annulée ou réformée. Il incombe à l’auteur de la norme de l’abroger, ou plus simplement à l’autorité d’exécution de cesser de l’appliquer (Pierre MOOR / Alexandre FLÜCKIGER / Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd. 2012, p. 352 n. 2.7.4.2 ; cf. en matière de recours au niveau fédéral arrêt du Tribunal fédéral 2C_620/2022 du 3 mai 2023 consid. 1.4). Ainsi, même si le recours était dirigé contre une décision portant sur le financement résiduel des soins résultant du traitement de la demande par la CSI, la chambre de céans ne serait en toute hypothèse pas fondée à interdire la délégation et annuler les directives y relatives si elle devait considérer qu’elles ne sont pas conformes au droit supérieur, mais seulement à annuler la décision qu’elles fondent. Enfin, sans préjudice d’un examen approfondi dans le cadre d’un tel contrôle concret, il n’est pas inutile au vu des circonstances de relever que selon l’art. 178 al. 3 Cst., la loi peut confier des tâches de l’administration à des organismes et à des personnes de droit public ou de droit privé qui sont extérieures à l’administration, et que l’art. 7 al. 1 LS prévoit que la loi peut confier des tâches de l’administration à des organismes et à des personnes de droit public ou de droit privé qui sont extérieures à l’administration.
Enfin, si les conclusions subsidiaires de la recourante devaient être interprétées comme tendant à la constatation d’un déni de justice en tant que l’intimé n’a pas rendu de décision sujette à recours confirmant la délégation à la CSI du traitement du financement résiduel des soins et l’applicabilité des directives, il n’y aurait pas lieu de renvoyer la cause à l’intimé pour décision sur ces points. En premier lieu, la portée d’une telle décision tendrait à la constatation de la compétence de la CSI, et ne créerait ainsi pas directement des droits ou des obligations pour la recourante, puisqu’elle ne porterait pas sur son droit au financement résiduel. On peut dès lors se demander si ces points peuvent faire l’objet d’une décision constatatoire, laquelle doit porter sur des droits et obligations individuels et concrets (arrêt du Tribunal fédéral 8C_949/2015 du 7 septembre 2016 consid. 4). De plus, en vertu de l’art. 49 al. 2 LPGA, une décision en constatation suppose que le requérant rende vraisemblable un intérêt digne d'être protégé. Cela signifie que la constatation immédiate de l'existence ou de l'inexistence d'un rapport de droit est commandée par un intérêt actuel de droit ou de fait, auquel ne s'opposent pas de notables intérêts publics ou privés, et que cet intérêt ne peut être préservé au moyen d'une décision formatrice, c'est-à-dire constitutive de droits ou d'obligations (ATF 142 V 2 consid. 1.1). Dans le cas d’espèce, la recourante n’a aucun intérêt à obtenir une décision constatant la compétence générale de la CSI en la matière. En effet, une telle décision n’affecterait pas sa situation en fait ou en droit, puisque l’intimé s’est engagé dans la présente procédure à traiter lui-même les décomptes de celle-ci à l’avenir.
2.7 Compte tenu de ce qui précède, le recours est devenu sans objet en tant qu’il tend à la constatation d’un déni de justice en lien avec le paiement des décomptes de financement résiduel des soins pour 2022, les autres conclusions de la recourante étant irrecevables. ![endif]>![if>
Lorsqu’une procédure devient sans objet, les dépens sont répartis en tenant compte de l'état de fait existant avant l'événement mettant fin au litige et de l'issue probable de celui-ci. En conséquence, les frais et dépens sont supportés en premier lieu par la partie qui a provoqué la procédure devenue sans objet ou chez qui sont intervenues les causes qui ont conduit à ce que cette procédure devienne sans objet (arrêt du Tribunal fédéral 9C_773/2011 du 30 juillet 2012 consid. 4 et les références).
En l’espèce, dès lors que le grief quant au retard injustifié de l’intimé n’était pas fondé les délais de règlement des décomptes étant imputables au refus de collaborer de la recourante, celle-ci n’a pas droit à des dépens (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014 consid. 3).
Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA a contrario).
PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :
Statuant
À la forme :
1. Déclare le recours pour déni de justice recevable. ![endif]>![if>
2. Déclare les conclusions de la recourante irrecevables pour le surplus. ![endif]>![if>
Au fond :
3. Prend acte du règlement par l’intimé des décomptes de la recourante afférents au financement résiduel des soins pour 2022 et de son engagement à traiter lui-même les décomptes de la recourante à l’avenir.![endif]>![if>
4. Constate que le recours pour déni de justice est devenu sans objet. ![endif]>![if>
5. Dit que la procédure est gratuite.![endif]>![if>
6. Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi. ![endif]>![if>
La greffière
Isabelle CASTILLO |
| La présidente
Catherine TAPPONNIER |
Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le