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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2072/2023

ATAS/836/2023 du 30.10.2023 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2072/2023 ATAS/836/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 octobre 2023

Chambre 6

 

En la cause

 

A______

 

recourant

 

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES

 

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’intéressé ou le recourant), né le ______ 1954, est marié à Madame B______, née le ______ 1963.

B. a. Le 2 octobre 2021, l'intéressé a déposé une demande de prestations complémentaires auprès du service des prestations complémentaires (ci-après: SPC ou l'intimé).

b. Le 8 décembre 2021, l’intéressé a reçu une décision du 2 décembre 2021 de l’AG2R La Mondiale institution de retraite complémentaire (ci-après : La Mondiale) l’informant que sa retraite complémentaire prenait effet le 1er mars 2021 et que le montant brut annuel de l’allocation était de EUR 13'806.49. La note d’information annexée mentionne que le montant de la retraite dépend du nombre de points obtenus auprès du régime AGIRC-ARRCO et de la valeur du point en vigueur au moment du paiement de la retraite. L’âge de la retraite est de 65-67 ans, en fonction de la date de naissance.

c. Par décision du 13 décembre 2021, le SPC a calculé le droit de l'intéressé à des prestations complémentaires, dès le 1er mai 2021, incluant, dans les plans de calcul, un revenu hypothétique pour son épouse de :

-          CHF 2'343.70 du 1er mai au 31 juillet 2021, s'ajoutant à un revenu d'activité lucrative perçu par cette dernière de CHF 18'551.75

-          CHF 20'895.45 du 1er août au 30 novembre 2021

-          CHF 18'349.55 du 1er au 31 décembre 2021, et de

-          CHF 18'511.05 dès le 1er janvier 2022.

Les plans de calculs précisaient, à cet égard, que le revenu hypothétique de l'épouse correspondait à la différence entre le revenu net déclaré et le revenu réalisable pour une activité à plein temps, déterminé par l’Enquête suisse sur la structure des salaires (ci-après : ESS).

d. Par courrier du 14 janvier 2022, l'intéressé a avisé le SPC que le 8 décembre 2021 il avait été informé par La Mondiale qu'une rente vieillesse complémentaire française de EUR 1'102.31 par mois lui était accordée, avec effet rétroactif au mois de mars 2021. En outre, il avait perçu deux versements de CHF 150.- chacun en novembre 2021 et janvier 2022 à titre d'honoraires pour une consultation par internet.

e. Par décision du 1er avril 2022, le SPC a recalculé le montant des prestations complémentaires de l'intéressé du 1er mai 2021 au 30 avril 2022 en incluant la rente vieillesse française dès le 1er mai 2021 et un revenu d'activité lucrative de l'intéressé de CHF 1'800.- pour les mois de novembre 2021 et janvier 2022. Pour le surplus, les montants retenus restaient identiques à ceux prévus dans les plans de calculs accompagnant la décision du 13 décembre 2021.

Vu ces modifications, l'intéressé avait perçu la somme de CHF 14'324.- en trop pour la période du 1er mai 2021 au 30 avril 2022, dont le remboursement lui était réclamé.

f. Par courrier du 1er avril 2022, le SPC a requis de l’intéressé les justificatifs de la décision de rente de La Mondiale.

g. Par courrier du 7 avril 2022, parvenu au SPC le 8 avril 2022, l'intéressé a formé opposition à cette décision, contestant les revenus imputés à son épouse et lui-même. Il exposait que ses revenus n'avaient pas été de CHF 1'800.- mais de CHF 150.- en 2021 et CHF 300.- en 2022. Quant à son épouse, elle avait uniquement perçu du 1er janvier au 31 juillet 2021, la somme nette de CHF 11'954.-. Leurs revenus étaient ainsi inférieurs à ceux retenus par le SPC.

Il faisait valoir sa bonne foi lors de sa demande de prestations complémentaires, la rente vieillesse française lui ayant été accordée postérieurement, et ajoutait qu'une restitution, même partielle, des montants perçus le placerait dans une situation très difficile.

Il a produit diverses pièces, dont une copie de la décision de La Mondiale du 2 décembre 2021.

h. Par décision sur opposition du 16 juin 2022, le SPC a rejeté l'opposition de l'intéressé et confirmé que la somme de CHF 14'324.- devait être restituée.

Il exposait que la prise en compte du salaire effectif de l'épouse du recourant, soit CHF 20'492.57 (CHF 11'954 / 7 mois x 12), en lieu et place du revenu hypothétique ne modifiait pas le calcul des prestations puisque le gain potentiel partiel était le résultat de la soustraction du revenu hypothétique prévu dans l'ESS 2021 (sic) pour une femme non invalide de 57 ans révolus, soit CHF 20'895.45, et de son revenu effectif annualisé.

L'épouse de l'intéressé ayant atteint l'âge de 58 ans le 20 novembre 2021, le SPC avait adapté son revenu hypothétique du mois de décembre 2021 à l'ESS 2021 (sic) pour une femme non invalide de 58 ans révolus, puis, dès le 1er janvier 2022, à celui prévu par l'ESS 2022 (sic).

Les revenus retenus pour l'intéressé correspondaient aux gains annoncés, annualisés (CHF 150 x 12).

Une demande de remise ayant été formulée dans l'opposition du 7 avril 2022, le SPC se prononcerait sur cette question par décision séparée, une fois la décision sur opposition entrée en force.

i. Le 1er juillet 2022, l'intéressé a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre de céans) contre ladite décision sur opposition, concluant à l'annulation de la demande de restitution et au « retour du montant de la prestation au calcul original ». Il contestait, en premier lieu, le gain potentiel retenu pour son épouse. Il exposait, à cet égard, qu'à l'issue de son emploi temporaire, le 31 juillet 2021, son épouse avait procédé, en vain, à des recherches d'emploi et s'était inscrite au chômage. En outre, il avait, lui-même, perçu un total de CHF 450.- entre 2021 et 2022. Il s'agissait de gains ponctuels ne justifiant pas une « projection de revenus ».

Finalement, il soutenait que ses revenus étaient composés de faibles rentes de divers pays, dont la rente vieillesse complémentaire française était la plus élevée, de sorte que sans la prestation complémentaire originellement octroyée et l'annulation de la demande de restitution, sa situation financière était très difficile.

j. Dans sa réponse du 9 août 2022, l'intimé a persisté dans ses précédentes explications, relevé que le recourant ne contestait pas les calculs s'agissant de ses rentes vieillesse et prié la chambre de céans de réclamer auprès de l'Office cantonal de l'emploi (ci-après: OCE) la production du dossier de l'épouse du recourant.

k. Le 11 août 2022, l'épouse du recourant a donné son accord pour l'apport de son dossier par l'OCE, lequel a ainsi été joint au dossier.

l. Par courrier du 11 octobre 2022, l'intimé, constatant que l'épouse du recourant avait été inscrite auprès de l'OCE du 14 septembre 2021 au 7 février 2022 et qu'elle s'était alors conformée à ses obligations de chômeuse en effectuant le nombre de recherches d'emploi requises de septembre 2021 à janvier 2022, a conclu que tout gain potentiel concernant celle-ci pouvait être retiré des calculs du 1er septembre 2021 au 31 janvier 2022. Le recours pouvait être partiellement admis sur ce point.

m. Le recourant en a pris note et confirmé l'ensemble de ses conclusions.

n. Par arrêt du 12 décembre 2022, la chambre de céans a partiellement admis le recours, annulé la décision litigieuse et renvoyé la cause à l’intimé pour nouvelle décision.

o. Par décision du 15 mars 2023, rendue à l’issue de l’arrêt précité, le SPC a conclu à un solde en sa faveur de CHF 7'684.-. Cette décision est entrée en force.

p. Par décision du 24 mai 2023, le SPC a rejeté la demande de remise de l’obligation de restituer CHF 7'684.-, au motif que le SPC n’avait été informé que le 17 janvier 2022 du versement de la rente de vieillesse française, selon une décision de La Mondiale du 2 décembre 2021, dont l’intimé avait eu connaissance le 8 décembre 2021.

q. Le 2 juin 2023, l’intéressé a fait opposition à cette décision, en faisant valoir qu’il avait informé le SPC dans un délai raisonnable, soit le 14 janvier 2022, de la décision du 2 décembre 2021, reçue le 8 décembre 2021, de La Mondiale, de surcroit en lui donnant toutes les informations utiles (montant de la rente et début du droit).

r. Par décision du 14 juin 2023, le SPC a rejeté l’opposition.

C. a. Le 21 juin 2023, l’intéressé a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre de la décision précitée, en concluant à « l’annulation du remboursement » et en faisant valoir que ce n’était que le 8 décembre 2021 qu’il avait été informé de sa prestation complémentaire de retraite française et qu’il en avait informé le SPC le 14 janvier 2022, soit rapidement ; il avait aussi informé le SPC de ses revenus de CHF 150.- en novembre 2021 et janvier 2022 ; par ailleurs, le gain potentiel calculé pour son épouse était irréel.

b. Le 4 juillet 2023, le SPC a conclu au rejet du recours.

c. Le 11 juillet 2023, le recourant a répliqué.

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.              

2.1 Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

2.2 Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

2.3 La législation sur les prestations complémentaires a connu des modifications également entrées en vigueur le 1er janvier 2021. Celles-ci sont applicables en l’espèce, dès lors que c’est le droit aux prestations complémentaires dès le 1er mai 2021 – et la restitution qui découle de leur nouveau calcul – qui sont litigieux.

3.             Le délai de recours est de trente jours (art. 60 al. 1 LPGA; art. 43 LPCC ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10] et art. 43 LPCC).

Interjeté dans les forme et délai légaux, le recours est recevable (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA ; art. 9 de la loi cantonale du 14 octobre 1965 sur les prestations fédérales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité [LPFC - J 4 20] ; art. 43 LPCC).

4.             Le litige porte sur le bien-fondé du refus de l’intimé d’accepter la demande de remise du recourant de son obligation de restituer CHF 7'684.-.

5.              

5.1 Selon l'art. 25 al. 1 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile. Ces deux conditions matérielles sont cumulatives et leur réalisation est nécessaire pour que la remise de l'obligation de restituer soit accordée (ATF 126 V 48 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2019 du 9 juillet 2020 consid. 4.1).

L'art. 4 de l'ordonnance fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 11 septembre 2002 (OPGA - RS 830.11) précise que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile (al. 1). Est déterminant, pour apprécier s'il y a une situation difficile, le moment où la décision de restitution est exécutoire (al. 2).

5.2 À teneur de l’art. 24 de la loi cantonale sur les prestations cantonales complémentaires du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25), les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l'intéressé était de bonne foi et qu'elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le règlement fixe la procédure de la demande de remise ainsi que les conditions de la situation difficile (al. 2).

L’art. 15 al. 1 du règlement relatif aux prestations cantonales complémentaires à l'assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité du 25 juin 1999 (RPCC-AVS/AI - J 4 25.03) prévoit que la restitution entière ou partielle des prestations allouées indûment, mais reçues de bonne foi, ne peut être exigée si l'intéressé se trouve dans une situation difficile.

6.              

6.1 Selon l’art. 24 de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301), l'ayant droit ou son représentant légal ou, le cas échéant, le tiers ou l'autorité à qui la prestation complémentaire est versée, doit communiquer sans retard à l'organe cantonal compétent tout changement dans la situation personnelle et toute modification sensible dans la situation matérielle du bénéficiaire de la prestation. Cette obligation de renseigner vaut aussi pour les modifications concernant les membres de la famille de l'ayant droit.

6.2 À teneur de l’art. 11 al. 1 LPCC, le bénéficiaire ou son représentant légal doit déclarer au service tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations qui lui sont allouées ou leur suppression.

7.             Savoir si la condition de la bonne foi, présumée en règle générale (art. 3 du Code civil suisse, du 10 décembre 1907 - CC - RS 210), est réalisée doit être examiné dans chaque cas à la lumière des circonstances concrètes (arrêt du Tribunal fédéral 8C_269/2009 du 13 novembre 2009 consid. 5.2.1). La condition de la bonne foi doit être remplie dans la période où l’assuré concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du
17 avril 2008 consid. 4.1 et les références).

7.1 La jurisprudence constante considère que l’ignorance, par le bénéficiaire, du fait qu’il n’avait pas droit aux prestations ne suffit pas pour admettre qu’il était de bonne foi. Il faut bien plutôt qu’il ne se soit rendu coupable, non seulement d’aucune intention malicieuse, mais aussi d’aucune négligence grave. Il s’ensuit que la bonne foi, en tant que condition de la remise, est exclue d'emblée lorsque les faits qui conduisent à l'obligation de restituer (violation du devoir d’annoncer ou de renseigner) sont imputables à un comportement dolosif ou à une négligence grave. En revanche, l'assuré peut invoquer sa bonne foi lorsque l'acte ou l'omission fautifs ne constituent qu'une violation légère de l'obligation d'annoncer ou de renseigner (ATF 138 V 218 consid. 4 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_43/2020 du 13 octobre 2020 consid. 3 et 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4).

7.2 On parlera de négligence grave lorsque l'ayant droit ne se conforme pas à ce qui peut raisonnablement être exigé d'une personne capable de discernement dans une situation identique et dans les mêmes circonstances (ATF 110 V 176 consid. 3d ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2019 du 25 avril 2019 consid. 4). La mesure de l'attention nécessaire qui peut être exigée doit être jugée selon des critères objectifs, où l'on ne peut occulter ce qui est possible et raisonnable dans la subjectivité de la personne concernée (faculté de jugement, état de santé, niveau de formation, etc. ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_413/2016 du 26 septembre 2016 consid. 3.1 ; Sylvie PÉTREMAND, in Commentaire romand, LPGA, 2018, n. 69 ad art. 25 LPGA). Il faut ainsi en particulier examiner si, en faisant preuve de la vigilance exigible, l’assuré aurait pu constater que les versements ne reposaient pas sur une base juridique. Il n’est pas demandé à un bénéficiaire de prestations de connaître dans leurs moindres détails les règles légales. En revanche, il est exigible de lui qu’il vérifie les éléments pris en compte par l’administration pour calculer son droit aux prestations. On peut attendre d'un assuré qu'il décèle des erreurs manifestes et qu'il en fasse l'annonce (arrêt du Tribunal fédéral 9C_498/2012 du 7 mars 2013 consid. 4.2). On ajoutera que la bonne foi doit être niée quand l’enrichi pouvait, au moment du versement, s’attendre à son obligation de restituer, parce qu’il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l’attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 CC ; ATF 130 V 414 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_319/2013 du 27 octobre 2013 consid. 2.2).

7.3 En revanche, l’intéressé peut invoquer sa bonne foi si son défaut de conscience du caractère indu de la prestation ne tient qu’à une négligence légère, notamment, en cas d’omission d’annoncer un élément susceptible d’influer sur le droit aux prestations sociales considérées, lorsque ladite omission ne constitue qu’une violation légère de l’obligation d’annoncer ou de renseigner sur un tel élément (ATF 112 V 97 consid. 2c ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_16/2019 précité consid. 4 et 9C_14/2007 du 2 mai 2007 consid. 4 ; DTA 2003 n° 29 p. 260 consid. 1.2 et les références ; RSAS 1999 p. 384 ; Ueli KIESER, Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts - ATSG, 2020, n. 65 ad art. 25 LPGA).

7.4 Les directives concernant les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI
(ci-après : DPC), valables dès le 1er avril 2011 (état au 1er janvier 2021), énoncent que si une PC est versée à tort et que l'assuré ne pouvait s'en rendre compte en faisant preuve de l'attention minimale exigible au vu des circonstances et du cas d'espèce, force est d'admettre la bonne foi (DPC n° 4652.01). À l'inverse, nul ne peut invoquer sa bonne foi si elle est incompatible avec l'attention que les circonstances permettaient d'exiger de lui. Ainsi, la condition de la bonne foi n'est pas réalisée lorsque le versement à tort d'une PC est dû à une grave négligence ou au dol de la personne tenue à restitution. Tel est le cas si, lors de la demande ou de l'examen des conditions économiques, certains faits n'ont pas été annoncés ou que des indications fausses ont été fournies intentionnellement ou par négligence grave ; il en est de même lorsqu'un changement dans la situation personnelle ou matérielle n'a, intentionnellement ou par grave négligence, pas été annoncé ou l'a été avec retard, ou lorsque des PC indues ont été acceptées en connaissance de leur caractère indu (DPC n° 4652.02).

Commet une négligence grave celui qui, lors de la demande de prestation, de l'examen des conditions du droit, ou du paiement de la prestation complémentaire indûment versée, ne fait pas preuve du minimum d'attention que l'on est en droit d'exiger de lui en fonction de ses compétences et de son degré de formation. Fait preuve de négligence grave la personne qui omet d'annoncer une modification de son revenu, qu'il soit obtenu sous forme de rente ou en vertu de l'exercice d'une activité lucrative, ou qui ne contrôlant pas - ou seulement à la légère - la feuille de calcul des prestations complémentaires, n'annonce pas une erreur de calcul qu'elle aurait facilement pu reconnaître (DPC n° 4652.03).

7.5 La bonne foi a été niée dans le cas d’un bénéficiaire qui avait omis d’annoncer au SPC une rente d’invalidité de l’assurance-accident, ce d’autant que ses revenus avaient à l’évidence augmentés depuis l’octroi de cette prestation ; le Tribunal fédéral a en outre rappelé que les considérations spécifiques de l’autorité pénale n’étaient pas déterminantes en droit des assurances sociales (arrêt du Tribunal fédéral 9C_498/2012 du 7 mars 2013 consid. 5.3).

Dans le cas d’une bénéficiaire de prestations complémentaires qui avait omis d’annoncer une rente AI versée à son conjoint, dont une partie était versée avec effet rétroactif, la bonne foi de l’intéressée a été admise pour la période correspondant au versement rétroactif de la rente AI ; notre Haute cour a rappelé que la condition de la bonne foi devait être réalisée dans la période où l'assurée concernée avait reçu les prestations indues dont la restitution était exigée, en l'occurrence les prestations complémentaires, et que durant cette période, les revenus du couple ne comprenaient effectivement que la rente AI perçue par la bénéficiaire, son époux n'ayant encore touché aucun montant de la part de l'assurance-invalidité ; au moment où elle avait perçu les prestations complémentaires, elle avait donc disposé à bon droit de celles-ci. En revanche, la bonne foi a été niée pour la période postérieure à la décision d’octroi de la rente AI ; en effet, à compter de la date de versement de la rente, la bénéficiaire avait pu prendre connaissance de la décision d’octroi de rente à son époux et aisément se rendre compte que l’existence d’un revenu supplémentaire dans le couple était de nature à influencer son droit aux prestations complémentaires ; il lui incombait dès lors d’informer immédiatement la caisse de cette nouvelle situation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4.3).

8.             En l’espèce, l’intimé nie la bonne foi du recourant, au motif que celui-ci ne l’a informé que le 17 janvier 2022, d’une part, de l’existence de son droit à la rente de vieillesse française, dont il avait eu connaissance le 8 décembre 2021, d’autre part, de ses gains d’activité lucrative de novembre 2021. Il relève également que la décision de La Mondiale, du 2 décembre 2021, ne lui est parvenue que le 8 avril 2022.

8.1 S’agissant de la rente de vieillesse française, il convient de constater que ce n’est que le 8 décembre 2021 que le recourant a été informé par La Mondiale de son droit à la rente, alloué rétroactivement depuis mars 2021 et du montant de celle-ci.

Il y a ainsi lieu d’admettre la bonne foi du recourant pour la période du 1er mars 2021 au 7 décembre 2021 ; en effet, durant cette période les revenus du recourant ne comprenaient pas la rente de vieillesse française ; le recourant n’a eu connaissance de ses droits qu’au jour de la réception de la décision de La Mondiale, le 8 décembre 2021.C’est uniquement dès cette date que l’on peut retenir que le recourant savait ou devait savoir que le montant des prestations complémentaires qu’il recevait était supérieur à celui auquel il avait droit (à cet égard arrêt du Tribunal fédéral précité 8C_766/2007). Au surplus, dès lors que le recourant a communiqué à l’intimé le 14 janvier 2022 le montant de sa rente française ainsi que le début de son versement, le reproche de l’intimé quant à l’absence de transmission immédiate de la décision de La Mondiale du 2 décembre 2021 ne saurait lui être opposé, ce d’autant que le recourant l’a ensuite rapidement transmise, soit le 8 avril 2022, dès que l’intimé la lui a demandée en date du 1er avril 2022.

8.2 S’agissant du gain de l’activité lucrative du recourant, ce dernier savait ou devait savoir dès sa réalisation, soit en novembre 2021, que le montant des prestations complémentaires qu’il recevait pouvait être supérieur à celui qui lui était dû. De la même manière, il y a lieu de constater que le recourant, pour la période antérieure du 1er mai au 31 octobre 2021, était de bonne foi.

8.3 Au demeurant, contrairement à l’avis de l’intimé, le recourant doit être considéré comme ayant reçu de bonne foi du 1er mai au 7 décembre 2021 les prestations complémentaires calculées sans prise en compte de la rente de La Mondiale et du 1er mai au 31 octobre 2021 celles sans prise en compte de l’augmentation de son gain d’activité lucrative.

Il incombera à l’intimé de rendre une nouvelle décision, tenant compte de cette constatation, après avoir examiné si le recourant remplit la condition de la situation difficile.

9.             Partant, le recours sera partiellement admis, la décision litigieuse annulée et la cause renvoyée à l’intimé pour nouvelle décision, dans le sens des considérants.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA).

 

 

 

 

 

 

 

 


 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Annule la décision de l’intimé du 14 juin 2023.

4.        Renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle décision, dans le sens des considérants.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le