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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2550/2021

ATAS/693/2023 du 19.09.2023 ( AVS ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2550/2021 ATAS/693/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 septembre 2023

Chambre 2

En la cause

A______

B______

tous deux représentés par Me Stéphane PENET, avocat

 

C______

représenté par Me Véronique MEICHTRY, avocate

 

D______

représentée par Me Nicolas PERRET, avocat

 

E______

 

recourants

contre

MEROBA 111, CAISSE DE COMPENSATION DE LA FÉDÉRATION DES MÉTIERS DU BÂTIMENT

représentée par Me Emily VILLARD, avocate

intimée


EN FAIT

 

A. a. F______ SA, en liquidation (ci-après : la société), sise à Genève, inscrite au registre du commerce le 6 décembre 2006, avait pour but social l'administration de sociétés de services et d'électricité.

b. La société a été affiliée, dès le 1er janvier 2007, à MEROBA 111, CAISSE DE COMPENSATION DE LA FÉDÉRATION DES MÉTIERS DU BÂTIMENT (ci-après : la caisse ou l'intimée).

c. Selon les indications contenues au registre du commerce, Monsieur A______ (ci-après : l'administrateur ou le recourant 1) était l'administrateur unique de la société, avec signature individuelle. Son fils, Monsieur B______ (ci-après : le recourant 2), disposait d'une procuration collective à 2 d'octobre 2015 à septembre 2016, remplacée par une signature collective à 2 dès le mois de septembre 2016. Monsieur C______ (ci-après : le directeur ou le recourant 3) était le directeur de la société, avec signature individuelle, depuis le mois d'octobre 2015, tandis que Madame D______ (ci-après : la recourante) et Monsieur E______ (ci-après : le recourant 4) disposaient d'une signature collective à 2 dès le mois d'octobre 2015, respectivement septembre 2016.

d. D'autres sociétés sont ou ont été administrées par Messieurs A______ ou B______, soit :

-          G______, SOCIÉTÉ ANONYME, en liquidation depuis sa faillite prononcée le 2 février 2022, qui était active dans le domaine des installations générales d'électricité et avait été inscrite au registre du commerce le 2 mai 1919, dont le recourant 1 a été administrateur jusqu'en avril 2021 et le recourant 2 administrateur président dès janvier 2020, puis administrateur dès avril 2021, étant précisé que E______ bénéficiait d'une procuration collective à 2 de décembre 2011 à janvier 2020 et que C______ en était le directeur de janvier 2013 à juillet 2020.

-          H______ SA, en liquidation depuis sa faillite prononcée le 3 février 2022 et radiée le 17 janvier 2023, qui était active dans la domotique et avait été inscrite au registre du commerce le 28 octobre 2010, dont le recourant 1 était depuis lors administrateur, les recourants 2 et 4 ayant bénéficié d'une signature collective à 2 de janvier 2016 à mai 2020, tandis que le recourant 3 disposait de la signature individuelle de janvier 2016 à juillet 2020.

-          I______ SA, en liquidation, ayant pour but l'administration de sociétés de services et d'électricité, inscrite au registre du commerce le 19 mars 2019 et radiée le 3 avril 2023 suite à sa faillite prononcée le 13 janvier 2022, dont le recourant 1 était l'administrateur président, et le recourant 2 l'administrateur, tous deux avec signature collective à 2, depuis sa fondation.

-          J______ SA, sise dans le canton de Vaud, en liquidation suite à sa faillite prononcée le 6 mai 2019, qui était active dans le domaine des installations électriques, dont le recourant 1 était administrateur, avec signature individuelle, le recourant 3 directeur depuis avril 2016, le recourant 2 disposant d'une signature collective à 2 depuis avril 2016, alors que le recourant 4 disposait d'une telle signature d'avril 2016 à janvier 2019.

e. En outre, la société F______ SA disposait dès janvier 2007 d'une succursale dans le canton de Vaud, enregistrée sous la raison sociale F______ SA, SUCCURSALE DE NYON, qui s'est trouvée en liquidation dès le 1er avril 2019 compte tenu du prononcé de la faillite au siège principal et qui a été radiée le 15 juillet 2022, et dont le recourant 1 était l'administrateur.

f. Ce dernier est également administrateur de K______ SA, sise à Genève, ayant pour but la prise et la gestion de participations dans toutes entreprises suisses et étrangères.

g. Selon le site internet www.L______.ch, M______, société d'installations électriques fondée en 1903, a diversifié ses compétences et agrandi ses effectifs, formant ainsi le groupe N______, composé de M______ & CIE SA, I______ SA et H______ SA. Le recourant 2 est présenté comme chef d'entreprise (respectivement administrateur selon la pièce 2 produite par le recourant 3).

h. Le recourant 3 avait été engagé dès le 1er septembre 2015 à la suite d'une offre de service de sa part du 20 août 2015 en qualité de directeur financier du groupe, incluant, outre F______ SA, les sociétés M______ ET CIE, SOCIÉTÉ ANONYME, J______ SA, et H______ SA. Selon son offre de services, il devait être salarié de F______ SA et travailler à raison d'une journée par semaine, pour un salaire mensuel de CHF 3'800.-. Son cahier des charges devait englober les principales tâches et responsabilités suivantes : contrôle et présentation des résultats financiers intermédiaires, supervision de la trésorerie et des paiements, supervision du département comptable, établissement et suivi des budgets annuels. Il acceptait de prendre la responsabilité de ce poste dans le but d'assainir la situation financière du groupe.

i. La recourante était la responsable du département comptable et en charge du paiement des divers créanciers de la société, tandis que le recourant 4 était chef du personnel, après avoir exercé en qualité de technicien.

j. Par courrier électronique du 8 octobre 2018, le directeur a informé la recourante que compte tenu des problèmes de trésorerie de la société, le recourant 1 avait décidé de nommer le recourant 4 responsable des paiements des créanciers et fournisseurs, avec effet immédiat. Les rappels et relances téléphoniques de tous les créanciers devaient donc être adressés à ce dernier, lequel négocierait directement des arrangements de paiement, notamment avec les fournisseurs qui bloquaient des livraisons. Les appels sur la ligne directe de la recourante devaient donc être déviés sur celle du recourant 4 le plus rapidement possible.

k. Selon un autre courrier électronique du même jour du directeur à l'attention du recourant 4, envoyé en copie aux autres recourants et à la recourante, le recourant 4 devait établir des listes de paiement qu'il devait communiquer, après aval du recourant 1, à la comptabilité pour paiement. Le recourant 1 avait décidé que la seule personne désormais autorisée à prendre des décisions et des engagements de paiement était le recourant 4. Tout accord préalablement pris était caduc et sujet à validation par le précité.

l. Selon le bordereau de prestations et cotisations sociales établi par la caisse le 8 février 2019, les cotisations sociales dues par la société pour le mois de janvier 2019 s'élevaient à CHF 31'056.30. Celles dues pour le mois de février 2019 s'élevaient à CHF 32'029.55, selon le bordereau établi le 5 mars 2019.

m. Le 15 mars 2019, la caisse a adressé une sommation à la société portant sur les cotisations sociales non payées du mois de janvier 2019, en CHF 31'556.30, correspondant au montant de son bordereau du 8 février 2019 majoré de CHF 500.- à titre de « CPS ». Elle a adressé une autre sommation le 8 avril 2019 pour les cotisations sociales du mois de février 2019, à hauteur de CHF 32'029.55. La première sommation précisait que le décompte de janvier 2019 comportait CHF 532.65 de cotisations « FPMB, RAMB, AM, CP », et la seconde CHF 547.45 à ce titre. Les deux sommations indiquaient par ailleurs que des amendes d'ordre « AF » de CHF 75.- chacune seraient facturées en cas de non-paiement dans l'ultime délai octroyé.

n. Le 29 mars 2019, la caisse a facturé à la société des intérêts moratoires de CHF 414.05 au vu du retard de paiement des cotisations sociales de décembre 2018, finalement acquittées le 26 février 2019.

o. Constatant le non-paiement des cotisations réclamées, la caisse a rendu deux décisions, datées du 3 avril 2019 et 3 mai 2019, la première portant sur les cotisations du mois de janvier 2019, pour un total de CHF 31'941.30 comprenant des taxes et frais de CHF 385.-, et la seconde portant sur les cotisations du mois de février 2019, pour un total de CHF 32'264.55 comprenant des taxes et frais de CHF 235.-. La société était informée qu'à défaut de paiement des montants dus dans les 48 heures, des poursuites allaient être engagées à son encontre.

p. La société a été dissoute par suite de faillite prononcée par jugement du Tribunal de première instance du 1er avril 2019. L'état de collocation a été déposé le 22 novembre 2019, selon les indications de la feuille officielle suisse du commerce (ci-après : FOSC), et la société a été radiée le 20 mai 2020.

q. Par avenant du 25 novembre 2019, le taux d'occupation du directeur au sein de la société I______ SA, qui avait repris les rapports de travail à la suite de la faillite de F______ SA, a été augmenté à 18 heures par semaine, correspondant à un taux de 43.37%.

r. Le 25 mai 2020, la caisse a déposé plainte pénale à l'encontre des recourants 1, 2 et 3, ainsi qu'à l'encontre de la recourante, plainte qui a été étendue le 18 juin 2020 à l'encontre du recourant 4, en raison de l'absence de versement des cotisations sociales retenues sur les salaires des employés (part pénale), s'élevant à CHF 36'167.35 pour les mois de janvier et février 2019. Lesdites plaintes ont été retirées par la caisse le 10 juillet 2020, la somme due ayant été réglée par virement du 30 juin 2020.

s. Le 15 juillet 2020, le directeur a écrit aux conseils d'administration de M______, SOCIÉTÉ ANONYME et H______ SA pour les informer de sa démission. Le 20 juillet 2020, il a requis la radiation de son inscription au registre du commerce concernant ces deux sociétés.

t. Le 3 août 2020, le recourant 2 lui a écrit pour savoir qui avait demandé sa radiation, sachant que son père n'avait pas signé et que celle-ci était très mal vue par la direction.

u. Le 13 août 2020, le directeur a indiqué à son conseil de l'époque – qui était également celui des recourants 1 et 2 – qu'il avait viré sur le compte de son étude les sommes de CHF 100'000.- et CHF 119'000.- de la part de M______, SOCIÉTÉ ANONYME, montants qui devaient immédiatement être transférés à la caisse et être imputés sur le compte d'affilié n° 424 pour paiement de la part pénale des cotisations d'avril et mai 2019.

v. Peu après cette demande, le recourant 1 a envoyé un SMS au directeur indiquant que seule la moitié de la somme aurait pu être payée et qu'il avait été prévu de verser CHF 100'000.- à un fournisseur de matériel qui les bloquait. À l'avenir, il devait aviser le recourant 2 pour tout paiement et il le remerciait de bien vouloir respecter cette modification.

w. Le 26 août 2020, les recourants 1 et 2, en tant qu'administrateurs de I______ SA, ont résilié le contrat de travail du directeur avec effet au 31 octobre 2020. Le même jour, ce dernier a présenté des certificats médicaux d'arrêt total de travail. Il a restitué les clés de M______, SOCIÉTÉ ANONYME par l'entremise de son épouse le 1er septembre 2020.

B. a. Par décisions séparées du 25 mai 2020, la caisse a réclamé des recourants 1, 2 et 3, ainsi que de la recourante, le paiement de son dommage s'élevant à CHF 64'052.45, ce montant n'ayant pas pu être recouvré dans le cadre de la faillite de la société. Cette somme portait sur les cotisations aux assurances sociales que sont l'assurance-vieillesse et survivants, l'assurance-invalidité et les allocations pour perte de gain (ci-après : AVS-AI-APG), ainsi que l'assurance-chômage (ci-après : AC), l'assurance-maternité (ci-après : AMat) et les allocations familiales (ci-après : AF ; pour le tout, ci-après : cotisations sociales), intérêts moratoires, taxes de sommation, amendes d'ordre et frais de poursuites inclus.

b. Le 18 septembre 2020, la caisse a rendu une décision en réparation du dommage de même nature à l'encontre du recourant 4, le montant réclamé s'élevant néanmoins à CHF 27'885.10, compte tenu du paiement de la part pénale depuis le prononcé des décisions du 25 mai 2020.

c. Des oppositions ont été élevées par les recourants et la recourante à l'encontre des décisions en réparation du dommage rendues par la caisse, à savoir :

-          Oppositions formées le 19 juin 2020 par les recourants 1, 2 et 3, sous la plume de leur conseil commun, par laquelle ils ont conclu, préalablement, à ce qu'ils puissent les compléter à réception des documents fondant les prétentions de la caisse et, principalement, à l'annulation des décisions entreprises.

-          Opposition formée le 26 mai 2020 par la recourante, par laquelle elle a indiqué n'avoir aucun pouvoir décisionnel sur les sociétés du groupe N______, n'ayant jamais fait partie de leur conseil d'administration ou de leur conseil de direction, et ayant uniquement exécuté les instructions de paiement.

-          Opposition formée le 24 septembre 2020 par le recourant 4.

d. Les oppositions des recourants 1, 2 et 3 ont été complétées dans le délai imparti par la caisse au 21 août 2020 : le recourant 1 n'avait commis aucune faute, ni violé des prescriptions légales en matière de paiement des cotisations sociales, car il n'était pas resté passif vis-à-vis de la situation ayant mené à la faillite et n'avait jamais évité de déclarer des salaires ; le recourant 2 n'avait jamais eu de rôle dirigeant ou organisationnel au sein de la société, ne disposant que d'une signature collective à 2, et n'était en particulier pas en charge de la comptabilité ou du paiement des charges sociales ; le recourant 3 était dans la même situation que le recourant 1 en ce sens qu'il n'avait commis aucune faute, ni violé des prescriptions légales en matière de paiement des cotisations sociales, l'absence de paiement des cotisations sociales n'étant due qu'à l'absence de liquidités de la société. Les décisions du 25 mai 2020 les concernant devaient donc être annulées. En outre, compte tenu du paiement de la part pénale en CHF 36'167.35 réalisé le 30 juin 2020, le montant qui pourrait être réclamé devait être diminué.

e. Le 19 avril 2021, la caisse a informé à tout le moins la recourante et les recourants 1, 2 et 3 qu'elle envisageait de modifier à leur détriment les décisions du 25 mai 2020 les concernant, dans la mesure où les frais d'administration en CHF 550.95, correspondant à un taux de 2.55% sur les cotisations dues à titre d'AVS-AI-APG (de CHF 21'606.35), devaient être ajoutés au solde du dommage, arrivant à un total dû de CHF 28'436.05.

f. Le 31 mai 2021, sous la plume de son nouveau conseil, le recourant 3 a persisté dans son opposition du 19 juin 2020. Il a en outre requis que la caisse invite les sociétés du groupe N______ à lui transmettre des pièces justificatives qui se trouvaient dans son ancien ordinateur professionnel ou les locaux de la société et a souligné que les amendes prononcées par les caisses de compensations ne faisaient pas partie du dommage pouvant être réclamé des organes de l'employeur, tout comme les cotisations sociales à l'assurance-maternité.

g. Par décisions sur oppositions séparées du 30 juin 2021, la caisse a déclaré les oppositions recevables et les a partiellement confirmées : elle a ordonné aux parties recourantes de lui verser la somme modifiée de CHF 27'497.30 à titre de dommage causé entre le 1er décembre 2018 et le 28 février 2019, ainsi que la somme de CHF 550.95 à titre de frais administratifs de 2.55% calculés sur les cotisations dues à l'AVS-AI-APG, soit la somme totale de CHF 28'048.25. Elle a produit un tableau récapitulatif de ses prétentions à cette occasion.

C. a. Par acte du 27 juillet 2021 (cause A/2550/2021), le recourant 4 a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) à l'encontre de la décision sur opposition du 30 juin 2021 le concernant, concluant à ce que l'intimée reconsidère sa position et à ce qu'il soit déchargé de toute responsabilité pour les dettes à son égard. Bien que faisant partie du comité de direction du groupe N______, son rôle était principalement de gérer le personnel fixe et temporaire. Il n'avait jamais eu accès aux comptes bancaires, ni aux bilans de la société. Les seules informations en sa possession concernant la santé financière de l'entreprise lui étaient données par le directeur. Ce dernier, qui ne s'occupait auparavant que des déclarations fiscales du groupe N______ par le biais de ses propres sociétés, avait souhaité se faire embaucher par le groupe et prendre plus de pouvoir. Il s'était ainsi occupé des antennes vaudoises J______ SA et F______ SA, SUCCURSALE DE NYON qui rencontraient des difficultés et qui avaient été mises en faillite sur sa recommandation. Contrairement à ce que ce dernier prétendait, il avait tout pouvoir de prendre les décisions de paiement ou non, certes présentées aux recourants 1 et 2, mais qui suivaient ses conseils. Le recourant 4 contestait par ailleurs que le directeur insistait pour que les charges sociales soient acquittées. Ce dernier avait décidé de son propre chef d'envoyer un courrier électronique à la direction pour le rendre responsable des paiements des créanciers et des fournisseurs. Avec le recul, il aurait dû refuser, car son rôle ne consistait qu'à prendre les téléphones des fournisseurs qui réclamaient leur dû et établir avec eux un plan de paiement. Il n'était jamais intervenu quant au choix de payer ou non les charges sociales.

b. Par acte du 31 août 2021 (cause A/2879/2021), le recourant 1, sous la plume de son conseil, a interjeté recours à l'encontre de la décision sur opposition du 30 juin 2021 qui lui avait été notifiée, sollicitant, préalablement, son audition, et, principalement, à ce qu'elle soit annulée, sous suite de frais et dépens, reprenant les arguments soulevés dans son opposition et soulignant que la période d'arriérés de cotisations avait été très brève et qu'il avait essayé durant ce laps de temps de remettre à flots la société. La société n'avait pas fait supporter à l'intimée son financement, car elle avait été déclarée très rapidement en faillite.

c. Le 31 août 2021, le recourant 2, représenté par son conseil, a interjeté recours à l'encontre de la décision sur opposition du 30 juin 2021 le concernant (cause A/2875/2021), sollicitant, préalablement, son audition et celle du recourant 1, et, principalement, à ce qu'elle soit annulée, sous suite de frais et dépens. Il ne pouvait être considéré comme employeur du fait de sa fonction au sein de la société débitrice et ne pouvait donc avoir violé des prescriptions légales concernant le paiement des cotisations sociales. Il n'avait en effet été au profit que d'une procuration collective à 2, puis d'une signature collective à 2, qui ne lui permettaient pas d'influer seul et directement dans les décisions de la société, qui plus est concernant le paiement des charges sociales, cette tâche ne relevant pas de ses compétences. Aucune négligence grave ou intention de causer un dommage ne pouvaient non plus lui être imputées.

d. Par acte du 1er septembre 2021 (cause A/2863/2021), le recourant 3, sous la plume de son conseil, a interjeté recours à l'encontre de la décision sur opposition du 30 juin 2021 le concernant, concluant à son annulation et à ce qu'il soit constaté qu'il n'était redevable d'aucun montant envers l'intimée, subsidiairement à ce que la cause lui soit renvoyée afin qu'elle statue dans le sens des considérants. Il n'avait pas eu les pouvoirs nécessaires pour empêcher la survenance du dommage : son taux d'activité était très limité et son activité concrète, qui consistait essentiellement à négocier des crédits bancaires, ne correspondait pas au cahier des charges qu'il avait proposé avant son engagement ; les recourants 1 et 2 étaient seuls compétents pour sélectionner et valider les paiements et lui-même n'avait aucun réel pouvoir à cet égard ; il se contentait d'émettre des propositions de paiement qui étaient ou non approuvées, étant précisé qu'il avait à réitérées reprises attiré leur attention sur la nécessité d'acquitter en priorité les cotisations sociales ; une procédure particulière concernant les paiements avait en outre été mise en place dès octobre 2018 impliquant le recourant 4 ; les arriérés de cotisations avaient trait à une période relativement brève et, durant ce laps de temps, la stratégie choisie par le recourant 1, qu'il lui avait sans succès déconseillée, n'avait pas porté ses fruits ; il était resté dans la société au cours du second semestre 2019 par loyauté et en se fiant aux promesses de son employeur, puis avait dû assumer une permanence administrative en raison de la pandémie de COVID-19 ; il avait fini par requérir la radiation immédiate de son inscription au registre du commerce concernant les sociétés M______, SOCIÉTÉ ANONYME et H______ SA à la mi-juillet 2020 puis, le 13 août 2020, avait décidé de régler la part pénale des arriérés de cotisations réclamés par l'intimée pour certaines sociétés du groupe N______, ce qui avait conduit à son licenciement prononcé le 26 août 2020. Compte tenu de sa marge de manœuvre limitée dans la société, il ne pouvait se voir imputer une faute ou une négligence grave. S'agissant du montant du dommage, les frais d'administration réclamés par l'intimée, en CHF 550.95, devaient être retranchés, ne reposant a priori sur aucune base légale.

e. La recourante, par l'entremise de son conseil, a quant à elle déposé un recours le 3 septembre 2021 (cause A/2902/2021) à l'encontre de la décision sur opposition en réparation du dommage datée du 30 juin 2021 qui lui avait été notifiée le 3 juillet 2021, dans lequel elle a conclu, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à ce qu'il soit dit qu'elle n'était pas débitrice envers l'intimée de la somme réclamée. Elle a relevé qu'elle n'avait fait qu'exécuter les instructions de paiement qui lui étaient données sans même qu'elle soit consultée.

f. Par mémoire de réponse du 26 août 2021, l'intimée a conclu à la confirmation de sa décision sur opposition concernant le recourant 4 et à ce qu'il soit condamné à lui verser la somme de CHF 27'497.30 à titre de réparation du dommage causé entre le 1er décembre 2018 et le 28 février 2019, ainsi que la somme de CHF 550.95 à titre de frais administratifs de 2.55% calculés sur les cotisations dues à titre d'AVS-AI-APG. Le recourant 4, qui avait été inscrit au registre du commerce, avait des pouvoirs et des domaines d'activités qui n'étaient pas limités, de sorte qu'il avait engagé sa responsabilité et violé la loi en ne s'acquittant pas des cotisations sociales dues, par négligence grave.

g. Elle a pris les mêmes conclusions à l'égard des recourants 1, 2 et 3 par écriture du 30 septembre 2021 et à l'égard de la recourante par écriture du 4 octobre 2021. Concernant le recourant 3, l'intimée a en particulier relevé qu'il avait procédé à des versements importants en août 2020 afin de couvrir d'autres arriérés de cotisations, alors qu'il avait déjà démissionné de deux entreprises du groupe N______ et qu'il n'était plus qu'employé de I______ SA, pour laquelle il ne disposait pas de la signature individuelle. Il avait ainsi pu effectuer ces versements sans requérir l'aval des recourants 1 et 2 ou de toute autre personne.

h. Le recourant 4 a répliqué par écriture du 23 septembre 2021, soulignant qu'il n'avait aucun pouvoir décisionnel quant aux paiements de la société et que la signature collective dont il bénéficiait lui servait principalement pour la commande de matériel. Il a joint son contrat de travail et son certificat de travail établi après son licenciement. Selon ce dernier document, le recourant 4 était responsable technique et chef du personnel du groupe N______. Ses activités au sein du groupe avaient consisté à assurer la bonne réalisation de chantiers dont il avait la gestion et à assumer la gestion du personnel d'exploitation fixe et temporaire de toutes les sociétés du groupe.

i. Le 11 octobre 2021, l'intimée a dupliqué dans la cause l'opposant au recourant 4, relevant que ce dernier était responsable des paiements des créanciers et des fournisseurs dès le mois d'octobre 2018, ce système ayant été mis en place en raison des problèmes de trésorerie des sociétés du groupe N______, de sorte qu'il avait connaissance du non-paiement des charges sociales et avait le pouvoir de les régler.

j. Par ordonnance du 26 octobre 2021, la chambre de céans a ordonné la jonction des causes A/2550/2021, A/2863/2021, A/2875/2021, A/2879/2021 et A/2902/2021 sous la cause A/2550/2021.

k. Par observations du 3 janvier 2022, le recourant 3 a persisté dans ses conclusions et arguments, relevant au surplus que si par impossible sa responsabilité quant au dommage subi par l'intimée devait être admise, une faute concomitante de cette dernière devrait être retenue. En effet, la faillite de la société était due aux graves difficultés financières des autres sociétés du groupe, notamment J______ SA, et l'intimée avait fait preuve d'une passivité totale au fil des années à leur égard, laissant les arriérés de cotisations s'accumuler. Concernant J______ SA, les arriérés de cotisations s'élevaient à CHF 340'000.- au mois de mars 2019 et concernaient, pour certains, des factures du mois d'octobre 2018. L'intimée avait reconnu avoir accordé des facilités de paiement aux recourants 1 et 2 et à leurs sociétés, alors qu'elle savait pertinemment que les cotisations ne pourraient être réglées. Le recourant 3 a en outre requis la production du compte-rendu d'une réunion s'étant tenue en 2019 avec des membres de la Caisse de compensation des installateurs électriciens du canton de Genève (ci-après : CCIE), lors de laquelle les recourants 1 et 2 s'étaient engagés à régler les créanciers sociaux des sociétés faillies, et a sollicité l'audition, à titre de témoins, de Messieurs O______ et P______, respectivement vice-président et président de la CCIE, qui avaient participé à ladite réunion.

l. Les recourants 1 et 2 ont produit des déterminations le 20 janvier 2022, persistant dans leurs conclusions, le recourant 2 soulignant en particulier qu'il n'était pas administrateur de la société, et n'était donc pas un organe formel, ni ne pouvait être qualifié d'organe de fait, car il ne prenait pas de décisions dépassant le cadre des affaires quotidiennes qui influençaient le résultat de l'entreprise. Il fallait faire abstraction des rapports de filiation qui l'unissaient au recourant 1.

m. La recourante s'est prononcée sur la procédure par écriture du 3 février 2022, tandis que le recourant 4 n'a pas produit d'observations dans le délai imparti.

n. En date du 22 mars 2022, la chambre de céans a requis de l'intimée qu'elle produise le compte-rendu de la réunion de 2019, tel que sollicité par le recourant 3.

o. Par courrier du 6 avril 2022, l'intimée a expliqué que la réunion s'était déroulée le 17 avril 2019, soit après la faillite de la société, et qu'aucun procès-verbal n'avait été dressé à cette occasion. Cette séance avait pour but de discuter de l'éventuelle adhésion de I______ SA, nouvellement constituée le 19 mars 2019, et du paiement des arriérés de cotisations sociales des autres entreprises du groupe N______.

p. Le 16 mai 2022, la recourante et la Caisse AVS MEROBA N°111, agence de Lausanne, ont signé une transaction, par laquelle cette dernière a accepté de renoncer à lui réclamer la réparation de son dommage, la recourante n'ayant agi que sur la base des instructions données par sa hiérarchie. Il était convenu que chaque partie garde ses frais d'avocat.

q. Une première audience de comparution personnelle des parties s'est tenue devant la chambre de céans le 17 mai 2022.

r. Le 7 juillet 2022, la chambre de céans, faisant suite à des réquisitions de preuves complémentaires formulées par le recourant 3 le 7 juin 2022, a ordonné aux recourants 1 et 2 de produire les courriels du recourant 3, les notes de séance, les listings de créanciers faisant état des charges sociales à verser par les sociétés du groupe N______ à l'intimée, ainsi que les courriels envoyés en ce sens par la recourante, pour la période du 1er janvier 2017 au 31 octobre 2020. Le même jour, elle a également ordonné à l'intimée, tant au siège de Genève qu'à l'agence de Lausanne, de produire, du 1er janvier 2017 jusqu'à tout le moins le jour des faillites des sociétés concernées, les relevés des cotisations sociales dues par la société ainsi que les autres sociétés du groupe N______, les échanges de correspondance et les éventuels comptes-rendus des réunions ayant trait aux facilités de paiement accordées, les preuves des mesures de recouvrement qu'elle aurait intentées à l'égard des sociétés du groupe, ainsi que les attestations de paiement des contributions sociales délivrées à ces sociétés, ou les refus de délivrance de ces attestations.

s. Par écriture du 28 juillet 2022, l'intimée a requis que la chambre de céans rétracte son ordonnance du 7 juillet 2022, dans la mesure où la production des pièces sollicitées concernait l'agence de Lausanne, et fait valoir que le volume desdites pièces rendait leur production extrêmement difficile et compliquerait inutilement la procédure.

t. Divers échanges d'écritures sont intervenus en lien avec la production de pièces requise de l'intimée, à la suite de quoi, le 23 août 2022, la chambre de céans a circonscrit la demande à la société F______ SA, indiquant que la question de la nécessité de renseigner précisément sur les autres sociétés du groupe pourrait être tranchée de manière définitive ultérieurement.

u. Le 7 septembre 2022, les recourants 1 et 2 ont fait valoir qu'il n'y avait aucune raison de transmettre des documents relatifs à d'autres sociétés du groupe N______ que ceux concernant F______ SA, seuls les faits en lien avec l'exploitation de cette dernière intéressant la chambre de céans. S'agissant de cette société, elle avait été déclarée en faillite le 1er avril 2019, de sorte que l'ensemble du dossier se trouvait depuis lors en mains de l'office des faillites et n'avait pas été récupéré à l'issue de la faillite. Concernant les sociétés M______, SOCIÉTÉ ANONYME et I______ SA, elles avaient été déclarées en faillite entre janvier et février 2022. L'office des faillites disposait donc de l'intégralité des documents papiers et des ordinateurs, dont ils n'avaient pas fait de copies privées. Ainsi, quand bien même il n'y avait aucune raison juridique que ces documents soient remis, il leur était matériellement impossible de les produire.

v. Par écriture du 23 septembre 2023, le recourant 3 a rétorqué que les recourants 1 et 2 avaient la possibilité de s'adresser à l'office des faillites en vue d'accéder aux données, les papiers d'affaires du failli devant être conservés pendant dix ans.

w. L'intimée a produit deux chargés de pièces en date du 31 octobre 2022 et 30 novembre 2022, le premier concernant essentiellement la succursale de Nyon et le second la société elle-même.

x. Par écriture du 2 décembre 2022, le recourant 3 s'est déterminé sur le premier chargé de pièces complémentaire produit par l'intimée, le second ne lui ayant pas encore été transmis, et a maintenu sa conclusion quant à la faute concomitante de l'intimée ainsi que sa demande de réquisitions de preuves.

y. Le 2 février 2023, la recourante a transmis à la chambre de céans une copie de l'arrêt rendu par la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud le 24 mai 2022, constatant que la transaction qu'elle avait conclue avec l'intimée, agence de Lausanne, était en adéquation avec les faits de la cause, qu'elle ne contrevenait pas à la loi et répondait aux intérêts des parties, et a sollicité que la chambre de céans ordonne la production du dossier de cette cause.

z. Sollicitée par la chambre de céans, l'intimée a expliqué par courrier du 16 mars 2023 que trois procédures similaires à la présente procédure étaient pendantes par-devant le Tribunal cantonal vaudois, opposant l'agence de Lausanne aux recourants 1, 2 et 3, au sujet du non-paiement des cotisations sociales de F______ SA, SUCCURSALE DE NYON entre le 1er octobre 2018 et le 31 mars 2019, pour un montant de CHF 29'459.80.

aa. Par ordonnance du 21 mars 2023, la chambre de céans a sollicité de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Vaud l'apport du dossier de la procédure concernant la recourante. Celui-ci a été transmis le 23 mars 2023.

bb. Par courrier du 31 mars 2023, le recourant 3 a maintenu ses demandes de réquisitions de preuves.

cc. Une seconde audience de comparution personnelles des parties s'est tenue devant la chambre de céans le 18 avril 2023, à l'occasion de laquelle le représentant de l'intimée a déclaré confirmer la transaction conclue en mai 2022 avec la recourante, et valider les actes accomplis par l'agence de Lausanne et son conseil à ce titre. Les autres parties non visées par la transaction n'ont par ailleurs pas soulevé d'objections à son égard.

dd. Par écriture du 9 mai 2023, le recourant 3 a persisté dans ses réquisitions de preuves et conclusions.

ee. Par observations spontanées du 25 mai 2023, l'intimée a souligné qu'elle avait fait suite à l'ordonnance de la chambre de céans du 7 juillet 2022 en produisant les pièces requises. Elle a par ailleurs contesté toute faute concomitante de sa part dans la gestion du dossier de la société, exposant que ses activités et celles de son agence à Lausanne étaient distinctes et qu'elle avait toujours déployé les mesures nécessaires et respecté ses procédures internes de recouvrement ainsi que les directives fédérales en vue d'encaisser les cotisations sociales, ce que la brièveté de la période litigieuse démontrait.

ff. Le 19 juin 2023, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger sur mesures d'instruction ou au fond.

 

EN DROIT

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10).

Sa compétence ratione materiae pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 Selon l’art. 52 al. 5 LAVS, en dérogation à l’art. 58 al. 1 LPGA, le tribunal des assurances du canton dans lequel l’employeur est domicilié est compétent pour traiter le recours. Cette disposition est également applicable lorsque la caisse recherche un organe de l’employeur en réparation du dommage, et ce quel que soit le domicile dudit organe (arrêt du Tribunal fédéral H 184/06 du 25 avril 2007 consid. 2.3).

1.3 La société étant domiciliée dans le canton de Genève depuis le 6 décembre 2006 jusqu'au moment de la faillite, la chambre de céans est également compétente ratione loci.

2.             À teneur de l'art. 1 al. 1 LAVS, les dispositions de la LPGA s'appliquent aux art. 1 à 97 LAVS, à moins que la loi n'y déroge expressément.

3.             Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Dans la mesure où le recours a été interjeté postérieurement au 1er janvier 2021, il est soumis au nouveau droit (cf. art. 82a LPGA a contrario).

4.             La LPGA, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, a entraîné la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l'AVS, notamment en ce qui concerne l’art. 52 LAVS. Désormais, la responsabilité de l’employeur y est réglée de manière plus détaillée qu’auparavant et les art. 81 et 82 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS ; RS 831.101) ont été abrogés.

5.             Il faut toutefois préciser que le nouveau droit n'a fait que reprendre textuellement, à l'art. 52 al. 1 LAVS, le principe de la responsabilité de l'employeur figurant à l'art. 52 aLAVS, la seule différence portant sur la désignation de la caisse de compensation, désormais appelée assurance. Les principes dégagés par la jurisprudence sur les conditions de droit matériel de la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 aLAVS (dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2002) restent par ailleurs valables sous l'empire des modifications introduites par la LPGA (ATF 129 V 11 consid. 3.5 et 3.6).

6.             Les dispositions de la novelle du 17 mars 2011 modifiant la LAVS sont entrées en vigueur le 1er janvier 2012. Elles n'ont pas amené de changements en matière de responsabilité subsidiaire des organes fondée sur l'art. 52 LAVS. En effet, outre quelques retouches de forme, le nouvel art. 52 al. 2 LAVS concrétise les principes établis par la jurisprudence constante du Tribunal fédéral (cf. Message relatif à la modification de la LAVS du 3 décembre 2010, FF 2011 519, p. 536 à 538). Sur le plan matériel, sont en principe applicables les règles de droit en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 129 V 1 consid. 1 ; ATF 127 V 467 consid. 1 et les références).

7.             En l’espèce, les montants litigieux concernent la période allant de décembre 2018 à février 2019, de sorte que l’art. 52 al. 1 LAVS est applicable dans sa teneur en vigueur au 1er janvier 2012 (arrêt du Tribunal fédéral 9C_80/2017 du 31 mai 2017 consid. 3.2).

8.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjetés dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais pour la période du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 38 al. 4 let. b LPGA et art. 89C let. b LPA), les recours sont recevables.

9.             Le litige porte sur la responsabilité des recourants et de la recourante dans le préjudice causé à l’intimée, par le défaut de paiement des cotisations sociales (AVS-AI-APG et AC ainsi qu’AMat et AF) entre le 1er décembre 2018 et le 28 février 2019, étant précisé que les impayés du mois de décembre 2018 ne concernent que les intérêts moratoires.

10.          

10.1 L'art. 14 al. 1er LAVS en corrélation avec les art. 34 ss RAVS, prescrit l'obligation pour l'employeur de déduire sur chaque salaire la cotisation du salarié et de verser celle-ci à la caisse de compensation avec sa propre cotisation. Les employeurs doivent envoyer aux caisses, périodiquement, les pièces comptables concernant les salaires versés à leurs salariés, de manière à ce que les cotisations paritaires puissent être calculées et faire l'objet de décisions. L'obligation de payer les cotisations et de fournir les décomptes est, pour l'employeur, une tâche de droit public prescrite par la loi. À cet égard, le Tribunal fédéral a déclaré, à réitérées reprises, que la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS est liée au statut de droit public. L'employeur qui ne s'acquitte pas de cette tâche commet une violation des prescriptions au sens de l'art. 52 LAVS, ce qui entraîne pour lui l'obligation de réparer entièrement le dommage ainsi occasionné (ATF 137 V 51 consid. 3.2 et les références).

10.2 Selon l’art. 52 LAVS (dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2019), l'employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n'observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage à l'assurance, est tenu à réparation (al. 1). Si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage (al. 2). Le droit à réparation est prescrit deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. Ces délais peuvent être interrompus. L'employeur peut renoncer à invoquer la prescription. Si le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est applicable (al. 3). La caisse de compensation fait valoir sa créance en réparation du dommage par voie de décision (al. 4).

Selon le Message relatif à la modification de la loi fédérale sur l’assurance-vieillesse et survivants (LAVS) du 3 décembre 2010 relatif à l’art. 52 al. 2 à 4 LAVS, la réparation du dommage est le corollaire des obligations de droit public que l’employeur assume en matière de perception, de versement et de décompte des cotisations paritaires d’assurances sociales en sa qualité d’organe d’exécution de l’AVS. Ce principe occupe une place prépondérante en droit des cotisations. En effet, d’après la jurisprudence développée par le Tribunal fédéral depuis 1970, non seulement les employeurs peuvent être tenus de réparer le dommage, mais également, à titre subsidiaire, les personnes physiques qui agissent en leur nom (ATF 114 V 219 et ATF 129 V 11). Actuellement, il est insatisfaisant que la responsabilité subsidiaire des organes, de même que d’autres caractéristiques importantes de la réparation du dommage, ne soient pas réglées dans la loi et ne puissent qu’être déduites de l’étude d’une abondante jurisprudence. Pour le citoyen, la loi doit être conçue de manière plus transparente. La conception de base ne sera pas modifiée ; la responsabilité reste limitée à la faute grave (FF 2011 519, p. 536).

En d’autres termes, la nouvelle teneur de l’art. 52 al. 2 LAVS, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, codifie la jurisprudence du Tribunal fédéral selon laquelle, si l'employeur est une personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom (ATAS/610/2013 du 18 juin 2013 consid. 4a).

11.         À titre liminaire, il convient d’examiner si la prétention de la caisse est prescrite.

11.1 Le 1er janvier 2020 est entrée en vigueur la révision du droit de la prescription de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220), entraînant la modification de l’art. 52 al. 3 LAVS (RO 2018 5343 ; FF 2014 221). Cet alinéa prévoit désormais que l’action en réparation du dommage se prescrit conformément aux dispositions du code des obligations sur les actes illicites.

Selon l’art. 60 CO, dans sa teneur en vigueur à compter du 1er janvier 2020, l’action en dommages-intérêts ou en paiement d’une somme d’argent à titre de réparation morale se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s’est produit ou a cessé (al. 1). Si le fait dommageable résulte d’un acte punissable de la personne tenue à réparation, elle se prescrit au plus tôt à l’échéance du délai de prescription de l’action pénale, nonobstant les alinéas précédents. Si la prescription de l’action pénale ne court plus parce qu’un jugement de première instance a été rendu, l’action civile se prescrit au plus tôt par trois ans à compter de la notification du jugement (al. 2).

11.2 Jusqu’au 31 décembre 2019, l’art. 52 al. 3 aLAVS prévoyait que le droit à la réparation se prescrivait deux ans après que la caisse de compensation compétente a eu connaissance du dommage et, dans tous les cas, cinq ans après la survenance du dommage. En renvoyant désormais aux dispositions du CO sur la prescription des actions introduites en cas d’acte illicite, le délai de prescription relatif se trouve porté de deux à trois ans et le délai de prescription absolu de cinq à dix ans. De plus, la prescription plus longue de l’action pénale visée à l’art. 60 al. 2 CO est applicable. Le délai de prescription ne commence plus à courir à la survenance du dommage mais le jour où le fait dommageable s’est produit ou a cessé. Les autres aspects de la prescription, notamment les motifs d’empêchement ou de suspension et les actes interruptifs, sont régis par les art. 130 ss CO (Message du Conseil fédéral relatif à la modification du code des obligations [droit de la prescription] du 29 novembre 2013, FF 2014 221, p. 260).

L’art. 49 Titre final du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) règle de manière générale les questions de droit transitoire en matière de prescription et a été réécrit lors de la révision du droit de la prescription (Message précité, FF 2014 221, pp. 230 et 231). Depuis le 1er janvier 2020, cet article dispose notamment que lorsque le nouveau droit prévoit des délais de prescription plus longs que l’ancien droit, le nouveau droit s’applique dès lors que la prescription n’est pas échue en vertu de l’ancien droit (al. 1). L’entrée en vigueur du nouveau droit est sans effet sur le début des délais de prescription en cours, à moins que la loi n’en dispose autrement (al. 3). Au surplus, la prescription est régie par le nouveau droit dès son entrée en vigueur (al. 4).

Le principe est que le nouveau droit s’applique dès lors qu’il prévoit un délai plus long que l’ancien droit, mais uniquement à la condition que la prescription ne soit pas déjà acquise. En d’autres termes, les délais de prescription en cours sont allongés par le nouveau droit. A contrario, une créance déjà prescrite demeure prescrite (Message précité, FF 2014 221, p. 231). Par ailleurs, même si la prétention bénéficie d’un nouveau délai plus long de prescription, cela n’influence pas le point de départ de la prescription, c’est-à-dire que le délai ne recommence pas à courir au moment de l’entrée en vigueur du nouveau droit. Pour les questions de droit de la prescription autres que celles du début et de la longueur du délai, par exemple les (nouveaux) motifs de suspension et d’interruption, la renonciation à la prescription ou le droit transitoire, seul le nouveau droit est applicable dès son entrée en vigueur pour la période suivant celle-ci et non rétroactivement. Ainsi, les déclarations de renonciation à la prescription valablement faites sous l’ancien droit restent valables sous l’empire du nouveau droit (Message précité, FF 2014 221, p. 254).

11.3 Les délais prévus par les art. 52 al. 3 aLAVS et 60 al. 1 CO sont des délais de prescription, de sorte qu'ils ne sont pas sauvegardés une fois pour toutes avec la décision relative aux dommages-intérêts ; le droit à la réparation du dommage au sens de l'art. 52 al. 1 LAVS peut donc aussi se prescrire durant la procédure d'opposition (ATF 135 V 74 consid. 4.2).

Selon l’art. 52 al. 3 aLAVS, le délai de prescription relatif a commencé à courir dès la connaissance du dommage ; le délai de prescription absolu a débuté, en revanche, dès la survenance du dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.2).

11.4 Le montant du dommage correspond à celui pour lequel la caisse de compensation subit une perte. Appartiennent à ce montant les cotisations paritaires (cotisations patronales et d’employés ou ouvriers) dues par l’employeur, les contributions aux frais d’administration, les intérêts moratoires, les taxes de sommation et les frais de poursuite (OFAS, Directives sur la perception des cotisations - DP, état au 1er janvier 2022, n. 8017 ; ATF 121 III 382 consid. 3/bb). Les éventuelles amendes prononcées par la caisse de compensation ne font pas partie du dommage et doivent le cas échéant être déduites (arrêt du Tribunal fédéral H 142/03 du 19 août 2003 consid. 5.6).

S'agissant des cotisations dues en vertu de la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption du 21 avril 2005 (LAMat - J 5 07), par arrêt du 30 janvier 2020, la chambre de céans a jugé qu’il n’existait pas de base légale suffisante pour rechercher les employeurs ou leurs organes pour le dommage résultant du défaut de paiement des cotisations précitées (ATAS/79/2020).

L’art. 11A LAMat, entré en vigueur le 1er février 2023, prévoit désormais que l’employeur qui, intentionnellement ou par négligence grave, n’observe pas des prescriptions et cause ainsi un dommage au fonds cantonal de compensation de l’assurance-maternité ou à la caisse de compensation AVS est tenu de le réparer. L’article 52 de la loi sur l’assurance-vieillesse et survivants s’applique par analogie.

En cas de changement de règles de droit, sous réserve de dispositions particulières de droit transitoire, la législation applicable est, en principe, celle qui était en vigueur lors de la réalisation de l'état de fait qui doit être apprécié juridiquement ou qui a des conséquences juridiques (ATF 136 V 24 consid. 4.3 et la référence), étant précisé que le juge n'a pas à prendre en considération les modifications de droit postérieures à la date déterminante de la décision litigieuse (ATF 148 V 21 consid. 5.3 et la référence).

En l’espèce, dans la mesure où les décisions litigieuses ont été rendues avant le 1er février 2023, le droit applicable reste celui qui était en vigueur jusqu'au 31 janvier 2023.

11.5 Il résulte de la jurisprudence rendue à propos de l’art. 52 al. 3 aLAVS, les éléments qui suivent.

Le dommage survient dès que l'on doit admettre que les cotisations dues ne peuvent plus être recouvrées, pour des motifs juridiques ou de fait (ATF 129 V 193 consid. 2.2 ; ATF 126 V 443 consid. 3a). Ainsi, en matière de cotisations, un dommage se produit au sens de l'art. 52 LAVS lorsque l'employeur ne déclare pas à l'AVS tout ou partie des salaires qu'il verse à ses employés et que, notamment, les cotisations correspondantes se trouvent ultérieurement frappées de péremption selon l'art. 16 al. 1 LAVS. Dans un tel cas, le dommage est réputé survenu au moment de l'avènement de la péremption (ATF 112 V 156 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral H 35/06 du 4 octobre 2006 consid. 6). Ce jour marque également celui de la naissance de la créance en réparation et la date à partir de laquelle court le délai absolu (ATF 129 V 193 consid. 2.2 ; ATF 123 V 12 consid. 5c).

Un dommage se produit également en cas de faillite, en raison de l'impossibilité pour la caisse de récupérer les cotisations dans la procédure ordinaire de recouvrement. Le dommage subi par la caisse est réputé être survenu le jour de la faillite ; le jour de la survenance du dommage marque celui de la naissance de la créance en réparation et la date à partir de laquelle court le délai absolu (ATF 129 V 193 consid. 2.2 et la référence).

Il faut entendre par moment de la « connaissance du dommage », en règle générale, le moment où la caisse de compensation aurait dû se rendre compte, en faisant preuve de l'attention raisonnablement exigible, que les circonstances effectives ne permettaient plus d'exiger le paiement des cotisations, mais pouvaient entraîner l'obligation de réparer le dommage (ATF 129 V 193 consid. 2.1).

En cas de faillite, le moment de la connaissance du dommage correspond en règle générale à celui du dépôt de l'état de collocation, ou celui de la publication de la suspension de la liquidation de la faillite faute d'actifs (ATF 129 V 193 consid. 2.3 ; cf. également ATF 141 V 487 consid. 2.2 et les références).

En cas de faillite, la caisse a une connaissance suffisante du dommage, s’il apparaît, lors de la 1ère assemblée des créanciers, qu’au moins une partie du dommage ne sera pas couverte. Si la caisse ne se fait pas représenter à l’assemblée des créanciers, elle doit en tout cas requérir en temps utile le procès-verbal et le rapport du préposé. Sinon, le dommage est suffisamment connu lors du dépôt de l’état de collocation et de l’inventaire. Est déterminante la consultation effective du dossier auprès de l’office des faillites. Si la caisse a renoncé à cette consultation, le délai commence à courir à la fin du délai de présentation (OFAS, DP, état au 1er janvier 2022, n. 8048).

11.6 S’agissant des actes interruptifs de prescription, il résulte de la jurisprudence rendue à propos de l’art. 52 al. 3 aLAVS les éléments qui suivent.

Les délais de prescription sont interrompus par les actes énumérés à l’art. 135 CO (applicable par analogie) ainsi que par tous les actes adéquats par lesquels la créance en dommages-intérêts est invoquée de manière appropriée à l’encontre du débiteur (arrêt du Tribunal fédéral 9C_641/2020 du 30 mars 2021 consid. 5.3 et la référence ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_400/2020 du 19 octobre 2020 consid. 3.2.1 et la référence). Tant la décision que l’opposition interrompent les délais de prescription (ATF 135 V 74 consid. 4.2.2).

La prescription est notamment interrompue par une action ou une exception devant un tribunal (art. 135 ch. 2 CO par analogie) et recommence à courir lorsque le litige devant l'instance saisie est clos (art. 138 al. 1 CO ; ATF 147 III 419 consid. 5.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_906/2017 du 21 juin 2018 consid. 1.2 ; sur l'application par analogie des dispositions générales selon les art. 135 ss CO, cf. ATF 141 V 487 consid. 2.3 et les références ; ATF 135 V 74 consid. 4.2.1 et les références).

Les actes concernant la créance de cotisations vis-à-vis de l'employeur n'engendrent aucun effet interruptif de délai (ATF 141 V 487 consid. 4 et les références).

12.         En l'espèce, les prétentions en réparation du dommage élevées par l'intimée à l'encontre des recourants et de la recourante ne sont pas prescrites.

En effet, ces prétentions concernant les cotisations sociales et intérêts moratoires de décembre 2018 à février 2019 non acquittés, l'art. 52 al. 3 aLAVS en vigueur jusqu'au 31 décembre 2019 est applicable. Cette disposition prévoyait que le délai de prescription relatif de deux ans courait dès la connaissance du dommage, qui survenait lors du moment du dépôt de l'état de collocation ou lors de la suspension de la faillite faute d'actif, et que le délai absolu de cinq ans débutait dès la survenance du dommage, intervenant le jour du prononcé de la faillite. Le délai absolu de prescription a ainsi commencé à courir le 1er avril 2019, tandis que le délai relatif a débuté lors du dépôt de l'état de collocation, intervenu le 22 novembre 2019 selon les indications contenues à la FOSC. De plus, les deux délais se sont vus allongés par l'entrée en vigueur du nouveau droit de la prescription au 1er janvier 2020, dans la mesure où ils n'étaient alors pas échus, pour se porter à dix ans, respectivement trois ans.

Or, en rendant des décisions en réparation du dommage le 25 mai 2020 et le 18 septembre 2020, l'intimée a valablement interrompu la prescription relative de trois ans – comme du reste celle de deux ans – qui avait débuté le 22 novembre 2019, et celle absolue de dix ans qui courrait depuis le 1er avril 2019. Compte tenu des procédures subséquentes d'opposition, la prescription a par la suite été régulièrement interrompue et ne court par ailleurs plus depuis l'introduction des causes devant la chambre de céans.

13.         L’action en réparation du dommage n’étant pas prescrite, il convient à présent d’examiner si les autres conditions de la responsabilité de l’art. 52 LAVS sont réalisées, à savoir si les recourants et la recourante peuvent être considérés comme étant « l’employeur » tenu de verser les cotisations à l’intimée, s’ils ont commis une faute ou une négligence grave et enfin s’il existe un lien de causalité adéquate entre leur comportement et le dommage causé à l’intimée.

14.         À teneur de l’art. 52 al. 2 LAVS, si l'employeur est une personne morale, les membres de l'administration et toutes les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation répondent à titre subsidiaire du dommage. Lorsque plusieurs personnes sont responsables d'un même dommage, elles répondent solidairement de la totalité du dommage.

14.1 S’agissant de la notion d’« employeur », la jurisprudence considère que, si l'employeur est une personne morale, la responsabilité peut s'étendre, à titre subsidiaire, aux organes qui ont agi en son nom, notamment quand la personne morale n’existe plus au moment où la responsabilité est engagée (ATF 123 V 12 consid. 5b ; ATF 122 V 65 consid. 4a). Le caractère subsidiaire de la responsabilité des organes d'une personne morale signifie que la caisse de compensation ne peut agir contre ces derniers que si le débiteur des cotisations (la personne morale) est devenu insolvable (ATF 123 V 12 consid. 5b).

L’art. 52 LAVS ne permet ainsi pas de déclarer l'organe d'une personne morale directement débiteur de cotisations d'assurances sociales. En revanche, il le rend responsable du dommage qu'il a causé aux différentes assurances sociales fédérales, intentionnellement ou par négligence grave, en ne veillant pas au paiement des cotisations sociales contrairement à ses obligations (arrêt du Tribunal fédéral H 96/05 du 5 décembre 2005 consid. 4.1).

14.2 La notion d'organe selon l'art. 52 LAVS est en principe identique à celle qui se dégage de l'art. 754 al. 1 CO.

En matière de responsabilité des organes d'une société anonyme, l'art. 52 LAVS vise en première ligne les organes statutaires ou légaux de celle-ci, soit les administrateurs, l'organe de révision ou les liquidateurs (ATF 128 III 29 consid. 3a ; Thomas NUSSBAUMER, Les caisses de compensation en tant que parties à une procédure de réparation d'un dommage selon l'art. 52 LAVS, in RCC 1991 p. 403).

D'autres personnes possèdent toutefois la qualité d'organe de fait de la société. Il s'agit de celles qui participent de façon durable, concrète et décisive à la formation de la volonté sociale dans un vaste domaine dépassant les affaires courantes (ATF 128 III 29 consid. 3a et les références ; ATF 122 III 225 consid. 4b et les références). Dans cette éventualité, il faut cependant que la personne en question ait eu la possibilité de causer un dommage ou de l'empêcher, c'est-à-dire qu'elle ait effectivement exercé une influence sur la marche des affaires de la société (ATF 132 III 523 consid. 4.5 et les références ; cf. aussi ATF 146 III 37 consid. 5 et 6 et les références).

C'est en principe le cas d'un directeur qui a généralement la qualité d'organe de fait en raison de l'étendue des compétences que cette fonction suppose (ATF 104 II 190 consid. 3b). Il ne doit toutefois répondre que des actes ou des omissions qui relèvent de son domaine d'activité, ce qui dépend de l'étendue des droits et des obligations qui découlent des rapports internes, sinon il serait amené à réparer un dommage dont il ne pouvait empêcher la survenance faute de disposer des pouvoirs nécessaires (ATF 111 V 172 consid. 5a ; arrêt du Tribunal fédéral H 234/02 du 16 avril 2003 consid. 7.3, résumé in HAVE/REAS 2003 p. 251 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_68/2020 du 29 décembre 2020 consid. 5.2.1 et la référence).

La qualité d'organe est donc réservée aux personnes exécutant leurs obligations au sein de la société ou à l'égard des tiers en vertu de leur propre pouvoir de décision. Le fait qu'une personne est inscrite au registre du commerce avec droit de signature n'est, à lui seul, pas déterminant. La préparation de décisions par un collaborateur technique, commercial ou juridique ne suffit pas à conférer la qualité d'organe au sens matériel. En d'autres termes, la responsabilité liée à la qualité d'organe présuppose que l'intéressé ait eu des compétences allant nettement au-delà d'un travail préparatoire et de création des bases de décisions, pour se concentrer sur la participation, comme telle, à la formation de la volonté de la société. La responsabilité pour la gestion ne vise ainsi que la direction supérieure de la société, au plus haut niveau de sa hiérarchie (ATF 117 II 572 ; arrêt du Tribunal fédéral H 128/04 du 14 février 2006 consid. 3).

Un organe de fait n'est appelé à assumer une responsabilité que pour les domaines dans lesquels il a effectivement déployé une activité. Contrairement à un organe au sens formel, il n'a donc pas un devoir de surveillance (cura in custodiendo) à l'endroit de l'activité des autres organes, de fait ou de droit, de la société (arrêt du Tribunal fédéral H 128/04 du 14 février 2006 consid. 3).

Les organes de fait sont les personnes qui s'occupent de la gestion ou de la liquidation de la société, à savoir celles qui prennent en fait les décisions normalement réservées aux organes ou qui pourvoient à la gestion, concourant ainsi à la formation de la volonté sociale d'une manière déterminante (ATF 132 III 523 consid. 4.5 ; ATF 114 V 213 consid. 3). Conformément à la jurisprudence en matière de responsabilité du droit de la société anonyme, dont les principes s'appliquent dans le cadre de l'art. 52 LAVS (ATF 114 V 213 consid. 3), revêt uniquement une position d'organe de fait la personne qui assume sous sa propre responsabilité la compétence durable – et non seulement isolée – de prendre des décisions qui dépassent le cadre des affaires quotidiennes et ont une influence sur le résultat de l'entreprise. Tel n'est pas le cas d'une personne qui se limite à préparer et/ou à exécuter de telles décisions (ATF 128 III 29 consid. 3c). En d'autres termes, la responsabilité pour la gestion ne concerne que la direction supérieure de la société, au plus haut niveau de sa hiérarchie (ATF 117 II 570 consid. 3). En revanche, l'accomplissement de l'ensemble des tâches administratives au sein de l'entreprise (facturation aux clients, exécution des paiements, préparation des bulletins de salaires – y compris établissement de décomptes pour les autorités de l'AVS et la SUVA –, gestion des livres de caisse et des relations bancaires, etc.) n'est pas assimilable à l'activité spécifique d'un organe (ATF 114 V 213 consid. 4). L'obligation de réparer le dommage au sens de l'art. 52 LAVS intervient en principe seulement si la personne intéressée avait un pouvoir de disposer des cotisations non payées et pouvait effectuer les paiements à la caisse de compensation (ATF 134 V 401 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_428/2013 du 16 octobre 2013 consid. 4.2).

La qualité d'organe de fait s'analyse en fonction du rôle que la personne concernée a effectivement joué au sein de la société. Aussi, il faut en particulier qu'elle ait eu la possibilité de causer un dommage ou de l'empêcher, en d'autres termes qu'elle ait exercé effectivement une influence sur la marche des affaires de la société (ATF 132 III 523 consid. 4.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_295/2017 du 6 juillet 2017 consid. 5.2).

Il incombe à la caisse, qui supporte les conséquences de l'échec de la preuve, d'alléguer les faits fondant la responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS et permettant d'établir qu'une personne occupait au sein d'une société la position d'un organe au sens matériel (ATF 114 V 213 consid. 5 in fine ; arrêt du Tribunal fédéral H 20/01 du 21 juin 2001 consid. 5).

14.3 Le Tribunal fédéral a ainsi reconnu la responsabilité non seulement des membres du conseil d'administration, mais également celle de l'organe de révision d'une société anonyme, du directeur d'une société anonyme disposant du droit de signature individuelle, du gérant d'une Sàrl ainsi que du président, du directeur financier ou du gérant d'une association sportive (arrêt du Tribunal fédéral H 34/04 du 15 septembre 2004 consid. 5.3.1 et les références, in SVR 2005 AHV n° 7 p. 23 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.1).

15.         En l'espèce, il convient d'examiner individuellement la qualité d'organe des différentes parties recourantes, en fonction de leurs rôles respectifs au sein de la société.

15.1 S'agissant du recourant 1, il sied de rappeler qu'il était le seul organe formel de la société depuis sa création.

Il engage donc à ce titre sa responsabilité, indépendamment de sa fonction ou de son influence concrète sur la marche des affaires de la société (cf. Michel VALTERIO, Droit de l'assurance-vieillesse et survivants (AVS) et de l'assurance-invalidité, 2011, p. 646) et sans qu'il soit nécessaire d'examiner s'il assumait les tâches d'un organe matériel (cf. arrêt du Tribunal fédéral H 34/04 du 15 septembre 2004 consid. 5.3.2).

Il apparaît en outre que, dans les faits, le recourant 1 exerçait concrètement la haute gestion sur la société et s'occupait de ses finances, en donnant en particulier des instructions quant aux paiements à effectuer ou non, comme cela ressort notamment des déclarations convergentes des autres parties.

Le recourant 1 avait donc la qualité d'employeur au sens de l'art. 52 LAVS, ce que ce dernier ne conteste au demeurant pas.

15.2 Le recourant 2 allègue qu'il ne revêtait pas la qualité d'employeur au sens de l'art. 52 LAVS, dans la mesure où il ne pouvait influer seul et directement dans les décisions de la société faillie, qui plus est dans celles relatives aux cotisations sociales, ne s'étant vu délivrer un droit de représentation de la société qu'en vue de pallier à d'éventuelles carences et en aucun cas pour y avoir un rôle opérationnel ou décisionnel. Il n'avait pas été actif dans la gestion de la société, ni dans son contrôle financier.

Quant à l'intimée, elle expose que le précité participait à toutes les discussions et avait le pouvoir de prendre toutes les décisions en lien avec la société, qu'il avait pleinement connaissance de ses problèmes financiers et de l'existence de cotisations sociales impayées et qu'il détenait un rôle principal au sein du groupe N______, respectivement F______ SA avant sa faillite.

Comme vu ci-dessus, outre les administrateurs à proprement parler, sont également réputées chargées de l'administration ou de la gestion des personnes qui prennent en fait des décisions réservées aux organes ou se chargent de la gestion proprement dite, participant ainsi de manière déterminante à la formation de la volonté de la société (administrateurs de fait) (ATF 107 II 349 consid. 5). Il suffit que ces personnes aient eu la possibilité, dans les faits, de causer le dommage ou de l'empêcher de se produire, c'est-à-dire d'influencer de manière déterminante la marche des affaires de la société (ATF 117 II 432 consid. 2b ; ATF 132 III 523 consid. 4.5). La qualité d'organe appartient à toute personne physique qui, d'après la loi, les statuts ou l'organisation effective de la personne morale, prend part à l'élaboration de sa volonté et jouit en droit ou en fait du pouvoir de décision correspondant ; elle ne dépend pas du pouvoir de représentation (ATF 124 III 418 consid. 1b). Les organes matériels sont ceux qui se sont vu conférer des pouvoirs à l'interne, tandis que les organes de fait sont toutes les personnes qui prennent en fait des décisions réservées aux organes ou qui se chargent de la gestion proprement dite des affaires et qui participent ainsi de manière décisive à la volonté de la société (ATF 146 III 37 consid. 6.1 et les références). La jurisprudence emploie parfois l'expression globale « organes formels ou de fait » qui oppose les différentes grandes catégories, les organes « matériels » étant inclus dans le terme « de fait » (Nicolas ROUILLER, Marc BAUEN, Robert BERNET, Colette LASSERRE ROUILLER, La société anonyme suisse, 2022, p. 633, note n. 1763). Pour juger si une personne peut être rendue responsable en tant qu'organe d'une personne morale, il ne suffit pas d'appliquer des critères formels (par exemple, droit de signer ou inscription de la personne au registre du commerce) mais il y a également lieu d'examiner si la personne en question a pris des décisions qui relevaient des organes ou si elle a assumé la gestion proprement dite, influençant ainsi d'une manière déterminante la formation de la volonté au sein de la société (ATF 114 V 213, in RCC 1989 176).

Selon les indications du registre foncier, le recourant 2 a bénéficié d'une procuration collective à 2 dès octobre 2015, remplacée par une signature collective à 2 en septembre 2016 jusqu'à la radiation de la société. Ce seul fait ne suffit certes pas à lui conférer la qualité d'organe de la société.

Néanmoins, la chambre de céans a acquis la conviction que le recourant 2 assumait, dans les faits, des fonctions liées à la gestion de la société et participait de manière décisive à la formation de sa volonté.

À ce propos, il sied de tenir compte de la particularité du cas d'espèce, liée au fait que la société F______ SA n'était pas isolée, mais faisait partie d'un groupe de sociétés apparentées, ayant un historique commun. Les liens entre les différentes sociétés du groupe ont largement été mis en évidence lors de la présente procédure, en particulier lors des auditions, (cf. notamment le fait que la faillite de F______ SA a été causée par les difficultés financières de J______ SA, l'utilisation des rentrées financières d'une société au profit du paiement des charges d'une autre société, le fait que le comité de direction portait sur l'ensemble des « sociétés du groupe », l'utilisation de cette expression par les parties recourantes elles-mêmes lors de leurs auditions, etc.) et résultent par ailleurs directement de la fonction administrative de la société faillie à laquelle étaient rattachées les autres sociétés, ainsi que de la communication diffusée sur internet, qui parle expressément du groupe N______. En conséquence, les fonctions du recourant 2 dans la société ne doivent pas uniquement être examinées au regard de ses pouvoirs formels dans celle-ci, tels qu'ils résultent du registre du commerce, mais être analysées à l'aune de ses pouvoirs dans le groupe dans son ensemble.

Or, il apparaît que le recourant 2 a été actif dans toutes les sociétés du groupe, bénéficiant pour chacune d'entre elles d'une signature collective à 2, voire d'une procuration à 2. Il est de plus administrateur de M______, SOCIÉTÉ ANONYME depuis janvier 2020 et, qui plus est, a assumé la charge d'administrateur de I______ SA dès sa création, lorsqu'elle a remplacé la société faillie et repris ses fonctions administratives au sein du groupe, ainsi que les contrats des employés. Sur internet, le recourant 2 figure en tant que « chef d'entreprise » ou « administrateur », sans que soit spécifiée une entreprise en particulier (cf. pièce 2 recourant 3). Le recourant 2 participait d'ailleurs au comité de direction qui portait sur l'ensemble des sociétés du groupe (PV d'audience du 17 mai 2022, p. 8).

D'autres éléments ressortant de la procédure et des enquêtes corroborent le l'implication du recourant 2 dans la gestion de la société et son pouvoir décisionnel, y compris concernant le paiement des charges sociales :

-          Note confidentielle établie le 11 février 2019 par le recourant 3 concernant les retards de paiement des charges sociales, mentionnant qu'une réunion s'est tenue entre les trois premiers recourants et que le recourant 3 a invité les recourants 1 et 2 à privilégier en priorité le paiement des charges sociales (pièce 13 recourant 3).

-          Email de l'intimée du 14 mars 2019 concernant les cotisations en souffrance qui est transféré au recourant 2 (pièce 16 recourante).

-          D'une part, volonté exprimée par le recourant 2 de reprendre les sociétés du groupe N______ en 2020 lors du départ de son père à la retraite, impliquant qu'il était évidemment au courant de leurs difficultés financières, et, d'autre part, affirmation qu'il était salarié de la société mais sans titre à proprement dit (PV d'audience du 17 mai 2022, p. 6), ce qui suppose qu'il était impliqué dans sa gestion.

-          Déclarations du recourant 2 affirmant que le recourant 1 ou lui-même n'avaient jamais dit qu'il ne fallait pas payer les charges sociales et que leur importance n'avait jamais été minimisée (PV d'audience du 17 mai 2022, p. 6), ce qui indique qu'il était associé à la question des charges sociales.

-          Accompagnement du recourant 1 lors de la séance dans les locaux de l'intimée qui s'est déroulée le 17 avril 2019 pour discuter de la problématique de l'entreprise et des arriérés de cotisations sociales (PV d'audience du 17 mai 2022, p. 7 et PV d'audience du 18 avril 2023, p. 3).

-          Reconnaissance, par le recourant 2, de ce que l'intimée a fait preuve de patience par rapport au paiement des cotisations (PV d'audience du 17 mai 2022, p. 7), ce qui implique qu'il a connaissance de manière précise des démarches entreprises par l'intimée à ce propos.

-          Déclarations du recourant 3 indiquant qu'aucun paiement ne pouvait être effectué sans l'accord des recourants 1 et 2 et que ce dernier pouvait accepter que des paiements soient effectués (PV d'audience du 17 mai 2022, p. 3).

-          Déclarations de la recourante affirmant qu'avant le 8 octobre 2018, c'était la direction qui décidait s'il fallait payer les charges sociales, par qui il fallait entendre Messieurs A______ et B______, père et fils, et le recourant 3 (PV d'audience du 18 avril 2023, p. 5-6).

-          Déclarations du recourant 3 affirmant que les recourants 1 et 2 prenaient les décisions concernant les paiements, les faisaient et les validaient (PV d'audience du 18 avril 2023, p. 6-7).

Les éléments qui précèdent sont autant d'indices permettant de retenir que, contrairement à ce qu'allègue le recourant 2, il disposait bien d'un pouvoir décisionnel au sein de la société et était à même d'influencer sur la marche de ses affaires, en particulier concernant le paiement des cotisations sociales. Le fait que le recourant 1 exerçait un contrôle très précis des différents paiements et désirait valider leur acquittement, ainsi que le fait que le recourant 2 n'avait pas accès aux comptes de la société ne sont, contrairement à ce que ce dernier soutient, pas des obstacles à la reconnaissance de sa qualité d'organe. Les recourants 1 et 2 exerçaient en définitive de manière parallèle la haute gestion de la société et pouvaient tous deux influencer la formation de sa volonté, peu importe à cet égard que le recourant 2 n'avait pas accès aux comptes, les paiements étant saisis par la comptabilité, en fonction des instructions données. La jurisprudence n'exige en effet pas que la personne concernée ait la compétence de procéder aux versements (arrêt du Tribunal fédéral H 77/03 du 18 janvier 2005 consid. 6.4)

Au vu de ce qui précède, le recourant 2 revêtait donc la qualité d'employeur au sens de l'art. 52 LAVS.

15.3 Concernant le recourant 3, il est établi qu'il avait été nommé directeur financier de la société et d'autres sociétés du groupe en raison de ses qualifications professionnelles à cet égard. Par ailleurs, son cahier des charges, tel qu'il l'avait lui-même décrit, comprenaient les tâches et responsabilités liées à la gestion financière de ces sociétés. Les allégations formulées en cours de procédure selon lesquelles il intervenait principalement pour obtenir et conserver divers crédits bancaires et d'institutions publiques apparaissent en contradiction avec les éléments du dossier.

Assumant formellement le rôle de directeur, le recourant 3 s'était ainsi vu déléguer la gestion financière de la société par le conseil d'administration de cette dernière, à savoir par le recourant 1 (cf. art. 716b al. 1 et 2 aCO, dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2022). Il revêtait donc la qualité d'organe matériel de la société et avait également le pouvoir de la représenter par sa signature individuelle (cf. art. 718 CO).

Cette délégation de la gestion financière impliquait que le recourant 3 était responsable des flux financiers et des paiements de la société, notamment des cotisations sociales. Son rôle n'était ainsi pas assimilable à une collaboration technique ou commerciale par laquelle il aurait simplement préparé les bases des décisions. De par la fonction supérieure de directeur qu'il occupait et ses tâches afférentes aux finances de la société, le paiement des cotisations sociales entrait dans ses compétences.

Les pièces versées à la procédure et les auditions menées démontrent également que le recourant 3 était compétent en matière de finances de la société, et intervenait quant aux paiements à réaliser.

En tout état, un organe matériel qui renoncerait à exercer les compétences qui lui ont été déléguées engagerait déjà sa responsabilité, cette délégation de compétence impliquant qu'il aurait eu la possibilité de causer le dommage ou de l'empêcher (Marco REICHMUTH, Die Haftung des Arbeitgebers und seiner Organe nach Art. 52 AHVG, 2008, p. 53, n. 217).

Par conséquent, le recourant 3 revêtait également la qualité d'employeur au sens de l'art. 52 LAVS.

L'argument du recourant 3 visant à soutenir qu'il n'est pas responsable du défaut de paiement des cotisations sociales car il ne décidait pas en dernier ressort des factures à acquitter doit être analysé en lien avec la condition de la faute (cf. ci-dessous ch. 17.3 ci-dessous).

15.4 Les fonctions jouées par le recourant 4 dans la société ne permettent par contre pas de retenir que ce dernier engageait sa responsabilité au sens de l'art. 52 LAVS.

En effet, bien qu'il ressorte des enquêtes que ce dernier participait aux séances de direction et qu'il établissait des listes de paiements, son rôle précis consistait à discuter avec les fournisseurs afin qu'ils ne bloquent pas leurs livraisons, et c'est en raison des liens privilégiés qu'il avait avec ceux-ci, compte tenu de ses nombreuses années passées sur les chantiers, qu'il a endossé des responsabilités plus importantes dès le 8 octobre 2018. Aucun élément du dossier ne permet de retenir que le recourant 4 aurait endossé des responsabilités en matière de paiement des cotisations sociales et aurait eu la possibilité d'influencer la volonté de la société sur ce plan.

Le recourant 4 ne peut ainsi pas être considéré comme un organe de fait en matière de paiement des cotisations sociales, de sorte qu'il ne peut pas être recherché par l'intimée.

15.5 Enfin, concernant la recourante, les parties ont toutes exprimé leur assentiment à l'homologation de la transaction qu'elle a signée avec la Caisse AVS MEROBA N°111, agence de Lausanne, qui a par ailleurs été validée par le représentant de l'intimée lors de l'audience du 18 avril 2023.

Au vu des pièces du dossier et des auditions intervenues, la chambre de céans est par ailleurs convaincue que la recourante n'exerçait en effet aucun pouvoir décisionnel dans la société et ne faisait que suivre les instructions qui lui étaient données, sans participer à la formation de sa volonté. Ceci est particulièrement vrai à compter du 8 octobre 2018, date à laquelle il a été décidé que la comptabilité n'était plus autorisée à prendre des engagements de paiement et ne devait plus recevoir les factures ou les appels téléphoniques des créanciers. Le rôle de la recourante durant la période litigieuse de décembre 2018 à février 2019 était ainsi purement technique, en ce sens qu'elle se bornait à exécuter les paiements dont elle avait reçu l'ordre.

Au vu de ce qui précède, les conditions d'application de l'art. 52 LAVS vis-à-vis de la recourante ne sont pas données. La transaction qu'elle a signée avec l'intimée pourra ainsi être homologuée par la chambre de céans (cf. ch. 23 ci-dessous).

16.         Les recourants 1, 2 et 3 revêtant tous trois la qualité d'organes, il convient maintenant de déterminer s'ils ont commis une faute qualifiée ou une négligence grave au sens de l’art. 52 al. 1 LAVS.

16.1 L'obligation légale de réparer le dommage ne doit être reconnue que dans les cas où le dommage est dû à une violation intentionnelle ou par négligence grave, par l'employeur, des prescriptions régissant l'assurance-vieillesse et survivants (RCC 1978 p. 259 ; RCC 1972 p. 687). Il faut donc un manquement d'une certaine gravité. Pour savoir si tel est le cas, il convient de tenir compte de toutes les circonstances du cas concret (ATF 121 V 243 consid. 4b).

La caisse de compensation qui constate qu'elle a subi un dommage par suite de la non-observation de prescriptions peut admettre que l'employeur a violé celles-ci intentionnellement ou du moins par négligence grave, dans la mesure où il n'existe pas d'indice faisant croire à la légitimité de son comportement ou à l'absence d'une faute (RCC 1983 p. 101).

Selon la jurisprudence constante, se rend coupable d'une négligence grave l'employeur qui manque de l'attention qu'un homme raisonnable aurait observée dans la même situation et dans les mêmes circonstances. La mesure de la diligence requise s'apprécie d'après le devoir de diligence que l'on peut et doit en général attendre, en matière de gestion, d'un employeur de la même catégorie que celle de l'intéressé. En présence d'une société anonyme, il y a en principe lieu de poser des exigences sévères en ce qui concerne l'attention qu'elle doit accorder au respect des prescriptions. Une différenciation semblable s'impose également lorsqu'il s'agit d'apprécier la responsabilité subsidiaire des organes de l'employeur (ATF 108 V 189). Les faits reprochés à une entreprise ne sont pas nécessairement imputables à chacun des organes de celle-ci. Il convient bien plutôt d'examiner si et dans quelle mesure ces faits peuvent être attribués à un organe déterminé, compte tenu de la situation juridique et de fait de ce dernier au sein de l'entreprise. Savoir si un organe a commis une faute dépend des responsabilités et des compétences qui lui ont été confiées par l'entreprise (ATF 108 V 199 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 4.3.2). La négligence grave mentionnée à l'art. 52 LAVS est admise très largement par la jurisprudence (ATF 132 III 523 consid. 4.6).

Commet notamment une faute ou une négligence grave, l'organe qui verse des salaires pour lesquels les créances de cotisations qui en découlent de par la loi ne sont pas couvertes (arrêt du Tribunal fédéral 9C_430/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.2 et les références). Commet également une faute grave celui qui ne démissionne pas de ses fonctions alors qu'il se trouvait, en raison de l'attitude du tiers, dans l'incapacité de prendre les mesures qui s'imposaient s'agissant du paiement des cotisations ou qui se trouvait dans l'incapacité d'exercer son devoir de surveillance (voir par exemple : arrêt du Tribunal fédéral 9C_344/2011 du 3 février 2012 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2). Enfin, commet une faute au sens de l'art. 52 LAVS l'organe qui investit de manière répétée des fonds dans une entreprise sans faire en sorte qu'ils servent en priorité à payer les cotisations sociales en souffrance (arrêt du Tribunal fédéral H 305/00 du 6 septembre 2001 consid. 4b).

Celui qui appartient au conseil d'administration d'une société et qui ne veille pas au versement des cotisations courantes et à l'acquittement des cotisations arriérées est réputé manquer à ses devoirs (arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 96/03 du 30 novembre 2004 consid. 7.3.1, in SJ 2005 I 272 consid. 7.3.1). Commettent ainsi une négligence grave au sens de l’art. 52 LAVS les administrateurs d'une société qui se trouve dans une situation financière désastreuse, qui parent au plus pressé, en réglant les dettes les plus urgentes à l'exception des dettes de cotisations sociales, dont l'existence et l'importance leur sont connues, sans qu'ils ne puissent guère espérer, au regard de la gravité de la situation, que la société puisse s'acquitter des cotisations en souffrance dans un délai raisonnable (ATF 108 V 183 consid. 2 ; SVR 1996 AHV n°98 p. 299 consid. 3).

La négligence grave est également donnée lorsque l'administrateur n'assume pas son mandat dans les faits. Ce faisant, il n'exerce pas la haute surveillance sur les personnes chargées de la gestion, attribution incessible et inaliénable du conseil d'administration conformément à l'art. 716a CO. Une personne qui se déclare prête à assumer ou à conserver un mandat d'administrateur tout en sachant qu'elle ne pourra pas le remplir consciencieusement viole son obligation de diligence (ATF 122 III 195 consid. 3b). Sa négligence peut être qualifiée de grave sous l'angle de l'art. 52 LAVS (ATF 112 V 1 consid. 5b). Un administrateur, dont la situation est à cet égard proche de celle de l’homme de paille, ne peut s'exonérer de ses responsabilités légales en invoquant son rôle passif au sein de la société (arrêt du Tribunal fédéral 9C_289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2).

La faute de l'homme de paille réside précisément dans le fait qu'il s'accommode de ne pouvoir exercer ses fonctions (ATF 122 III 195 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral H 126/04 du 8 septembre 2005 consid. 4).

La jurisprudence exige de l'organe factuellement exclu de la gestion de la société qu'il se soucie sérieusement de remplir ses obligations contractuelles, parmi lesquelles figure le paiement des cotisations sociales. Dans les cas où l'organe risque d'engager sa responsabilité, il doit démissionner (Marco REICHMUTH, op. cit., p. 133, n. 563 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_446/2014 du 2 septembre 2014 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_ 289/2009 du 19 mai 2010 consid. 6.2).

Le fait que la société soit tenue en mains par une personne tierce et que cette dernière promette d'y injecter des fonds n'est pas suffisant pour disculper un organe du non-paiement des cotisations sociales, celui-ci devant, le cas échéant, procéder à leur paiement, même contre la volonté des personnes qui dirigent dans les faits la société (arrêt du Tribunal fédéral H 5/02 du 31 janvier 2003 consid. 5.3).

16.2 Dans certaines circonstances, un employeur peut causer intentionnellement un préjudice sans être dans l'obligation de le réparer, lorsqu'il retarde le paiement des cotisations pour maintenir son entreprise en vie, lors d'une passe de trésorerie difficile. Mais il faut alors, pour qu'un tel comportement ne tombe pas ultérieurement sous le coup de l'art. 52 LAVS, que l'on puisse admettre que l'employeur avait, au moment où il a pris sa décision, des raisons sérieuses et objectives de penser qu'il pourrait s'acquitter des cotisations dues dans un délai raisonnable (ATF 121 V 243 ; ATF 108 V 183 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_430/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.3 et les références). À cet égard, la seule expectative que la société retrouve un équilibre financier ne suffit pas (arrêt du Tribunal fédéral 9C_430/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.3.1 et les références). Il faut des éléments concrets et objectifs selon lesquels on peut admettre que la situation économique de la société se stabilisera dans un laps de temps déterminé et que celle-ci recouvrera sa capacité financière (arrêt du Tribunal fédéral H 163/06 du 11 juin 2007 consid. 4.4). Le fait de s'être régulièrement acquitté pour le compte de la société d'une partie des cotisations dues et d'avoir fait un apport d'argent personnel dans la société ne constituent pas des motifs d'exonération suffisants (arrêt du Tribunal fédéral 9C_430/2021 du 7 avril 2022 consid. 5.3.1 et la référence). Ce qui est déterminant, ce n'est pas de savoir si l'employeur croyait réellement que l'entreprise pouvait être sauvée et que les cotisations seraient payées dans un proche avenir, il s'agit bien plutôt d'examiner si une telle attitude était alors défendable, objectivement, aux yeux d'un tiers responsable (arrêt du Tribunal fédéral H 19/07 du 10 décembre 2007 consid. 4.1).

Le non-paiement des cotisations sociales durant une courte période doit être pris en considération lorsque l'on procède à l'appréciation de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer la faute de l'organe (ATF 121 V 243 consid. 4b et 5). Ce motif d'exonération ne s'applique cependant que dans les cas où l'employeur a rempli ses obligations de manière consciencieuse durant plusieurs années et se trouve économiquement dans l'impossibilité de payer les quelques mois qui précèdent l'ouverture de la faillite (arrêt du Tribunal fédéral H 67/06 du 11 juillet 2006 consid. 5.4). La faillite ne devait par ailleurs pas être entrevue depuis longtemps et les assurances sociales ne doivent pas avoir été désavantagées par rapport à d'autres créanciers, sous peine de faire supporter aux deniers publics le financement de l'entreprise (arrêts du Tribunal fédéral H 256/99 du 30 mars 2000 consid. 3b et H 134/02 du 30 janvier 2003 consid. 3.1).

17.         La faute des recourants 1, 2 et 3 doit être examinée de manière individualisée.

17.1 Concernant en premier lieu le recourant 1, sa qualité d'organe formel implique qu'il devait veiller au paiement des cotisations sociales. Les arguments dont il se prévaut ne permettent pas de l'exonérer de toute faute, à tout le moins d'une négligence grave à cet égard.

En effet, le fait que la période litigieuse durant laquelle les charges sociales n'ont pas été acquittées soit brève, à savoir trois mois (dont un concerne seulement un impayé d'intérêts moratoires), ne suffit pas à le disculper. Il ressort en effet des auditions menées que la société connaissait déjà des difficultés financières depuis plusieurs mois, ce qui avait conduit le recourant 1 à envisager de vendre certains de ses biens pour la renflouer au début de l'année 2018. De plus, le recourant 3 avait été engagé en tant que directeur financier dans le but précisément d'assainir la situation financière du groupe, ce qui indique que les finances des différentes sociétés qui le composaient n'étaient pas saines depuis un certain temps, cela étant également corroboré par le fait que toutes les sociétés du groupe BADEL ont finalement été mises en faillites après celle de la société concernée par la présente procédure.

Les pièces transmises par l'intimée font de surcroît apparaître que la société, dès le premier trimestre 2017, s'est vue adresser plusieurs sommations de paiement et acquittait des intérêts moratoires pour paiements tardifs des cotisations sociales, ce qui plaide à l'encontre de la thèse soutenue par le recourant 1 selon laquelle les difficultés financières n'étaient que ponctuelles.

Ainsi, la situation de la société ne s'apparentait pas à un cas imprévu de manque de liquidités prenant au dépourvu les organes et les empêchant d'acquitter les charges sociales avant que la société soit mise en faillite (pour un cas d'application, voir l'arrêt du Tribunal fédéral H 134/02 du 30 janvier 2003 consid. 3).

Il ressort en outre des auditions menées que le recourant 1 privilégiait le paiement des fournisseurs en vue d'éviter que les chantiers soient bloqués, de sorte qu'il a bien, contrairement à ses dénégations, fait supporter aux deniers publics le financement de sa société. Le recourant 1 n'avance par ailleurs aucun élément justificatif qui permettrait d'expliquer que le non-paiement des cotisations sociales résultait d'un plan financier mûrement réfléchi en vue de sauver la société et qu'il existait des indications tangibles qu'en procédant de la sorte ses chances de survie étaient grandement améliorées.

L'inaction du recourant 1 quant au paiement des cotisations sociales apparaît ainsi fautive.

17.2 En tant que le recourant 2 avance l'argument selon lequel aucune faute ou négligence grave ne peut lui être reprochée car il n'avait aucun rôle de direction dans la société, sa position se trouve en contradiction avec les éléments au dossier et la conclusion à laquelle la chambre de céans est parvenue concernant sa qualité d'organe de fait.

Il apparaît par ailleurs que, contrairement à ce qu'il allègue dans ses écritures, il était au courant de l'arriéré de paiement concernant les charges sociales (cf. ch. 15.2 ci-dessus), de sorte qu'il aurait pu intervenir pour les régler.

À juste titre, le recourant 2 ne se prévaut pas d'autres motifs permettant d'exonérer sa responsabilité et la chambre de céans n'en décèle aucun, ceux liés à la brièveté de la durée du défaut de paiement et à l'objectif de remettre la société sur les rails devant être rejetés, comme vu ci-dessus concernant la faute du recourant 1.

Par conséquent, le recourant 2 a violé de manière fautive les prescriptions concernant le paiement des cotisations sociales.

17.3 Il convient à présent d'examiner si le recourant 3 a également agi de manière fautive ou par négligence grave.

Le recourant 3 le conteste en soulignant que compte tenu des responsabilités qui lui avaient été confiées par son employeur, sa marge de manœuvre était limitée. Il n'avait eu cesse, d'autre part, d'attirer l'attention des recourants 1 et 2 sur la nécessité d'acquitter en priorité les cotisations sociales et, lorsqu'il avait réalisé que ses mises en garde resteraient lettre morte, il avait requis sa radiation de ses inscriptions au registre du commerce concernant les autres sociétés du groupe encore actives. Enfin, il n'avait surtout pas le pouvoir de payer les cotisations sociales du personnel des sociétés du groupe N______, preuve en était que lorsqu'il avait finalement donné un ordre de paiement en août 2020 il avait été abruptement licencié.

L'intimée souligne pour sa part que le recourant 3 avait été engagé en qualité de directeur financier du groupe N______ afin de rétablir sa situation financière. Il devait donc appliquer toute la diligence nécessaire dans la gestion de la société, et notamment veiller au paiement des cotisations sociales. S'il ne pouvait prendre les mesures qui s'imposaient sans requérir l'accord des recourants 1, 2 ou de toute autre personne, il aurait dû démissionner au début de l'année 2019 déjà, et non pas augmenter son taux d'activité au sein du groupe dès novembre 2019 (salarié de I______ SA) et attendre qu'une procédure pénale soit introduite à son encontre pour démissionner.

Comme il a été vu dans le cadre de l'examen de la qualité d'organe du recourant 3, la fonction occupée par ce dernier au sein de la société – et des autres sociétés du groupe – avait pour corollaire qu'il devait se soucier des flux financiers, et notamment du paiement des cotisations sociales. Ses devoirs englobaient donc cet aspect.

Certes, la procédure menée devant la chambre de céans a mis en évidence que le recourant 1, et dans une moindre mesure le recourant 2, participaient de manière active aux décisions concernant les paiements à effectuer et que le recourant 1 avalisait chacun d'entre eux, ceci même avant octobre 2018.

Cependant, si ce contrôle serré impliquait que le recourant 3 avait l'interdiction d'effectuer des paiements sans accord préalable du recourant 1, voire du recourant 2, constatant que les paiements essentiels que sont les cotisations sociales – qui reposent sur une base légale et par lesquelles les divers employeurs participent à la mise en œuvre du système des assurances sociales en Suisse – n'étaient pas réalisés, il aurait dû démissionner de ses fonctions.

La jurisprudence a en effet souligné à maintes reprises que la faute d'un organe écarté de la gestion de la société et n'assumant plus ses fonctions de manière concrète réside précisément en le fait qu'il se satisfait de cette situation et n'entreprend rien pour qu'elle cesse, rendant ainsi impossible la concrétisation de ses devoirs.

Dès lors, si, dans les faits, la marge de manœuvre du recourant 3 était limitée car il devait impérativement suivre les instructions du recourant 1, voire du recourant 2, cette situation aurait dû l'amener à constater qu'il ne pouvait exercer correctement ses missions au sein de la société (dont fait partie le paiement des cotisations sociales) et à démissionner.

Puisqu'il était exigible de sa part qu'il démissionne de lui-même, l'argument tiré du fait qu'il aurait été licencié en août 2020 en raison du paiement auquel il a procédé à ce moment, ne résiste pas à la critique. La chambre de céans relève aussi que le licenciement est intervenu dans un contexte plus général de tensions entre le recourant 3 et les recourant 1 et 2, ces derniers ayant marqué leur vive désapprobation à la suite de la radiation des pouvoirs du recourant 3 au registre du commerce, décidée unilatéralement par lui.

En outre, les éléments qui figurent au dossier ne permettent pas de retenir que le recourant 3 aurait de manière réitérée interpellé les recourants 1 et 2 afin qu'ils acquittent les cotisations sociales dues par la société concernée par la présente procédure. Une seule pièce a en effet trait à cette société, soit la note confidentielle établie en février 2019, les autres étant postérieures à la faillite de la société. Quoi qu'il en soit, la question de savoir si le recourant 3 s'opposait à la politique financière adoptée par les recourants 1 ou 2 ou s'il y souscrivait, à tout le moins s'en accommodait, peut demeurer indécise, car, que l'on soit dans l'un ou l'autre cas, il a agi de manière fautive, au minimum par négligence grave, en continuant malgré tout sa collaboration au sein de la société.

Le recourant 3 pouvait d'autant plus facilement démissionner de ses fonctions que son taux d'occupation au sein de la société F______ SA était alors limité à 20%, de sorte que cette activité n'était selon toute vraisemblance pas sa seule source de revenus, et que le recourant n'allègue pas qu'il en dépendait financièrement.

En outre, le fait que le recourant 3 a augmenté son taux d'activité au sein du groupe, postérieurement à la faillite de la société, suggère au contraire qu'il n'était pas en décalage complet avec la politique qui y était exercée.

Il apparaît par ailleurs que, contrairement à ce qu'allègue le recourant 3, ce n'est pas tant le non-paiement des cotisations sociales des sociétés du groupe N______ qui l'a conduit à requérir la radiation de ses pouvoirs au registre du commerce, mais plutôt le fait qu'il avait l'objet d'une dénonciation pénale par l'intimée. À défaut, on peine à imaginer pour quelle raison le recourant n'aurait pas entrepris ces démarches avant l'été 2020, puisqu'il devait clairement lui apparaître, dès la faillite de la société, que les cotisations sociales ne pourraient plus être réglées, du moins dans leur intégralité. Quand bien même le recourant 3 aurait pu être mû par un sentiment de loyauté vis-à-vis de la société, puis par des obligations liées à la crise du COVID-19, ces éléments ne sont pas propres à justifier son inaction et à diminuer les exigences qui étaient attendues de lui concernant l'acquittement des charges sociales.

Au vu de ce qui précède, le recourant 3 ne peut se prévaloir d'aucune justification valable quant au non-paiement des cotisations sociales, en sorte que la condition de la faute au sens de l'art. 52 LAVS est également remplie le concernant.

18.          

18.1 D'après la jurisprudence, les manquements de la caisse de compensation à des prescriptions élémentaires relatives à la fixation et à la perception des cotisations constituent une faute grave, concomitante à celle des administrateurs, qui justifie de réduire le montant du dommage, pour autant que celui-ci entre dans un rapport de causalité notamment adéquate avec le comportement illicite reproché (ATF 122 V 185 consid. 3c). Constitue par exemple un motif de réduction l'octroi irrégulier d'un sursis au paiement ou le fait de ne pas ordonner par voie de décision le paiement de cotisations arriérées avant le délai de péremption de cinq ans (arrêt du Tribunal fédéral H 307/02 du 28 janvier 2004 consid. 8.1).

Une faute concomitante ou une faute propre de la caisse de compensation n'a en principe aucune influence sur le devoir de l'employeur de se soucier du paiement des cotisations sociales, ce pourquoi – contrairement aux principes généraux du droit de la responsabilité civile – même une négligence grave de cette dernière ne permet pas d'interrompre le lien de causalité entre l'acte reproché aux organes et le dommage causé à la caisse de compensation. La question doit ainsi être traitée dans le cadre de l'examen de la faute des organes et entraîner une réduction de l'obligation de réparer le dommage de l'employeur, au sens de l'art. 44 al. 1 CO, lorsque la faute grave de l'administration se trouve en lien de causalité avec la survenance ou l'aggravation du dommage (Marco REICHMUTH, op. cit., p. 189, n. 791 et pp. 179-180, n. 749 et 750).

Cette position a encore été récemment confirmée par le Tribunal fédéral (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_425/2022 du 26 juin 2023 consid. 5.2.1).

18.2 Le recourant 3 soutient qu'une faute concomitante de l'intimée doit être retenue, justifiant une réduction de l'obligation de réparer le dommage, du fait qu'elle aurait fait preuve de passivité totale au fil des années vis-à-vis des sociétés du groupe, en laissant les arriérés de cotisations s'accumuler et en attendant le prononcé de la faillite des sociétés concernées pour aller rechercher leurs organes par le biais de l'art. 52 LAVS. Il invoque à ce propos le fait que la faillite de F______ SA était liée aux graves difficultés financière de la société J______ SA dont elle était créancière et le fait que les arriérés de cotisations de cette seconde société, au mois de mars 2019, s'élevaient à plus de CHF 340'000.- et concernaient, pour certains, des factures du mois d'octobre 2018. Dans le même sens, l'intimée, par le biais de la CCIE dont les actes lui étaient imputables, avait accepté l'adhésion de la société I______ SA, nouvellement constituée, sur la base des seules promesses des recourants 1 et 2 de régler les créanciers sociaux des sociétés faillies, sans demander d'autres garanties. Or, l'arriéré de cotisations sociales des sociétés du groupe encore actives n'avait par la suite cessé de croître. De plus, depuis 2016, le paiement des cotisations sociales de la société était systématiquement tardif, ce qui, en l'absence de mesures prises par l'intimée, avait incité la société à persévérer. L'intimée avait par ailleurs suggéré à la société de solliciter un sursis au paiement après l'échéance du délai de sommation du bordereau de décembre 2018 et n'avait introduit qu'une seule poursuite à son encontre, tardivement. Elle avait donc fait preuve d'une trop grande patience et avait accordé des facilités de paiements à la société, attendant qu'elle tombe d'elle-même en faillite. L'ampleur de la faute concomitante de l'intimée, tant au siège de Genève qu'à l'agence de Lausanne, devait être appréciée au regard de l'ensemble des sociétés du groupe N______ vu l'interdépendance de celles-ci tant sur le plan financier qu'organisationnel.

18.3 Les éléments avancés par le recourant 3 ne permettent pas de retenir une faute concomitante de l'intimée.

En effet, contrairement à ce qu'affirme le recourant 3, l'intimée n'a pas fait preuve de passivité totale dans la gestion du dossier. Les pièces versées à la procédure par cette dernière démontrent en particulier qu'elle n'a pas laissé les arriérés de paiements s'accumuler en attendant le prononcé de la faillite de la société, mais a exigé régulièrement le paiement des cotisations sociales et entrepris les démarches légales en cas de non-encaissement dans les délais, soit a notifié des sommations et des décisions d'intérêts moratoires (cf. art. 34a et 41bis RAVS). En particulier, concernant les cotisations concernées par la présente procédure, une sommation a été adressée à la société le 8 février 2019 au sujet des cotisations de décembre 2018, une autre le 15 mars 2019 au sujet des cotisations de janvier 2019 et une dernière le 8 avril 2019 au sujet de celles de février 2019. Ces délais respectent ainsi l'art. 34 al. 3 RAVS – qui énonce que les cotisations doivent être payées dans les dix jours qui suivent le terme de la période de paiement – et les prescriptions des DP qui stipulent que la caisse de compensation doit envoyer les sommations au plus tard 40 jours après cette échéance de paiement (cf. n. 2011 à 2013 et n. 2188 DP). Compte tenu du prononcé de la faillite de la société le 1er avril 2019, il ne peut non plus être reproché à l'intimée d'avoir tardé ou d'avoir renoncé à notifier des poursuites, celles-ci ne pouvant être introduites qu'après la sommation infructueuse, au plus tard 70 jours à compter du terme de la période de paiement, respectivement de la facturation (voir n. 6014.1 DP).

Par ailleurs, dans la mesure où la société F______ SA est la première du groupe qui est tombée en faillite, il ne peut être reproché à l'intimée de ne pas avoir tenu compte des arriérés de paiement plus importants de J______ SA, société sise dans le canton de Vaud et affiliée à une autre caisse de compensation, indépendamment de la question de savoir si les faits étant survenus dans ce canton devaient être connus de l'intimée, car cette dernière ne pouvait en tout état pas savoir quels étaient les liens internes de dépendance économique entre les sociétés du groupe.

S'agissant du reproche selon lequel l'intimée aurait fait preuve de facilités envers la société et lui aurait suggéré de requérir un sursis au paiement – outre que cette possibilité trouve une assise légale (cf. art. 34b RAVS) –, les déclarations de l'intimée en audience expliquant que les sociétés du groupe avaient une certaine renommée dans le bassin lémanique et accomplissaient réellement des travaux et des mandats qui laissaient une chance de redressement, et que le recourant 1 s'était engagé à renflouer les caisses des sociétés du groupe, de sorte qu'elle avait considéré, après évaluation, qu'il fallait éviter une faillite, sont crédibles et compréhensibles. Cet élément est à mettre en relation avec l'affirmation du recourant 3 relevant qu'il n'a pas immédiatement démissionné car il s'était fié aux promesses des recourants 1 et 2, formulées dès le début de l'année 2018, d'après lesquelles ils réinjecteraient de l'argent dans la société.

Le cas d'espèce se distingue aussi en ce que la période durant laquelle les cotisations n'ont pas été versées est relativement brève. Cela suffit, en tant que tel, à rejeter l'argument du recourant 3 concernant la soi-disant passivité de l'intimée.

Au surplus, le contenu de la discussion du 17 avril 2019 et les actes qui y sont liés sont sans importance, ces éléments étant postérieurs au prononcé de la faillite de la société impliquée dans la présente cause, à l'origine de l'arriéré de cotisations sociales ouvert et du dommage de l'intimée.

Il sera du reste rappelé qu'il n'y a pas de compensation des fautes dans le domaine visé par l'art. 52 LAVS (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_22/2008 du 5 février 2009 consid. 4.2.2), de sorte que le recourant 3 affirme à tort que la sévérité avec laquelle l'intimée le juge doit également lui être appliquée.

En définitive, l'intimée n'ayant pas gravement manqué à ses obligations, mais ayant au contraire respecté le cadre légal et réglementaire concernant la perception des cotisations litigieuses, aucune faute concomitante ne peut lui être imputée.

19.         Au regard de ce qui précède, la chambre de céans s'estime par ailleurs suffisamment informée pour trancher le litige et ne fera pas suite aux réquisitions de preuve complémentaires du recourant 3. Il n'apparaît en particulier pas utile d'être en possession des dossiers des autres sociétés du groupe, compte tenu du fait que F______ SA est la première société à être tombée en faillite, que la durée du non-paiement des cotisations sociales est brève, et que leur production n'apporterait aucun élément pertinent concernant l'interdépendance financière et organisationnelle entre les diverses sociétés du groupe (ce fait étant par ailleurs attesté par l'instruction déjà menée). Il se justifie également de renoncer à l'audition des témoins sollicitée par le recourant 3, les discussions auxquelles ils ont participé ayant été menées le 17 avril 2019, soit postérieurement à la faillite de la société.

Dans ce contexte, par appréciation anticipée des preuves, il apparaît superflu d'administrer d'autres preuves, telles que celles sollicitées par le recourant 3, celles-ci ne pouvant pas modifier la conviction de la chambre de céans (ATF 122 II 469 consid. 4a ; ATF 122 III 223 consid. 3c ; SVR 2001 IV n. 10 p. 28 consid. 4b ; ATF 124 V 94 consid. 4b ; ATF 122 V 162 consid. 1d).

20.          

20.1 La responsabilité de l'employeur au sens de l'art. 52 LAVS suppose enfin un rapport de causalité (naturelle et) adéquate entre la violation intentionnelle ou par négligence grave des prescriptions et la survenance du dommage. La causalité est adéquate si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience de la vie, le fait considéré était propre à entraîner un effet du genre de celui qui s'est produit, la survenance de ce résultat paraissant de façon générale favorisée par une telle circonstance (ATF 129 V 177 consid. 3.2).

20.2 Le lien de causalité adéquate entre le comportement fautif – soit la rétention des cotisations alors même que les salaires sont versés – et le dommage survenu ne peut pas être contesté avec succès lorsque les salaires versés sont tels que les créances de cotisations qui en découlent directement ex lege ne sont plus couvertes (SVR 1995 AHV n° 70 p. 214 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral H 167/05 du 21 juin 2006 consid. 8 ; arrêt du Tribunal fédéral H 74/05 du 8 novembre 2005 consid. 4).

La causalité adéquate peut être exclue, c'est-à-dire interrompue, l'enchaînement des faits perdant alors sa portée juridique, lorsqu'une autre cause concomitante, telle la force majeure, la faute ou le fait d'un tiers, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait pas s'y attendre. L'imprévisibilité de l'acte concurrent ne suffit pas en soi à interrompre le rapport de causalité adéquate ; il faut encore que cet acte ait une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'événement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener, en particulier le comportement de l'auteur (arrêt du Tribunal fédéral H 95/05 du 10 janvier 2007 consid. 4).

Le comportement d'un organe responsable peut, le cas échéant, libérer son coresponsable solidaire s'il fait apparaître comme inadéquate la relation de causalité entre le comportement de ce dernier et le dommage. La jurisprudence se montre stricte à cet égard. Elle précise qu'une limitation (et, a fortiori, une libération) de la responsabilité fondée sur la faute concurrente d'un tiers ne doit être admise qu'avec la plus grande retenue si l'on veut éviter que la protection du lésé que vise, d'après sa nature, la responsabilité solidaire de plusieurs débiteurs, ne soit rendue en grande partie illusoire (arrêt du Tribunal fédéral 9C_779/2020 du 7 mai 2021 consid. 3.2 et les références).

Ainsi, le fait que seuls certains organes prenaient, dans les faits, toutes les décisions relatives à la marche des affaires de la société, ne présente rien de si exceptionnel et imprévisible que ces circonstances relégueraient à l'arrière-plan la négligence d'un organe écarté de la gestion de la société (arrêt du Tribunal fédéral 9C_779/2020 du 7 mai 2021 consid. 6.2).

Le rapport de causalité n'est pas donné si un comportement conforme aux devoirs n'aurait pas empêché la survenance du dommage. Cependant, la simple hypothèse que le dommage ne serait pas survenu ne suffit pas à exclure la causalité. Le fait que le dommage serait de toute façon survenu doit être établi de manière certaine ou à tout le moins rendue hautement vraisemblable (arrêt du Tribunal fédéral H 173/04 du 20 janvier 2006 consid. 4.2 et les références).

21.         En l'espèce, aucune partie ne soutient, à juste titre, que le lien de causalité adéquate et naturelle serait interrompu pour une quelconque raison, par exemple au vu de la grande implication du recourant 1 dans les affaires de la société.

En particulier, une telle situation ne constitue pas, selon la jurisprudence, un fait si exceptionnel qu'il relèguerait à l'arrière-plan la négligence de l'organe écarté.

Au contraire, un comportement conforme des recourants 1, 2 et 3 à leurs devoirs, à savoir le paiement des cotisations sociales, aurait empêché la survenance du dommage.

Il s'ensuit que la condition du rapport de causalité naturelle et adéquate est aussi remplie.

22.         Comme vu ci-dessus, le montant du dommage correspond à celui pour lequel la caisse de compensation subit une perte (cf. consid. 11.3).

S'agissant des charges sociales, le dommage selon l'art. 52 LAVS comprend les cotisations impayées dues selon la LAVS, la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20) (dont l'art. 66 LAI renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale du 25 septembre 1952 sur les allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité (LAPG - RS 834.1) (dont l'art. 21 al. 2 renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale du 20 juin 1952 sur les allocations familiales dans l'agriculture (LFA - RS 836.1) (dont l'art. 25 al. 3 renvoie à l'art. 52 LAVS), la loi fédérale du 24 mars 2006 sur les allocations familiales (LAFam - RS 836.2) (dont l'art. 25 let. c renvoie à l'art. 52 LAVS), et la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0) (dont l'art. 6 renvoie à la LAVS). Sur le plan cantonal, la loi sur les allocations familiales du 1er mars 1996 (LAF - J 5 10) opère aussi, à son art. 30 al. 3, un renvoi à l'art. 52 LAVS. Il ne va de même de l'art. 11A LAMat, mais seulement depuis le 1er février 2023.

22.1 L'intimée a requis le remboursement du montant de CHF 28'048.25 composé de CHF 27'497.30 de dommage et de CHF 550.95 de frais d'administration calculés à 2.55% sur les cotisations dues à titre d'AVS-AI-APG (CHF 21'606.35).

Aucun des recourants ne critique le montant du dommage en tant que tel, fixé à CHF 27'497.30, mais le recourant 3 fait valoir que le montant complémentaire de CHF 550.95, non justifié par l'intimée, ne reposerait sur aucune base légale.

Entendu en audience, le directeur de l'intimée a indiqué que les frais administratifs de CHF 550.95 étaient fondés sur le règlement de l'intimée, le comité de direction décidant chaque année du taux de participation. Invitée à transmettre ce règlement, l'intimée ne l'a pourtant pas fait.

Compte tenu de ce qui précède et malgré que le taux fixé par l'intimée (2.55%) respecte les maximas prévus par la loi (cf. art. 69 al. 1 LAVS, art. 157 RAVS et art. 1 de l'ordonnance sur le taux maximum des contributions aux frais d'administration dans l'AVS du 19 octobre 2011 (RS 831.143.41) prévoyant un taux maximal de 5%), la légalité du montant demandé ne peut être vérifiée par la chambre de céans, de sorte que ce poste du dommage sera écarté.

Il faut en effet rappeler que le principe de la légalité s'applique en matière de responsabilité publique, qui ne peut être engagée que si une norme le prévoit (ATAS/79/2020 consid. 14b et les références).

22.2 Par ailleurs, la chambre de céans applique le droit d'office en vertu de l'art. 61 let. d LPGA et son contrôle doit donc porter sur l'ensembles des postes du dommage, malgré l'éventuelle absence de contestation des parties recourantes (ATAS/79/2020 consid. 14).

C'est à juste titre que l'intimée a écarté, dans ses dernières conclusions concernant la demande de réparation du dommage, soit dans ses décisions sur opposition du 30 juin 2021, les cotisations afférentes à l'assurance-maternité, compte tenu du fait qu'à l'époque des faits litigieux aucune base légale claire ne permettait de rendre les organes d'une société responsables en cas de non-paiement de celles-ci. Il apparaît en effet qu'elle a déduit de la somme non-versée par la société, en CHF 64'660.03, non seulement le montant de CHF 607.58 dû à la « Caisse » (association patronale désignée sous le titre « CPS » pour « Caisses Patronales Sociales MEROBA »), mais également le montant de CHF 387.80 dû à titre de cotisations d'assurance-maternité pour les mois de janvier et février 2019, aboutissant ainsi à un montant de charges sociales de CHF 27'497.30 (CHF 64'660.03 - CHF 607.58 - CHF 387.80 - CHF 36'167.35 de part pénale versée).

Contrairement à ce que mentionne le tableau récapitulatif de l'intimée produit dans le cadre des décisions sur opposition du 30 juin 2021, les montants désignés sous le poste « frais de gestion » de la « Caisse MEROBA », totalisant la somme de CHF 1'080.10, ne constituent, par contre, selon toute vraisemblance, pas des frais administratifs admissibles. Le montant précité, composé des montants de CHF 532.65 pour le mois de janvier 2019 et de CHF 547.45 pour le mois de février 2019, sont en effet en tous points identiques aux cotisations libellées « FPMB, RAMB, AM, CP » requises dans les sommations des 15 mars 2019 et 8 avril 2019.

Or, l'intimée n'a pas précisé ce que recouvrent ces cotisations. Selon les informations disponibles sur son site internet (www.mbg.ch), la RAMB est une fondation chargée de prélever les cotisations sociales pour financer la retraite anticipée des ouvriers ayant travaillé dans la métallurgie du bâtiment. Quant à la FPMB, il s'agit de la fondation de prévoyance du deuxième pilier. Aucune explication ne peut être trouvée pour les deux autres abréviations.

Il n'est ainsi pas prouvé que ces montants concernent des cotisations paritaires dont le non-paiement entraîne la responsabilité subsidiaire des organes, en vertu d'une base légale expresse ou par le biais d'un renvoi à l'art. 52 LAVS. Ces montants seront ainsi écartés.

À la lecture du tableau récapitulatif établi par l'intimée, l'on constate par ailleurs que la somme due à titre de cotisations d'allocations familiales, de CHF 10'561.50, comporte un montant de CHF 150.- intitulé « A.O/AF ». Ce montant correspond à l'addition des deux amendes d'ordre de CHF 75.- prévues dans les sommations des 15 mars et 8 avril 2019. Or, les amendes d'ordre ne font pas partie du dommage au sens de l'art. 52 LAVS selon la jurisprudence fédérale (cf. ch. 11.3 ci-dessus). Il y a donc aussi lieu de les retrancher.

Compte tenu de ce qui précède, le dommage subi par l'intimée dont elle peut exiger le remboursement des recourants 1, 2 et 3 s'élève à CHF 26'267.20 (CHF 27'497.30 - CHF 1'080.10 - CHF 150.-).

Les décisions sur oppositions concernant les recourants précités seront donc partiellement réformées en ce sens.

23.          

23.1 Le règlement d'un litige par transaction est permis par la LPGA (cf. art. 50 LPGA). La transaction peut aussi être conclue durant une procédure judiciaire de recours relative à une créance en réparation du dommage selon l'art. 52 LAVS (ATF 135 V 65 consid. 1).

Le Tribunal fédéral considère que la décision par laquelle un tribunal radie une affaire du rôle à la suite d'une transaction judiciaire doit contenir une motivation sommaire expliquant en quoi cette transaction est conforme à l'état de fait et au droit. Déduite du droit d'être entendu, qui comprend notamment le devoir pour l'autorité administrative ou judiciaire de motiver ses décisions en lien avec le devoir de surveillance d'autres autorités, cette exigence s'applique aussi lorsque le juge ne rend pas une décision de radiation du rôle, mais un jugement au fond qui a pour objet la ratification de la transaction et dont le dispositif reprend les termes de celle-ci afin de donner à la décision un caractère exécutoire (ATF 135 V 65 consid. 2.1-2.7 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_671/2009 du 16 novembre 2009 consid. 2.1).

23.2 En l'espèce, lors de l'audience du 18 avril 2023, l'intimée a validé la transaction signée par la recourante et l'agence de Lausanne dans le cadre de la procédure vaudoise, par laquelle cette dernière acceptait de renoncer à lui réclamer la réparation de son dommage au sens de l'art. 52 LAVS, compte tenu du fait que la recourante n'avait agi que sur la base des instructions données par sa hiérarchie.

Une telle conclusion peut en effet être approuvée, comme expliqué supra (cf. ch. 15.5).

La chambre de céans homologuera donc la transaction intervenue entre la recourante et l'intimée.

24.          

24.1 Au vu des considérations qui précèdent, les recourants 1, 2 et 3 n'obtiennent que très partiellement gain de cause, concernant le montant du dommage qu'ils doivent rembourser à l'intimée. Les décisions les concernant doivent donc être partiellement annulées, et les recourants 1, 2 et 3 condamnés à verser à l'intimée la somme de CHF 26'267.20.

Le recourant 4 obtient gain de cause, de sorte que la décision sur opposition le concernant doit être annulée.

Enfin, s'agissant de la recourante, la transaction conclue avec l'intimée, qui peut être homologuée, met fin au litige.

24.2 Les recourants 1, 2 et 3 obtenant très partiellement gain de cause, une indemnité de CHF 300.- leur sera accordée à chacun d'entre eux à titre de participation à leurs frais et dépens (art. 61 let. g LPGA ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

Non représenté, le recourant 4 n'a pas droit à des dépens.

Quant à la recourante, la transaction conclue prévoit que chaque partie garde ses frais d'avocat, de sorte qu'il n'y a pas lieu de lui accorder des dépens.

24.3 Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA).

 

***

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare les recours recevables.

Au fond :

2.        Admet le recours de Monsieur E______ et annule la décision sur opposition de l'intimée du 30 juin 2021 le concernant.

3.        Admet partiellement les recours de Messieurs A______, B______ et C______.

4.        Annule partiellement les décisions sur opposition de l'intimée du 30 juin 2021 les concernant.

5.        Condamne Messieurs A______, B______ et C______ à verser solidairement à l'intimée la somme de CHF 26'267.20 au titre de la réparation du dommage.

6.        Prend acte, pour valoir jugement, de la transaction par laquelle l'intimée ne réclame pas à Madame D______ la réparation de son dommage.

7.        Condamne l'intimée à verser CHF 300.- à Monsieur A______, CHF 300.- à Monsieur B______ et CHF 300.- à Monsieur C______, à titre de dépens.

8.        Dit que la procédure est gratuite.

9.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110). Selon l’art. 85 LTF, s’agissant de contestations pécuniaires, le recours est irrecevable si la valeur litigieuse est inférieure à 30'000 francs (al. 1 let. a). Même lorsque la valeur litigieuse n’atteint pas le montant déterminant, le recours est recevable si la contestation soulève une question juridique de principe (al. 2). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le